FMI – dernières manœuvres du gouvernement pour éviter l’échec du programme

En marge du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial qui se tient à Paris les 22 et 23 juin, le Premier ministre Shehbaz Sharif a rencontré la directrice générale du FMI pour tenter de débloquer les négociations autour de la 9ème revue, à maintenant une semaine de la fin du programme FMI.

Lors de cet entretien, le premier ministre pakistanais a souligné que toutes les actions préalables à la 9ème revue avaient été mises en œuvre et que le gouvernement s'était pleinement engagé à remplir ses obligations, comme convenu avec le FMI.

Ces derniers jours, les autorités pakistanaises ont multiplié les démarches auprès des partenaires bilatéraux (convocation des ambassadeurs des principaux partenaires financiers avec le Premier ministre, entretien téléphonique du ministre des Finances Ishaq Dar avec Andrew Mitchell, ministre d'État chargé des Affaires du Développement et de l'Afrique auprès du ministère britannique des Affaires étrangères) pour faire entendre leurs positions et demander un soutien pour tenter d’infléchir la position du Fonds et éviter ainsi l’échec du programme fin juin.

Annonce d’un plan de relance économique sous l’égide de l’armée

Le Premier ministre a présenté un « Plan de relance économique », qui prévoit de « développer le potentiel inexploité du Pakistan dans les secteurs clés de la production de défense, de l'agriculture, de l'élevage, de l'exploitation minière, de l'informatique et de l'énergie grâce au développement local et aux investissements des pays amis (plus particulièrement les pays du Golfe)».  Il a également annoncé la création d’un Conseil pour faciliter les investissement (Special Investment Facilitation Council – SFIC), qui servira de guichet unique pour les investisseurs étrangers afin de faciliter leurs démarches.

On notera la présence lors de cette présentation du Chef d’Etat major de l’armée de terre (Chief of Army Staff – COAS), le Général Asim Munir qui a assuré le gouvernement du soutien de l’armée à ce plan de relance économique. D’après les déclarations d’un ministre du gouvernement, l’armée jouerait un rôle important dans la coordination de ces projets.

Moody's considère que le Pakistan va faire face en 2023/2024 à des risques élevés sur la viabilité de sa dette.

Dans une note publiée récemment, Moody’s considère que les projections de recettes du gouvernement sont trop sommaires et reposent essentiellement sur l'hypothèse qu’une forte croissance du PIB (+3,5%) aura pour effet de soutenir une augmentation des recettes. L’agence de notation considère « qu’il n'est pas garanti que le Pakistan pourra obtenir 2,4 Mds USD du FMI comme prévu au cours de l’année budgétaire à venir et que, la question de savoir si le Pakistan adhérera à un autre programme du FMI ne se posera qu'après les élections, qui doivent avoir lieu d'ici octobre 2023». Moody’s ajoute : « Les négociations relatives à tout nouveau programme du FMI prendront également du temps, même si elles aboutissent. Tant qu'un nouveau programme n'aura pas été adopté, la capacité du Pakistan à obtenir des prêts auprès d'autres partenaires bilatéraux et multilatéraux sera fortement limitée ».

Moody’s considère qu’il est peu probable que le Pakistan ait accès dans un avenir prévisible à des financements de marché à des coûts abordables. D’ici là, l’agence de notation considère que les perspectives de financement extérieur du Pakistan pour l'exercice 2024 sont très incertaines et l’agence de notation pense que l’accès du Pakistan à des financements bancaires ou à des euro-obligations sera très onéreux pour le Gouvernement pakistanais. Moody’s rappelle à cet égard qu’au cours de l'exercice budgétaire 2022/2023, le gouvernement pakistanais n'a émis aucune euro-obligation et n'a levé que 521 Mds PKR (1,8 Md USD) auprès des banques commerciales, ce qui est loin des 1 400 Mds PKR (4,4 Mds USD) visés dans le projet de loi de finances 2022/2023.

La SBP a publié une liste exhaustive des dépenses des créanciers multilatéraux et bilatéraux au cours des 11 premiers mois de l’année 2022/2023.

Les créanciers multilatéraux ont décaissé 4,45 Mds USD de prêts au cours des 11 premiers mois :

  • Banque Asiatique de Développement - 2,03 Mds USD ;
  • Banque mondiale :
    • (IDA) - 1,3 Md USD,
    • (IBRD) - 170,32 M USD ;
  •  Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (AIIB) - 555,96 M USD.

Le FMI a débloqué 1,16 Md USD en septembre 2022 au titre des 7ème et 8ème revues de la facilité élargie de crédit.

Les 161 M USD décaissés par la Banque islamique de développement sous forme de prêts à court terme ont été très inférieurs à l’objectif de décaissement de 1,2 Md USD annoncé sur l’exercice budgétaire 2022-23. Les décaissements de ECO Trade and Development Bank (ECO-TDB, basée en Turquie) se sont élevés à 64 MUSD, celui du Fonds international de développement agricole (FIDA) à 43,9 MUSD, ceux de l’Islamic Development Bank (IsDB) à 16,8 MUSD, ceux de la Banque européenne d'investissement (BEI) à 13,37 M USD et ceux de la « Multilateral trading facility » liée à la commission européenne se à 1,47 MUSD. Il n'y a pas eu de décaissement de prêts ou de dons de l'UE, de l'OPEC Fund for International Development (OFID) et de l'UNICEF pendant l'année fiscale en cours.

Parmi les créanciers bilatéraux, le Pakistan a reçu 1,35 Md USD au cours des onze premiers mois de l'année fiscale :

  • 1,08 Md USD de l'Afrique du Sud par le biais d'une facilité pétrolière,
  • 128 M USD de la Chine,
  • 34,8 M USD du Japon,
  • 32,8 M USD de la France,
  • 30,23 M USD des États-Unis,
  • 22,59 M USD de la Corée du Sud,
  • 7,32 M USD de l'Allemagne,
  • 5,45 M USD de l'Italie,
  • 5,35 M USD de la Belgique
  • 1,89 M USD du Sultanat d'Oman.

Le Danemark, le Koweït, l'Arabie Saoudite et le Royaume-Uni n'ont pas décaissé de fonds d’aide publique au développement durant l'année fiscale en cours.

Signature d’un MoU entre la Chine et le Pakistan pour la construction d’un nouveau réacteur nucléaire de 1200 MWe

En présence du Premier ministre, Shehbaz Sharif, la Coopération nucléaire nationale chinoise et la Commission pakistanaise de l'énergie atomique ont signé un protocole d’accord portant sur la construction d’un réacteur nucléaire de 1200 MWe – Chashma 5 dans la province centrale du Pendjab. Le montant total de l’investissement s’élève à 4,8 Mds USD. Ce projet « Chashma 5 » sera construit dans la province centrale du Pendjab. Il n’est toutefois pas précisé si ce projet entre dans le cadre du CPEC - Corridor économique sino-pakistanais, déclinaison au Pakistan de BRI -Belt and Road Initiative.