Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

  • L’inflation PCE se stabilise
  • L’activité des services se redresse tandis que celle de l’industrie demeure mitigée

Politiques Macroéconomiques

  • La Maison-Blanche publie un décret visant à durcir l’encadrement de l’immigration

Services financiers

  • La Chambre des représentants se penche sur la tokenisation des transactions financières
  • Le comité consultatif de la CFTC alerte sur les conséquences de Bâle III
  • La réforme des private funds est annulée par un tribunal fédéral
  • Un véto présidentiel censure une résolution du Congrès visant à assouplir le cadre comptable de détention de crypto-actifs
  • Le Treasury met l’accent sur les risques liés à l’intelligence artificielle dans le secteur financier

Situation des marchés

Brèves

 

Conjoncture

 L’inflation PCE se stabilise

Selon les estimations du Bureau of Economic Analysis (BEA), l’indice des prix des dépenses de consommation personnelle (Personal Consumption Expenditure – PCE) et sa composante sous-jacente (hors énergie et alimentation) ont augmenté de +0,3 % et de +0,2 % en mars respectivement (après +0,3 % pour les deux en février), en ligne avec les attentes. Sur douze mois glissants, l’inflation est restée inchangée à +2,7 % (après +2,7 %) et à +2,8 % (après +2,8 %) pour sa composante sous-jacente.

Les prix de l’énergie ont augmenté de +1,2 % (après +1,2 %) et les prix de l’alimentation ont reculé, de -0,2 % (après 0,0 %). Sur douze mois glissants, ils ont progressé de +3,0 % (après +2,6 %) et de +1,3 % (après +1,5 %) respectivement.

Les prix des services et des biens ont augmenté de +0,3 % (après +0,4 %) et de +0,2 % (après +0,1 %) respectivement, soit +2,9 % (après +2,8 %) et de +1,9 % (après +2,8 %) sur douze mois glissants.

 
L’activité des services se redresse tandis que celle de l’industrie demeure mitigée

Les perspectives rapportées par les entreprises sont mitigées dans l’industrie en mai. En effet, l’indice PMI du secteur de l’industrie publié par l’Institut for Supply Management (ISM) a continué sa contraction en mai à 48,7 (après 49,2) contre 49,6 attendu par le marché. Ce recul s’explique notamment par la baisse des commandes. L’indice PMI publié par S&P Global a lui progressé à 51,3 en mai (après 50,0 et 50,7 attendu par le marché), indiquant une légère amélioration de l’activité industrielle. S&P Global note un redressement des anticipations des entreprises sur la production du fait de la hausse des nouvelles commandes. La différence entre les deux indices serait liée à l’échantillon d’entreprises interrogées : l’indice ISM porte principalement sur les grandes entreprises alors que celui de S&P Global intègre une proportion plus importante de PMEs.

Dans le secteur des services, les deux indices ont progressé : à 53,8 (après 49,4 en avril et 50 ,7 attendu par le marché) pour l’indice PMI de l’ISM et à 54,8 (après 51,3 et en ligne avec les attentes) pour l’indice PMI de S&P Global. Les deux indices sont tirés par les nouvelles commandes et la production, malgré la contraction de l’emploi. Le rapport sur l’emploi de l’ADP (Automatic Data Processing), un organisme spécialisé dans l’analyse des fiches de paie, fait en effet état de créations d’emploi inférieures aux attentes en mai (+152 000 contre +175 000) et d’un taux d’embauche faible, notamment dans le secteur des loisirs et de l’hôtellerie.

 

Politiques Macroéconomiques

 La Maison-Blanche publie un décret visant à durcir l’encadrement de l’immigration

Le Président Biden a annoncé le 4 juin de nouvelles mesures visant à durcir l’immigration via un décret présidentiel.

Le décret prévoit notamment d’interdire aux migrants qui franchissent illégalement la frontière sud de bénéficier de l’asile. Toutefois, l’administration Biden a précisé que cette mesure serait temporaire et conditionnelle au nombre de migrants (2 500 par jour pendant 7 jours consécutifs). Notamment, cette fermeture serait levée si le nombre de migrants redescendait sous la barre de 1 500 par jour pendant 14 jours consécutifs.

