Des échanges encore limités avec la région AOEI mais structurellement excédentaires pour la France malgré un point bas en 2022

La région Afrique de l’Est et Océan Indien (AEOI) reste un partenaire mineur des échanges commerciaux de la France. Madagascar et Maurice sont les principaux partenaires, du fait de liens forts et de la présence de nombreuses entreprises françaises. Le Kenya et les Seychelles sont également parmi les principaux exportateurs de la zone. Quant à l’Ethiopie, caractérisée par l’importante taille de son marché intérieur, elle est notre 3ème client dans la région. Si la composition de nos exportations varie selon le pays partenaire (et est marqué par les grands contrats aéronautiques), la structure des produits importés est relativement similaire, principalement des produits agricoles et des industries agroalimentaires. En raison d’un différentiel de valeur ajoutée entre les exportations et les importations, la France est structurellement excédentaire avec l’AEOI, même si cet écart se réduit.

Les exportations vers l’AEOI ont faiblement augmenté et sont restées inférieures au niveau prépandémie

Selon les données des Douanes françaises, les exportations françaises vers l’Afrique de l’Est et l’Océan Indien se sont élevées à 1,8 Md EUR en 2022, en hausse après deux années de baisses consécutives. Cette augmentation s’est inscrite dans une tendance plus globale, où nos exportations ont augmenté de 8,9 % en Afrique subsaharienne et 19,4 % dans le monde en 2022. Toutefois, malgré ce rebond de 5,7 %, les exportations à destination de l’AEOI sont restées inférieures au niveau pré-pandémie (2,2 Mds EUR), et ont vu leur part dans les exportations françaises totales tomber à 0,3 %, contre 0,4 % en 2019. La région AEOI reste donc un client marginal pour la France : en 2022, la zone était destinataire de 16,3 % des exportations françaises en direction de l’Afrique subsaharienne, en deçà de la moyenne 2016-2021 qui s’élevait à 19,4 %. Les principaux clients en AEOI sont Maurice (24,4% des exportations vers l’AEOI), Madagascar (23,9 %) et l’Ethiopie (18,2 %).

Nos exportations ont augmenté dans la plupart des pays de l’AEOI en 2022 : Maurice (+29,8 %), Madagascar (+19,9 %), Djibouti (21,3 %), Tanzanie (+43,1 %), Rwanda (+25,4 % ), et Somalie (+36,4 %). Elles ont plus que doublé en Erythrée (+125,3%) et au Soudan du Sud (+112,8 %), mais ont augmenté plutôt faiblement au Kenya (+9,1 %), au Soudan (+4,5 %), aux Seychelles (+9,8 %), et au Burundi (+9,3 %). Cependant, cette tendance n’a pas été partagée par l’ensemble des pays : l’Ouganda (-45,0 %), l’Ethiopie (-21,0 %) et les Comores (-29,7 %) ont vu leurs importations en provenance de France diminuer drastiquement.

Nos principaux postes d’exportations vers l’AEOI sont en accord avec la structure de nos exportations globales :

  • Les matériels de transport, qui représentent 16,6 % de nos exportations vers l’AEOI (23,1 % en moyenne depuis 2013), en particulier à destination de l’Ethiopie (76,9 % en 2022) et de Maurice (5,4 %) ;
  • Les équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et informatique, 22,6 % de nos exportations (20,1 % en moyenne depuis 2013), principalement vers Maurice (28,7 %), Madagascar (21,4 %) et l’Ethiopie (9,8 %) ;
  • Les produits des industries agroalimentaires (IAA), 16,4 % de nos exportations (13,8 % en moyenne depuis 2013), notamment en direction de Maurice (29,4 %) et de Madagascar (19,1 %) ;
  • Les produits chimiques, parfums et cosmétiques, 10,4 % de nos exportations (9,3 % en moyenne depuis 2013), en particulier à destination de Maurice (26,4 %), du Kenya (19,9 %) et de Madagascar (16,2 %).

Parallèlement, nos importations ont fortement augmenté pour la seconde année consécutive

En 2022, les importations françaises en provenance de l’AEOI se sont établies à 1,5 Md EUR, soit une hausse de +26,2 % par rapport à 2021, pour la seconde année de hausses consécutives. Néanmoins, cette augmentation des importations depuis l’AEOI est inférieure à celle observée depuis l’Afrique subsaharienne (+94,0 %) et le monde (+29,4 %). L’AEOI reste également un fournisseur marginal pour la France : en 2022, la région a fourni 9,3 % des importations françaises en provenance de l’Afrique Subsaharienne, bien inférieur à la moyenne 2016-2021 de 14,7 %. Au niveau mondial, l’AEOI ne représente que 0,2 % des importations françaises. Nos principaux fournisseurs en AEOI sont Madagascar (46,7 % de nos importations depuis l’AEOI), Maurice (17,7 %), le Kenya (9,6 %) et les Seychelles (9,2 %).

L’augmentation des importations  en 2022 (+308,3 MEUR) s’explique par la croissance de nos importations en provenance de Madagascar (+32,9 %), de Maurice (+25,7 %), du Soudan (+83,7 %) et de l’Ethiopie (+26,9 %) et ce malgré la diminution de celles en provenance des Comores (-40,6 %).

