Energie

Pour le Gouvernement espagnol, l’autoconsommation est un élément clé dans l’atteinte de la neutralité carbone à l'horizon 2050. Selon l’Union espagnole du photo-voltaique, les dispositifs d’autoconsommation (ex : panneaux solaires) pourraient permettre de réduire de 35% l’électricité nécessaire pour un foyer et d’économiser 35% sur sa facture d’électricité. En 2021, près de 1.200 MW d’énergie solaire ont été installés pour l’auto-consommation (le double qu’en 2020). Le Gouvernement a budgétisé 900 M€ afin de subventionner l’installation de dispositifs d’autoconsommation. A ce titre, les aides aux particuliers permettront jusqu’à 40% d’économies sur les coûts d’installation.

La Commission européenne a approu-vé le mécanisme de plafonement du prix du gaz utilisé par les centrales thermiques. Le 13 mai l’Espagne a publié un décret plafonnant pendant un an ce prix (prévu de façon échelonnée entre 40 et 70€/MWh), afin de réduire leurs coûts de production d’électricité, et donc la facture des ménages et des entreprises. En effet, le prix spot sur le marché de gros électrique est presque toujours déterminé par le coût de production de ce type de centrales (selon le mécanisme du merit order). Cette initiative engendre un écart entre le coût plafonné du gaz et son coût réel sur le marché. La compensation de cet écart sera financée par imputation sur l’ensemble du marché de gros de l’électricité.

Les mesures mises en place par le Gouvernement en avril 2022 pour contenir l’augmentation du prix des carburants trouvent leurs limites. Le prix des caburants dépasse pour la première fois la moyenne européenne, alors que l’Espagne se situait jusqu’à présent en bas de l’échelle des prix (15e de l’UE pour l’essence et 16e pour le diesel il y a un an à la même période). Avec la guerre en Ukraine, le Gouvernement a institué une réduction fiscale à la pompe de 15 centimes par litre (couplée à une réduction complémentaire de 5 centimes à la charge des groupes pétroliers).

Environnement

Après plusieurs avertissements, la Commission européenne poursuit l’Espagne en justice pour sa mauvaise gestion des eaux usées urbaines. 133 agglomérations sont concernées. L’Espagne est le pays de l’UE comptant le plus de dossiers ouverts pour infractions environnementales (26 dossiers en début d’année dont 3 relatifs au traitement de l’eau). Le pays, qui accumule déjà 63 M€ d’amende depuis les sanctions prises par l’UE en 2018 pour sa mauvaise gestion des eaux usées (à l’époque une petite dizaine de villes était concernée), reconnaît ne pas pouvoir assurer la conformité totale des stations d’épuration (STEP) concernées avant 2025 et va donc continuer à voir croître cette amende. Le Gouvernement fait cependant des efforts : celui-ci a notamment pris en charge avec les Communautés autonomes la construction de nouvelles STEP (en lieu et place des municipalités). De plus, il a approuvé fin mars un plan stratégique de collaboration public-privé (PERTE) dédiée à la digitalisation du cycle de l’eau mobilisant 1,94 Md€ d’investissements publics directs et 1,12 Md€ de fonds complémentaires public-privés. A ce jour, les dossiers n’ont pas encore été déposés. 

Le Gouvernement approuve la stratégie nationale de lutte contre la désertification. Cette stratégie vise à contribuer à la conservation et à l'amélioration du capital naturel associé aux zones arides, semi-arides et subhumides sèches, et à progresser dans l'atténuation et la restauration des zones dégradées. Elle part du diagnostic selon lequel le phénomène de désertification concerne 74% du territoire. Les principales causes sont le changement climatique et l'exploitation non durable des ressources naturelles. La stratégie  propose des actions et des mesures jusqu'en 2030 (l’élaboration d'un plan de restauration des terres touchées par la désertification, le développement d'un réseau de projets pilotes et une loi sur la conservation et l'utilisation durable des sols).

