Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

  • L’inflation repart à la hausse, tirée par les prix de l’énergie
  • Les ventes au détail poursuivent leur progression

Services financiers

  • L’opposition des banques à la transposition de Bâle III s’intensifie et trouve de l’écho au Congrès
  • Le président de la SEC présente son bilan et rappelle ses priorités au Sénat
  • La Fed réitère son appel à encadrer les stablecoins

Situation des marchés

Brèves

 

 

Conjoncture

 

L’inflation repart à la hausse, tirée par les prix de l’énergie

Selon la publication du Bureau of Labor Statistics (BLS), publiée le 13 septembre, l’indice des prix à la consommation (IPC) a progressé de +0,6 % en août (après +0,2 % en juillet et juin) et sa composante sous-jacente (hors énergie et alimentation) de +0,3 % (après +0,2 %). Cette hausse a été largement anticipée par les marchés qui prévoyaient +0,6 % et +0,2 % respectivement. Les prix de l’énergie ont augmenté de +5,6 % (après +0,1 %) et ceux de l’alimentation de +0,2 % (après +0,2 %). En particulier, les prix du logement sont sur une tendance baissière (+0,3 % après +0,4 % en juin et juillet).

Sur un an, l’inflation s’est établie à +3,7 % (après +3,2 %) du fait des prix de l’énergie mais sa composante sous-jacente a reculé à +4,3 % (après +4,7 %). Les prix de l’énergie baissent de ‑3,6 % (après -12,5 %) et ceux de l’alimentation ont ralenti à +4,3 % (après +4,9 %).

Cette publication témoigne par ailleurs d’une accélération de certaines composantes de l’indice outre l’énergie et l’alimentation : les services de transports (+2,0 % après +0,3 %), les soins de santé (+0,1 % après -0,4 %), les nouveaux véhicules (+0,3 % après -0,1 %), l’habillement (+0,2 % après +0,0 %), les équipements médicaux (+0,6 % après +0,5 %). Toutefois, les prix des services de logements affichent une tendance baissière (+0,3 % après +0,4 % en juillet et juin et +0,6 % en mai).

Le Council of Economic Advisers (CEA), organe composé des conseillers économiques de la Maison-Blanche, a publié le même jour une analyse qui souligne la baisse de l’inflation sous-jacente et la volatilité des prix de l’énergie. En effet, la contribution de l’énergie à l’inflation mensuelle serait de 0,34 point de pourcentage sur +0,6 %, soit plus de la moitié de la hausse mensuelle.

Selon une enquête de la Fed de New York publiée le 11 septembre, les anticipations d’inflation des consommateurs sont restées quasi stables, à +3,6 % pour les anticipations d’inflation à 1 an (+0,1 point), +2,8 % pour celles à 3 ans (-0,1 point) et à +3,0 % (+0,1 point) pour celles à 5 ans.

 

Les ventes au détail poursuivent leur progression

Selon les données publiées par le Census Bureau, les ventes au détail poursuivent leur progression à +0,6 % en août (après +0,5 % en juillet, révisé de -0,2 point), soit un niveau nettement supérieur aux attentes du marché (+0,1 %). Les ventes hors essences ont progressé de +0,2 %. Sur douze mois glissants, les ventes au détail ont progressé de +2,5 %. Les données sont publiées en valeur nominale, donc non ajustées de l’inflation.

Sur un mois, les ventes ont notamment augmenté dans les stations-services (+5,2 %), l’habillement (+0,9 %) et les distributeurs d’électronique grand public (+0,7 %). Au contraire, les ventes ont reculé dans les produits de loisir et livres (-1,6 %), les détaillants divers (‑1,3 %) et les magasins d’ameublement et de jardinage (-1,0 %)

 

 

Services Financiers

 

L’opposition des banques à la transposition de Bâle III s’intensifie et trouve de l’écho au Congrès

Plusieurs groupes représentant les intérêts du secteur bancaire et financier (BPI, IIB, ABA, SIFMA, etc.), soutenus par l’US Chamber of Commerce, ont adressé le 12 septembre une lettre ouverte aux régulateurs bancaires (Fed, FDIC, OCC) pour demander une révision de la proposition de règle du 27 juillet transposant les règles de Bâle III. La lettre dénonce en particulier la période de consultation trop courte, la hausse trop importante des exigences de capital et le manque de justification des paramètres. BPI a également engagé une campagne d’opposition publicitaire sur le sujet.

