Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

  • Les tensions sur le marché du travail persistent

Politiques macroéconomiques

  • La Chambre des représentants adopte la loi annuelle de financement de la défense

Services financiers

  • La Fed propose un cadre de gestion des risques financiers liés au climat pour les grandes banques
  • Le gestionnaire d’actifs Vanguard quitte l’alliance financière internationale pour la neutralité carbone
  • Plusieurs élus républicains reprochent aux grands gestionnaires d’actifs de promouvoir des objectifs ESG

Situation des marchés

Brèves

 

Conjoncture

 Les tensions sur le marché du travail persistent

Le rapport mensuel du Bureau of Labor Statistics (BLS) sur la situation de l’emploi, publié le 2 décembre, fait état de 263 000 créations nettes d’emplois en novembre (après 284 000 postes créés en octobre et 269 000 en septembre), soit un niveau supérieur aux attentes du marché (200 000). Néanmoins, le nombre de créations d’emplois des deux derniers mois a été révisé à la baisse (‑46 000 en septembre et +23 000 en octobre).

Les emplois créés sont concentrés principalement dans les secteurs des loisirs et du tourisme (+88 000), les soins de santé (+45 000), ainsi que l’administration publique (+42 000). Les emplois ont diminué dans le commerce de détail (-30 000) et dans le transport et l’entreposage (‑15 000).

En novembre, le taux d’activité continue de reculer sur 3 mois consécutifs, à 62,1 % (-0,1 point par mois depuis le pic de 62,4 % atteint en août).  Le taux de chômage, quant à lui, s’est établi à 3,7 % en novembre (stable par rapport à octobre) proche de son niveau d’avant-crise (3,5 % en février 2020) et en-deçà de son niveau de long‑terme estimé à 4,0 % par la Fed.

Enfin, le salaire horaire moyen a progressé de +0,6 % en novembre après +0,5 % en octobre mais il a ralenti à +5,1 % en glissement annuel (après +5,6 % en octobre).

 

 

Politiques macroéconomiques

 La Chambre des représentants adopte la loi annuelle de financement de la défense

La Chambre des représentants a adopté le 8 décembre la loi d’autorisation du financement de la défense (National Defense Authorization Act – NDAA) pour 2023.  Le texte de loi, publié la veille par les commissions de la Chambre et du Sénat, est issu d’un accord bipartisan et bicaméral.

La loi prévoit 857 Md USD de dépenses, dont 816,7 Md USD pour le département de la Défense, 30,3 Md USD pour le programme nucléaire du département de l’Énergie (DoE) et 10,6 Md USD de dépense diverses. Le niveau autorisé est supérieur de 45 Md USD à la demande de la Maison-Blanche afin notamment de prendre en compte l’impact de l’inflation sur les achats de matériels (à hauteur de 12,6 Md USD), les projets de constructions (3,8 Md USD) et les achats de carburants (2,5 Md USD).

Au cours des discussions au Congrès, certaines dispositions ont été retirées, comme l’accès aux services bancaires pour l’industrie du cannabis, des dispositifs visant à aider les petites entreprises de presse à négocier leur rémunération avec les grandes plateformes de réseaux sociaux, et la proposition du sénateur Joe Manchin (D-Viriginie Occidentale) visant à accélérer le processus d’octroi des autorisations des projets de développement énergétique. Par ailleurs, conformément à la demande des Républicains, l’obligation vaccinale du personnel militaire a été abrogée.

Pour mémoire, la NDAA est une loi de programmation. Les crédits correspondants doivent faire l’objet d’un vote dans le cadre du budget annuel 2023 en cours de négociations au Congrès.

 

 

Services financiers

 La Fed propose un cadre de gestion des risques financiers liés au climat pour les grandes banques

La Fed a ouvert le 2 décembre une consultation sur un ensemble de principes relatifs à la gestion des risques financiers climatiques qui s’imposeraient aux banques détenant plus de 100 Md USD d’actifs. Les gouverneurs Michelle Bowman et Christopher Waller ont exprimé leur scepticisme, C. Waller ayant voté contre la proposition. Ce cadre s’inscrit dans la lignée de propositions similaires faites par la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC, autorité de résolution bancaire) en mars, et l’Office of the Comptroller of Currency (OCC – régulateur des national banks), en décembre 2021.

