Publication du Service économique régional d’Abuja, réalisée avec les contributions des SE de Lagos et d’Accra.

Faits saillants:

- Nigéria : La Banque centrale du Nigéria annonce l’émission d’une nouvelle version de ses billets ; L’agence de notation Moody’s dégrade la notation souveraine du Nigéria ; La dernière version du Jollof Rice Index souligne l’augmentation continue des prix alimentaires ; La BAD, le FIDA et la BID lancent un programme de 520 M USD pour développer des zones spéciales de transformation agro-indusrielle au Nigéria.

 

- Ghana : Le Ghana Union of Traders’ Association a appelé à fermer les magasins et marchés trois jours pour protester contre la vie chère et l’inflation ; La crise financière conduit la Banque du Ghana et le gouvernement à une série de consultations visant à freiner la dépréciation rapide du cedi ghanéen.

Le chiffre à retenir:

8 Md NGN C’est le montant total des transactions effectuées en e-Naira en un an, soit environ 12 M USD pour 700 000 transactions comptabilisées. 

  

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Nigéria

La Banque centrale du Nigéria annonce l’émission d’une nouvelle version de ses billets  

Le gouverneur de la Banque centrale du Nigéria, a annoncé le 26 octobre, l’émission d’une nouvelle version des billets de 100, 200, 500 et 1 000 Nairas à partir du 15 décembre. Ces billets remplaceront progressivement les précédents qui cesseront d’être valables à compter du 31 janvier 2023.

L’objectif de l’opération, selon la CBN, est d’une part de contrôler la monnaie en circulation et d’autre part de diminuer le nombre de billets contrefaits. Cette mesure permettra également de lutter contre le terrorisme et le banditisme qui se financent en partie grâce aux rançons demandées lors d’enlèvements.

Selon la Banque centrale, la quantité de liquidités hors du réseau bancaire a augmenté de 133% entre 2015 et août 2022, de 1 150 Md NGN à 2 680 Md aujourd’hui. Avec cette nouvelle émission, nécessitant de déposer ses anciens billets sur un compte en banque pour en recevoir de nouveaux, les autorités espèrent réduire la quantité d’argent en circulation en augmentant les dépôts en banques. De plus, la quantité de Nairas disponibles sur le marché des changes parallèle devrait également diminuer, ce qui pourrait freiner son rythme de dévaluation par rapport au dollar à moyen terme. Enfin, en réduisant la quantité de monnaie en circulation, la Banque centrale espère favoriser l’utilisation de la e-Naira, sa cryptomonnaie introduite il y a un an. Pour rappel, seulement 64% de la population a accès à des services bancaires au Nigéria.

L’agence de notation Moody’s dégrade la notation souveraine du Nigéria

L’agence de notation américaine a décidé de diminuer la note souveraine du Nigéria de B2 à B3 sur sa dette à long terme en devises et en Naira. Par ailleurs, le Nigéria est également placé sous surveillance dans l’hypothèse d’une nouvelle dégradation si aucune amélioration n’est observée.

Les raisons invoquées par Moody’s pour justifier cet abaissement sont la dégradation des finances publiques et de la position extérieure du Nigéria. Outre la chute de la production pétrolière, c’est la mauvaise gouvernance qui serait en cause. Le maintien de la subvention à l’essence, entre autres, n’a pas permis aux finances publiques de profiter de la hausse des prix du pétrole, tandis que les leviers politiques pour limiter la hausse des coûts d’emprunt et la baisse des réserves de devises sont très restreints. D’après Moody’s, cette détérioration en cours pourrait s’accélérer dans les prochains mois, réduisant progressivement la capacité de l’Etat à honorer les obligations sur sa dette et donc aggravant le risque de défaut. L’annonce par la Ministre des finances d’une possible restructuration de la dette publique souligne les difficultés rencontrées par le Nigéria. Pour autant, les réserves de change permettent théoriquement de couvrir la totalité du stock de dette libellée en devises.

L’agence précise qu’une nouvelle dégradation, même importante, est possible en cas d’intensification de la pression sur les finances publiques et la position extérieure du Nigéria. En revanche, une augmentation des revenus pétroliers ou un plan de financement à moyen terme du service de la dette permettraient au Nigéria de maintenir sa note souveraine stable.

La dernière version du Jollof Rice Index souligne l’augmentation continue des prix alimentaires.

Publié chaque trimestre, le Jollof Rice Index du cabinet SBM étudie l’évolution du coût de préparation du riz jollof pour une famille de cinq personnes. L’édition de ce troisième trimestre, intitulée « Brace for Impact », évalue le coût moyen à 9 917 NGN (22,7 EUR) en septembre. Cela représente une augmentation considérable de 7,6% par rapport à juin. Les relevés permettent de comparer treize marchés à travers le pays : le plus onéreux est celui de Wuse II, dans la capitale Abuja, à 13 150 NGN, contre 8 510 dans le marché le moins cher, à Onitsha (Sud-Est). Le riz, élément de base de l’alimentation et de ce plat, continue de voir son prix augmenter (à Wuse, 40 000 NGN, soit 91,5 EUR, pour un sac de 50 Kg en septembre, contre 33 000 NGN en janvier).