Le Président a par ailleurs souligné les mesures prises par son administration pour mieux contrôler les flux migratoires, comme le renforcement de la procédure d’examen des demandes d’asile, l’accélération du traitement des cas d’immigration, la révocation du visa des employeurs qui facilitent l’immigration clandestine, le démantèlement du trafic d’êtres humains et l’application stricte des décisions d’expulsions.

Le Président Biden a également appelé les Républicains à lever l’obstruction au Congrès, en soulignant notamment qu’un décret ne pouvait se substituer à une loi. En effet, après avoir déposé de manière bipartisane un projet de loi visant à renforcer le contrôle à la frontière sud, les Républicains se sont rétractés faute de soutien de Donald Trump.

 

Services Financiers

 

La Chambre des représentants se penche sur la tokenisation des transactions financières

Le 5 juin 2024 la Chambre des représentants a organisé une audition consacrée à la tokenisation des transactions financières. Le représentant French Hill (R – Arkansas), vice-président de cette commission, a souligné les opportunités de modernisation du système financier permises par la tokenisation, qui consiste à échanger, sur une blockchain, une représentation d’actifs traditionnels (actions, dépôts bancaires, etc.). Il souhaite que les États-Unis adoptent un cadre favorable à ces innovations. Deux propositions de loi ont été discutées : elles demandent aux régulateurs bancaires (Fed, FDIC, OCC, NUCA) et financiers (SEC, CFTC) de dresser un état des lieux des pratiques actuelles de tokenisation et de proposer des évolutions réglementaires.

Stephen Lynch (D – Massachusetts), chef de file des démocrates à la sous-commission des technologies financières, a souligné les risques liés à l’utilisation des blockchains, mais a partagé l’objectif de demander des études aux régulateurs. Sa vision était corroborée par Hilary Allen, professeure de droit auditionnée par la commission, qui a mis en exergue les risques cyber, les fraudes et les inefficiences qui caractérisent certaines blockchains. Les autres personnes auditionnées étaient, à l’inverse, favorables à la tokenisation des dépôts bancaires (groupe USDF Consortium) et des titres financiers, notamment non-cotés (groupe Securitize).

La Depository Trust and Clearing Corporation (DTCC), principale chambre de compensation aux États-Unis, a exposé ses projets, qui concernent notamment la tokenisation de parts de fonds, des actions (projet Ion, plus de 100 000 transactions par jour), d’actifs non-cotés (projet Whitney) et des simulations de règlement en monnaie numérique de banque centrale. La DTCC a toutefois insisté sur l’adoption de règles aussi exigeantes pour les actifs tokenisés que pour les actifs traditionnels.

 

Le comité consultatif de la CFTC alerte sur les impacts de Bâle III

Le comité consultatif de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), le régulateur des marchés de dérivés, a fait part de ses préoccupations sur les conséquences de la transposition de Bâle III. Le comité consultatif de la CFTC réunit, autour de deux commissaires de la CFTC, des représentants de l’industrie financière (sociétés de gestion, banques, teneurs de marché, etc.).

Le comité estime que les nouvelles exigences en matière de risque de marché, prévues par le projet de transposition de Bâle III présenté par la Fed en juillet 2023, entraineraient un renchérissement des instruments de couverture, une baisse de la liquidité, une hausse des risques systémiques et des distorsions de concurrence entre juridictions. Le comité appelle la CFTC à mener des discussions avec la Fed en vue d’un assouplissement.

 

La réforme des private funds est annulée par un tribunal fédéral

Le 5 juin, la 5th US Circuit Court of Appeal a estimé, à l’occasion d’un litige opposant des private funds (fonds de capital-investissement et hedge funds) à la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés financiers), que la SEC avait outrepassé son mandat en adoptant, en août 2023, une réforme des private funds.

La réforme imposait aux private funds de communiquer davantage d’informations aux investisseurs chaque trimestre, notamment concernant les frais et les performances des fonds, et imposait le recours à une évaluation indépendante lors des cessions de participations au profit d’un autre fonds géré par la même société de gestion (fonds de continuation). La réforme interdisait également certaines pratiques tarifaires.