Les banques seraient tenues de prendre en compte les risques liés au climat dans leur gouvernance, leur planification stratégique, leurs procédures internes et leur gestion des données. Elles devraient également développer des analyses fondées sur des scénarios climatiques et intégrer les risques spécifiquement climatiques dans leur évaluation des risques de crédit, de liquidité, opérationnels, et de non-conformité.

Le gestionnaire d’actifs Vanguard quitte l’alliance financière internationale pour la neutralité carbone

Vanguard, le deuxième gestionnaire d’actifs au monde (7 100 Md USD d’actifs sous gestion) a annoncé le 7 décembre son retrait de la Net Zero Asset Managers Initiative (NZAMI). Cette initiative internationale des gestionnaires d’actifs est intégrée à la coalition financière pour la neutralité carbone (Glasgow Financial Alliance for Net Zero - GFANZ), lancée fin 2020 dans le contexte de la COP26 de Glasgow, avec pour objectif de coordonner les actions du secteur financier en vue d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Vanguard justifie sa décision par un souci de clarté vis-à-vis de ses clients quant à son indépendance et au rôle de ses fonds indiciels ; le gestionnaire d’actifs est le premier acteur financier de cette importance à quitter la GFANZ, qui rassemble près de 550 membres.

 

Plusieurs élus républicains reprochent aux grands gestionnaires d’actifs de promouvoir des objectifs ESG

Le 6 décembre, les élus républicains de la commission pour les affaires bancaires du Sénat ont publié un rapport dénonçant l’influence et la poursuite d’un programme politique progressiste par les trois gestionnaires d’actifs majeurs (« Big Three » - BlackRock, State Street, Vanguard), au moyen des droits de vote attachés à leurs portefeuilles d’investissement.

Le rapport revient d’abord sur l’influence du Big Three permise par l’essor de la gestion indicielle : en cumulé, ces trois sociétés gèrent près de 20 000 Md USD d’actifs et représenteraient 25 % des votes aux sein des assemblées d’actionnaires des entreprises du S&P 500 (500 plus grandes sociétés cotées sur les bourses aux États-Unis) ; selon les auteurs, ce chiffre pourrait atteindre 40 % dans les vingt prochaines années.

Les sénateurs reprochent aux gestionnaires d’actifs d’utiliser cette influence afin de promouvoir des pratiques et objectifs ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) et DEI (diversité, équité et inclusion) au sein des sociétés de leur portefeuille. Ils recommandent des investigations du Congrès sur le sujet et appellent à redéfinir la notion de contrôle actionnarial ainsi que les règles applicables aux franchissements de seuil, afin de mieux appréhender les intentions des gestionnaires.

Le 7 décembre, le Sénat de l’État du Texas, à majorité républicaine, a envoyé au gestionnaire d’actifs BlackRock une injonction à comparaitre et à transmettre des documents relatifs à ses décisions d’investissement en matière ESG, en vue d’une audition du 15 décembre. La convocation vise également State Street, Vanguard et l’agence de conseil en vote Institutional Shareholder Services (ISS). 

Enfin, le Chief Financial Officer (chargé des comptes publics) républicain de l’État de Floride a annoncé dans un communiqué le retrait des fonds publics de l’État placés auprès de BlackRock, -représentant 2 Md USD-. Il dénonce la poursuite d’objectifs d’investissement ESG par le gestionnaire, qui se ferait au détriment du retour sur investissement pour ses investisseurs.

 

 

Situation des marchés

 

Sur la période écoulée depuis le dernier Wall Street Watch (vendredi à jeudi), l’indice S&P 500 a reculé de -1,9 %, à 3 964 sur fond de craintes d’un resserrement monétaire plus soutenu qu’escompté en raison d’un marché du travail robuste et d’une récession qui pourrait en découler.

Alors que le taux fed funds se rapprocherait de son taux terminal, le rendement des obligations d’État américaines (Treasuries) à 2 ans est resté stable sur 5 jours à 4,3 % et celui des Treasuries à 10 ans a légèrement reculé à 3,5 % (‑0,1 point). La volatilité implicite sur le marché des Treasuries (MOVE Index) reste stable (130 le 8 décembre contre 150 en octobre et 50 en moyenne annuelle 2021).

