Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

-          Les ventes au détail accélèrent

-          L’indice de la production industrielle reste à un niveau élevé

-          Les marchés actions poursuivent leur chute sur fond de craintes sur la consommation

Politiques macroéconomiques

-         Les responsables de la Fed réitèrent fermement leur engagement à lutter contre l’inflation

-         La Maison-Blanche expose des mesures de lutte contre la pénurie de logements

Services financiers

-          Le Sénat auditionne Michael Barr pour le poste de vice-président de la Fed chargé de la supervision

-          Face à la dépréciation des crypto-actifs, la CFTC et la SEC réaffirment leur volonté de régulation

Brèves

 

 

Conjoncture

 

Les ventes au détail accélèrent

Selon les données publiées par le Census Bureau, les ventes au détail ont progressé de +0,9 % en avril, un rythme proche des attentes du marché (+1,0 %). Toutefois, l’indicateur a été révisé à la hausse pour le mois de mars, à +1,4 %, contre +0,5 % dans l’estimation préliminaire. L’évolution sur douze mois glissants s’établit à +8,2 % (après 7,3 % en février).

En avril, les ventes ont été dynamiques dans les magasins généralistes (+4,0 %), les concessionnaires de véhicules automobiles et de pièces (+2,2 %), les ventes en ligne (+2,1 %) et la restauration (+2,0 %), tandis qu’elles ont reculé  dans les stations d’essence (-2,7 %) et, dans une moindre mesure, les produits de loisirs (-0,5 %).

 

L’indice de la production industrielle reste à un niveau élevé

Selon la publication de la Fed, l’indice de la production industrielle a progressé de +1,1 % en avril, bien au-delà des attentes du marché (+0,5 %). Depuis le début de l’année, l’indice progresse à un rythme soutenu (+0,9 % en mars, +1,0 % en février et +0,8 % en janvier). En particulier, le taux d’utilisation des capacités productives a rebondi à 79 % en avril, supérieur aux attentes du marché (78,6 %) et au niveau pré-pandémique (76,3 %). Néanmoins, ce rebond serait à nuancer avec l’estimation préliminaire de l’indice manufacturier de la Fed de New York (Empire State manufacturing index), qui a fortement chuté en mai, à -11,6 contre +16,5 en avril, du fait de la baisse des nouvelles commandes et des livraisons.

Les marchés actions poursuivent leur chute sur fond de craintes sur la consommation

Le 18 mai, les marchés actions ont connu une très forte chute sur fond de craintes quant à la solidité de la consommation américaine, au lendemain des publications des résultats du 1er trimestre 2022 et des prévisions de croissance des entreprises de la grande distribution. Le 18 mai, le S&P 500 a chuté de 4,0 % (-18 % depuis le début d’année), le Nasdaq de 4,7 % (-30 %) et le Dow Jones de 3,6 % (-14 %).

Amazon avait publié le 28 avril des résultats en-deçà des attentes du marché, conduisant à une chute du cours de l’action de 26 % depuis cette date jusqu’au 18 mai. Walmart et Target ont également publié des résultats en-deçà des attentes du marché et abaissé leurs prévisions de croissance du fait des hausses des coûts et des difficultés de gestion des stocks. Néanmoins, elles ont divergé sur l’appréciation de l’état des consommateurs américains : Walmart prévoit une baisse de la consommation tandis que Target considère un retour au mode de consommation pré-pandémique avec des produits liés au voyage et aux festivités.

 

 

Politiques macroéconomiques

 

Les responsables de la Fed réitèrent fermement leur engagement à lutter contre l’inflation

Les dirigeants de la Fed continuent de se montrer favorables à de nouvelles hausses de taux dans le contexte d’inflation élevée et persistante. Les critiques se multiplient néanmoins vis-à-vis de l’action de la Fed. Selon Ben Bernanke, ancien président de la Fed, la réponse « lente » de la Fed à l’inflation fut ainsi une erreur et l’économie américaine pourrait entrer en stagflation. Bill Dudley, ancien président de la Fed de New York, considère quant à lui très peu probable une baisse de l’inflation sans récession.

