Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

  • Le maché du travail ralentit
  • Les conditions de crédit continuent de se durcir
  • L’endettement des ménages et leur taux de défaillance augmentent

Politiques macroéconomiques

  • Le Treasury publie son rapport semestriel sur la politique macroéconomique et le taux de change

Services financiers

  • Le CFPB souhaite renforcer la supervision des activités de paiement des géants du numérique
  • Le FSOC simplifie la désignation d’institutions non-bancaires systémiques
  • La réduction du volume de cessions pèse sur la profitabilité des principaux fonds de private equity

Situation des marches

Brèves

 

Conjoncture

 

Le maché du travail ralentit

D’après le rapport mensuel du Bureau of Labor Statistics (BLS) sur la situation de l’emploi, les créations d’emplois ont surpris à la baisse, à +150 000 en octobre, en-deçà des attentes du marché (+170 000) et la moyenne des créations au cours des 12 derniers mois (+258 000). Ces créations sont concentrées notamment dans les soins de santé (+58 000), les administrations publiques (+51 000) et l’assistance sociale (+19 000).

Par ailleurs, les créations d’emploi des rapports précédents ont été révisées à la baisse, de +227 000 à +165 000 en août et de +336 000 à +297 000 en septembre, soit une baisse cumulée de ‑101 000.

Le taux de chômage a augmenté de +0,1 point, à 3,9 % en octobre. Le taux d’emploi et le taux d’activité ont légèrement reculé par rapport à septembre, à 60,2 % (-0,2 point) et 62,7 % (‑0,1 point) respectivement.

Le salaire horaire moyen a progressé de +0,2 % sur un mois et de +4,1 % sur douze mois glissants (-0,1 point par rapport à septembre).

 

Les conditions de crédit continuent de se durcir

L’enquête de la Fed sur les conditions de crédit (Senior Loan Officer Opinion Survey on Bank Lending Practices - SLOOS), réalisée auprès d’environ 80 organismes financiers et publiée le 6 novembre, souligne à la fois le maintien du durcissement des conditions de crédit et une baisse de la demande de crédit dans l’ensemble des catégories de crédit au cours du T3 2023. Toutefois, la proportion des banques ayant répondu avoir durci au cours des 3 derniers mois baisse, impliquant un rythme ralenti du durcissement. 

D’après les banques interrogées, les conditions de crédit se sont durcies notamment pour des prêts commerciaux et industriels (commercial and industrial – C&I) aux entreprises et ceux de l’immobilier résidentiel aux ménages. En particulier, les banques ont indiqué qu’elles réduisaient l’offre de crédit à des emprunteurs dont le credit score était inférieur à 680. La demande de crédits des entreprises et des ménages serait également plus faible. Les facteurs explicatifs d’un tel durcissement sont (i) des perspectives économiques moins favorables et plus incertaines, (ii) une moindre tolérance au risque, (iii) la détérioration de la qualité des crédits et de leur collatéral, et (iv) des inquiétudes sur le coût de financement. En dépit des turbulences bancaires et de la fragilité du secteur, les petites et moyennes banques ne semblent pas avoir durci plus particulièrement leurs exigences.

 

L’endettement des ménages et leur taux de défaillance augmentent

Selon les données publiées par la Fed de New York, au 3ème trimestre 2023, l’endettement des ménages américains a progressé de +1,3 % par rapport au trimestre précédent, portant son niveau total à 17 290 Md USD (+228 Md USD par rapport au T2 2023). Cette progression est tirée principalement par la hausse des crédits immobiliers (+126 Md USD), de la dette des cartes de crédit (+48 Md USD) et par les prêts étudiants (+30 Md USD).

Le taux de défaillance a augmenté pour l’ensemble des crédits, à l’exception des prêts étudiants, et des lignes de crédit gagées sur les biens immobiliers. En septembre 2023, les défaillances concernent 3 % du stock de dettes, en hausse de +0,4 point par rapport au T2 2023 (mais inférieur de ‑1,7 point par rapport au T4 2019). L’augmentation des défaillances sévères (de plus de 90 jours) est la plus forte pour les populations de 30 à 39 ans (taux de transition en défaillances sévères à +3,69 %).

 

 

Politiques Macroéconomiques

 

Le Treasury publie son rapport semestriel sur la politique macroéconomique et le taux de change

Le Treasury a publié le 7 novembre son rapport semestriel sur la politique de change des principaux partenaires économiques des États‑Unis pour la période de juin 2022 à juin 2023.

D’après ce rapport, aucun partenaire commercial majeur des États-Unis n’aurait manipulé sa monnaie pour obtenir un avantage commercial indu. En effet, le rapport souligne que le dollar demeure fort, ce qui a conduit les principaux partenaires commerciaux des États-Unis à vendre du dollar sans pour autant remplir le critère de manipulation de devise. Enfin, le rapport déplore à nouveau l’absence de transparence de la Chine sur le mécanisme d’ajustement de son taux de change et son intervention sur le marché des changes.

La liste des pays surveillés comprend l’Allemagne, la Chine, la Malaisie, Singapour, Taïwan et le Vietnam. Au cours de la période couverte, la Suisse et la Corée du Sud, n’ayant vérifié qu’une seule des trois conditions sur deux évaluations consécutives, ont été retirées de la liste des pays sous surveillance. La Chine est restée dans la liste en raison de son manque de transparence sur le marché des changes et de son excédent commercial important.

