Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

-         L’inflation, tirée par les prix de l’énergie, atteint un nouveau record

-          Les ventes au détail progressent mais sont en recul hors énergie

Politiques macroéconomiques

-         La secrétaire au Trésor appelle à une réforme des institutions financières internationales

Services financiers

-          L’OCC expose sa vision de la régulation des stablecoins

-          Les grandes banques américaines publient des résultats trimestriels en forte baisse

-          Les assureurs américains adoptent un standard de reporting climatique aligné sur les recommandations de la TCFD

Brèves

 

Conjoncture

 

L’inflation, tirée par les prix de l’énergie, atteint un nouveau record

L’indice des prix à la consommation (IPC) a progressé de +1,2 % en mars selon le Bureau of Labor Statistics (après +0,8 % en février) et sa composante sous-jacente (hors alimentation et énergie) de +0,3 % (après +0,5 %). Les prix de l’énergie ont connu une forte accélération (+11 %, après +3,5 % en février) et ceux de l’alimentation ont été stables à +1,0 %. La hausse de l’inflation sous-jacente a été modérée en raison de la baisse des prix des véhicules d’occasion (-3,8 %, après ‑0,2 % en février) et des matières premières autres que l’énergie et l’alimentation (-0,4 %). Toutefois, les prix des services de transports (+2,0 %, après +1,4 % en février) et de santé (+0,6 %, après 0,1 %) ont connu une accélération.

Sur douze mois glissants, l’inflation s’est établie à +8,5 % (+0,6 point par rapport au mois précédent) et sa composante sous-jacente à +6,5 % (+0,1 point), atteignant son plus haut niveau depuis 1981. Le prix de l’énergie a augmenté de +32 % et celui de l’alimentation de +8,8 %. La hausse de l’inflation s’explique principalement par les prix des véhicules neufs (+12,5 %) et d’occasion (+35,3 %) ainsi que des marchandises hors alimentation et énergie (+11,7 %).

À la suite de cette publication, la Maison-Blanche a annoncé des mesures visant à réduire le coût de l’énergie à travers l’allègement des réglementations relatives aux biocarburants. Selon l’enquête Consumer Expectation Survey publiée par la Fed de New York, les anticipations d’inflation à 1 an et 3 ans se sont établies en mars à 6,6 % et 3,7 % respectivement, contre 6,0 % et 3,8 % en février.

 

Les ventes au détail progressent mais sont en recul hors énergie

Selon les données publiées par le Census Bureau, les ventes au détail ont progressé de +0,5 % en mars (-0,3 % en excluant les ventes dans les stations d’essence), légèrement en-deçà des attentes du marché (+0,6 %). Toutefois, l’indicateur a été révisé à la hausse pour le mois de février, à +0,8 % contre +0,3 % dans l’estimation préliminaire. L’évolution sur douze mois glissants s’établit à +6,9 % (après 18,2 % en février).

Les ventes ont été dynamiques dans les stations d’essence (+8,9 %), les ventes de marchandises (+5,4 %) et les produits de loisirs (+3,3 %) mais lestées par les ventes en ligne (-6,4 %) et, dans une moindre mesure, des produits de santé (‑0,3 %).

 

 

Politiques macroéconomiques

 

La secrétaire au Trésor appelle à une réforme des institutions financières internationales

La secrétaire au Trésor, Janet Yellen, est intervenue le 13 avril devant l’Atlantic Council sur le leadership économique des États-Unis et l’avenir de l’économie mondiale dans le contexte de guerre en Ukraine, en amont des Assemblées de printemps du FMI et de la Banque mondiale.

J. Yellen a d’abord mis en garde les pays qui chercheraient à aider la Russie à contourner les sanctions et averti la Chine que sa position vis-à-vis de la Russie pourrait affecter ses relations avec les États-Unis, son intégration dans l’économie mondiale et sa place sur la scène internationale, tout en l’invitant à faire usage de son influence pour mettre fin à la guerre.

