Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

  • La croissance du PIB continue de surprendre à la hausse

Politiques macroéconomiques

  • La Chambre des représentants a élu un nouveau Speaker dans un contexte de calendrier budgétaire serré

Services financiers

  • Les régulateurs bancaires prolongent la période de consultation sur la transposition de Bâle III
  • La Fed souligne les principales vulnérabilités du système financier
  • La SEC propose d’uniformiser certains tarifs appliqués par les bourses
  • Les régulateurs bancaires publient des principes pour une meilleure gestion des risques financiers liés au climat
  • La Fed propose de réduire le plafond des commissions d’interchange des cartes bancaires
  • Les régulateurs bancaires finalisent une réforme du Community Reinvestment Act (CRA)

Situation des marchés

Brèves

 

Conjoncture

 La croissance du PIB continue de surprendre à la hausse

Selon l’estimation provisoire du Bureau of Economic Analysis (BEA), le PIB des États-Unis a augmenté de +1,2 % au 3ème trimestre 2023 (+4,9 % en rythme annualisé) après +0,5 % au 2ème trimestre (+2,1 % en rythme annualisé), surprenant à la hausse les attentes du marché (+4,7 % en rythme annualisé).

La croissance du PIB au T3 2023 s’explique en grande partie par une demande intérieure dynamique, notamment la consommation privée (contribution de +0,7 point), l’investissement et les dépenses publiques (+0,2 point) et les variations de stocks (+0,3 point).

Le revenu disponible nominal a ralenti à +0,5 % au T3 2023 (+1,9 % en rythme annualisé) après +1,5 % au T2 (+6,1 %). Le revenu disponible réel a reculé de -0,25 % au T3 (-1,0 %) après +0,9 % au T2 (+3,5 %).

Le Président Joe Biden a immédiatement salué la réussite de son programme économique qui a permis de faire reculer l’inflation tout en maintenant le dynamisme du marché du travail et de l’économie américaine.

 

Politiques Macroéconomiques

 

La Chambre des représentants a élu un nouveau Speaker dans un contexte de calendrier budgétaire serré

Mike Johnson (R-Louisiane) est élu comme nouveau Speaker de la Chambre des représentants (président de l’assemblée) en rassemblant l’intégralité des Républicains. Cette élection intervient après la déchéance de Kevin McCarthy (R-Californie) le 3 octobre et les tentatives échouées des trois précédents candidats : Steve Scalise (R-Louisiane), Jim Jordan (R-Ohio) et Tom Emmer (R-Minnesota).

Le calendrier budgétaire est particulièrement serré. Le budget provisoire (continuing resolution) adopté le 30 septembre a permis de prolonger le fonctionnement des administrations fédérales jusqu’au 17 novembre. Faute de budget annuel ou provisoire à l’issue de cette date, l’État fédéral risque à nouveau un arrêt des activités jugées « non-essentielles ». La Maison-Blanche a demandé le 20 octobre un budget d’urgence de 106 Md USD dont 61,4 Md USD d’aides militaire, économique et humanitaire à l’Ukraine, 14,3 Md USD d’aides militaire et humanitaire à Israël, 13,6 Md USD de sécurité aux frontières, 11,2 Md USD d’aide humanitaire aux pays en conflits (dont l’Ukraine, Israël, Gaza, etc.) et 5,4 Md USD de dépenses militaires dans la zone Indo-Pacifique.

 

 

Services Financiers

 

Les régulateurs bancaires prolongent la période de consultation sur la transposition de Bâle III

Les régulateurs bancaires (Fed, OCC et FDIC) ont annoncé le 20 octobre que la période de consultation sur la transposition de Bâle III, qui devait s’achever le 30 novembre 2023, sera finalement prolongée jusqu’au 16 janvier 2024.

Les régulateurs ont publié le 27 juillet une proposition de règle renforçant les exigences de capital des banques ayant plus de 100 Md USD d’actifs en transposant les règles de Bâle III. La règle finale devrait être publiée plusieurs mois après la fin de la période de consultation.

Cette réforme suscite une opposition de la part du secteur bancaire. Les banques critiquent à la fois les nouvelles exigences, considérées comme excessives, et la procédure suivie, notamment le fait que l’étude d’impact ne prenne pas en compte certaines données qui doivent être collectées par la Fed au cours de la période de consultation. Le Bank Policy Institute (BPI), qui représente les intérêts des banques, a publié le 20 octobre un communiqué demandant à la Fed de publier une nouvelle proposition de règle, se substituant à la proposition du 27 juillet.

