UNE PUBLICATION DU SERVICE ECONOMIQUE REGIONAL DE BEYROUTH En collaboration avec les services économiques de la circonscription (Amman, Bagdad, Jérusalem, Le Caire, Téhéran, Tel Aviv)

Dans les brèves économiques cette semaine :

Zoom : Egypte - Le long chemin vers le regain de la confiance

Egypte : Mission FMI : poursuite des discussions en l’absence d’accord.

Irak : La Banque Centrale interdit l’accès au dollar à 8 banques privées

Iran : Impact économique des restrictions d’accès à l’internet en 2023

Israel : Les performance enviables des Hedge Funds en 2023

Jordanie : Baisse de l’indice des prix à la production en 2023

Liban : Vers une unification des taux de change

Palestine : L’UNRWA en chiffres

Syrie : Bilan un an après les séismes de février 2023

 

Bonne lecture.

 

breves 05-2024

breves titre zoom 05-2024

 

chiffre zoom 05-2024La situation économique et financière égyptienne reste préoccupante à bien des égards alors que l’année 2023, qui fut aussi celle de la réélection du président Sissi, a été marquée par la nette dégradation des principaux indicateurs macroéconomiques. Les défis pour l’année 2024 sont nombreux : poids de l’endettement public, pénurie de devises étrangères, en passant par la nécessaire consolidation budgétaire et la maîtrise de l’inflation. Les perspectives de croissance pour 2023/24 ont ainsi été revues à la baisse à plusieurs reprises par le FMI de 5 % à 4,1 % en juillet 2023 puis 3,6 % en octobre et enfin 3,0 % en janvier 2024. L’activité du secteur privé continue notamment de se contracter sur les 38 derniers mois (indice PMI à 48,1 en janvier 2024). Les agences de notation ont aussi abaissé la note souveraine de l’Égypte à plusieurs reprises pour atteindre B- avec perspective stable en octobre 2023 (S&P et Fitch). Moody’s a par ailleurs ouvert la voie à une nouvelle révision à la baisse en adoptant une perspective négative en janvier 2024, alimentant la crise de confiance de l’ensemble des acteurs économiques.

Les crises internationales se multiplient et avec elles leurs conséquences sur l'économie égyptienne. L'invasion de l’Ukraine par la Russie, en février 2022, avait déjà entraîné une hausse des prix de l’énergie et du coût des produits alimentaires en Égypte, premier pays importateur de blé au monde, ainsi qu’une fuite des investissements de portefeuille (-24,8 Mds USD sur les deux derniers exercices budgétaires). A ces difficultés persistantes, se sont ajoutées les répercussions du conflit Israël/Hamas et des attaques en mer Rouge sur deux des trois rentes du pays : (i) le tourisme d’abord, avec une chute des réservations estimée autour de 26 % en décembre 2023 ; (ii) les recettes du canal de Suez ensuite du fait du contournement suite aux attaques houthies (-42 % de baisse de volume commercial sur décembre/janvier 2024). Sans lien avec le conflit, les transferts des travailleurs expatriés, troisième rente en devises de l’économie égyptienne, ont chuté de 30,7 % sur l’exercice 2022/23 pour atteindre 22,1 Mds USD du fait de l’émergence d’un marché du change parallèle à l’été 2023 avec des taux de 30 à 50 % supérieurs au marché officiel.

La situation des finances publiques s’est dégradée du fait de la trajectoire haussière de la dette publique (93 % du PIB en 2022/23), en lien avec l’accumulation des déficits (budgétaires et commerciaux) et la dépréciation de la livre égyptienne (dépréciation de 49 % du taux EGP/USD entre janvier 2022 et janvier 2024). La dette publique externe est en hausse, atteignant 20,9 % du PIB en juin 2023, contre 7 % en 2016, attestant d’une dépendance croissante aux financements extérieurs. De plus, la dette publique est très coûteuse et expose l’Égypte à des risques de refinancement dans un contexte de taux élevés. Sur sa seule dette extérieure, l’Égypte doit rembourser 25,4 Mds USD pour l’année fiscale 2023/24 selon la Banque Centrale. L’inflation, à 33,7 % en glissement annuel en décembre 2023 dont 78,7 % pour l’alimentation, apparaît aussi comme un facteur supplémentaire entrainant la dégradation du pouvoir d’achat de la population. Le gap de financement externe a été révisé à la hausse, à environ 20 Mds USD et près de 25 Mds USD sur les quatre prochains exercices budgétaires, selon Goldman Sachs.

C'est dans ce contexte qu’est intervenu du 17 janvier au 1er février dernier la revue par le FMI de son programme avec l’Égypte mis en place en décembre 2022 (facilité élargie de crédit d’une durée de 46 mois pour un montant de 3 Mds USD) dont les réformes tardent à être mises en œuvre par les autorités égyptiennes, notamment sur la libéralisation du change et le désengagement de l’État dans l’économie. À ce stade, un accord de principe a été trouvé qu’il convient de finaliser au niveau technique. Le nécessaire effet levier permis par l’augmentation du montant du programme pour restaurer la confiance reste encore incertain.

Service Économique du Caire