Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

  • L’inflation totale et sa composante sous-jacente baissent
  • Les créations d’emploi ralentissent
  • Le Beige Book signale une activité en légère hausse, soutenue par une consommation robuste

Politiques macroéconomiques

  • Les responsables de la Fed privilégient dans l’ensemble la poursuite du resserrement monétaire

Services financiers

  • La Fed présente ses orientations pour la transposition des accords de Bâle III
  • La SEC finalise la réforme des fonds monétaires

Situation des marchés

Brèves

 

Conjoncture

 L’inflation totale et sa composante sous-jacente baissent

Selon la publication du Bureau of Labor Statistics (BLS), l’indice des prix à la consommation (IPC) et sa composante sous-jacente (hors énergie et alimentation) ont tous deux augmenté de +0,2 % en juin (après +0,1 % et +0,4 % en mai respectivement), soit légèrement en-dessous des attentes du marché (+0,3 % chacun). Les prix de l’énergie ont augmenté de +0,6 % (après -3,6 %) et ceux de l’alimentation ont augmenté de +0,1 % (après +0,2 %). La composante sous-jacente a connu sa plus faible hausse depuis août 2021.

Sur un an, l’inflation a nettement reculé à +3,0 % (après +4,0 %) principalement du fait d’un fort effet de base (-1,2 point de contribution), et sa composante sous-jacente a diminué à +4,8 % (après +5,3 %). Les prix de l’énergie ont baissé de ‑16,7 % (après -11,7 %) et ceux de l’alimentation ont ralenti à +5,7 % (après +6,7 %).

Selon une enquête de la Fed de New York publiée le 10 juillet, les anticipations d’inflation des consommateurs ont baissé à +3,8 % sur un an (‑0,3 point), au plus bas depuis avril 2021. Par ailleurs, les anticipations à 3 ans et à 5 ans sont désormais toutes deux à +3,0 %, soit une anticipation inchangée à 3 ans et en hausse de +0,3 point à 5 ans par rapport au mois précédent.

 

Les créations d’emploi ralentissent

D’après le rapport mensuel du BLS sur la situation de l’emploi, publié le 7 juillet, les créations d’emplois se sont établies à +209 000 en juin (après +306 000 en mai et contre +278 000 en moyenne sur les 6 derniers mois), soit en-dessous des attentes du marché (+240 000). Elles se sont concentrées dans le secteur public (+60 000), la santé (+41 000), les aides sociales (+24 000) et la construction (+23 000). Par ailleurs, le rapport fait état de révisions à la baisse des créations d’emploi en avril (‑77 000) et en mai (‑33 000), soulignant que les créations d’emplois étaient légèrement moins dynamiques qu’annoncé dans les rapports précédents.

Le taux de chômage s’est établi à 3,6 % en juin (‑0,1 point par rapport à mai), en ligne avec les attentes du marché. Il continue d’évoluer entre 3,4 % et 3,7 % depuis mars 2022. En revanche, le taux de chômage des Afro-américains et des Hispaniques a augmenté en juin, à 6,0 % (après 5,6 %) et 4,3 % (après 4,0 %).

Les taux d’emploi et d’activité sont tous deux restés stables, à 60,3 % et 62,6 % respectivement. Le salaire horaire moyen a accéléré à +0,4 % en juin (après +0,3 %) mais sa croissance reste inchangée à +4,4 % sur douze mois glissants. Par ailleurs, le nombre de travailleurs à temps partiel a augmenté de +452 000 en juin.

 

Le Beige Book signale une activité en légère hausse, soutenue par une consommation robuste

Le Beige Book publié le 12 juillet, qui présente l’évolution de la situation économique dans les 12 districts des Fed régionales, témoigne d’une légère progression de l’activité économique en dépit d’un ralentissement du marché du crédit.

Depuis la dernière publication du Beige Book, le 31 mai, la consommation a globalement augmenté pour les services, bien que certains commerçants aient noté un ralentissement des dépenses discrétionnaires. L’activité immobilière est restée soutenue bien qu’elle ait été contrainte par la baisse de biens disponibles.

Le marché du travail reste solide avec un ralentissement des créations d’emploi et une plus grande disponibilité de la main d’œuvre dans la plupart des districts. Toutefois, les entreprises continuent de souligner des difficultés à recruter, en particulier des travailleurs qualifiés. Globalement, les mouvements sur le marché du travail et la croissance des salaires seraient en train de se normaliser vers leur niveau prépandémique.

