Malgré un marché domestique relativement réduit, l’Afrique du Sud a développé une industrie automobile performante et le pays s’inscrit aujourd’hui comme le premier pays producteur de véhicules en Afrique. Le développement du secteur automobile résulte d’une politique industrielle incitative ambitieuse, qui s’est montrée particulièrement efficace pour attirer les constructeurs internationaux. L’industrie est intégrée à la chaîne de valeur mondiale et repose principalement sur les exportations, notamment vers l’Europe. La présence des constructeurs et entreprises françaises reste secondaire (groupe Renault via Nissan et équipementiers Faurecia et Valeo) avec toutefois un projet phare d’implantation du groupe Stellantis à l’horizon 2025. Si les perspectives de croissance sont plutôt favorables à court terme, le secteur fait aujourd’hui face à de nombreux défis, notamment la lente transition vers l’électrique et une concurrence venue d’Asie croissante.

 

I- Etat des lieux du marché automobile sud-africain en 2023
L’industrie automobile sud-africaine, un secteur important pour l’économie

Le secteur de l’automobile est stratégique pour l’industrie sud-africaine – premier sous-secteur, représentant plus de 17% de la valeur ajoutée en 2022. Plus largement, le secteur représente 4,9% du PIB (dont 2,9% pour la production et 2% pour les ventes) – contre 7% du PIB en 2019 (respectivement 4,6% et 2,3%), avant la pandémie de Covid-19[1].

Le secteur représente 110 000 emplois directs et près d’un demi-million d’emplois indirects (en prenant en compte les fournisseurs et les activités de ventes, réparation et maintenance) – soit près de 3% du total de la force de travail sud-africaine, dans un pays où le taux de chômage dépasse les 33% au premier trimestre 2023. L’industrie emploie par ailleurs majoritairement des populations relativement peu qualifiées et historiquement défavorisées – ainsi entre juin 2021 et juin 2022, 58% des emplois crées par les OEM concernaient des personnes noires et 53% des jeunes[2].

L’industrie automobile est un catalyseur clé pour les investissements internationaux. D’après l’Automotive Industry Export Council (AIEC) [3], elle a ainsi totalisé près de 690 projets d’implantation, pour un total de 106 Mds ZAR (5,1 Mds EUR) d’investissements depuis 1995. En 2022, le secteur a attiré près de 12 Mds ZAR d’Investissements Directs à l’Etranger (0,7 Md EUR) – dont plus de 60% réalisés directement par les constructeurs, soit plus de 2% du flux total entrants. Lors de l’édition 2022 de la conférence sur les investissements (South Africa Investment Conference), présidée par le Président sud-africain Cyril Ramaphosa, les annonces dans le secteur automobile ont été parmi les plus importantes : elles ont atteint 20,4 Mds ZAR (1 Md EUR), portées par les investissements de Ford, 16,8 Mds ZAR, pour la modernisation de son usine de Silverton et de BMW, 800 MZAR.

Un marché domestique de taille relativement réduite, mais qui s’est montré résilient ces dernières années

Le marché automobile domestique est d’une taille relativement réduite et centré sur les véhicules passagers. Le parc automobile était ainsi estimé à 12,9 M de véhicules dont 7,6 M de véhicules passagers en 2021, soit un ratio de détention de véhicule automobile de 178 pour 1 000 habitants (environ trois fois moins qu’en France). Bien que la voiture demeure le moyen de locomotion privilégié dans le pays, de nombreux ménages sud-africains n’ont en effet pas les moyens d’acquérir et entretenir un véhicule (23% de la population vit sous le seuil international de pauvreté, 2,15 USD par jour, en 2022). Les ventes globales de véhicules neufs (voitures de passagers, utilitaires, camions, bus) se sont élevées à près de 530 000 unités sur l’année 2022, en hausse de 14% par rapport à l’an passé – bien que le niveau demeure toujours inférieur de plus de 4% à celui de 2019 (cf Graph 1). Les véhicules passagers représentent en moyenne les deux tiers des ventes (en unités), les véhicules commerciaux légers (pick-up et utilitaires) un peu moins de 30% et les bus et camions 5%. A noter que les ventes de véhicules électriques demeurent très marginales : seulement 4 686 véhicules électriques et hybrides vendues dans le pays, soit 1,2% du total des ventes, une part plus de 10 fois inférieure au niveau mondial.

