Care at the Core - Brèves économiques de la Péninsule arabique - Semaine du 19 au 26 janvier 2024
Toute l'actualité économique et financière hebdomadaire de l'Arabie Saoudite, du Bahreïn, des Emirats arabes unis, du Koweït, d'Oman, du Qatar et du Yémen
Care at the Core
L’événement Arab Health va ouvrir ses portes ce lundi 29 janvier à Dubaï. Plus de 110 000 personnes et 3 450 entreprises exposantes sont attendues par les organisateurs du salon, le plus important du Moyen-Orient.
En parallèle, les pays du CCEAG continuent de monter en puissance sur le segment de la santé à travers des investissements domestiques, prises de participations dans des structures européennes ou asiatiques mais également consolidation des actifs en portefeuille et coopération scientifique et technologique internationale accrue. Trois des principales actualités financières émiriennes des quinze derniers jours portent ainsi sur la santé : i) PureHealth a finalisé l'acquisition du britannique Circle Health pour 1,2 Md USD, ii) une filiale de Mubadala a pris une participation dans le capital de l’indien Manipal Health et iii) Gulf Islamic Investments a investi 160 M USD dans Abeer Medical, basée en Arabie saoudite.
Les différentes Visions stratégiques des pays du CCEAG fixent d’ailleurs des objectifs ambitieux en matière sanitaire. Alors que la Vision 2030 saoudienne vise à augmenter l’espérance de vie moyenne de 74 à 80 ans entre 2016 et 2030, les Emirats entendent devenir dans leur stratégie 2031 un des dix meilleurs pays du monde en termes de soins. L’heure est donc à l’investissement, un aggiornamento justifié par plusieurs éléments.
En premier lieu, la santé favorise la croissance économique. Bien collectif et source d’externalités positives, la santé influe sur la croissance à travers principalement trois canaux (Weil, Accounting for the effect of health on economic growth, 2007) : i) une meilleure productivité des travailleurs en bonne santé, ii) une incitation à poursuivre les études, avec donc en filigrane un accroissement des compétences dans le pays et iii) une hausse de l’épargne disponible, et donc de l’investissement et du capital physique, d’une population vieillissante en bonne santé.
Ensuite, les enjeux sanitaires sont très élevés dans la région. Dans le CCEAG, les maladies non transmissibles (MNT - maladies cardiovasculaires, diabètes, cancers, maladies respiratoires chroniques…) comptent pour 70-80% de l’ensemble des décès selon les pays (OMC, 2018). Les taux de prévalence de diabètes sont parmi les plus élevés du monde et dépassent 15,5% à Oman et 16,5% au Qatar (I. Fadhil et al, 2022). Ces maladies ont un coût direct et indirect pour les économies du CCEAG, un coût anticipé à 68 Md USD en 2022 pour les cinq principales MNT (Alshaikh MK et al, 2017). Cette exposition significative aux MNT, couplée à la croissance démographique liée à l'arrivée massive d'immigrants et à la forte augmentation de l'espérance de vie (+23 ans en Arabie et +18 ans aux EAU depuis 1971), exerce une pression sur les structures de santé et justifie les efforts d'investissement actuels pour en accroître les capacités.
En termes économiques, les maladies et autres problèmes de santé sont des défaillances de marché que l’Etat est tenu de corriger. Ces actions étatiques passent par des mesures de prévention (cinq des six pays du CCEAG ont instauré des assises sur des produits jugés nocifs depuis 2017) et des investissements, à la fois dans l’économie domestique et à l’international via les fonds souverains (rien qu’à Abu Dhabi, PureHealth (ADQ), Mubalada Health et le département de PE d’ADIA sont très actifs). Des investissements qui sont également lucratifs et dans des secteurs innovants, soutenus traditionnellement par la puissance publique, aux fortes barrières d’entrées (technologie, CAPEX, régulation) et aux cashflows stables… voire contracycliques en période de pandémie.
Enfin, la constitution d’un système de santé performant (offre de soins de haut niveau, système assurantiel efficient, régulation et liens universités-entreprises incitant à l’innovation et favorisant les spillovers entre secteurs, politique de prévention…) est un élément essentiel d’attractivité de populations qualifiées et stables, mais aussi de patients. Aux Emirats, le leadership parle même de devenir un hub sanitaire mondial afin de favoriser le tourisme médical. En d’autres termes, c’est un investissement indispensable pour attirer capitaux, entreprises et talents étrangers afin de continuer à financer et façonner l’après-pétrole.
L'espérance de vie dans les pays du CCEAG a fortement augmenté au cours des 60 dernières années
Source : Banque mondiale (espérance de vie à la naissance, en années)
Pétrole et gaz
Brent : 26/01/2024 à 16h30 GST : 82 USD
Le baril de Brent pour la prochaine livraison s’échange ce vendredi, à 16h30 GST, à environ 82 USD. Les cours pétroliers sont donc en hausse sur les sept derniers jours (+3 USD pour la référence britannique).