Le Beige Book fait état d’un ralentissement des prix, notamment des prix à la consommation. Les entreprises indiquent que les prix des intrants demeurent élevés pour les services mais qu’ils baissent dans l’industrie. Le rapport souligne l’hétérogénéité sectorielle en termes de capacité des entreprises à répercuter la hausse des prix des intrants dans leur prix de vente.

 

Politiques macroéconomiques

 

Les responsables de la Fed privilégient dans l’ensemble la poursuite du resserrement monétaire

Au cours de la semaine, les responsables de la Fed ont exprimé leur position quant à la trajectoire de la politique monétaire. Dans l’ensemble, ils soutiennent que les taux fed funds devront être maintenus à un niveau élevé et restrictif pendant un certain temps. Certaines présidentes de Fed régionales comme Mary Daly (San Francisco) et Loretta Mester (Cleveland) soutiennent de nouvelles hausses de taux dès le prochain FOMC, soulignant une baisse trop lente de l’inflation sous-jacente. D’autres, comme Austan Goolsbee (Chicago) et Neel Kashkari (Minneapolis) seraient favorables à de nouvelles hausses uniquement si les données sur l’inflation le justifiaient. En revanche, Raphael Bostic (Atlanta) se démarque des autres en faisant appel à la « patience » de la Fed afin d’observer les effets différés du durcissement des conditions monétaires et financières. Selon lui, le niveau des taux fed funds est déjà suffisamment restrictif pour ralentir l’activité.

Face à la résilience de l’activité économique, Susan Collins (Boston) et A. Goolsbee se montrent convaincus de la capacité de la Fed à ramener l’inflation à son taux cible de 2 % sans entrer en récession, même en cas de nouvelles hausses des taux. Selon A. Goolsbee, la Fed est sur la bonne voie (golden path) pour un atterrissage en douceur (soft landing) grâce à la résilience du marché du travail et à sa normalisation progressive.

 

Services Financiers

 

La Fed présente ses orientations pour la transposition des accords de Bâle III

Michael Barr, vice-président de la Fed chargé de la supervision, est intervenu le 10 juillet sur la transposition aux États-Unis des règles issues des accords de Bâle III finalisés en 2017. Ce discours annonce également les orientations retenues à l’issue de la « revue holistique » sur la régulation bancaire menée par la Fed.

M. Barr a d’abord livré ses orientations pour l’application des règles de Bâle III relatives aux exigences de fonds propres : un risque de crédit évalué essentiellement par une approche standard, un risque opérationnel reposant sur une approche standard ajustée selon l’historique des pertes, et un risque de marché pour lequel les modèles internes pourront être utilisés, mais avec un niveau d’exigence plus élevé. Les nouvelles exigences s’appliqueraient aux banques ayant plus de 100 Md USD d’actifs.

M. Barr a également annoncé des mesures visant à tirer les enseignements des faillites bancaires du premier trimestre. La dérogation permettant aux banques ayant moins de 700 Md USD d’actifs de ne pas déduire de leurs fonds propres réglementaires les moins-values latentes issues de leurs titres disponibles à la vente devrait être limitée aux banques ayant moins de 100 Md USD d’actifs. Les banques dépassant ce seuil seront par ailleurs soumises à des exigences de dette de long terme permettant d’absorber leurs pertes. Les stress-tests de supervision devraient également être renforcés (diversification des scénarios, refonte du choc de marché, etc.).

En termes de calendrier, M. Barr a indiqué que les propositions de règle seraient publiées dans les mois à venir, avec une entrée en vigueur étalée sur plusieurs années. Il a estimé que les nouvelles règles entraîneraient une hausse des exigences de fonds propres rapportés aux actifs pondérés par les risques (RWA) de l’ordre de +2 points pour les banques concernées.

 

La SEC finalise la réforme des fonds monétaires

La Securities and Exchange Commission (SEC), autorité des marchés financiers, a publié le 12 juillet la version finalisée de sa réforme des fonds monétaires (Money Market Funds – MMF). La réflexion sur l’évolution de la régulation des MMF avait été ouverte à l’issue des turbulences de marché de mars 2020 et une proposition de règle avait été publiée par la SEC en décembre 2021.

Conformément à la proposition initiale, les ratios de liquidité des MMF sont réhaussés : le ratio d’actifs liquides à un jour passe à 25 % des actifs (contre 10 % actuellement) et le ratio d’actifs liquides à une semaine passe à 50 % des actifs (contre 30 % actuellement).