 

La Fed souligne les principales vulnérabilités du système financier

La Fed a publié le 20 octobre son rapport semestriel sur la stabilité financière. Ce rapport analyse chaque semestre quatre sources de vulnérabilité du système financier :

  • le niveau de valorisation des actifs : ces derniers mois, le prix des actions a augmenté plus vite que les perspectives de croissance des résultats des entreprises, augmentant le risque de survalorisation. Cette vulnérabilité est exacerbée par la faible liquidité sur le marché des actions et sur le marché des obligations souveraines (Treasuries). En outre, la valorisation du parc d’immobilier commercial reste élevée malgré la baisse des prix dans le secteur ;
  • l’endettement des ménages et des entreprises : la Fed estime que leur situation financière reste solide, notamment au regard de la capacité de remboursement des prêts des entreprises et de l’endettement des ménages rapporté au PIB ;
  • le niveau de levier dans le secteur financier : le secteur bancaire est considéré comme bien capitalisé, mais la Fed souligne le creusement des moins-values latentes des portefeuilles obligataires des banques, causé par la hausse des taux. La Fed évoque également le niveau de levier toujours très élevé des hedge funds ;
  • les risques de liquidité : si le système bancaire est globalement liquide, certaines banques continuent de subir de fortes pressions du fait de leur dépendance aux dépôts non-assurés et de la baisse de valorisation de leurs actifs liquides. Le Bank Term Funding Programm (BTFP), facilité de refinancement mise en place face aux faillites bancaires de mars 2023, permet toutefois d’apaiser ces tensions. En dehors du système bancaire, la Fed évoque la vulnérabilité de plusieurs acteurs à des retraits rapides : les stablecoins, les fonds monétaires investis en titres d’entreprises et d’administrations infra-fédérales, les fonds obligataires et les assureurs vie qui disposent d’une forte proportion de passifs exigibles à court terme.

À court terme, les zones de risque les plus fréquemment citées dans les sondages réalisés par la Fed sont la situation du marché de l’immobilier commercial, les risques d’une persistance de l’inflation qui imposerait le maintien d’une politique monétaire restrictive et la survenance d’un nouvel épisode de perturbation dans le secteur bancaire. Le rapport cite enfin les risques liés à la situation de l’économie chinoise et aux tensions géopolitiques (Ukraine, Moyen-Orient).

 

La SEC propose d’uniformiser certains tarifs appliqués par les bourses

La Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés financiers, a publié le 18 octobre une proposition de règle qui vise à uniformiser les tarifs appliqués par les bourses quel que soient les volumes d’actions échangés. La proposition vise à (i) établir des règles concurrentielles plus justes entre acteurs, (ii) à éliminer les conflits d’intérêts entre le client final et l’intermédiaire et (iii) à établir une concurrence plus juste entre les bourses, dont certaines sont plus aptes que d’autres à proposer des tarifs attractifs pour les volumes importants.

Pour les ordres passés pour le compte d’un tiers, la proposition de règle interdirait les conditions tarifaires avantageuses (réductions des frais, rabais) appliquées par les bourses lorsque les volumes d’actions échangés franchissent certains seuils. Ainsi, il n’y aurait plus de différences de tarification entre les acteurs qui traitent des petits volumes d’ordres et ceux qui traitent des volumes importants.

Le barème de tarification progressif resterait toutefois autorisé pour les ordres pour compte propre, sous condition d’un rehaussement des exigences de transparence. Les bourses devront ainsi transmettre à la SEC le nombre d’opérateurs pour compte propre éligibles à chacun de leurs seuils tarifaires. Ces informations seront par la suite rendues publiques. 

 

Les régulateurs bancaires publient des principes pour une meilleure gestion des risques financiers liés au climat

Les trois régulateurs bancaires (Fed, OCC et FDIC) ont conjointement publié le 24 octobre des principes de gestion des risques financiers liés au climat (climate-related financial risks) à destination des plus grandes institutions financières, dont les actifs consolidés dépassent 100 Md USD. Ces principes ont pour objectif de fournir aux institutions un cadre de gestion des risques cohérent et synthétique, qui reprend les règles déjà existantes et les dernières propositions des agences en la matière.