L’Afrique du Sud est également un pays producteur de véhicule, le premier sur le continent africain et le vingtième au niveau mondial (cf Graph 2), avec 555 889 véhicules produits en 2022[4] (cf Graph 3). La production a progressé de 11 % comparativement à l’année précédente, à un rythme près de deux fois supérieur à la production mondiale (+6%) sur la période. Le secteur s’est donc montré particulièrement résilient, alors qu’il a fait face à de nombreux chocs conjoncturels, notamment l’impact des inondations dans la région de Durban en 2022 (les dégâts importants sur l’usine de Toyota ont poussé le constructeur à fermer son site pendant plusieurs mois) et les difficultés croissantes d’approvisionnement en électricité (niveau record de délestages électriques en 2022).

Une forte présence des constructeurs de rangs mondiaux qui a attiré de nombreux sous-traitants

Sept constructeurs de rang mondiaux (OEM) sont aujourd’hui implantés dans le pays, répartis dans trois clusters régionaux (Zones Economiques Spéciales) : l’Eastern Cape (43,3% de la production domestique en 2020, région de Port Elisabeth – VolskWagen Group SA, Mercedes-Benz SA et Isuzu Motors SA), le Gauteng (33%, région de Pretoria et Johannesburg – Ford Motor Company Southern Africa, Nissan SA et BMW SA) et le Kwazulu Natal (23,5%, région de Durban – Toyota SA Motors). Par ailleurs quinze fabricants de véhicules intermédiaires, poids lourd et bus étaient également présents localement (Iveco, UD Trucks, Man, Hyundai, Marcopolo, Volvo, FAW, etc.) (cf Graph 4). L’industrie est fortement dépendante de ces multinationales, qui représentent environ 40% de la valeur ajoutée de l’industrie en 2019, soit près du double comparativement à la moyenne mondiale du secteur. [5]

Un véritable écosystème s’est développé avec la présence de plus de 500 sous-traitants et équipementiers, notamment implantés dans les trois principaux clusters automobiles – dont 175 de premiers rangs (à 75% des multinationales). Ainsi, au-delà de la présence d’usine d’assemblages, de nombreux composants des véhicules (systèmes d’échappement châssis, moteurs, pneus, etc.) sont manufacturés localement avec en moyenne 40% de contenu local pour les véhicules produits en Afrique du Sud, et jusqu’à 55% pour certains modèles. A titre d’exemple, Volskwagen produit localement les moteurs de ses modèles de Polo (EA111) et Ford a annoncé en 2022 délocaliser dans le pays la production de moteurs diesel pour équiper ses pick-ups Ranger.

Sur le segment des ventes domestiques de véhicules personnels et utilitaires, le marché est largement dominé par Toyota (près de 30% des parts de marché avec les modèles Hilux, Urban Cruiser, Corolla, Starlet). On retrouve par la suite les modèles de Volkswagen (14% - Polo), Suzuki (près de 10% - Swift), et Hyundai (6% - Venue) (cf Graph 5). L’offre sur le marché est variée (plus de 50 marques disponibles à la vente dans le pays, pour plus de 2500 modèles) et les tarifs compétitifs – résultat du programme d’industrialisation du gouvernement (APDP II) qui octroie aux constructeurs automobiles implantés dans le pays des crédits de droits de douane pour les importations des modèles non produits localement (cf infra).

La présence des marques française demeure secondaire sur un marché particulièrement compétitif. Ainsi les parts de marché des véhicules neufs vendus en 2022 atteignaient moins de 6% pour Renault (modèles Kwid, Duster, Sandero, Clio – une part en légère progression ces dernières années : +3,5 points depuis 2015) et moins de 2% pour Stellantis (avec les marques Opel – Corsa, Astra et Peugeot – 3008). A ce jour, seul le constructeur Renault est implanté en Afrique du Sud, via une coentreprise avec le groupe Imperial (distribution uniquement) et indirectement via Nissan (usine d’assemblage de Rosslyn, qui produit les véhicules commerciaux légers NP 200 et NP 300 et le pick up Navara, avec une capacité de 35 000 véhicules par an). L’équipementier Faurecia est également présent dans quatre usines – Le Cap et Port-Elisabeth (systèmes d’échappement à chaud et à froid pour automobile) ainsi que Prétoria et Uitenhage (intérieur de véhicule) – et compte 1 500 employés. A noter aussi la présence de Valéo (usine de production à Uitenhage, dans la région de Port Elisabeth - différents composants comme les embrayages, les systèmes de climatisation, etc.), Michelin (distribution uniquement) et CFAO (réseau de concessions automobiles, notamment pour Toyota).