Le ministère espagnol pour la Transition Ecologique (Miteco) soutient 45 projets de communautés énergétiques (CE) dans 14 régions. Le Miteco a présenté les résultats du 1er appel d’aides destinées à des projets pilotes de communautés énergétiques, CE, dont l’investissement est inférieur à 1 M€ (Programme CE IMPLEMENTA) qui mobilisera 14,7 M€. 16 % des projets luttent contre la pauvreté énergétique à travers l’inclusion des consommateurs vulnérables et plus de la moitié des projets sélectionnés sont développés, totalement ou partiellement, dans des municipalités confrontées à des défis démographiques, ce qui contribuerait à atteindre les objectifs de cohésion territoriale et de lutte contre le dépeuplement.

Un 2ème appel, doté de 30 M€, a été lancé pour les projets dont l'investissement est supérieur à 1 M€. Des demandes ont été reçues pour plus de 55 M€, ce qui confirme l'intérêt croissant pour le développement des CEs en Espagne.

Dans l’objectif de décarbonation à l’horizon 2050, le Gouvernement mise notamment sur le développement de l’autoconsommation et à ce titre sur le rôle joué par les communautés énergétiques.

Industrie

Près de 12 Md€ destinés à la transition du secteur d’automobile et à la construction de 2 usines de batteries électriques en Espagne. Une aide publique de 2,97 M€ (subventions et prêts à taux réduit) est inscrite dans le cadre du plan de relance espagnol et vise à mobiliser un total de 11,9 Md€ d’investissements (notamment via des collaborations publiques-privées) avec pour objectif de produire 250.000 véhicules électriques d’ici 2023. A ce titre, 311 entreprises se sont engagées dans 13 groupements pour réaliser 487 projets répartis sur tout le territoire espagnol. Parmi ces projets, le groupe Volkswagen (en association avec 62 sociétés) envisage la fabrication d’un petit véhicule électrique dans ses usines de Martorell (Barcelone) et Landaben (Pampelune).  10 Md€ d’investissement permettront de transformer les usines, construire un centre de la fabrication de cellules de batteries à Sagunto (Valence) et développer l'écosystème nécessaire pour disposer des composants de la voiture électrique dans la péninsule ibérique. Le constructeur chinois Envision associé à l’espagnol Acciona (BTP, immobilier, logistique et EnR) constituent le 2ème plus gros investisseur : 1 Md€ pour la première étape dans la construction d’ici 2025 d’une usine de batteries en Estrémadure (Venergy+), d’une capacité initiale de 10 gigawattheures (GWh) et un objectif final de 30 GWh en 2030. Le groupe Stellantis (usines à Vigo, Saragosse et Madrid) a présenté 2 projets pour 223 M€ : l’un pour l’affectation de nouveaux véhicules électriques dans son usine de Figueruelas (Saragosse) et l’autre sur le développement du big data et de la technologie 5G dans ses centres de Vigo et Madrid. Le gouvernement, par l'intermédiaire du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, décidera au cours du dernier trimestre 2022 l'attribution de fonds aux initiatives présentées dans le cadre du projet stratégique du véhicule électrique et connecté.

La ministre des Sciences et de l'Innovation annonce la création de l’agence spatiale espagnole (AEE) en 2023. L’initiative fait partie du Projet Stratégique pour la Relance et la Transformation Economique (PERTE) consacré à l’aérospatial, qui mobilisera 4,5 Md€ jusqu'en 2025. Le secteur aérospatial espagnol représente 1,2 % du PIB national et génère plus de 150.000 emplois directs et indirects. Rattachée au ministère des sciences et de l'innovation, sa fonction sera de coordonner toutes les activités spatiales au niveau national et la participation espagnole aux programmes internationaux, ainsi que de promouvoir la recherche, le développement et l'innovation dans le secteur aéronautique et spatial. Il y a déjà plusieurs candidats pour accueillir le siège : Séville, Teruel, Cebreros (Ávila), Puertollano (Ciudad Real) et León.

Transport

500 M€ pour la numérisation et la durabilité des transports urbains ainsi que la mise en place de zones à faibles émissions (ZFE). Le ministère des Transports, de la Mobilité et de l’Agenda urbain (MITMA) a annoncé pour cet été un nouvel appel à projets dans le cadre du plan de relance espagnol pour la mise en œuvre de ZFE et la transformation numérique et durable des transports urbains.

Selon le MITMA environ 93% des émissions associées au secteur des transport proviennent de la route (dont 1/3 sont émises dans les villes).

