Publication du Service économique régional d’Abuja, réalisée avec les contributions des SE de Lagos et d’Accra.

Faits saillants:

- Nigéria : L’agence de notation Moody’s dégrade la note souveraine du Nigéria ; La mise en circulation des nouveaux billets aurait permis de récupérer 1 900 Md NGN (4,1 Md USD) qui circulaient en dehors du système bancaire ; En raison de la pénurie de billets, certains Nigérians privilégient désormais le franc CFA ; La valorisation de Nollywood atteint 6,4 Md USD, seconde industrie du film derrière Hollywood.

 

- Ghana : Le programme de restructuration de la dette domestique du Ghana en bonne voie ; L'insécurité alimentaire est concentrée dans les cinq régions du nord du Ghana.

Le chiffre à retenir:

1,6 Md USD C’est le montant des encours d’émissions d’obligations islamiques, les sukuk, faisant du Nigéria le plus grand marché d’Afrique pour ces produits financiers. 

  

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Nigéria

L’agence de notation Moody’s dégrade la note souveraine du Nigéria

L’agence de notation financière américaine Moody’s a annoncé le 27 janvier qu’elle dégradait de la note souveraine du Nigéria de B3 à Caa1. Les obligations d’Etat, émises en monnaies locales ou en devises, sont désormais jugées comme de faible qualité et avec un risque élevé de défaut. Les perspectives sont toutefois stables. Cet abaissement de la note est justifié par la détérioration de l’état des finances publiques et l’augmentation de la dette. En effet, le coût de la subvention à l’essence, la chute de la production pétrolière et la hausse des taux d’intérêt risquent de creuser les déficits et de réduire la capacité de l’Etat à investir. D’après leurs prévisions, le service de la dette pourrait engloutir la moitié des recettes publiques à moyen terme tandis que le ratio de dette sur PIB pourrait atteindre 45%. La Ministre des finances a fait part de sa surprise quant à cette dégradation, soulignant les efforts faits par le NigériaEn réaction à ces annonces, les marchés financiers ont sanctionné le Nigéria. Les obligations Eurobonds émises en dollars, et avec pour maturité 2051, ont vu leur valeur diminuer de 2,8%.

La mise en circulation des nouveaux billets aurait permis de récupérer 1 900 Md NGN (4,1 Md USD) qui circulaient en dehors du système bancaire

Mi-décembre, la Banque centrale du Nigéria (Central Bank of Nigeria, CBN) a annoncé le rappel des anciens billets anciens billets de 1 000, 500 et 200 nairas et la mise en circulation de nouvelles coupures. D’après la CBN, cette mesure vise à lutter contre les moyens de paiement contrefaits et à réduire l’excès de liquidité, afin d’améliorer l’efficacité des politiques monétaires. Entre 2015 et 2022, la quantité de monnaie en circulation est passée de 1 400 Md NGN à 3 230 Md NGN. Le Gouverneur de la CBN a souligné que seuls 500 Md NGN (1,1 Md USD) circulaient dans le système bancaire, contre 2 700 Md NGN (6 Md USD) en dehors. Depuis, la CBN aurait récupéré 1 900 NGN (4,2 Md USD), réduisant à 800 Md NGN (1,7 Md USD) la quantité de monnaie circulant en dehors du système bancaire.

Si le Gouverneur de la CBN se félicite de cette mesure, sa mise en œuvre soulève toutefois quelques difficultés. Il est parfois difficile d’avoir accès aux nouveaux billets, et depuis la fin du mois de janvier les files d’attente de personnes cherchant à changer leurs anciennes coupures se sont formées devant les banques. Initialement prévue au 31 janvier, la date butoir de fin de validité des anciens billets a été repoussée au 10 février, avec une période de grâce supplémentaire de sept jours. Le manque de nouveaux billets fait peser un risque sur les micro-entreprises et les ménages les plus pauvres qui dépendent de l’argent liquide.

