L’hélium est une matière première critique pour certaines industries dont la production est concentrée essentiellement aux Etats-Unis et au Qatar. Son approvisionnement et ses prix sont sous tension depuis le début de 2022. Le Qatar est un producteur important d’hélium dont l’importance est amenée à se renforcer vu les investissements programmés.

1) L’hélium est une matière première critique pour certaines industries dont la production est concentrée essentiellement aux Etats-Unis et au Qatar. Son approvisionnement et ses prix sont sous tension depuis le début de 2022.

L’hélium est utilisé de façon croissante dans les secteurs électroniques, médicaux et spatiaux, notamment comme vecteur de refroidissement (par exemple pour les aimants supraconducteurs pour l’imagerie médicale ou l’oxygène ou hydrogène dans des véhicules spatiaux) et comme substance protectrice vu sa faible réactivité (fabrication de fibres optiques et de semi-conducteurs).

La synthèse de l’hélium, techniquement possible, n’est pas une méthode économiquement viable de production : l’hélium est aujourd’hui essentiellement un sous-produit valorisé lors de l’extraction de gaz naturel et de sa liquéfaction.  Les principales réserves d’hélium sur terre sont situées dans des pays riches en gaz naturel mais sa production est concentrée dans une minorité de pays qui ont développé les infrastructures nécessaires pour valoriser cet atome : la production d’hélium (160 M m3 dans le monde en 2022) est donc concentrée dans un petit nombre de pays : notamment les États-Unis (47%), le Qatar (38%), l’Algérie (6%), la Russie (3%) et l’Australie (3%).

Les particularités chimiques de l’hélium complexifient le transport et le stockage de cet atome. L’hélium, une fois extrait, doit être liquéfié à -269°C avant d’être transporté dans des conteneurs appropriés. Le gaz doit arriver à destination en moins de 60 jours, avant déperdition d’hélium.  En l’absence de réelle réserve stratégique depuis la privatisation du gisement de Cliffside aux Etats-Unis, les prix de l’hélium sont particulièrement volatiles, ce qui incite les producteurs (comme Qatar Energy) et les fournisseurs de gaz industriels à signer des contrats de long-terme afin de lisser ces évolutions.

Les marchés de l’hélium sont sous tension depuis le début de 2022. Quatre des cinq principaux fournisseurs d'hélium, ont mis en place des rationnements d'approvisionnement pour leurs clients long-terme en fonction de la criticité de l’hélium pour les applications. Les prix de l'hélium ont également fortement augmenté (entre +50 à 100 %).

Ces tensions s’expliquent en grande partie par les délais rencontrés par Gazprom pour la mise en activité de ses sites de production de gaz en Sibérie. Les gaz résiduaires de l'usine de traitement du gaz d'Amour sont en effet riches en hélium et constituaient théoriquement un gaz d'alimentation idéal pour une usine de purification et de liquéfaction d'hélium. À pleine capacité, l'usine de l'Amour a théoriquement le potentiel de produire le tiers de la capacité mondiale actuelle mais une explosion en janvier 2022 et la guerre en Ukraine ont repoussé jusqu’ici la mise en œuvre de cette infrastructure. A ce stade, aucune sanction spécifique ne s’applique sur la commercialisation hélium mais les contraintes existantes complexifieraient le transport du gaz, déjà complexe logistiquement. En l’absence des nouveaux volumes russes disponibles, les prix de l’hélium pourraient rester élevés.

 

2) Le Qatar est un producteur important d’hélium dont l’importance est amenée à se renforcer vu les investissements programmés dans la production de gaz naturel.

La production qatarienne d’hélium est issue du gaz provenant du gisement North Field. Certes, l’hélium ne constitue que 0,04% du gaz extrait mais sa valorisation est rentable économiquement au vu des immenses volumes de gaz extraits et liquéfiés.

Théoriquement, le Qatar pourrait doubler sa production d’hélium (60 M m3 en 2022) d’ici la fin de la décennie. Une première usine d’extraction, Helium I, d’une capacité de 19 M de m3/an, est en activité depuis 2005. En 2013, a démarré l’exploitation d’une nouvelle unité de 38 M de m3/an. L’unité de production Helium III, d’une capacité théorique de 11 M de m3/an rencontre par contre de nombreuses difficultés et peine pour l’instant à fournir des volumes importants d’hélium. Par ailleurs, l’augmentation des capacités de production de gaz dans le cadre des projets North Field East et North Field South implique une forte progression de la production connexe d’hélium et se traduit d’ores et déjà par le lancement par Qatar Energy des projets Helium IV (38 M de m3 d’ici 2027) et Helium V (volumes encore incertains).

Le Ministre de l’Energie Saad Al-Kaabi a annoncé en février 2023 l’absorption par QatarEnergy des activités commerciales et de marketing de Qatargas, historiquement responsable de la commercialisation de l’hélium et du GNL.