Depuis le FOMC des 3 et 4 mai, le président de la Fed, Jerome Powell, a fermement indiqué à plusieurs reprises poursuivre le resserrement monétaire, notamment à travers des hausses de taux (probablement de 50 points de base en juin et juillet) et la réduction du bilan, jusqu’à faire reculer l’inflation à un niveau considéré comme « sain ». J. Powell a toutefois concédé le 11 mai que la Fed aurait probablement dû relever les taux plus tôt, tout en soulignant les difficultés d’un atterrissage en douceur de l’économie.

De nombreux présidents de Fed régionales comme James Bullard (Saint Louis), Charles Evans (Chicago), John Williams (New York), Esther George (Kansas City) et Neel Kashkari (Minneapolis) ont soutenu les propos de J. Powell. J. Bullard a notamment indiqué que les marchés ont déjà intégré les hausses de taux futures. Selon J. Williams, la volatilité des indices boursiers et des obligations souveraines actuellement observée dans le sillage du resserrement monétaire n’envoie pas de signal d’alarme particulier.

 

La Maison-Blanche expose des mesures de lutte contre la pénurie de logements

La Maison-Blanche a publié le 16 mai un plan d’action qui vise à augmenter l’offre de logement et à alléger la charge liée à l’immobilier. Il s’agit également d’une mesure de lutte contre l’inflation élevée dans la mesure où les prix de l’immobilier, à travers les loyers, ont un poids important (environ un tiers) dans l’inflation.

Le plan prévoit 4 grands axes : (i) augmenter l’offre de logements aux loyers abordables ; (ii) augmenter l’offre face à la pénurie de 1,5 millions de logements ; (iii) donner la priorité, pour les ventes de logements individuels (single-family), aux propriétaires-occupants ou à des organisations à but non-lucratif ; (iv) donner des incitations aux États et collectivités locales pour revoir leur politique d’aménagement du territoire.

Pour mettre en œuvre ce projet, l’administration Biden vise à augmenter le soutien budgétaire aux agences publiques, dont celles dédiées au financement de logement, à assouplir les règles de financement par Fannie Mae et Freddie Mac (chargées de la titrisation des prêts hypothécaires), à exclure les promoteurs et les investisseurs institutionnels des ventes de logements garantis par l’administration fédérale du logement et à inciter financièrement les États et collectivités locales à réformer les pratiques de zonage et à supprimer les barrières réglementaires en matière de construction.

 

 

Services Financiers

 

Le Sénat auditionne Michael Barr pour le poste de vice-président de la Fed chargé de la supervision

La commission des affaires bancaires du Sénat a auditionné le 19 mai Michael Barr, nommé par Joe Biden au poste de vice-président de la Fed chargé de la supervision. Professeur à l’université du Michigan et ancien Assistant Secretary chargé des institutions financières au Trésor (administration Obama), M. Barr a été interrogé sur ses priorités en matière de supervision.

En matière de réglementation bancaire, M. Barr a estimé que le niveau de liquidité et de solvabilité des banques américaines était aujourd’hui satisfaisant. Il a indiqué que l’éventuelle révision du ratio de levier supplémentaire (SLR) n’interviendrait qu’après avoir mené une analyse plus approfondie du secteur et de l’impact des réformes à venir, en particulier la transposition des règles de Bâle III finalisées aux États-Unis. Il n’a pas donné d’indication de calendrier sur ce point. Il a par ailleurs affirmé être d’accord avec le principe d’exigences différenciées selon la taille des établissements (tailoring), par référence à la loi de régulation bancaire (« Crapo Bill ») votée en 2018, même s’il ne partageait pas l’ensemble des paramètres retenus dans ce texte.

Interrogé par les sénateurs républicains sur sa vision du rôle de la Fed en matière climatique, il a indiqué que la priorité des analyses de scénarios envisagées serait de mesurer l’exposition des banques aux risques climatiques et non d’influencer l’allocation du crédit. Il a également souligné les risques liés aux crypto-actifs pour la protection des consommateurs et, s’agissant des stablecoins, pour la stabilité financière. Il a invité le Congrès à définir un cadre législatif à ce sujet.

La commission a aussi auditionné Jaime Lizárraga (candidat démocrate) et Mark Uyeda (candidat républicain), nommés pour être commissaires de la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés financiers.

Les trois candidats devront être approuvés par un vote du Sénat.