II - Le développement du secteur résulte du succès d’une politique industrielle ambitieuse  succès d’une politique industrielle ambitieuse
Dès la fin de l’apartheid, le gouvernement a soutenu l’industrie automobile …

Le développement du secteur automobile s’est appuyé sur un programme ambitieux d’industrialisation, visant dès la fin d’apartheid à attirer les constructeurs internationaux et à créer une industrie forte. Dès 1995 le gouvernement a ainsi mis en place le Motor Industry Development Programme (MIDP), remplacé en 2013 par l’Automotive Production Development Programme (APDP). Le secteur a donc bénéficié de nombreuses incitations à l’investissement public (exonérations fiscales, amortissement accéléré, subventions liées aux exportations, etc.), ce qui explique en grande partie la dichotomie entre la taille du marché automobile sud-africain relativement réduite (500 000 par an), son positionnement dans l’hémisphère sud (nombreux frais logistiques induits) et le nombre important de constructeurs établis dans le pays

En 2021, l’Afrique du Sud a relancé un programme industriel automobile qui vise à inciter au développement de la production domestique, via la mise en place du programme APDP II pour la période 2021-2035. Ce programme repose notamment sur quatre piliers : (i) droits d'importation sur les véhicules et les composants fixés à un niveau relativement élevé de 25 % pour les véhicules légers et 20 % sur les composants. A noter que les véhicules européens et anglais importés en Afrique du Sud bénéficient d’un droit d’importation préférentiel (18%),  fixé dans le cadre des accords de coopération économique avec la SACU ; (ii) allocation d’assemblage locale (VALA) destinée aux fabricants de véhicules automobiles légers produisant au moins 10 000 unités dans le pays (franchise de droits de douane de 40 % à partir de 2021, réduite progressivement à 35% à l’horizon 2026 – pour l’importation des composants et équipements) ; (iii) incitations à la production  – reversement de 12,5% de la valeur ajoutée manufacturière sous forme de franchise sur les droits d’importation  ; (iv) régime d'incitation automobile (AIS), sous forme d’aides à l’investissement (subvention d'un montant de base égal à 20 % des investissements sur les actifs productifs agréés par le DTIC[6], jusqu’à 25% pour certains projets identifiés comme stratégiques, payables sur une période de trois ans). A noter que ces mesures sont toutefois conditionnées à des exigences renforcées en matière de BEEE, ce qui pourrait s’avérer particulièrement coûteux pour certains constructeurs (ouverture de l’actionnariat, changement de fournisseurs, etc.).

Parallèlement, le gouvernement sud-africain cherche à moderniser l’industrie automobile et à renforcer sa compétitivité. Il a ainsi publié, en 2019, le South African Automotive Masterplan 2021-2035, dont la mise en œuvre peine toutefois à se concrétiser. Le plan fixe des objectifs particulièrement ambitieux pour le secteur – hausse de la production domestique à 1% du total de la production mondiale en 2035 (soit près de 1,5 M de véhicules par an), augmentation du contenu local pour les véhicules produits dans le pays à 60% (contre 40% actuellement) et doublement de l’emploi direct du secteur (à 224 000 salariés). Plusieurs axes stratégiques très généraux ont été identifiés, comme l’optimisation du marché local, une meilleure intégration au marché régional, le renforcement des infrastructures, le développement de compétences et technologies et le maintien des politiques publiques de soutien.

… favorisant le développement d’un secteur imbriqué dans la chaîne de valeur mondiale

La politique industrielle sud-africaine a encouragé le développement d’une industrie intégrée dans la chaîne de valeur mondiale et tournée vers les exportations. Ainsi, en 2022, plus de 63% des véhicules produits dans le pays étaient destinés à l’export, une part qui suit une tendance de progression ces dernières années (50% en 2014, 58% en 2018) (cf Graph 6). Les exportations du secteur (véhicules passager, commerciaux, camion et véhicules spéciaux ainsi que leurs pièces détachées) ont ainsi atteint 11,2 Mds USD en 2022[7], soit près de 10% du total des exportations du pays (cf Graph 7).  Les principaux constructeurs exportateurs pour les véhicules personnels et commerciaux légers sont, par volume exporté en 2021 : Volkswagen, Ford, Toyota et BMW ; et, pour les camions et bus : Volvo Group, UD Trucks, Toyota, Scania et Isuzu.