Pour un nouvel ordre économique mondial, J. Yellen a énoncé les priorités des États-Unis, qui s’articulent autour de 6 axes : (i) modernisation de l’approche multilatérale et de l’intégration commerciale à travers la sécurisation des sources d’approvisionnement en développant des coopérations avec partenaires de confiance (« friendshoring ») ; (ii) mise en œuvre des accords de l’OCDE sur la fiscalité internationale ; (iii) modernisation du rôle des institutions financières internationales pour faire face aux crises mondiales ; (iv) révision des politiques de soutien aux pays en développement en intégrant la lutte contre le changement climatique et le financement des secteurs « verts » ; (v) accélération de la transition écologique ; et (vi) renforcement de la coopération internationale en matière de santé (« global health architecture »).

 

  

Services Financiers

 

L’OCC expose sa vision de la régulation des stablecoins

Michael Hsu, directeur par intérim de l’Office of the Comptroller of the Currency (OCC), régulateur des national banks, a prononcé le 8 avril un discours sur la régulation des stablecoins (crypto-actifs dont la valeur est censée être stable par rapport à un actif de référence).

M. Hsu a développé trois priorités. (i) La première est d’assurer la stabilité des stablecoins, en mettant en place un modèle de réglementation inspiré du secteur bancaire et appliquant des règles harmonisées à l’ensemble des émetteurs. (ii) Il a également appelé à renforcer l’interopérabilité entre les stablecoins et entre les différentes blockchains sur lesquelles les stablecoins peuvent être utilisés. (iii) Enfin, il a plaidé en faveur d’une séparation, au sein des établissements bancaires émettant des stablecoins, entre cette activité et les activités bancaires traditionnelles, afin de limiter l’interconnexion des risques.

M. Hsu a indiqué que les discussions menées au Congrès sur la régulation des stablecoins devenaient bipartisanes. Plusieurs propositions de loi ont en effet été déposées sur ce sujet, la dernière étant celle portée par Pat Toomey, chef de file des Républicains à la commission des affaires bancaires du Sénat.

Circle, société américaine émettrice de l’USD Coin,  2ème plus important stablecoin au monde, a par ailleurs annoncé cette semaine avoir levé 400 M USD auprès de plusieurs investisseurs, dont BlackRock et Fidelity. Dans ce cadre, BlackRock a conclu un partenariat avec Circle pour devenir le principal gestionnaire de ses actifs de réserve. Circle a également confirmé son intention de demander un agrément bancaire fédéral.

 

Les grandes banques américaines publient des résultats trimestriels en forte baisse

Les plus grandes banques américaines par la taille du bilan ont publié cette semaine leurs résultats du 1er trimestre 2022. Ces résultats sont marqués par une forte baisse des résultats nets par rapport au 1er trimestre 2021.

En Md USD

JP Morgan

Bank of America

Citi

Produit net bancaire

30,7

(-5 %)

Résultats à paraître le 18 avril

19,2

(-2 %)

Résultat net

8,2

(- 42 %)

4,3

(-46 %)

 

En Md USD

Wells Fargo

Goldman Sachs

Morgan Stanley

Produit net bancaire

17,6

(-5 %)

12,9

(-27 %)

14,8

(-6 %)

Résultat net

3,4

(-20 %)

3,9

(-42 %)

3,7

(-11 %)

Les pourcentages entre parenthèses représentent les variations enregistrées par rapport au T1 2021
Source : états financiers des banques américaines au T1 2022

D’une part, les produits nets bancaires des banques ont baissé sur la période, en raison notamment du recul des revenus de banque d’investissement, de gestion d’actifs et des activités de marché. D’autre part, les banques ont enregistré de fortes provisions pour pertes de crédit. Ces provisions reflètent la dégradation de leurs prévisions économiques, en raison notamment de la crise ukrainienne, du niveau de l’inflation et de la situation sanitaire.

Cette baisse des résultats tient également aux résultats très élevés que les banques avaient enregistrés au 1er trimestre 2021, qui avait été marqué par des activités de marché très dynamiques et d’importantes reprises de provisions.