Pour rappel, le Treasury utilise trois critères pour évaluer si un pays manipule sa monnaie. Un pays est placé sur la liste des pays surveillés s’il remplit au moins deux des trois conditions suivantes :

  1. un excédent commercial (de biens et services) vis-à-vis des États-Unis supérieur à 15 Md USD au cours de 12 derniers mois;
  2. une balance des paiements excédentaire dépassant 3 % du PIB du pays ;
  3. des achats de devises étrangères (pour affaiblir sa monnaie) sur au moins 8 mois au cours des 12 derniers mois, pour un montant supérieur à 2 % du PIB du pays.

 

Services Financiers

 

Le CFPB souhaite renforcer la supervision des activités de paiement des géants du numérique

Le Consumer Financial Protection Bureau (CFPB) a publié le 7 novembre une proposition de règle qui vise à renforcer la supervision des grands établissements non bancaires proposant des services de paiements en ligne (portefeuilles numériques, applications de paiements et de transfert de fonds etc.). 

A partir de 5 millions de transactions par an, ces acteurs devraient se conformer aux lois fédérales applicables aux transferts de fonds, à la confidentialité des données et aux autres textes relatifs à protection financière des consommateurs. Ces acteurs seront également supervisés par le CFPB, afin d’établir des règles de concurrence équitable avec les institutions financières. La proposition cible 17 entreprises de la Big Tech qui traitent 13 Md USD de transactions par an et détiennent 88 % des parts du marché des paiements en ligne aux États-Unis (Apple, Google, Paypal, etc.).

La Bank Policy Institute a salué la proposition, tandis que l’industrie de la tech et les élus républicains ont déploré une règle qui nuirait à l’innovation. La proposition est soumise à une consultation publique jusqu’au 8 janvier 2024.

 

Le FSOC simplifie la désignation d’institutions non-bancaires systémiques

Le Financial Stability Oversight Council (FSOC), comité réunissant les régulateurs financiers (Fed, FDIC, SEC, etc.), a finalisé le 3 novembre deux textes visant à renforcer la supervision des grandes institutions financières non-bancaires (NBFI).

Le premier facilite la désignation de NBFI comme entités systémiques. Cette désignation entraine la supervision des NBFI par la Fed et l’application d’exigences prudentielles renforcées. Historiquement, les NBFI qui avaient été désignées comme systémiques ont toutes bénéficié, entre 2016 et 2018, d’une annulation de cette désignation. La nouvelle procédure de désignation est simplifiée, notamment en supprimant l’obligation de mener une analyse coûts/bénéfices. La désignation reste fondée sur l’identification de difficultés financières d’une NBFI ou sur la nature, la taille, la concentration et l’interconnexion des activités d’une NBFI, susceptibles de menacer la stabilité financière des États-Unis.

Le second texte formalise un cadre d’analyse et de réponse, par le FSOC, aux risques pour la stabilité financière. Ces réponses incluent notamment la formulation de recommandations aux régulateurs ou de législation au Congrès, ainsi que la désignation de NBFI comme établissement systémique. 

 

La réduction du volume de cessions pèse sur la profitabilité des principaux fonds de private equity

Les résultats distribuables (distribuable earnings) des plus gros fonds de private equity cotés américains (Blackstone 1 000 Md USD d’actifs sous gestion - AUM, Apollo Global Management 631 Md USD d’AUM, KKR 527 Md USD d’AUM et Carlyle 382 Md USD d’AUM) baissent au troisième trimestre 2023 sur un an (-43 % pour Carlyle, -7 % pour KKR et -12 % pour Blackstone). Cette baisse s’explique principalement par la réduction des revenus tirés des cessions d’actifs, pénalisées par le contexte de remontée des taux d’intérêt. Le volume de levées de fonds marque également le pas sur un an (‑19 % pour Carlyle sur les 9 premiers mois de l’année et -40 % pour KKR). Les activités d’assurance et de retraite acquises respectivement par KKR et Apollo Global Management constituent des relais de croissance et de résilience dans le contexte macroéconomique actuel. Le résultat de l’activité d’assurance de KKR augmente de +25 % et celui de l’activité de retraite d’Apollo augmente de +36 %, grâce aux revenus de son portefeuille obligataire (+52 %). L’activité de crédit privée offre également des opportunités de marché pour ces fonds, dans un contexte de remontée des taux d’intérêt et de durcissement des conditions de crédit bancaire. Depuis le début de l’année 2023, les fonds levés sur ce segment par KKR sont six fois supérieurs à ceux levés pour son activité de private equity. Le résultat de gestion d’actifs d’Apollo, historiquement investi dans les activités de crédit, est tiré par la dynamique de ce segment. Malgré la baisse des fonds levés, ces quatre gestionnaires d’actifs disposent encore de montants importants de capital à déployer (200 Md USD pour Blackstone, 99 Md USD pour KKR, 71 Md USD pour Carlyle et 59 Md USD pour Apollo).

 

Situation des marchés

 

Au cours de la semaine écoulée (de vendredi à jeudi), l'indice S&P 500 a progressé de +0,68 %, à 4 347 points. Cette progression s’explique notamment par des créations d’emplois en-deçà des attentes, présageant une normalisation du marché du travail qui pourrait être plus rapide que prévu, ainsi qu’une détente du marché obligataire dans l’espoir d’une fin imminente du resserrement monétaire.

Les rendements des Treasuries à 2 ans ont légèrement augmenté au cours de la semaine, à 5,03 % (+0,05 point), tandis que les rendements à 10 ans sont restés quasi-stables, à 4,63 %. Les adjudications des 7, 8 et 9 novembre (dans le cadre du refinancement trimestriel du Treasury) ont illustré une demande de Treasuries robuste, notamment des investisseurs étrangers. La demande a toutefois été moins importante que prévu sur les titres de maturité 30 ans, entrainant une hausse des rendements à cette échéance et contribuant à un recul des marchés actions sur la séance du 9 novembre.

 

Brèves