Cette hausse des cours a été principalement soutenue par les fondamentaux du marché. Les statistiques américaines ont ainsi montré i) une forte chute des stocks de bruts domestiques (plus forte baisse depuis août dernier) et ii) une croissance économique au T4 2023 dépassant les attentes du marché. Du côté de l'offre, les tensions géopolitiques au Moyen-Orient ont pu également jouer à la hausse sur les cours à travers la prime de risque.
Brèves économiques
Arabie Saoudite
Le Conseil d’Affaires Franco-Saoudien (CAFS) a publié son rapport d’activité annuel pour l’année 2023. Le CAFS représente les communautés d’affaires française et saoudienne et permet de développer les relations commerciales entre les deux pays. En 2023, le CAFS a ouvert ses inscriptions aux entreprises françaises, passant de 80 à plus de 200 membres en quelques mois. Une trentaine d’évènements regroupant 1 200 participants ont été organisés ainsi qu’une trentaine de rencontres individuelles B2B pour des entreprises participant à des délégations d’affaires.
Schneider Electric va construire une usine à SPARK. L’entreprise française, fournisseur de services numériques et d’automatisation pour les secteurs de l’énergie et de l’industrie, a annoncé son intention de construire un site de production de 20 000 m² dans le parc énergétique King Salman (SPARK) en Arabie saoudite. Schneider Electric y fabriquera des systèmes de contrôle et d’arrêt d’urgence. Le projet devrait être achevé d’ici la fin de 2025 et obtiendra la certification de bâtiment écologique LEED (leadership in energy and environment design).
CLESTRA a remporté le projet d’aménagement d’espaces de travail de la Riyad Bank. L’entreprise française a été choisie pour équiper la tour Riyad Bank Bronze Tower de 53 étages à KAFD avec ses solutions de cloisons de bureaux. Le montant total du projet s'élève à 5,2 M EUR couvrant la fourniture et la pose d'environ 12 000 m² de cloisons. La phase 1 du projet, d'une valeur de 1,5 M EUR, a été signée en décembre avec l’entreprise générale Apsal John Paul. CLESTRA est une entreprise française, leader mondial de la cloison amovible et présente en Arabie Saoudite depuis plus de 40 ans.
Le Public Investment Fund (PIF) a émis une obligation en trois tranches d’un montant total de 5 Md USD. Celle-ci a suscité une forte demande, avec des offres d’une valeur totale supérieure à 27 Md USD selon la CMA. Au 23 janvier 2024, les actifs sous gestion du PIF s’élèveraient à 776 Md USD selon le Sovereign Wealth Fund Institute, ce qui en fait désormais le 6ème plus important fonds souverain au monde.
Le Saudi Tadawul Group acquiert une participation de 32,6 % dans le Dubai Mercantile Exchange. Le Saudi Tadawul Group (société mère du Saudi Exchange) a pris une participation de 32,6 % dans Dubai Mercantile Exchange (DME) pour 28,5 M USD, ce qui fait de l'opérateur boursier le principal actionnaire avec le groupe américain CME. Dans le cadre de cet accord, le DME sera rebaptisé Gulf Mercantile Exchange et se développera dans les secteurs de l'énergie, des métaux et des produits agricoles. Le Saudi Tadawul Group a également la possibilité d’en prendre le contrôle majoritaire après quatre ans.
Bilatéral : annonce de partenariats commerciaux entre l’Arabie saoudite et le Maroc lors du forum économique saoudo-marocain du 21 janvier. Les représentants des secteurs privés saoudien et marocain ont convenu d'un programme commun établissant un ensemble d'initiatives qui visent à faire progresser la coopération et l'intégration économiques entre les deux pays. Ce programme prévoit notamment des projets de lignes directes de transport maritime, la création d’un fonds d'investissement commun, des aides visant à faciliter aux entreprises saoudiennes l’accès aux marchés africains et européens, et l’intensification de l'activité des délégations commerciales. Les initiatives incluent également l'échange d'informations sur les opportunités et les marchés, ainsi que le renforcement de la participation des entreprises marocaines aux projets de la Vision 2030.
SABIC annonce sa décision finale d’investissement pour le développement d’un complexe pétrochimique de 6,4 Md USD en Chine. Il s’agit d’une joint-venture entre SABIC Industrial Investment Company, qui détient 51 % du projet, et Fujian Fuhua Gulei Petrochemical, qui détient 49 % du projet. Le complexe comprendra un vapocraqueur à alimentation mixte d’une capacité d’1,8 M de tonnes d’éthylène. Le coût du projet est estimé à 6,4 Md USD et sa mise en service est prévue pour 2027.
