Les échanges commerciaux de l’Inde avec le reste du monde ont augmenté en 2022 de 21,4% à 1176 Mds USD selon les données publiées par le ministère du commerce et de l’industrie indien. Porté par un effet de base favorable après la reprise post-Covid de 2021, les exportations ont augmenté de 14,4% pour atteindre 453 Mds USD. Les importations ont augmenté de 26% à 723 Mds USD, portées par la hausse des importations d’hydrocarbures, en provenance de Russie notamment (+600% en valeur), et par une dépendance toujours forte aux biens manufacturés chinois. Le solde déficitaire de la balance commerciale indienne s’est mécaniquement creusé de 55% en glissement annuel, de 177 à 270 Mds USD entre 2021 et 2022. Les Etats-Unis conservent leur place de premier partenaire commercial de l’Inde (11% de ses échanges), suivi de la Chine (10%), et des Émirats Arabes Unis (7,2%). Le déficit bilatéral du pays avec la Chine se creuse encore, à 87 Mds USD.

Dans le prolongement de 2021, les exportations atteignent un pic historique corrélé à l’augmentation des prix

Après avoir augmenté de 43% pour s’établir à 396 Mds USD en 2021 – un plus haut historique soulignant la reprise post covid – les exportations indiennes de biens ont augmenté de 14,4%, à 453 Mds USD, en 2022. Cette croissance s’explique largement par la dérive des prix, compte tenu d’une inflation élevée en 2022.

Les exportations de produits pétroliers raffinés progressent de manière très dynamique ; elles enregistrent une augmentation de 74%, à 98 Mds USD contre 56 Mds en 2021 et constituent désormais le premier poste d’exportation du pays à 21% du total. Les autres postes obéissent à la distribution de 2021, le commerce des pierres et métaux précieux (+8,67%) et celui des machines et chaudières (+6%) constituant les premiers. Par ailleurs, les exportations de fer et d’acier enregistrent une baisse de 6 Mds USD, en raison du ralentissement du cycle économique dans le reste du monde et particulièrement en Chine.

Les Etats-Unis restent le premier client de l’Inde (17,6% de ses exportations) tandis que les Emirats Arabes Unis consolident leur seconde place (6,9%) devant les Pays-Bas (4,1%), qui constituent un des principaux points d’entrée des hydrocarbures dans l’UE. La Chine recule à la 4ème place et ne représente que 3,3% des exportations indiennes.

Les dix principaux clients de l’Inde ont accru leurs achats dans des proportions importantes (à l’exception de la Chine et du Bangladesh, dont les importations se contractent respectivement de 34% et 5%). En outre, on observe que la Turquie (2,2%) a plus que doublé ses importations de pétrole indien. La France, avec des achats de 9 Mds USD[1] (+34% par rapport à 2021) se classe au 19ème rang des clients de l’Inde avec 1,76% de part de marché et gagne trois places par rapport à l’année dernière.

En relation avec la situation économique dégradée des pays de la zone, les exportations de biens indiens vers l’Asie du Sud poursuivent leur tendance baissière. La zone ne représente plus que 7% des exportations indiennes (contre 8% en 2021).

La dépendance aux biens chinois et les achats d’hydrocarbures augmentent les importations

Les importations ont augmenté de 26% de 573 à 723 Mds USD entre 2021 et 2022, et atteignent un niveau bien supérieur à celui qui prévalait avant la pandémie (+48% par rapport à 2019). Les dix premiers postes d’importation, qui représentent plus de 80% du total, affichent tous une augmentation en valeur. Sans surprise, les importations de produits pétroliers augmentent drastiquement atteignant 265 Mds USD contre 170 en 2021 et représentent 36,6% du total.

En dépit des mesures de restriction visant ses produits, la Chine reste le principal fournisseur de l’Inde, avec une part de marché qui s’infléchit de 15,3% à 14,2% sous l’effet du renchérissement des importations d’hydrocarbures. Malgré la volonté affichée par les autorités indiennes de réduire la dépendance du pays, les importations en provenance de Chine enregistrent un niveau record de 100 Mds USD en 2022 (contre 68 Mds USD en 2019). Cette dépendance est imputable aux achats d’équipements électriques et électroniques, de machines et chaudières, qui représentent 7% du total des importations indiennes.

Les importations en provenance de Russie, constituées à 80% de produits pétroliers, augmentent de 330%, en raison du quintuplement des livraisons de pétrole, dont la Russie est devenue le premier fournisseur de l’Inde, à 26% du total en fin d’année. Les autres pays fournisseurs de produits pétroliers tels que l’Irak et l’Arabie Saoudite voient également leurs exportations vers l’Inde s’accroître de manière significative de 44% et 61% respectivement en valeur et 28% et 53% en volume. Malgré la hausse constante des livraisons russes tout au long de l’année, l’Irak reste le premier fournisseur d’hydrocarbures de l’Inde (36 Mds USD) en 2022.

La France est le 29ème fournisseur de l’Inde avec une part de marché diminuant tendanciellement, à 0,7% en 2022 contre 0,9% en 2021 et 1,3% en 2019.

Le creusement du déficit de la balance commerciale indienne est compensé en partie par l’excédent des services

Le déficit de la balance commerciale indienne augmente de 52,5%, de 177 à 270 Mds USD entre 2021 et 2022, avec un taux de couverture revenant de 69% à 62,5%, son plus bas niveau depuis 2012.

Le recul est sensible pour deux des trois principaux soldes déficitaires de la balance des biens indiens. Le déficit des produits pétroliers augmente de 46,5% pour atteindre 167 Mds USD en 2022. Le déficit des pierres et métaux précieux se réduit de 28% mais reste un facteur important de déséquilibre. Enfin, le déficit des équipements électriques et électroniques augmente de 14,8% et atteint 43,5 Mds USD en 2022.

La Chine reste le premier déficit commercial bilatéral de l’Inde, à hauteur de 87,5 Mds USD, contre 64 Mds USD en 2021. Le taux de couverture bilatéral se dégrade de près de douze points de pourcentage et passe en dessous de 15%.

La balance commerciale reste structurellement déficitaire pour les échanges de marchandises, mais est en partie contrebalancée par l’excédent de celle des services à 129 Mds USD en 2022, grâce à une hausse de 30% des exportations à 307 Mds USD.

Les échanges de biens et services s’élèvent à 1661 Mds USD en 2022, dont 901 Mds pour les importations et 761 Mds USD pour les exportations, induisant un déficit de 140 Mds USD en 2022.

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Les objectifs définis par la doctrine Atmanirbhar Bharat (Inde autonome), qui impliquent une réduction des importations et une augmentation des exportations, à 1000 Mds USD d’ici 2030, paraissent difficiles à atteindre. L’Inde reste très dépendante de la Chine, second partenaire commercial après les Etats-Unis mais premier déficit bilatéral, en dépit de mesures de restrictions à l’accès au marché indien pour les produits chinois.

La relation commerciale avec la Russie se renforce, l’Inde ayant tiré parti des sanctions prises à l’encontre de la Russie pour augmenter ses importations de pétrole brut en 2022, et se positionner comme un fournisseur de produits raffinés vers l’Europe. L’interdiction prise par l’UE en février sur les produits raffinés russes devrait encore renforcer cet effet d’aubaine.



[1] Pétrole, machines et chaudières, équipements électriques, produits pharmaceutiques en sont à l’origine.