Les inondations expliquent en partie de cette augmentation. Elles ont causé des pertes de plus de 15 M USD dans le seul Etat de Nassarawa (destruction d’une ferme de 4 400 ha), et ont fortement réduit les perspectives de récolte en novembre-décembre 2022. Le prix moyen d’un œuf a augmenté de 25% depuis le début de l’année, notamment car il est substitué à la viande, trop chère pour beaucoup de ménages, et car l’alimentation aviaire devient rare et chère. En moyenne, les marchés les plus chers se trouvent au Nord (Kano, Abuja, Bauchi, et les moins chers au Sud (Akwa, Onitsha, Calabar). D’autres facteurs, dont l’insécurité et les coûts du transport dans le Nord, expliquent ces divergences. Enfin, l’affaiblissement de la naira, nécessaire à l’importation de volaille par exemple, qui s’ajoute à des saisies par les autorités de cargaisons de volailles, contribue à cette dégradation à l’échelle nationale. De nombreux commerçants interrogés dans le cadre de l’étude comparent la situation actuelle à celle des années 1986-1993, marquée par une forte inflation alimentaire.

L’étude ne permet pas d’anticiper un rétablissement à court terme de la situation. Il est toutefois à noter que cette étude ne couvre pas l’ensemble du pays, certaines régions pouvant présenter des prix plus bas, ou plus élevés.

La BAD, le FIDA et la BID lancent un programme de 520 M USD pour développer des zones spéciales de transformation agro-indusrielle au Nigéria

Un programme pour le développement des zones spéciales de transformation agro-industrielle (Special Agro-Industrial Processing Zones Programme, SAPZ) a été lancé mardi à Abuja. La Banque Africaine de Développement (BAD) y contribue à hauteur de 210 M USD, la Banque Islamique de Développement (BID) et le Fonds International de Développement Agricole (FIDA) apportent conjointement 310 M USD, tandis que l’ Etat fédéral devrait participer à hauteur de 18 M USD. La BAD définit les SAPZ comme des espaces industriels en zones rurales, équipés d’infrastructures, où pourront s’implanter les entreprises agro-alimentaires et agro-industrielles, au plus près des agriculteurs. Le programme SAPZ a pour objectif de développer les chaînes de valeur en sécurisant les débouchés pour les producteurs, et en soutenant la transformation des produits bruts pour augmenter la valeur du produit final. Le programme cible des filières stratégiques telles que le maïs, le riz, le manioc, le cacao et la volaille. Sept Etats ont été sélectionnés pour participer à la première phase du programme : Cross River, Imo, Kaduna, Kano, Kwara, Ogun et Oyo.

Le développement des chaînes de valeur agricoles est un défi majeur pour le Nigéria, et la Banque centrale (Central Bank of Nigeria, CBN) en a fait une priorité. Alors que l’agriculture représente 26% du PIB, emploie 70% de la population et que les surfaces agricoles s’étendent sur 70 Mha, la production intérieure ne parvient pas à couvrir la demande locale. En 2021, les importations de produits agricoles ont atteint le niveau record de 4,3 Md USD. Le pays peine à atteindre l’auto-suffisance alimentaire malgré la politique de développement des capacités de production nationales menée par la CBN. D’après l’Indice de la Faim dans le monde 2022, le Nigéria se classe 103ème sur les 121 pays souffrant d’une crise alimentaire. A noter que les exportations de produits agricoles ont progressé pour atteindre 1,1 Md USD, en augmentation de 48% sur un an, mais il s’agit principalement de produits bruts, à faible valeur ajoutée.  

Ghana

Le Ghana Union of Traders’ Association a appelé à fermer les magasins et marchés trois jours pour protester contre la vie chère et l’inflation.

L'Association des commerçants du Ghana (GUTA) a décidé de la fermeture symbolique des magasins d’Accra les 17 octobre pour trois jours en guise de protestation contre l’inflation galopante. Il a obtenu d’être reçu par le ministre des finances et que ses recommandations soient prises en considération dans les négociations engagées avec le FMI. Le pays subit une inflation de 37 % sur un an, avec une hausse qui peut aller jusqu’à 100% pour les denrées alimentaires.

Le président de GUTA, le Dr Joseph Obeng, s'est adressé aux médias  « Il est évident que nous ne pouvons plus contenir ces défis car cela devient de plus en plus difficile. Nous voulons envoyer un indice au gouvernement pour qu'il reconnaisse qu'il y a un sentiment d'urgence dans cette situation ».

La crise financière conduit la Banque du Ghana et le gouvernement à une série de consultations visant à freiner la dépréciation rapide du cedi ghanéen.

Le cedi ghanéen s'est déprécié respectivement de 37,5% face au dollar américain, de 24,1% face à la livre et de 27,5% face à l'euro, a indiqué la banque centrale. Le ministre de l‘information, a annoncé que les consultations ont débuté le lundi 24 octobre 2022 entre la Banque du Ghana, les chefs des institutions bancaires et les opérateurs des bureaux de change. La valeur change du dollar est passé de 6 Cedis en janvier 2022 à 14 Cedis en octobre 2022, affectant très sérieusement les entreprises importatrices comme les particuliers dont les prêts à la consommation ou immobiliers sont souvent contractés en dollars.

Le président Akufo ADDO s’exprimera le 30 octobre à la Nation pour calmer les mécontentements grandissants.