La société turque Tosyali prévoit une usine de sidérurgie en Arabie saoudite de 5 Md USD L’entreprise a par ailleurs déclaré vouloir produire de l’acier à l’aide de sources d’énergies renouvelables. Cette annonce s’inscrit dans un contexte d’expansion de la société qui a récemment lancé de nombreux projets en Afrique et en Europe. Pour le moment, l’Arabie saoudite est l’un des principaux producteurs d’acier de la région avec une capacité annuelle de 10 M de tonnes.
Bahreïn
Hausse de la coopération économique entre Bahreïn et l’Inde. Le ministre des Affaires étrangères de Bahreïn Dr. Abdullatif Al Zayani a rencontré son homologue indien S. Jaishankar à Kampala. Ont été évoqués un investissement prochain de 45 M USD à Bahreïn par les entreprises indiennes Aerolam Middle East (isolation) et Titan Company Limited (bijouterie). Les ministres prévoient 1,3 Md USD d’échanges commerciaux bilatéraux durant l’année 2024. En outre, le conglomérat indien Shapoorji Pallonji, s’intéresse à la Cité internationale des sports située près du circuit de Formule 1 à Sakhir et dont l’inauguration est prévue en 2025. Shapoorji Pallonji envisage de construire un stade de cricket d’un montant de 130 M USD. Son groupe investit également dans les infrastructures : la centrale de désalinisation d’Al Dur, l’échangeur Mina Salman et le centre commercial Marassi Galleria. Cette annonce s’inscrit dans la lignée de la déclaration du Conseil de promotion des exportations pharmaceutiques de l'Inde, Pharmexcil, qui souhaite un cadre commun de régulation pharmaceutique avec Bahreïn et le CCEAG afin de développer ses exportations.
Emirats arabes unis
Le PIB de Dubaï a augmenté de 3,3% au cours des neuf premiers mois de 2023. Au cours de ces neuf mois, les services d'hébergement et de restauration ont augmenté de 11,1%, tandis que les services de transport et d'entreposage ont progressé de 10,9%. Ces chiffres confirment la bonne forme économique du 2e émirats du pays en termes de PIB. Parmi les autres signes positifs témoignant de la reprise économique à Dubaï : i) la relance du projet emblématique de Palm Jebel Ali 15 ans après son arrêt en raison de la crise financière de 2008 et ii) le remboursement par Dubaï de 7,5 Md USD de dettes à ses créanciers émiriens.
Le président émirien Sheikh Mohamed bin Zayed Al Nahyan a annoncé la création du Conseil de l'intelligence artificielle et des technologies avancées pour Abu Dhabi, l'AIATC. Le Conseil sera responsable de l'élaboration et de la mise en œuvre de politiques et de stratégies liées à l'IA et aux technologies de pointe. Pour rappel, les EAU ont déjà un ministère de l’IA avec à sa tête Omar Al Olama.
Le conseil d'administration d'ADNOC, présidé par le président émirien Sheikh Mohamed bin Zayed Al Nahyan, a augmenté à 23 Md USD le budget alloué aux projets de décarbonation du géant pétrolier national. La chiffre précédent, annoncé début janvier 2023, était de 15 Md USD. Ce budget témoigne de la double stratégie émirienne en matière énergétique : innover dans la décarbonation tout en continuant à investir massivement dans le pétrole (cf l’objectif de 5Mbj en 2027).
Le conglomérat immobilier Majid al-Futtaim Development a attribué deux contrats d'un montant de 817M USD pour la construction de plus de 200 villas dans la communauté dubaïote de Tilal al-Ghaf. La construction devrait s'achever au S2 2026.
La Roads and Transport Authority de Dubaï, RTA, a signé deux protocoles d'accord visant à développer des systèmes innovants de transport dans l'émirat : 1) un système Floc Duo Rail, autonome à double voie et 2) un système d'autobus ferroviaires, les deux innovations fonctionnant à l'énergie solaire. Les protocoles d'accord ont été signés avec l'entreprise britannique Urban Mass et avec l'entreprise américaine Rail Bus.
Koweït
Le décret émiral n°1 de l’année 2024 constituant le nouveau gouvernement du Koweït sous la direction de Cheikh Mohammad Sabah Al-Salem Al-Sabah (1er ministre) a été publié. Aux côtés de nouvelles figures, les ministres de l’Information et des Affaires sociales du précédent gouvernement ont été reconduits. Le ministre des finances et ministre d’état aux affaires économiques et à l’investissement est Dr. Anwar Ali Al-Mudhaf. C’est un homme d’affaires koweïtien qui exerce dans les milieux financiers depuis 25 ans (actuel président non exécutif d’Ahli United Bank) après un doctorat en finance à l’université de Claremont (USA). Le vice premier ministre et ministre des hydrocarbures est Dr. Emad Mohammad Al-Atiqi. Diplômé d’un doctorat en génie chimique de l’université de Lehigh (USA), il a fait carrière dans le milieu de l’éducation (professeur et directeur d’université notamment) et des hydrocarbures (papiers de recherche et membre du conseil suprême du pétrole).