La Cour ayant estimé que la règle entrainait des contraintes excessives, celle-ci a été annulée par le jugement du 5 juin. La SEC n’a pas encore indiqué si elle comptait se pourvoir en cassation devant la Cour Suprême.

 

Un véto présidentiel censure une résolution du Congrès visant à assouplir le cadre comptable de détention de crypto-actifs

Le 31 mai, Joe Biden a utilisé son pouvoir de véto afin d’empêcher l’entrée en application d’une résolution adoptée cette semaine par le Congrès. Le ralliement de 11 sénateurs démocrates modérés et indépendants a permis l’adoption de cette résolution déposée par des élus républicains.

La résolution visait la censure d’une règle de la SEC visant à rehausser les exigences comptables de détention des crypo-actifs. En l’espèce, la règle impose aux sociétés qui détiennent des cryptos-actifs pour le compte de tiers de les inscrire au passif de leur bilan. Pour les banques, cette comptabilisation renchérit ainsi le coût de leur détention (coût des fonds propres).

J. Biden a souligné l’importance de la protection des consommateurs et des investisseurs, essentielle au développement responsable des innovations en matière de crypto-actifs.

 

Le Treasury met l’accent sur les risques liés à l’intelligence artificielle dans le secteur financier

Le 6 juin, Janet Yellen, secrétaire du Treasury, a introduit une conférence sur l’intelligence artificielle (IA) et la stabilité financière organisée par le Financial Stability Oversight Council (FSOC), qui regroupe les principaux régulateurs financiers américains (Fed, FDIC, SEC, CFTC etc.). À cette occasion, elle est revenue sur les travaux engagés sur ces sujets par les régulateurs, en particulier par le Treasury, et a rappelé l’importance d’évaluer les enjeux de l’IA pour la stabilité financière.

J. Yellen a d’abord rappelé les conclusions du FSOC dans son rapport annuel 2023 sur la stabilité financière, qui souligne les vulnérabilités des technologies d’IA pour le système financier, notamment au regard i) de la complexité et de la faible transparence des modèles, ii) des pratiques de gestion des risques inadaptées aux enjeux de l’IA, iii) des biais que l’IA est susceptible d’introduire dans les décisions de financement et iv) de la dépendance des modèles vis-à-vis des données et de prestataires externes.

J. Yellen a ensuite présenté les travaux engagés par le Treasury pour améliorer sa compréhension des enjeux de l’IA, s’inscrivant dans la perspective de l’Executive Order sur l’IA promulgué le 30 octobre 2023. Elle a notamment souligné i) son rapport sur la gestion des risques cyber spécifiques au développement de l’IA dans le secteur financier (mars 2024), et ii) l’accent mis sur l’utilisation de l’IA dans la stratégie de lutte contre la finance illicite du Treasury.

J. Yellen a également annoncé le lancement d’une consultation publique (Request for Information - RFI) visant à évaluer les usages, les opportunités et les risques de l’IA dans le secteur des services financiers. En particulier, la RFI vise à i) améliorer la capacité d’expertise du Treasury sur les usages actuels de l’IA dans le secteur, ii) identifier les potentiels obstacles à son utilisation responsable au sein des institutions financières, iii) mesurer les impacts de l’IA sur les parties prenantes du secteur (consommateurs, investisseurs, entreprises, etc.), et iv) formuler des recommandations afin d’améliorer le cadre de supervision applicable à l’IA. Les commentaires publics sont attendus dans un délai de 60 jours.

 

Situation des marchés

 

Au cours de la semaine écoulée (de vendredi à jeudi), l’indice S&P 500 a progressé de +2,1 %, à 5 353 points. Le ralentissement de l’économie illustré par une baisse plus forte qu’attendu des indices ISM du secteur de l’industrie et des chiffres de l’emploi (JOLTS) a ravivé l’espoir d’une baisse plus rapide des taux directeurs.

Les rendements des obligations souveraines américaines (Treasuries) à 2 ans et à 10 ans ont baissé respectivement de -17 points de base et -12 points de base pour atteindre 4,7 % et 4,3 %.

 

Brèves