 

Les assureurs américains adoptent un standard de reporting climatique aligné sur les recommandations de la TCFD

La National Association of Insurance Commissioners (NAIC), association de coordination des superviseurs des États fédérés dans le secteur des assurances,  a validé le 8 avril un cadre de reporting des risques climatiques dans les rapports annuels des assureurs, visant à aligner ses exigences avec les standards internationaux de la Task Force on Climate Related Financial Disclosures (TCFD).

Ce cadre, présenté par le groupe de travail de la NAIC sur le climat et la résilience, demande aux assureurs d’expliquer (i) leur stratégie de gestion des risques et opportunités climatiques pour leurs activités, (ii) la façon dont ces risques sont pris en compte au niveau de la gouvernance, (iii) leurs méthodes d’identification des risques climatiques, incluant les risques physiques, les risques de transition et les risques légaux (liability risks) et (iv) les métriques et cibles utilisées dans leur processus d’identification et de gestion des risques climatiques.

À ce stade, 14 États et le District de Columbia ont adopté ce cadre dans leur juridiction pour l’année 2022,  représentant 80 % du marché de l’assurance aux États-Unis et près de 400 assureurs.

 

 

Brèves                 

 

-Le 12 avril, Gary Gensler, président de la Securities and Exchange Commission (SEC), régulateur des marchés financiers, a défendu la proposition de règle de reporting climatique publiée par son agence le 21 mars et encouragé les acteurs financiers à transmettre leurs commentaires et réactions. Il a soutenu que la proposition relevait bien du mandat de la SEC de protection de la bonne information des investisseurs et a rappelé que près de 70 % des 1000 plus grandes entreprises cotées aux États-Unis publiaient déjà des informations relatives à la durabilité de leurs activités dans leurs rapports annuels. Il a souligné que les règles proposées permettront d’assurer la cohérence et la comparabilité des informations publiées et des objectifs affichés par les entreprises en matière climatique.

-Le fonds de pensions de l’État de New York, représentant 280 Md USD d’actifs sous gestion, a annoncé mardi 12 avril son soutien à des propositions de résolution d’actionnaires de six grandes banques (Bank of America, Citigroup, Goldman Sachs, JP Morgan Chase, Morgan Stanley et Wells Fargo) visant à arrêter le financement de nouveaux projets liés aux énergies fossiles. Ces propositions, déposées à la fin 2021, ont suscité l’opposition des conseils d’administration de l’ensemble de ces entreprises et seront examinées lors des assemblées d’actionnaires au mois d’avril.

-Le 7 avril, la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), superviseur des state banks, a publié une lettre demandant aux institutions sous sa supervision de lui notifier toute intention ou réalisation d’opérations et activités liées aux crypto-actifs, ainsi que de lui transmettre les informations nécessaires à l’identification des risques liés et des implications pour la stabilité financière.

-Le 11 avril, l’État de Virginie a promulgué une loi permettant aux banques opérant dans l’État de proposer des services de détention (custody) de crypto-actifs pour le compte de leurs clients, sous réserve de mise en place de protocoles appropriés de gestion des risques.

-La Depository Trust & Clearing Corporation, acteur majeur des activités de compensation et de règlement-livraison pour les marchés financiers, a annoncé le 12 avril avoir débuté le développement d’un prototype d’infrastructure de règlement des transactions pouvant supporter une future monnaie numérique de banque centrale.  

-Les présidents de Fed régionales, John Williams (New York) et James Bullard (Saint Louis) se sont montrés favorables à une normalisation plus rapide de la politique monétaire, à commencer par une hausse de 50 points de base des taux directeurs à l’issue de la réunion du comité de politique monétaire (FOMC) des 3 et 4 mai. J. Bullard a par ailleurs souligné le risque d’être en retard dans la lutte contre l’inflation élevée. De nombreux responsables de la Fed considèrent que les taux directeurs devraient être supérieurs au taux neutre (neutral rate), estimé à 2,5 %, afin de résorber l’inflation.