1 Md€ avaient déjà été affectés à cette politique.

La loi espagnole sur la mobilité durable devrait être approuvée en 2023. Le processus de consultation et d'audition publique ayant déjà eu lieu, le projet de loi devrait être soumis au Conseil des ministres pour approbation finale avant la fin de 2022 puis adressé au Parlement. Cette démarche s’inscrit dans le cadre d’un compromis passé la Commission européenne en vue de l’octroi des fonds Next Generation (adoption avant fin 2023). Parmi les innovations envisagées :

  • la création de « bancs d'essai » pour le développement de projets de mobilité, de véhicules automatisés et autonomes et de logistique du dernier kilomètre ;
  • l'introduction d'une taxe municipale afin de financer la constitution de ZFE ;
  • l'obligation de négocier des plans de transport durable afin de promouvoir des déplacements domicile-travail et visant à rechercher des solutions de mobilités durables ;  
  • la numérisation des procédures de contrôle administratif requis pour le transport public routier de marchandises ;
  • ou encore la création d’un Système national de mobilité durable dont le but sera de placer le citoyen « piéton » au centre des politiques publiques.

La ministre des transports affirme que 7,6 Md€ issus du plan de relance ont été mobilisés pour des projets transport et mobilité sur le total des 11 Md€ envisagés. Un appel d'offres pour 4 Md€ a été lancé (2,5 Md€ ont été attribués). Cette enveloppement vient s’ajouter aux 3,6 Md€ de subventions gérées par l'intermédiaire des régions et des municipalités. La Catalogne est en tête des investissements avec une augmentation de 160% des appels d'offres par rapport à la même période l'année dernière. Les corridors ferroviaires atlantique et méditerranéen font partie des projets retenus. A ce titre, le financement à hauteur de 1,25 Md€ est prévu pour réaliser la connexion Plasencia-Badajoz (en phase d'essai) sur plus de 200 km seront ajoutés au corridor atlantique. 1 250 M€ sont consacrés à l'accélération des travaux.  Concernant le corridor méditerranéen, la ministre a souligné les 233 km ajoutés au cours de ces trois ans, les progrès des travaux entre Martorell et Castellbisbal (la porte d'entrée vers l'Europe) ainsi que l'avancement des accès ferroviaires et routiers au port de Barcelone.

L’énergéticien Cepsa et la compagnie Vueling s'associent pour accélérer la décarbonation du transport aérien. Les sociétés vont promouvoir le développement et la production de carburants aéronautiques durables (SAF)[1], basés sur le recylcage de résidus  d’origine biosourcée ainsi que sur le développement de l'hydrogène vert. L'objectif de Cepsa est d'être à la tête de la production des carburants durables d'ici 2030, avec une production annuelle de 800 000 tonnes. En outre, IAG (groupe aérien auquel appartient Vueling avec Iberia, British Airways) est le premier groupe européen de compagnies aériennes avec l’engagement d’opérer 10% de ses vols avec SAF d'ici 2030.

Repsol est l’autre grand énergéticien à se lancer dans la production à grande échelle de SAF. Dans cette optique, l’entreprise a également renforcé son partenariat avec Iberia.

Globalvia, entreprise espagnole  d’infrastructures de transport, franchit une nouvelle étape dans sa stratégie visant à devenir un opérateur global de mobilité. En Juin 2022, la société a annoncé avec Kinetic[2] le lancement d’une offre publique d’achat de la société de transport Go-Ahead[3] pour une valeur de 753 M€, Globalvia devrait acquerir 49% de la compagnie. Bien que Go-Ahead soit favorable à ce rachat, il est cependant conditionné par l’approbation d’une majorité des actionnaires de Go-Ahead. Enfin, dans le cadre de sa nouvelle loi sur la mobilité, le MITMA a élaboré une proposition de nouvelle carte du réseau de bus pour relier les communautés autonomes ; cette reconfiguration prévoit de réduire le nombre de lignes et d’arrêts mais devrait permettre au réseau d’être plus efficace, pratique et compétitif. Globalvia compte profiter de cette refonte du réseau inter-régional pour se positionner sur ce segment de marché par l’intermédiaire de Go-Ahead ou d’un autre consortium.

