Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

  • Les ventes au détail rebondissent
  • La dette des ménages augmente mais les prêts hypothécaires ralentissent
  • Plusieurs publications rendent compte de l’état du secteur industriel

Politiques macroéconomiques

  • La Maison-Blanche annonce les nominations à la Fed
  • Les responsables de la Fed restent attentifs à l’évolution de la conjoncture

Services financiers

  • Le vice-président de la Fed souhaite renforcer la réglementation bancaire
  • Le Congrès met en cause la responsabilité des ex-dirigeants de Signature Bank et Silicon Valley Bank

Situation des marchés

Brèves

 

Conjoncture

 

Les ventes au détail rebondissent

Selon les données publiées par le Census Bureau, les ventes au détail ont augmenté de +0,4 % en avril (après avoir baissé de ‑0,7 % en mars), en‑deçà des attentes du marché (+0,8 %). Sur douze mois glissants, les ventes au détail ont ralenti à +1,6 % (après +2,4 % en mars). Les données sont publiées en valeur nominales, donc non ajustées de l’inflation.

Sur un mois, les ventes ont augmenté pour les magasins de détail divers (+2,4 %), les détaillants hors magasin (+1,2 %), les soins de santé (+0,9 %), les bars et restaurants (+0,6 %), tandis qu’elles ont diminué pour les articles de sport, de loisirs, de musiques et les librairies (‑3,3 %), les stations-services (‑0,8 %) et l’ameublement (‑0,7 %).

Home Depot, entreprise spécialisée dans la distribution d’équipement de maison, a publié des ventes inférieures aux attentes du marché (37 Md USD contre 38 Md USD attendus) et sa 1ère baisse des bénéfices depuis mai 2020. Elle a baissé ses perspectives de croissance (jusqu’à ‑5 % contre -0,7 % attendu par le marché) en raison du ralentissement de la demande.

Walmart et Target, deux entreprises de grande distribution, ont quant à elles publié des résultats pour le T1 2023 plus encourageants. Walmart a publié une croissance très forte de son revenu, à +7,6 % (pour atteindre 152,3 Md USD), tirée par le e-commerce (+26 %). L’entreprise a relevé ses perspectives de croissance pour l’année (de 2,5 %-3,0 % à +3,5 %). Target a publié un rapport plus mitigé, avec des ventes en très légère progression (+0,5 %), juste au-dessus des attentes du marché, tirées par les produits de première nécessité mais reflétant une baisse de la consommation. L’entreprise a maintenu ses perspectives pour l’année (stabilité des ventes).

 

La dette des ménages augmente mais les prêts hypothécaires ralentissent

D’après le rapport trimestriel de la Fed publié le 16 mai sur la dette des ménages au T1 2023, celle‑ci a augmenté de +0,9 % (soit +148 Md USD), atteignant un volume total de 17 050 Md USD.

Toutefois, les nouvelles émissions de prêts hypothécaires ont nettement ralenti à 324 Md USD au T1 2023 (après 498 Md USD au T4 2022), au niveau le plus bas depuis le T2 2014.

Le taux de défaillances agrégé demeure stable à 2,6 % au T1 2023 (après avoir diminué depuis le début de la pandémie) mais le taux de défaillance de plus de 30 jours continue de progresser pour les dettes de carte de crédit (+0,6 point), les crédits automobiles et les prêts hypothécaires (+0,2 point chacun).

 

Plusieurs publications rendent compte de l’état du secteur industriel

D’après un rapport de la Fed, publié le 16 mai, la production industrielle américaine a augmenté de +0,5 % en avril après être restée stable (+0,0 %) sur les deux derniers mois. En particulier, la production manufacturière a augmenté de +1,0 % (après ‑0,8 % en mars), tirée par les véhicules à moteurs et les pièces détachées. L’utilisation des capacités de production a légèrement augmenté pour atteindre 79,9 %, soit le taux d’utilisation moyen sur le long terme (sur la période 1972-2022).