 

Face à la dépréciation des crypto-actifs, la CFTC et la SEC réaffirment leur volonté de régulation

Le 17 mai, Rostin Behnam, président de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), régulateur des marchés de dérivés, a fait allusion aux difficultés rencontrées par les marchés de crypto-actifs, dans un contexte de baisse générale et d’effondrement du stablecoin Luna. Intervenant dans le cadre d’un forum dédié à la protection des investisseurs, il a dit s’attendre à recevoir dans les prochaines semaines un grand nombre d’informations et plaintes concernant des fraudes et pertes d’argent en lien avec la chute des marchés.

Intervenant dans le cadre du même forum, Gary Gensler, président de la SEC, a également évoqué les « événements » de ces dernières semaines sur les marchés de crypto-actifs. Il a souligné l’importance d’accroître la protection des investisseurs, en particulier concernant les plateformes de prêt et de courtage.

 

 

Brèves

 

-Le 18 mai, la Secrétaire au TrésorJanet Yellen, a annoncé qu’il était peu probable (« unlikely ») que les États-Unis prolongent une dérogation au régime des sanctions sur la Russie expirant le 25 mai qui permet actuellement aux détenteurs de la dette souveraine russe de recevoir les paiements de leurs échéances par débit de comptes détenus dans des banques américaines. Le ministre des finances russe a quant à lui annoncé le 18 mai que la Russie assurera le service de la dette en roubles s’il lui devient impossible d’utiliser d’autres options. La Russie doit procéder à des règlements sur sa dette le 27 mai, qu’elle peut réaliser en dollar, livre sterling, franc suisse ou euro. Sa prochaine échéance de paiement exclusivement en dollar est prévue le 24 juin.

 

-La Fed de New York a lancé le 18 mai un nouvel indicateur qui vise à mesurer l’intensité des tensions sur les chaînes d’approvisionnement (Global Supply Chain Pressure Index). L’indicateur, publié pour la première fois en janvier 2022, regroupe plusieurs éléments : (i) le coût de transport des matières premières (Baltic Dry Index) ; (ii) le taux de remplissage des cargaisons (Harpex Index), (iii) le coût de transport et de fret aérien publié par le Bureau of Labor Statistics et (iv) les indices manufacturiers (PMI). Après avoir atteint un pic (4,45) en décembre 2021, l’indice a diminué à 2,8 en mars, avant de rebondir à 3,29 en avril.

 

-Le Bureau de protection des consommateurs de services financiers (CFPB) a publié le 16 mai un rapport sur les difficultés rencontrées par certains emprunteurs pour faire face au remboursement de leurs prêts immobiliers à la suite de la levée des moratoires mis en place pendant la crise sanitaire. À fin 2021, environ 330 000 emprunteurs se trouvaient en situation de défaut de paiement pour un prêt immobilier sans moratoire ni solution de rééchelonnement du crédit.

 

-Le 17 mai, la SEC a annoncé avoir sanctionné, dans le cadre d’un accord de règlement dans lequel la société et certains dirigeants reconnaissent leur culpabilité, la société Allianz Global Investors à hauteur de 6 Md USD en raison de la mise en place d’un système de fraude à large échelle ayant suscité de fortes pertes pour ses investisseurs au début de l’année 2020.

 

-Le 11 mai, la CFTC a annoncé l’organisation le 2 juin de réunions publiques concernant les marchés de crédits et compensations carbones afin d’échanger sur les problématiques de standardisation et d’organisation de ces marchés, en vue de mieux cerner le rôle qui pourrait être tenu par les pouvoirs publics et les régulateurs pour accompagner ce développement.

 

-Dans une intervention le 17 mai, Mark Calabria, ancien directeur de la Federal Housing Finance Agency (FHFA), le régulateur des agences de titrisation hypothécaire Fannie Mae et Freddie Mac, a sévèrement critiqué les allègements prudentiels apportés ces derniers mois par l’administration démocrate, qui ont selon lui fortement accru les risques portés par ces agences.

 

-Le 18 mai, la Cour d’appel pour le 5ème district (États du Mississipi, Tennessee et Texas) a publié une opinion relative à un jugement d’une juridiction administrative interne de la SEC en 2014 contre un gestionnaire de fonds d’investissement. La Cour estime que les poursuites ne pouvaient pas être conduites par la voie choisie mais auraient dû faire l’objet d’un procès par jury (jury trial).