Ville durable

Le Parlement a approuvé le projet de loi sur la qualité architecturale en Espagne. Après son vote au Sénat, sans aucune voix contre, la procédure parlementaire est désormais terminée. Le texte, promu par le MITMA, prévoit la création de deux organes fondamentaux pour guider l'action des autorités dans la réalisation des objectifs : la Maison de l'architecture et le Conseil pour la qualité architecturale. La loi a pour objet de promouvoir la protection du patrimoine architectural, de favoriser la conservation, de promouvoir la recherche, l'innovation, la numérisation, l'industrialisation et la créativité.

La mobilité durable en Espagne reprend de la vitesse après la pause causée par la pandémie. Les raisons sont multiples : hausse des prix des carburants, offre renouvelée des opérateurs de mobilité avec de nouveaux modèles et de nouvelles solutions de mobilité, amélioration des batteries et des infrastructures de recharge électrique et transformation progressive des villes avec le développement des zones à faibles émissions. La plupart des grands groupes automobiles proposent des plateformes multimodales en ligne (Uber, Cabify, Mobilize, etc.) et des offres de « caresharing » : Zity (Renault et Ferrovial), Wible (Kia et Respol), ShareNow (BMW et Mercedes) et Free2Move (Stellantis).  A Madrid, ces dernières cumulent 2500 véhicules et près de 1,3 millions d’utilisateurs.

Blablacar, avec près de 7 millions d’usagers en Espagne, se situe également sur des niveaux d’utilisation supérieurs à ceux qui prévalaient avant la pandémie.

En definitive, l’association professionnelle des fabricants d’automobiles, l’Anfac, estime que la valorisation du secteur en Espagne pourrait atteindre 310 Md€ d’ici 2040.   

Tourisme

Les grands groupes touristiques et le gouvernement espagnol prévoient une forte saison estivale avec une demande robuste et des niveaux d'activité prépandémique. Après 2 ans difficiles suite au covid et à l'impact des restrictions de mobilité, le tourisme en Espagne vise une reprise complète pour son 1er été de normalité postpandémique, malgré l'incertitude économique due à l'invasion de l'Ukraine. Le secteur cumule, dans le pays, 11 mois consécutifs de croissance des arrivées de touristes étrangers. Les prévisions du gouvernement passent par une saison estivale quasiment normalisée, égalant les chiffres d'avant Covid. L’année 2022 devrait représenter 80% du flux touristique de 2019. A l’époque, ce flux représentait un record avec 83,7 millions de voyageurs qui, selon le gouvernement, pourrait être à nouveau atteint en 2023.  En outre, le total des places offertes par les compagnies aériennes opérant en Espagne se rapproche de celui de 2019 ( 212 millions de places envisagées entre avril et octobre, soit seulement 0,4% de moins qu’en 2019). En revanche,  la reprise de la demande de transport aérien est plus lente. Les prévisions indiquent que le trafic de passagers aériens en 2022 en Espagne se situerait entre 75 % et 85 % des chiffres de 2019 (le secteur estime que la situation se normalisera complètement en 2023).

Depuis mai 2022, l'emploi dans le secteur du tourisme en Espagne est supérieur au niveau prépandémique, avec 2,5 millions de personnes affiliées à la sécurité sociale. Au cours de l'année 2021, 465 978 nouvelles inscriptions de travailleurs liés aux activités touristiques ont été générées, soit une croissance de 22,3 %, poursuivant la tendance initiée en juin 2021. Ainsi, à la fin du mois d'avril 2022, les travailleurs du secteur représentaient 12,7% du nombre total d'affiliés dans l'économie nationale. 80,7 % des personnes enregistrées dans le secteur du tourisme sont des salariés, tandis que les indépendants représentent 19,3 %. L'emploi a augmenté dans toutes les régions : en chiffres absolus, les plus fortes hausses ont été consignées en Andalousie, Baléares, Catalogne,  Valence, Canaries et Madrid.


[1] Les carburants durables réduisent les émissions de CO2 jusqu'à 80 % par rapport aux carburants traditionnels.

[2] Exploitant d’autobus australien

[3] Société de transport de voyageurs basée en Angleterre et présente au Royaume-Uni, en Irlande, à Singapour, en Norvège et en Allemagne.