Le 13 septembre, les 29 représentants républicains membres de la commission des services financiers de la Chambre des représentants ont écrit aux régulateurs pour demander le retrait de la proposition. Lors d’une audition le 14 septembre, les élus républicains ont renouvelé leur opposition. Patrick McHenry (R), président de la commission des services financiers, a mis en avant les risques pour l’accès au crédit des particuliers et des entreprises.

Ces positions étaient soutenues par plusieurs témoignages de l’industrie financière. Outre BPI qui a réitéré ses critiques, la Mortgage Bankers Association a évoqué les impacts significatifs sur l’immobilier résidentiel, notamment pour les emprunteurs à faibles ressources ou primo-accédant, dans un contexte de taux d’intérêt déjà élevés. Le cabinet d’avocat Mayer Brown estime que la proposition de règle est illégale à plusieurs titres, notamment en contrevenant au principe du « tailoring » (exigences croissantes selon la taille des banques) prévu par la loi de dérégulation bancaire de 2019 et en apportant des justifications insuffisantes à l’appui des contraintes envisagées. Seule l’association Americans for Financial Reform a témoigné en faveur d’une augmentation des exigences de fonds propres.

Les élus démocrates, minoritaires à la Chambre mais majoritaires au Sénat, ont majoritairement soutenu le projet de transposition de Bâle III. Certains élus démocrates ont néanmoins exprimé des réserves en marge de l’audition du 14 septembre. Le représentant Sean Casten (D) a souligné la nécessité de prendre en compte les effets sur les investissements en actions des banques. Le sénateur Mark Warner (D) a dit s’inquiéter des impacts pour les banques déjà confrontées à une hausse rapide des taux et aux difficultés du secteur de l’immobilier commercial.

 

Le président de la SEC présente son bilan et rappelle ses priorités au Sénat

Dans une audition à la commission des affaires bancaires du Sénat, Gary Gensler, président de la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés financiers, a présenté le bilan de la SEC au cours des derniers mois et ses priorités. 22 nouvelles règles ont été finalisées depuis sa prise de fonction en avril 2021.

En matière de concurrence et d’efficience des marchés, G. Gensler a mis en avant la réforme des hedge funds et des fonds de capital-investissement qui renforce les exigences de communication aux investisseurs et encadre certaines pratiques commerciales. Il a aussi rappelé les propositions de règles de fin 2022 relatives au marché actions, qui restent à finaliser (qualité de l’exécution, système d’enchères pour les ordres des particuliers, etc.).

S’agissant de l’intégrité des marchés, G. Gensler a rappelé les durcissements relatifs aux délits d’initiés, à la rémunération des dirigeants, aux rachats d’actions et à la lutte contre la fraude. De nombreuses propositions restent là aussi à finaliser, notamment sur la communication des sociétés cotées en matière climatique, le traitement des risques cyber, la gestion des conflits d’intérêts dans l’utilisation des outils d’intelligence artificielle, les Special Purpose Acquisition Companies (SPAC) et la dénomination des fonds recourant à des critères ESG.

Enfin, s’agissant de la résilience des acteurs de marché, G. Gensler a mis l’accent sur les nouvelles règles de liquidité des fonds monétaires et le raccourcissement du délai de règlement-livraison, qui devrait être effectif à partir de mi-2024. Ses priorités à venir consistent notamment à finaliser les propositions de règles relatives à l’exigence de liquidité des fonds ouverts et à la résilience du marché des Treasuries.

 

La Fed réitère son appel à encadrer les stablecoins

Dans un discours du 8 septembre consacré à l’innovation dans le secteur des paiements, Michael Barr, vice-président de la Fed pour la supervision, a souligné les risques liés au développement des stablecoins (crypto-actifs visant à rester stables par rapport à une monnaie) qui ne disposent pas d’un cadre réglementaire fédéral, et a appelé le Congrès à légiférer.

Plusieurs grands acteurs des paiements ont récemment fait des annonces en la matière. PayPal a annoncé le 7 août le lancement d’un stablecoin (PYUSD) en partenariat avec Paxos. Visa, partenaire de Circle, l’émetteur du stablecoin USDC, a annoncé le 5 septembre le lancement d’un projet pilote mettant à disposition de prestataires de paiement de nouveaux outils de règlement en stablecoins.

M. Barr a par ailleurs rappelé les travaux de la Fed dans le secteur des paiements : système de paiement interbancaire FedNow entré en vigueur en juillet 2023, recherches menées sur les monnaies numériques de banque centrale, etc.