En 2022, le secteur exportait vers 152 destinations[8], via notamment le terminal automobile du port de Durban. L’Europe est le premier débouché (près de 51% de part de marché en 2022) - notamment l’Allemagne (1er client avec 32,4%), la Belgique (2e 12%) et l’Espagne (5e - 5%). La France se situe à la treizième place des pays importateurs (2,4% du total)[9]. A noter que ces échanges sont facilités par l’exemption de droit de douane pour les ventes à l’export de véhicules et pièces détachées sud-africaines à destination de l’Union Européenne dans le cadre de l’accord de partenariat économique SADC-UE, signé en 2016. L’Afrique sub-saharienne se distingue également comme un marché clé (18,1%), notamment pour les pays de la zone australe : Namibie (7 ième pays importateur avec près de 4% de part de marché), Zimbabwe (8 ième avec près de 3%) et Zambie – (9 ième et près 3%). Dans une moindre mesure, l’Afrique du Sud exporte également vers les Etats-Unis (9%) des produits exemptés de droit de douane dans le cadre de l’accord AGOA (35% de part local exigée) ; et l’Asie (7%, notamment le Japon). Ces parts de marché sont globalement stables sur les cinq dernières années (cf Graph 8).

L’Afrique du Sud est un fournisseur automobile de rang secondaire pour l’Europe (23e en 2022, avec 2% de part de marché, le deuxième en Afrique derrière le Maroc) mais stratégique pour certains pays d’Afrique australe, notamment pour plusieurs marchés régionaux enclavés de taille très modeste comme la Namibie (premier fournisseur avec 73% de part de marché en 2020 – dernière donnée disponible), le Zimbabwe (premier avec 70%) ou encore la Zambie (premier avec 22%).

Les pièces détachées représentent un segment important du secteur à l’export. En 2021, le flux de composants exportés représentait ainsi 69,2 Mds ZAR (3,6 Mds USD), soit plus du tiers du total des exportations de l’industrie. Le marché se concentre notamment autour des pots catalytiques (représentant 52% des exportations de pièces détachées) et dans une moindre mesure des pièces de moteur (7%) et des pneus (4,5%). Ce segment suit une dynamique d’évolution très favorable, les exportations ayant progressé de 8,3% par an en moyenne entre 2017 et 2021.

Le pays est également un importateur important de véhicules - près des deux tiers des véhicules vendus sur le marché domestique étaient ainsi importés ces dernières années. En 2022, les importations du secteur ont atteint 8,4 Mds USD, soit plus de 7,5% du total des importations[10] (cf Graph 9). Les principaux pays fournisseurs sont les pays asiatiques (plus de la moitié du flux en 2022), avec notamment l’Inde (premier fournisseur avec près de 20% de part de marché), la Chine (deuxième avec près de 15%) et le Japon (cinquième avec près de 10%). On retrouve en second plan les pays européens (32% de part de marché), notamment l’Allemagne (troisième avec 14,5%). La France apparaît comme un fournisseur marginal au treizième rang (1,2%) (cf Graph 10).

III -  Enjeux et perspectives de développement
Des perspectives de croissance plutôt favorables à court terme, mais limitées à moyen terme

Les perspectives d’évolution du marché apparaissent comme plutôt favorables à court terme. Ainsi, selon les projections de l’association des constructeurs automobiles Naamsa, la production de véhicules devrait progresser de 11% en 2023 – l’industrie devrait ainsi croître à un niveau bien supérieur au marché mondial (prévisions aux alentours des +5,5% en 2023). La production sera notamment portée par les ventes domestiques (+15%) et dans une moindre mesure par les exportations (+8%). Le secteur devrait donc poursuivre sa reprise et retrouver ses niveaux de production pré pandémie de Covid-19 dès cette année.

Toutefois, une augmentation significative du parc de véhicules passagers est difficilement envisageable à moyen terme étant donné les difficultés structurelles de l’économie sud-africaine (incapacité à créer des emplois, croissance atone, etc.). Le marché domestique, qui pourrait être saturé dans les années à venir, devrait inciter les constructeurs implantés en Afrique du Sud à exporter encore davantage – une tendance déjà observée depuis quelques années. Ainsi, d’après une étude du cabinet de conseil Deloitte, la croissance du secteur devrait nettement ralentir en 2024 et 2025, puis stagner dès 2026 : le niveau de vente de véhicules se maintiendrait ainsi aux alentours des 600 000.

Le secteur automobile pâtit de la très nette dégradation du climat des affaires, notamment de la crise énergétique et des difficultés croissantes d’approvisionnement en électricité. Si certaines zones économiques exclusives sont encore exemptées de délestages électriques, ces mesures ne concernent par l’ensemble des constructeurs, ni les équipementiers et sous-traitants. L’impact financier est colossal (recours aux générateurs), les coupures répétées poussent par exemple Faurecia à arrêter totalement certaines lignes de production particulièrement énergivores (injection plastique). Cette dégradation de l’environnement pourrait pousser certains constructeurs à revoir leur positionnement sur le marché et à freiner certains investissements dans le pays.