Les principes visent à soutenir les efforts des institutions financières dans l’amélioration de leurs pratiques de gestion des risques financiers climatiques physiques, liés aux effets directs du changement climatique (inondations, sècheresses, ouragans, etc.) et de transition, qui résultent des effets de la mise en place d’un modèle économique bas-carbone (changement du comportement des clients, etc.). Ils ciblent l’ensemble des leviers mobilisables au sein des institutions financières pour une meilleure gestion des risques (les pratiques de gouvernance ; la planification stratégique ; l’établissement de scénarios prédictifs climatiques ; la gestion des données, la mesure des risques et le reporting ; les politiques, les procédures et limites d’exposition aux risques).

Par ailleurs, les principes s’appliquent sur un périmètre prudentiel qui couvre les activités de crédit, de marché, les positions de liquidité, mais aussi les risques opérationnels, juridiques et de mise en conformité des institutions financières. Toutefois, ils ne constituent pas un cadre légal contraignant. La Fed précise qu’ils n’interdisent ni ne découragent les institutions financières à fournir des services bancaires à certains types de clients. La décision d'accorder ou non un prêt ou d'ouvrir, de fermer ou de maintenir un compte appartient à l'institution financière, pour autant qu'elle respecte les lois et règlements en vigueur.

En août, les groupes d’intérêts bancaires avaient demandé aux régulateurs de repousser l’application de la réforme.

 

La Fed propose de réduire le plafond des commissions d’interchange des cartes bancaires

La Fed a publié le 18 octobre une proposition de règle qui vise à réduire le montant maximum des commissions d’interchange (interchange fee cap) que peuvent percevoir les émetteurs de carte bancaire dont les actifs consolidés dépassent 10 Md USD, et à établir un processus de mise à jour de ce seuil tous les deux ans. Cette réforme vise à s’assurer que les commissions perçues par ces émetteurs sont raisonnables et proportionnelles à l’évolution de leurs coûts.

La proposition de règle réviserait à la baisse les trois composantes du plafond des commissions d’interchange, qui seraient modifiées pour la première fois depuis 2012. Ainsi, (i) la composante forfaitaire passerait à 14,4 centimes maximum contre 21,0 aujourd’hui, (ii)    la part variable passerait à 0,04 % de la transaction contre 0,05 % aujourd’hui et (iii) la part variable appliquée aux émetteurs respectant certains standards renforcés de prévention de fraude (fraud prevention adjustment) passerait à 1,3 % contre 1 % aujourd’hui.

Par ailleurs, le processus de mise à jour de ce plafond s’appuierait, pour chacune des composantes, sur des méthodologies cohérentes d’une année sur l’autre, avec une actualisation des données par la Fed.      Les modalités du nouveau plafond seraient publiées le 31 mars des années impaires, avec une entrée en vigueur au 31 juillet et une durée d’application de deux ans.

Les régulateurs bancaires finalisent une réforme du Community Reinvestment Act (CRA)

Les régulateurs bancaires (Fed, OCC et FDIC) ont finalisé le 24 octobre une réforme des règles d’application du Community Reinvestment Act (CRA), une loi de 1977 qui impose aux banques de fournir des financements et des services aux territoires et aux populations à faibles revenus.

Cette réforme intègre les activités de banque en ligne dans le champ des activités soumises au CRA, tout en maintenant des exigences relatives au maintien d’agences bancaires dans les territoires concernés. La réforme encourage par ailleurs les partenariats des banques avec des institutions financières dédiées au financement de certains publics (Minority Depository Institutions – MDI – et Community Development Financial Institutions - CDFI). La règle prévoit enfin des exigences de financement plus strictes pour les grands établissements et assouplit celles des petites banques.

 

Situation des marchés

 Au cours des de la semaine écoulée (de jeudi à vendredi), l'indice S&P 500 a reculé de -3,2 %, à 4 137 points. Cette baisse s’explique principalement par la hausse des rendements des obligations souveraines américaines à maturité élevée (au-delà de 10 ans) en début de semaine, puis des résultats décevants de grandes capitalisations boursières comme Alphabet (-11 % du cours de l’action sur la semaine écoulée), Meta (-8 %), Amazon (‑7 %) et Tesla (‑5 %).

Les rendements des Treasuries à 2 ans et à 10 ans ont légèrement baissé au cours de la semaine, à 5,1 % (‑0,1 point), et à 4,8 % (‑0,2 point). Le taux à 10 ans a temporairement franchi la barre symbolique de 5 % le 23 octobre avant de reculer à 4,8 %. Les marchés restent attentifs aux variables économiques et à la politique de « higher for longer » de la Fed.

 

 

Brèves