Selon une enquête de la Fed de New York (Empire State Manufacturing Survey), conduite du 2 au 9 mai dans sa circonscription, l’indice des conditions générales du secteur a fortement chuté en mai à ‑31,8 bien en‑deçà des attentes du marché (-5,0). Les entreprises interrogées anticipent peu d’améliorations dans les 6 prochains mois, comme le souligne la baisse de l’indice des dépenses d’investissement, à son plus bas depuis 3 ans (0,9).

D’après une enquête de la Fed de Philadelphie (Manufacturing Business Outlook Survey), conduite du 8 au 15 mai dans sa circonscription, l’indice des conditions générales du secteur reste négatif pour le 9ème mois consécutif (-10,4), bien que supérieur aux attentes du marché (‑20). Les entreprises interrogées anticipent également une baisse de l’activité dans les 6 prochains mois, ainsi qu’un une hausse des prix.

 

 

Politiques macroéconomiques

 

La Maison-Blanche annonce les nominations à la Fed

La Maison-Blanche a annoncé le 12 mai plusieurs nominations à la Fed : (i) Philip Jefferson, gouverneur de la Fed depuis janvier 2022, est nommé au poste de vice-président de la Fed, poste précédemment occupé par Lael Brainard, qui assure depuis le 21 février 2023 la présidence du National Economic Council (NEC), organe rattaché à la Maison-Blanche chargé de l’analyse et de l’élaboration des politiques économiques. (ii) Adriana Kugler, actuellement administratrice et représentante des États-Unis au conseil d’administration de la Banque mondiale, est nommée gouverneure de la Fed. Elle a été professeur d’économie à Georgetown avant de rejoindre la Banque Mondiale. (iii) Lisa Cook, dont le mandat de gouverneure devait expirer le 31 janvier 2024, est nommée gouverneure pour un nouveau mandat. Ces nominations et demande de reconduction devront être approuvées par le Sénat à la majorité simple.

 

Les responsables de la Fed restent attentifs à l’évolution de la conjoncture

Au cours de la semaine, les responsables de la Fed ont réaffirmé leur détermination à faire reculer l’inflation tout en adaptant la politique monétaire à l’évolution de la conjoncture. Dans l’ensemble, ils soutiennent le maintien des taux fed funds à des niveaux élevés, voire leur relèvement pour certains, afin de lutter contre l’inflation. Certains présidents de Fed régionales comme Raphaël Bostic (Atlanta) et Thomas Barkin (Richmond) écartent tout scénario de baisse de taux et retiennent même la possibilité de poursuivre la remontée des taux si l’inflation persistait, même en cas de récession. La présidente de la Fed de Cleveland, Loretta Mester estime que la Fed pourrait conduire une politique monétaire restrictive dans la durée en raison du maintien de l’inflation à un niveau élevé qui pourrait s’expliquer par des changements structurels comme la désépargne liée au vieillissement de la population.

Au contraire, Austan Goulsbee, président de la Fed de Chicago et Philip Jefferson, gouverneur, se sont montrés plus prudents, considérant que la désinflation a été plus lente que prévu mais qu’elle est bien amorcée avec un marché du travail qui demeure résilient. Ils ont également indiqué être attentif à l’évolution du marché du crédit, notamment en lien avec les perturbations bancaires. P. Jefferson a alerté sur le risque d’un « choc de crédit » qui pourrait être plus fort qu’estimé actuellement.

 

 

Services Financiers

 

 Le vice-président de la Fed souhaite renforcer la réglementation bancaire

La Chambre et le Sénat ont auditionné le 16 et le 18 mai les régulateurs bancaires : la Fed, la FDIC (chargée de la garantie des dépôts et des résolutions), l’OCC (régulateur des national banks) et la NCUA (superviseur des établissements de crédit).

Michael Hsu, directeur par intérim de l’OCC, a regretté le manque d’action des superviseurs des banques en faillite, et souhaité un renforcement du soutien aux équipes de supervision dans l’exercice de leur pouvoir discrétionnaire à l’encontre de banques témoignant de manquements répétés. Il a également recommandé le renforcement des exigences prudentielles des grandes banques et la réforme du système de garantie des dépôts, relayant les propositions récentes de la FDIC.