Changements réglementaires pour les entreprises étrangères. Une loi publiée au journal officiel du Koweït comprend deux mesures très longtemps attendues par les investisseurs internationaux dans la région. En premier, le texte abroge l’article 24 du code de commerce qui obligeait les entreprises étrangères à créer une joint-venture minoritaire (à au maximum 49 %) avec un partenaire koweïtien pour exercer une activité locale. Jusqu’à présent, la seule possibilité d’être exempté de cette obligation de représentation était d’obtenir le bénéfice du régime dit KDIPA. En second lieu, est également abrogé l’article 31 du code des marchés publics qui réservait la capacité de soumissionner aux personnes de droit koweïtien. Les entreprises étrangères pourront désormais soumissionner directement, à condition qu’elles soient inscrites au registre du commerce et au « registre des fournisseurs ».
Un rapport de Kamco invest souligne qu’il y a eu 8.2 milliards de dollars de projets en 2023 au Koweït, plus haut niveau depuis 5 ans et quadruplement par rapport à 2022 (2.1 Milliards d’USD). Le secteur de l’énergie arrive en tête avec 3 milliards, suivi par 2.7 milliards dans les transports.
Oman
Dans son rapport de consultation au titre de l’article IV, le fonds monétaire international (FMI) estime que la reprise économique du Sultanat se poursuit à la faveur de prix du brut élevé et des réformes mises en place, tout en encourageant à accélérer ces dernières notamment sur le plan de la diversification. Le FMI estime que la croissance du PIB réel en 2023 sera de 1,3%, conséquences des réductions de production de pétrole liées à l’OPEP+. Enregistrant un excédent des comptes publics en 2023, le Sultanat a réduit son niveau de dette publique à 38% du PIB en 2023, lui permettant de ramener ses spreads souverains au même niveau que la moyenne des pays du CCG et en dessous de celle des pays émergents.
Qatar
Le groupe QNB annonce la réussite d'une émission d'obligations pour un montant d’un milliard USD dans le cadre de son programme d'euros à moyen terme (EMTN) sur les marchés de capitaux internationaux. La tranche émise le 23 janvier 2024 arrivera à échéance le 30 janvier 2029 avec un taux nominal de 4,875 % par an. L'émission a été organisée et proposée par un groupe de banques internationales (Crédit Agricole CIB, Barclays, HSBC, JP Morgan, QNB Capital, SMBC Nikko et Standard Chartered Bank).
La société d'investissement qatarienne Estithmar Holding lance un programme conforme à la Charia de 933,8 M USD pour l'émission d’obligations fiduciaires par l'intermédiaire d'Estithmar Sukuk Limited LLC, une société à but spécial (SPC) enregistrée au Centre Financier du Qatar (QFC). Le nouveau programme devrait être introduit sur le marché international des valeurs mobilières (ISM) de la Bourse de Londres (LSE).
La fintech qatarienne KARTY lève 2 M USD auprès d'investisseurs locaux tels que la Qatar Foundation, la Qatar Development Bank, le Qatar FinTech Hub et Masraf Al Rayan, ainsi qu'auprès d'entités internationales telles que Visa.
L'Agence de promotion des investissements du Qatar (Invest Qatar) rejoint la nouvelle coalition mondiale pour les IDE climatiques, aux côtés de 14 agences d'investissement du monde entier et de l'Association mondiale des agences de promotion des investissements (WAIPA).
Le Forum économique mondial et le ministère des finances du Qatar signent un accord en vue de la création d'un centre dédié à la quatrième révolution industrielle (C4IR) au Qatar. C4IR Qatar, qui sera inauguré en juin 2024, sera une organisation autonome à but non lucratif consacrée principalement aux technologies émergentes et à leur lien avec le développement durable et la compétitivité économique.
Capital Intelligence (CI) confirme les notations du Qatar avec une perspective « stable ». Ces notes reflètent non seulement les soldes extérieurs et les performances budgétaires « très solides » de Doha, soutenus par des prix favorables du gaz naturel liquéfié (GNL), mais elles sont également soutenues par d'importantes réserves d'hydrocarbures (environ 12,9 % des réserves mondiales de gaz) et la capacité d'exportation associée, qui à leur tour, fournir au gouvernement des moyens financiers substantiels.