Le projet d’implantation du groupe Stellantis

Le groupe Stellantis prévoit d’implanter une ligne de production dans le pays. Le constructeur franco-italien, issu de la fusion de PSA et Fiat-Chrysler, a en effet annoncé début 2023 la signature d’un accord (MoU) avec les autorités sud-africaines (Industrial Development Corporation – IDC et le Department of Trade, Industry and Competition – DTIC) pour l’installation d’une unité de production en Afrique du Sud à l’horizon fin 2025. Ce dernier ambitionne de fortement renforcer sa présence sur le marché local et régional à l’horizon 2030.

L’absence de transition vers l’électrique menace le secteur à moyen terme

L’absence de transition vers l’électrique fait peser un risque important sur l’industrie automobile sud-africaine, alors que l’interdiction des ventes des véhicules thermiques a été fixée à 2030 par le Royaume-Uni et 2035 par l’UE principaux marchés à l’export. Sans un développement rapide de l’industrie automobile électrique, l’Afrique du Sud pourrait voir la valeur de ses exportations diminuer de 112 Mds ZAR (5,6 Mds EUR) à l’horizon 2030, avec une perte potentielle de près de 300 000 emplois. Pour maintenir sa place dans la chaîne de valeur mondiale, les constructeurs appellent le gouvernement sud-africain à rapidement mettre en place une politique incitative globale, à la fois pour le développement d’une filière locale de production de véhicules électriques (VE) mais aussi pour le développement du marché domestique. A noter qu’à ce jour, le gouvernement sud-africain n’a développé aucune mesure pour soutenir le secteur. Le Department of Trade Industry and Competition (DTIC) ne devrait pas rendre publique sa stratégie VE avant mars 2024 – alors qu’un premier rapport (Green Paper) avait été rendu public dès mai 2021 (Cf note du SER sur les véhicules électriques en Afrique du Sud).

Un marché qui fait face à une concurrence croissante venue d’Asie

Le secteur fait face à une concurrence internationale croissante. Ainsi, en 2022, le pays a importé 323 800 véhicules, un niveau en hausse de près de 11% par rapport à 2019. Plus de la moitié des véhicules importés provenaient d’Inde, une part en très forte progression ces dernières années (+20% depuis 2017). De même, la Chine s’inscrit comme le second fournisseur en volume (12%), alors que les flux d’importation depuis la puissance asiatique étaient insignifiants en 2017. Ainsi les parts de marché des produits indiens et chinois sur le marché sud-africain ont très nettement progressé (hausse de respectivement 8 et 7 points depuis 2015), alors qu’à l’inverse, les pays européens ont perdu près de 10 points sur la période.

Les modèles indiens (Tata, Mahindra) et chinois (Haval, BAIC, Foton), particulièrement compétitifs en termes de prix, semblent séduire de plus en plus la clientèle sud-africaine, dans un contexte socio-économique fortement dégradé, marqué par des pressions inflationnistes élevées (+7,1% sur un an au mois de mars), une érosion du pouvoir d’achat et une tendance à la dépréciation de la devise domestique face à l’USD, qui renchérit les importations (le rand a atteint la parité de 19,1 ZAR pour 1 USD le 15 mai 2023, soit -16% sur un an). De plus, certains constructeurs internationaux choisissent de desservir le marché sud-africain depuis leur hub de production en Inde, notamment Renault qui y produit son modèle Kwid.

 
Annexes : cf. fichier pdf.

[3] L’AIEC représente les intérêts des 7 OEMs exportateurs présents en Afrique du Sud.

[4] Source : NaamsaIndustry vehicules sales 2014-2024

[5] Source : Rapport de Deloitte : Rooting SA: Strengthening the local automotive industry

[6] Department of Trade Industry and Competition

[7] Sources : calculs réalisés par le SER à partie de la base de données Trade Map 

[9] Source : Base de données Trade Map, données déclarées par le pays exportateur (Afrique du Sud), pour le secteur automobile au sens large (véhicules léger, commerciaux, bus, poids-lourds, véhicules spéciaux et pièces détachées).

[10] Source : Base de données Trade Map, données déclarées par le pays importateur (Afrique du Sud), pour le secteur automobile au sens large (véhicules léger, commerciaux, bus, poids-lourds, véhicules spéciaux et pièces détachées).