Edito

Un rapport de la Banque Asiatique de Développement publié en 2016 chiffrait les besoins d’investissement en infrastructures dans la zone Asie du sud à 7,6% du PIB de la zone, soit plus que la moyenne de la zone Asie Pacifique, dont les besoins étaient de 5% et davantage que les pays de l’ASEAN, dont les besoins s’inscrivaient à 4%, tout en ne menaçant pas leur solde courant, structurellement excédentaire, contrairement aux pays d’Asie du Sud. Ces derniers ne brillent pas davantage par la qualité des infrastructures, si l’on en juge d’après le classement du Forum économique mondial, qui place le Sri Lanka et l’Inde respectivement à la 61ème et 70ème place, loin devant le Pakistan (105ème ), le Népal (112ème) et le Bangladesh (115ème).

La faiblesse de l’investissement en infrastructure de la zone, préjudiciable à la dynamique de croissance à long terme, trouve sa source sur le plan financier dans une épargne domestique structurellement insuffisante par rapport aux besoins de financement à long terme, dans une activité bancaire cantonnée à des financements de besoin en fonds de roulement et dans des marchés obligataires embryonnaires, notamment pour ce qui concerne les émissions des entreprises du secteur privé non financier (corporates).

Dans ce contexte, le financement interne des infrastructures est dévolu à l’Etat, dont les moyens budgétaires limités, faute d’assiettes fiscales larges, achoppent très rapidement sur l’incapacité à mener durablement des politiques budgétaires actives, sous peine de devenir rapidement hors de contrôle, compte tenu de leur association à des déficits courants, faute d’une épargne domestique suffisante pour financer les déficits budgétaires. De même, les déficits courants structurels dans tous les pays de la zone limitent dans les faits la capacité des bailleurs internationaux, tant bilatéraux que multilatéraux, à financer le déficit d’investissements en infrastructures, sous peine de compromettre la soutenabilité des équilibres externes. Certains pays de la zone, comme le Sri Lanka, en ont fait les frais, récemment, dans un contexte de retournement des marchés de capitaux internationaux.

Les risques climatiques, illustrés l’été dernier par les inondations ayant affecté le tiers de l’appareil productif pakistanais, illustrent par ailleurs la nécessité pour les pays d’Asie du Sud de disposer d’infrastructures résilientes à ces risques, engendrant ainsi des contraintes de financement supplémentaires. La nouvelle facilité du FMI, au titre de la résilience et de la soutenabilité, dont devrait bénéficier le Bangladesh au cours des prochains mois, vise à répondre à ces risques, mais elle ne saurait se substituer à des réformes de structure en mesure de mieux formaliser l’épargne des agents, d’en allonger la maturité et de l’allouer aux besoins de financement à long terme de l’économie. 

 

Benoit GAUTHIER

Chef du service économique régional de New Delhi

Benoit.gauthier@dgtresor.gouv.fr