La réforme supprime par ailleurs le lien mécanique existant entre les ratios de liquidité et l’application de frais de rachats et de restriction des rachats, ce lien étant considéré comme à l’origine de mouvements massifs de retraits dans les périodes de tension.

Contrairement à la proposition de règle qui prévoyait l’application d’un mécanisme de variation des prix des parts en période de retrait (swing pricing), la règle finale impose, pour les MMF destinés aux investisseurs institutionnels (à l’exception de ceux investissant uniquement dans des titres de dette fédérale américaine), des frais de rachat obligatoires lorsque les rachats nets quotidiens excèdent 5 % des actifs nets.

La règle prévoit un calendrier d’application étalé entre 6 et 12 mois selon les mesures.

 

 

Situation des marchés

 

Au cours de la semaine écoulée (de vendredi à jeudi), l'indice S&P 500 a progressé de +2,4 %, à 4 510 points. Le marché est porté par l’espoir d’un atterrissage en douceur de l’économie américaine résultant d’un marché du travail résilient et d’une désinflation plus rapide.

Le rendement des obligations souveraines (Treasuries) à 2 ans a diminué de ‑4 points, à 4,6 % et celui des obligations souveraines à 10 ans a de ‑2 points, à 3,8 %. Cette baisse s’explique notamment par la publication des derniers chiffres de l’inflation qui ont surpris à la baisse, réduisant ainsi les anticipations d’un resserrement monétaire aussi fort que signalé lors du dernier FOMC et dans les minutes publiées le 5 juillet.

 

Brèves


-Le président de la Fed de Saint Louis, James Bullard, a annoncé le 13 juillet sa démission pour devenir le doyen de la Business School de l’Université Purdue à compter du 15 août. Kathleen O’Neill Pease, actuellement première vice-présidente et directrice des opérations assurera l’intérim de la présidence de la Fed de Saint Louis après son départ.

 

-La Chambre des Représentants a adopté le 11 juillet une loi (qui doit ensuite être étudiée au Sénat) demandant à la SEC de prolonger de six mois un régime dérogatoire mis en place à la suite de l’adoption de la directive MiFID II dans l’Union européenne. Ce régime d’exemption permet aux courtiers de recevoir des paiements distincts pour leurs travaux de recherche sans être soumis à la réglementation de conseiller en investissement (investment adviser).

 

-La SEC a publié le 12 juillet une proposition de règle visant à renforcer la protection des clients des courtiers. La proposition exigerait des courtiers détenant plus de 250 M USD de cash pour le compte de leurs clients qu'ils déterminent chaque jour (et non plus chaque semaine) les montants des réserves qu’ils doivent constituer en face de ces actifs.

 

-Le 13 juillet, dans le cadre de l’affaire opposant la SEC à la société Ripple Labs, émettrice du crypto-actif XRP, la juge de district Analisa Torres a statué que XRP ne constituait pas « en soi » un titre financier (security - au sens de la réglementation américaine), mais que les circonstances en l’espèce de vente du XRP à des investisseurs institutionnels l’assimilait à une security. Cette décision a été accueillie favorablement par le secteur des crypto-actifs, et a fait bondir le cours du XRP (+ 73 % sur la journée) et des autres crypto-actifs (+4,1 % pour Bitcoin ; +6,52 % pour Ethereum), ainsi que celui de la plateforme Coinbase (+25 %) qui fait l’objet d’une action en justice de la SEC

 

-Les sénatrices Cynthia Lummis (R – Wyoming) et Kirsten Gillibrand (D – New York) ont déposé le 12 juillet une nouvelle proposition de loi bipartisane sur la régulation des crypto‑actifs. La proposition prévoit que la Commodity Futures Trading Commission (CFTC, régulateur des marchés de dérivés) devienne le régulateur principal des plateformes d’échanges. Elle réserverait l’émission de stablecoins aux banques et aux titulaires d’une licence dédiée. La proposition prévoit aussi la ségrégation des actifs des clients et la conservation des actifs par un tiers.

 

-Les sénateurs Ron Wyden (D – Oregon) et Mike Crapo (R – Idaho), qui dirigent la commission financière du sénat (compétente pour les questions fiscales) ont  initié une consultation publique sur les enjeux de taxation des crypto-actifs.