Le Bureau de protection des consommateurs de services financiers (CFPB) a par ailleurs publié une étude soulignant le rôle des grandes entreprises de la Tech, notamment Apple et Google, dans le secteur des paiements, en raison du développement des paiements par smartphone.

 

 

Situation des marchés

 

Au cours de la semaine écoulée (de vendredi à jeudi), l'indice S&P 500 a progressé de +1,2 %, à 4 505 points. Cette hausse s’expliquerait par des anticipations d’une pause dans le resserrement de la politique monétaire de la Fed lors du prochain FOMC et une baisse de l’incertitude après la publication des indicateurs conjoncturels conformes aux attentes.

Les rendements des obligations souveraines (Treasuries) à 2 ans et à 10 ans sont restés quasi stables à 5,0 % et 4,3 % respectivement.

Le taux de change USD/EUR continue de progresser à la suite des propos signalant une possible fin du resserrement en zone euro et atteint ainsi son plus haut niveau depuis juin dernier, à 1 USD = 0,94 EUR.

 

 

Brèves


-Selon le rapport intitulé « Revenus, pauvreté et assurance santé » du Census Bureau publié le 12 septembre, le revenu réel a baissé de ‑2,3 % en 2022, l’inflation élevée ayant effacé les gains nominaux. L’inégalité des revenus a diminué de ‑1,2 % pour la 1ère fois depuis 2007 mais l’inégalité des revenus après impôts a augmenté de +3,2 %. Le taux de pauvreté « supplémentaire » (Supplemental Poverty Measure), l’indicateur qui prend en compte les aides publiques, a augmenté de +4,6 points en 2022, à 12,4 % sous l’effet de la fin des mesures de soutien de l’American Rescue Plan (ARP).

 

-Le Congressional Budget Office (CBO), organe d’évaluation des analyses budgétaires et économiques rattaché au Congrès, a publié le 8 septembre une projection de la dette publique à la demande du président de la commission du budget de la Chambre des représentants, Jodey Arrington (R-Texas). Selon le CBO, après une stabilité en 2024, la dette publique devrait croître de 124 % du PIB en 2023 à 129 % en 2033 et 192 % en 2053.

 

-Le Treasury et l’Internal Revenue Service (IRS) ont publié le 12 septembre les directives relatives à l’impôt minimum de 15 % (corporate alternative minimum tax – CAMT) instauré dans le cadre de l’Inflation Reduction Act. Ils reconnaissent les difficultés des entreprises à calculer avec précision le montant du CAMT et par conséquent, exemptera toute pénalité liée à la déclaration du CAMT pour l’année 2023. Par ailleurs, les directives précisent la méthodologie du calcul de l’impôt à partir des résultats financiers des entreprises et du traitement des dispositifs fiscaux.

 

-Selon un rapport du Government Accountability Office (GAO), organe d’audit de comptes publics au service du Congrès, les fraudes à l’assurance chômage durant la crise sanitaire (entre avril 2020 et mai 2023) sont estimées à 11-15 % du montant total des aides, soit entre 100 et 135 Md USD. Le système de l’assurance chômage figure, depuis 2022, dans la liste des programmes à haut risque du GAO.

-La Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), autorité de résolution et de garantie des dépôts, a publié le 8 septembre un rapport revenant sur la faillite de First Republic en mai 2023. La FDIC souligne les défaillances de la banque en matière de gestion du risque de taux et sa dépendance vis-à-vis des dépôts non-assurés.

 

-Kyle Bass, fondateur et gérant du hedge fund Hayman Capital Management (450 M USD d’actifs sous gestion), a estimé dans une interview le 11 septembre que les banques américaines pourraient enregistrer entre 200 et 250 Md USD de pertes sur le secteur de l’immobilier de bureau.

 

-Dans une audition du 14 septembre à la Chambre des représentants, les élus républicains se sont fortement opposés à l’idée de créer une monnaie numérique de banque centrale (MNBC), en dénonçant notamment les risques d’atteintes à la vie privée et le rôle trop important qu’une MNBC confèrerait à la Fed. Plusieurs élus ont déposé des propositions de loi interdisant l’émission d’une MNBC sans autorisation du Congrès. À l’inverse, le représentant démocrate Stephen Lynch a déposé une proposition de loi qui encourage la Fed à poursuivre ses recherches sur le sujet et qui demande au Treasury de lancer un programme pilote pour tester l’utilisation d’une version électronique des dollars fiduciaires (e-cash).