 

 

Brèves          

 

--Les indices PMI du secteur des services, publiés le 5 décembre par l’Institute for Supply Management (ISM), ont rebondi à 56,5 en novembre contre 54,4 en octobre et 53,7 attendu par les marchés. Ce rebond est tiré par la hausse de la production même si les commandes nouvelles et existantes ralentissent. Cette surprise à la hausse contraste avec la baisse des indices du secteur manufacturier publié le 1er décembre.

--La Fed de Chicago a annoncé la nomination d’Austan Goolsbee au poste de président à compter du 9 janvier 2023. Il succédera ainsi à Charles Evans, qui a annoncé son départ en retraite dans le courant de janvier 2023. Sur la base de la rotation annuelle, A. Goolsbee sera membre votant de la réunion du comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) en 2023, et assurera la présidence de la Fed de Chicago jusqu’au 28 février 2026.

--Blackstone, premier gestionnaire américain de capital-investissement (950 Md USD d’actifs sous gestion), a annoncé le 5 décembre que son fonds Blackstone Private Credit Fund (50 Md USD d’actifs), investi majoritairement en dette non cotée, avait enregistré ces derniers mois un volume de rachats supérieur à 5 % des parts. Le fonds a précisé qu’il disposait de suffisamment d’actifs liquides pour honorer ces demandes. Par ailleurs, Blackstone a annoncé qu’il limitait les retraits sur son fonds immobilier non coté (Blackstone Real Estate Income Trust – 69 Md USD d’actifs nets) après avoir reçu un volume élevé de demandes de rachat. Selon certains observateurs, ces rachats seraient liés à des inquiétudes quant à la valorisation du fonds et à un retrait d’investisseurs confrontés à des appels de marge sur les marchés asiatiques. Le cours de l’action Blackstone a perdu 13 % depuis le début du mois de décembre.

--Circle, émetteur du stablecoin USDC (43 Md USD d’encours), a indiqué le 5 décembre qu’il renonçait à son projet d’introduction en bourse, initialement prévu via une fusion avec la Special Purpose Acquisition Company (SPAC) Concord Acquisition. Le CEO de Circle Jeremy Allaire a néanmoins précisé qu’une introduction en bourse restait son objectif à terme.

--Sherrod Brown, président de la commission des affaires bancaires du Sénat, ainsi que plusieurs sénateurs démocrates, ont déposé le 6 décembre la proposition de loi Close the Shadow Banking Loophole Act visant à renforcer la réglementation applicable aux industrial loan companies (ILC). Les ILC sont des sociétés dont l’agrément permet d’exercer certains services bancaires sans être soumis à la même régulation ni à la même supervision que les banques. Ce régime est utilisé notamment par le groupe de paiement Block (ex-Square).

--Dans le cadre d’une enquête menée au sujet de la plateforme de crypto-actifs Nexo, le Bureau de protection des consommateurs de services financiers (CFPB) a indiqué le 22 novembre qu’il s’estimait compétent pour évaluer les pratiques sur le marché des prêts de crypto-actifs. Nexo avait déposé un recours remettant un cause la compétence du CFPB sur ce marché.

--L’Office of the Comptroller of the Currency (OCC), régulateur des national banks, a publié le 8 décembre son rapport semestriel sur les risques pesant sur le système bancaire. L’OCC estime que le niveau de capitalisation des banques reste satisfaisant et que le risque de crédit des portefeuilles de prêts demeure modéré, même si certains signes de fragilité apparaissent sur certains segments (immobilier commercial). Le rapport met par ailleurs l’accent sur les risques opérationnels, en particulier cyber, supportés par les banques.

--Le 8 décembre, les services de la Securities and Exchange commission (SEC), l’autorité des marchés financiers, ont appelé les sociétés soumises à des obligations déclaratives à évaluer leur exposition aux crypto-actifs et aux plateformes de crypto-actifs en faillite, ainsi que les risques associés à ces expositions. Certaines sociétés recevront des requêtes spécifiques de la SEC leur demandant de rendre publiques ces expositions.