Compte tenu des caractéristiques productives des pays de l’AEOI, la structure de nos importations depuis la zone est relativement éloignée de la structure globale de nos importations, cette dernière reposant plutôt sur des produits à plus forte valeur ajoutée. Nos principaux produits importés depuis l’AEOI sont :

  • Les produits agricoles, sylvicoles, de la pêche et de l’aquaculture, qui représentent 36,1 % de nos importations (31,0 % en moyenne depuis 2013), principalement en provenance de Madagascar (42,0 %), du Kenya (18,5 %) et du Soudan (14,4 %) ;
  • Les produits des industries agroalimentaires (IAA) avec 27,3 % de nos importations (29,3 % en moyenne depuis 2013), essentiellement en provenance de Madagascar (43,2 %) et des Seychelles (31,2 %), et dans une moindre mesure de Maurice (12,1 %) ;
  • Le textile, l’habillement, cuir et chaussures, avec 20,7 % de nos importations (23,2 % en moyenne depuis 2013), pour quasi-exclusivité en provenance de Madagascar (72,0 %) et de Maurice (20,9 %).

Croissance des échanges agricoles, agroalimentaires, forestiers et d’agrofournitures

L’année 2022 a enregistré un volume d’échanges dans le secteur agricole, agroalimentaire, forestier et d’agrofournitures en hausse de 22,0 % par rapport à 2021 pour s’établir à 1 373,3 MEUR. Avec une valeur des exportations en hausse de 13,2 % et des importations en hausse de 26,1 %, le déficit de la balance commerciale française pour ce secteur a cru de 37,5 % par rapport à 2021, atteignant 558,6 MEUR. La croissance des exportations françaises dans ce secteur (407,3 MEUR) a été portée par les produits agricoles et agroalimentaires (+22,7 %). A l’inverse, les exportations d’engrais et de produits phytosanitaires ont reculé de 8,8 %. L’augmentation des importations françaises du secteur (965,7 MEUR) est liée à la croissance des importations de produits d’épicerie (+46,1 %) et de produits issus de la pêche et de l’aquaculture (+17,5 %). Au total, les produits agricoles, agroalimentaires forestiers et d’agrofournitures ont représenté 23,0 % de la valeur des exportations françaises vers la zone AEOI, et 65,1 % de la valeur des importations françaises en provenance de cette zone.

En résulte une baisse de notre excédent avec l’AEOI qui atteint presque son point le plus bas depuis 2014

Historiquement, la France connait un déficit commercial avec seulement deux pays de la zone : Madagascar où il s’est établi à -149,0 MEUR en moyenne sur la dernière décennie (2012-2021), et les Seychelles, à -50,8 MEUR sur la même période. En 2022, la France a exceptionnellement enregistré un déficit avec le Soudan de -24,8 MEUR.

En 2022, l’excédent commercial français vis-à-vis de l’AEOI s’est établi à 287,9 MEUR, en baisse de 212,7 MEUR par rapport à 2021 et de 694,6 MEUR par rapport à 2019. Cette dégradation de la balance commerciale est particulièrement marquée en Ethiopie, où l’excédent est près de trois fois moins important qu’en période pré-pandémie (239,3 MEUR, contre 661,2 MEUR en 2019), ainsi qu’à Madagascar, où le déficit commercial français s’est creusé de -101,0 MEUR pour s’établir à -268,2 MEUR.

L’UE, 3ème fournisseur et 1er client de l’AEOI

La France, 1er partenaire européen de l’AEOI, représente une part substantielle des échanges européens avec la région (19,7 % de la valeur échangée en 2022), et a fortiori avec les pays de l’Océan Indien. En 2022, l’Union européenne (UE)[1] a exporté 9,7 Mds USD de marchandises vers l’AEOI[2] et importé 7,4 Mds USD, constituant le 3ème fournisseur de l’AEOI, derrière la Chine et l’Inde, et son 1er client, devant l’Inde, les Etats-Unis et la Chine. L’Union européenne a enregistré une nouvelle baisse de son excédent commercial en 2022, qui s’est établi à 2,3 Mds USD contre 3,1 Mds USD en 2021, s’expliquant par une hausse de ses exportations (+6,1 %) bien inférieure à celle de ses importations (+21,8 %).

L’Union européenne a principalement importé en 2022 du café, thé, mate et épices – 1er produit d’importation de la France et de l’Allemagne – ainsi que des plantes vivantes et produits de la floriculture – 1er produit d’importation des Pays-Bas.

L’Accord de Partenariat Economique UE-Kenya devrait permettre de stimuler le commerce extérieur français

Le Kenya a signé en juin 2023[3] un APE bilatéral[4] avec l’UE afin de conserver son accès préférentiel au marché européen. Pour l’Union européenne, la signature de cet accord commercial bénéficiera en premier lieu aux exportations de produits des industries chimiques (25,0 % des exportations de l’UE à destination du Kenya en 2022 ; baisse moyenne des droits de douane kényans de 80,9 % à terme), d’appareils mécaniques et électriques (19,6 % des exportations ; baisse moyenne des droits de douane kényans de 94,5 % à terme) et de produits minéraux (13,4 % des exportations ; baisse moyenne des droits de douane kényans de 98,1 % à terme). En raison des spécialisations françaises à l’exportation, notre excédent commercial avec le Kenya devrait s’en trouver renforcé.



[1] Données Trade Data Monitor hors Royaume-Uni ; conversion en euros par le SER.

[2] Données non disponibles pour l’Erythrée. Les données pour le Soudan s’arrêtent en 2018.

[3] Les négociations autour de l’APE UE-Kenya ont néanmoins débuté dès 2021, à la suite de la signature de l’APE RU-Kenya.

[4] Bien que bilatéral, l’APE-Kenya est ouvert à la signature pour les autres Etats membres de la CAE. Néanmoins, selon le Vice-Président de la commission européenne Valdis Dombrovskis, seul le Rwanda aurait manifesté à ce jour un intérêt.