En raison de la pénurie de billets, certains Nigérians privilégient désormais le franc CFA

Malgré le report de la date de validité des anciens billets, la pénurie d’argent liquide se poursuit. Les files d’attente se multiplient à travers le pays devant les guichets de banques, tant et si bien que face à cette situation, certains habitants des régions frontalières du Niger (Etats de Sokoto, de Zamfara et de Katsina) et du Bénin (l’Etat de Kwara) optent désormais pour le franc CFA. En raison de la rareté des billets et de la dévaluation de la naira, certains commerçants n’acceptent désormais plus que cette monnaie. Par ailleurs, l’absence de distributeurs dans certaines régions reculées accroît la difficulté d’accès aux nouveaux billets. Dans l’Etat d’Adamawa, à l’Est du pays, certains agents économiques privilégient désormais les Francs CFA camerounais.

La valorisation de Nollywood atteint 6,4 Md USD, seconde industrie du film derrière Hollywood 

Nollywood est une des industries culturelles et créatives qui connaît la croissance la plus forte au monde. En 2022, la valorisation de Nollywood a dépassé les 6,4 Md USD, contre 3,6 Md USD il y a dix ans, soit une croissance de 56%. Entre 2017 et 2021, le nombre de films produits par an a été multiplié par trois, passant de 450 à 1 051, avec un pic à 2 599 en 2020. Grâce à une meilleure structuration de l’industrie et à la lutte contre le piratage, la rentabilité du secteur s’est largement améliorée. En 2022, les salles de cinéma nigérianes ont ainsi généré 15 M USD, soit 50% de plus qu’il y a cinq ans.

En outre, le dynamisme du secteur attire les investisseurs étrangers. Entre 2016 et 2022, Netflix a investi 40 M USD dans du contenu nigérian. En 2022, son concurrent Amazone Prime a fait son entrée sur le marché. Les studios de production américains ont signé un contrat de 50 M USD avec le nigérian LaVida Studio. Cet engouement pousse les acteurs locaux à développer du contenu exportable hors d’Afrique. C’est notamment l’ambition d’EbonyLife Creative Academy, dont l’ambition est de former les jeunes professionnels de Nollywood à l’internationalisation. Inaugurée en 2021 par le Gouverneur Sanwo-Olu et Mo Abudu, la directrice générale du groupe de média EbonyLife, l’académie propose des formations gratuites entièrement financées par l’Etat de Lagos. Devant le potentiel de croissance et de création d’emploi que renferme le secteur, les autorités publiques cherchent en effet à se positionner. Pour rappel, l’industrie cinématographique contribue à hauteur de 1,4% au PIB et emploie plus d’un million de personnes, ce qui en fait l’un des premiers employeurs du pays.  

Ghana

Le programme de restructuration de la dette domestique du Ghana en bonne voie

Selon le gouvernement du Ghana, des progrès significatifs avec toutes les parties prenantes, y compris les associations du secteur financier et les groupes représentatifs d'obligataires individuels, ont été réalisés au titre du Programme d'échange de la dette intérieure (DDEP). Le gouvernement a ainsi annoncé que sur la base de l'accord conclu avec la Ghana Association of Banks (GAB), la Ghana Insurers Association (GIA) et la Ghana Securities Industry Association (GSIA), le protocole d'échange d’obligations était sur le point d’aboutir.  Pour ce faire, le délai d’adhésion au programme a été repoussé du 31 janvier au 7 février 2023. En parallèle, le gouvernement fait appel aux bailleurs multilatéraux et bilatéraux pour abonder le fonds de stabilité financière accompagnant ce programme, et pour lequel la Banque mondiale aurait indiqué vouloir abonder à hauteur de 300 M USD.

L'insécurité alimentaire est concentrée dans les cinq régions du nord du Ghana

L'insécurité alimentaire est concentrée dans les cinq régions du nord du pays, où le pourcentage de population qu’elle frappe peut avoisiner les 50% à la frontière avec le Burkina Faso : Upper East (48,7%),  North East (33%), Northern (30,7%), Upper West (22,8%) et Savannah (22,6%). Telles sont les conclusions du rapport sur la sécurité et la vulnérabilité alimentaires, élaboré par le Service statistique du Ghana (GSS) en collaboration avec le ministère de l'Alimentation et de l'Agriculture (MOFA) et avec l'assistance financière et technique du Programme alimentaire mondial et de l’Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture de l’ONU. Les régions dans lesquelles le niveau d'insécurité alimentaire est le plus élevé sont également les zones les plus sujettes aux conditions météorologiques défavorables, telles que les inondations et la sécheresse. Ces régions sont aussi touchées de manière disproportionnée par l’inflation alimentaire, notamment lors de ces épisodes climatiques.