Michael Barr, vice-président de la Fed chargé de la supervision, a fait part de son souhait de renforcer la régulation bancaire afin de tirer les enseignements des faillites récentes (particulièrement pour les banques de plus de 100 Md USD d’actifs), et ce sur plusieurs matières : les exigences de capitaux propres ; la prise en compte prudentielle des moins-values sur les portefeuilles des banques ; la gestion des risques de taux ; la gestion du risque de liquidité ; les règles applicables aux rémunérations des dirigeants de banques afin de renforcer les incitations à une bonne gestion des risques. Il a également signalé que la Fed prévoyait de publier cet été les conclusions de la révision des exigences de capitaux propres des banques, et la proposition de règles de finalisation de Bâle III. Ces orientations ont été dénoncées par plusieurs élus républicains, certains accusant M. Barr d’utiliser cette crise afin de poursuivre un agenda progressiste et néfaste pour le secteur bancaire.

Le 12 mai, Michelle Bowman, membre du bureau des gouverneurs de la Fed, avait évoqué la réponse politique à apporter aux faillites bancaires, et mis en garde contre toute modification importante du cadre réglementaire de la Fed, y compris un renforcement des exigences de fonds propres pour les banques.

Par ailleurs, la Fed a publié son rapport semi‑annuel sur la supervision et la régulation. La Fed revient sur l’état du système bancaire, soulignant le haut niveau de capitalisation et de liquidité des banques, mais souligne les conditions économiques incertaines, des dépôts en retrait et des moins-values significatives dans les actifs de certaines banques. Elle indique qu’elle est attentive à l’effet de la hausse des taux sur la liquidité, le crédit et la valeur des actifs des établissements qu’elle supervise.

 

Le Congrès met en cause la responsabilité des ex-dirigeants de Signature Bank et Silicon Valley Bank

Le Sénat et la Chambre ont auditionné le 16 et 17 mai les ex-dirigeants de Signature Bank et Silicon Valley Bank (SVB), qui ont fait faillite en mars. La majorité des élus a mis en cause la responsabilité des dirigeants de ces banques dans la faillite de leurs établissements, notamment l’ignorance, par SVB, des multiples alertes du superviseur, et la poursuite de stratégies risquées, privilégiant la recherche de bénéfices à court terme au détriment de la mise en place de couvertures. Plusieurs élus ont dénoncé la rémunération et les bonus acquis par les dirigeants en 2022, appelant ces derniers à reverser ces compensations à la FDIC. D’autres ont interrogé l’ex CEO de SVB sur la vente de 3,6 M USD d’actions de la banque dans les jours précédant sa faillite.

Les dirigeants de Signature Bank ont affirmé que la banque n'avait pas besoin d'être fermée, que sa situation était solvable et son bilan suffisamment liquide. Certains élus ont soutenu cette position, se demandant si la fermeture de Signature Bank n’avait pas été précipité en raison de ses activités dans le secteur des crypto-actifs.

Les élus démocrates ont particulièrement mis en exergue les lacunes de la législation bancaire et la nécessité de réforme. Les élus républicains, s’ils relèvent aussi les erreurs de gouvernance des deux banques, soulignent davantage le rôle de la conjoncture macro-économique, dommageable pour les banques, en raison de l’inflation et de la hausse des taux engagée par la Fed.

 

 

Situation des marchés

 

Au cours de la semaine écoulée (de vendredi à jeudi), l'indice S&P 500 a progressé de +1,4 %, à 4 198 points sur fonds d’apaisement des inquiétudes liées à l’absence d’accord sur le relèvement du plafond de dette. L’indice KBW des 30 plus grandes banques américaines a progressé de +5,3 % sur la semaine.

Compte tenu des annonces des responsables de la Fed, excluant la possibilité d’une baisse des taux mais n’excluant pas une poursuite du resserrement, le rendement des obligations souveraines (Treasuries) à 2 ans a augmenté de +0,4 point, à 4,3 % et celui à 10 ans a augmenté de +0,3 point à 3,7 %. Par ailleurs, l’espoir d’un accord bipartisan sur le plafond de dette a contribué à la baisse du taux des Treasuries à 1 mois (de -0,4 points, à 5,4 %).

 

 

Brèves