Avec ses ressources en gaz naturel et un affichage ambitieux en matière d’énergies renouvelables, Israël espère, sans trop y croire, atteindre une autonomie énergétique constituée à 30% de renouvelable et à 70% de gaz naturel d’ici à 2030. Le charbon représente encore 20% de la production électrique en 2022. Les exportations de gaz vers l’Egypte, la Jordanie et dans une moindre mesure l’UE constituent une source de stabilité et génèrent des revenus non négligeables.

1. Mix énergétique et électrique : domination nette des énergies fossiles

En croissance continue depuis 2015, la consommation d’énergie en Israël s’est hissée à 74 Mds kWh en 2022, établissant ainsi un nouveau record. L’Autorité Israélienne de l’Electricité estime que la consommation atteindra 84,4 Mds KWh en 2025.

Le mix énergétique israélien accorde une place prépondérante aux énergies fossiles. Le gaz (58%) et le charbon (19%) représentent 77% de l’énergie consommée, tandis que les énergies renouvelables, dont 91% sont d’origine photovoltaïque, ne représentent que 11,8% du mix. Le reste est constitué de pétrole. [Annexe 1]. Ces proportions sont en deçà de celles des pays de l’OCDE, où le recours aux énergies renouvelables est de 11%.

La transition du charbon importé vers le gaz naturel national, entamée en 2013, a permis une baisse des émissions de GES. En dix ans, le pays a aussi effectué 310 Mds ILS (77,8 Mds EUR) d’économies sur la production d’énergie grâce à cette transition et les volumes de dioxyde de soufre et de dioxyde d’azote rejetés ont respectivement été divisés par 3 et 6. Les champs gaziers Tamar et Léviathan approvisionnent l’économie israélienne et, en 2022, près de 60% de la production électrique fonctionnait au gaz.

 

 2. Marché de l’électricité : un île électrique en partie privatisée

Le marché de l’électricité en Israël est caractérisé par son isolement quasi-total des marchés voisins et par la transition du monopole historique exercé par l’Israel Electric Company (IEC), entreprise détenue à 99,9% par l’Etat (créée en 1923). Privatisation et décentralisation progressive du marché sont donc à l’oeuvre. En juillet 2018, la loi de réforme du marché de l’électricité a amorcé l’ouverture à la concurrence de plusieurs segments d’ici à 2026. La part de marché de l’IEC sur la production d’électricité a été ramenée de 99% à environ 60%, permettant l’entrée de producteurs indépendants. La loi prévoyait la cession de cinq centrales à gaz d’une capacité installée de 4 500 MW, et le remplacement de deux anciennes centrales à charbon par des centrales à gaz, d’une capacité cumulée de 1 200 MW. Sur les segments transmission et distribution, l’Etat garde son monopole et investira 0,84 Mds EUR dans la modernisation du réseau (qui inclut parfois l’approvisionnement de certaines colonies en territoire palestinien). Enfin, comme prévu la gestion du réseau a été confiée à une nouvelle entreprise publique créée à cet effet, Noga.

En avril 2023, l’Autorité de l’Electricité a annoncé une nouvelle réforme, non-encore mise en œuvre, qui devrait inciter les Israéliens à investir dans le stockage de l’énergie renouvelable. Une partie des financements irait à la création de stockage d’électricité « casher », c’est-à dire produite pendant la semaine et qui pourrait ainsi être utilisée le samedi par la population ultra-orthodoxe.

 

 3. Gaz naturel : indépendance énergétique et source de revenus

La découverte de champs gaziers offshores a permis à Israël d’acquérir une précieuse indépendance énergétique : Tamar et Dalit en 2009, Leviathan en 2010, Dolphin en 2011, Tanin en 2012, Karish en 2013, Karish Nord en 2019 et le Katlan en 2023. Israël disposait en 2023 de réserves proches de 1100 BCM (Mds m3 ) pour une consommation intérieure qui ne devrait pas excéder les 500 Mds m3 pour les 24 années cumulées de 2021 à 2045.

Après avoir conclu des accords d’exportation avec la Jordanie (2016) et l’Egypte (2019) et commencé à exporter vers ces deux pays début 2020, les exportations sont passées de 0,2 BCM en 2019 (2% de la production) à 10 en 2022 générant ainsi plus de 1,5 Mds ILS (370 M EUR) de revenus.

La majeure partie des exportations se fait en direction de l’Egypte qui dispose d’unités de liquéfaction (GNL) qui permettent d’exporter vers des marchés lointains, dont l’UE. La guerre en Ukraine a renforcé l’intérêt d’Israël pour des débouchés en Europe et un accord « politique » a été signé entre l’UE, l’Egypte et Israël en 20224 . Il n’est pas exclu non plus qu’Israël puisse se doter de ses propres installations flottantes de liquéfaction.

Une partie de la manne gazière contribue à alimenter le premier fonds souverain israélien, l’Israël Citizen’s Fund, effectif depuis le 1er juin 2022. La Banque Centrale Israélienne, en charge de la gestion du fonds, pourrait consacrer jusqu’à 3,5% de ses plus-values annuelles à des projets « d’utilité publique ».

 

4. Transition énergétique : l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables 

En tant que signataire de l’Accord de Paris sur le Climat, Israël a pris un certain nombre d’engagements visant à réduire ses émissions de GES d’ici à 2030. A la COP 26 de Glasgow le Premier ministre a pris l’engagement d’arriver à la neutralité carbone d’ici 2050. Les principaux objectifs semblent aujourd’hui difficiles à atteindre: élever la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique complet de 2% en 2019 à 30% en 2030, abandonner le charbon comme source d’énergie primaire d’ici 20267 , s’assurer que 100% des véhicules individuels vendus en 2030 seront électriques, réduire de 20% la distance parcourue en voiture individuelle, promouvoir la transition des bus vers des carburants plus propres (gaz naturel comprimé et électricité notamment). Enfin, Israël est revenu sur la suspension des permis d’exploration d’hydrocarbures en juin 2022 en raison de la demande gazière européenne. Autre signal, en février 2023, Israël exporta pour la première fois du pétrole brut (condensats) vers l’Europe dans le cadre d’un accord de commercialisation multi-cargaisons avec Vitol.

Du fait des caractéristiques du pays, le solaire représente environ 91% de la production d’énergie renouvelable, en baisse de 4 points depuis 2021. Cette baisse s’explique par des difficultés réglementaires (y compris foncières) et des infrastructures obsolètes.

Dans le cadre d’un accord signé en novembre 2021, des panneaux solaires d’une puissance totale de 600 MW seront implantés en Jordanie et devraient fournir Israël en électricité en échange de 200 M m3 d’eau dessalinisée. En septembre 2023, le ministre de l’Energie israélien se rendra en Jordanie pour tenter d’accélérer la mise en oeuvre de ce projet, signé aux EAU en présence d’un envoyé américain.

 

5. Nucléaire : Israël revoit discrètement sa position en matière de nucléaire civil

Israël n’affichait jusqu’à récemment aucun intérêt pour le nucléaire à usage civil, tant du fait de ses réserves en gaz que du risque sécuritaire. Désormais, cette position semble évoluer et Israël pourrait envisager une phase préliminaire à un programme civil. Le pays compte par ailleurs deux réacteurs : le centre Shimon Peres pour la Recherche Nucléaire situé à Dimona dans le Néguev (capacité estimée entre 26 et 150 MW), et le Centre de Recherche Nucléaire de Nahal Soreq (capacité < 5 MW).