Actualités économiques du Nigéria et du Ghana - semaine du 4 au 10 avril 2022
Publication du Service économique régional d’Abuja, réalisée avec les contributions des SE de Lagos et d’Accra.
Faits saillants:
- Nigéria : L’Etat fédéral lance son programme de prêts à destination des PME et exploitations agricoles ; Le Nigéria importe chaque année pour près de 2 Md EUR de véhicules d’occasion ; Avec 600 MUSD, le Nigéria totalise le tiers des levées de fonds de startups d’Afrique au premier trimestre 2022 ; L’ONG Worldfish introduit des élevages de tilapia GIFT pour lutter contre la malnutrition et améliorer les conditions de vie des populations.
- Ghana : A l’approche de la mise en œuvre de la taxe E-Levy, la plateforme de « Mobile Money » perd 10 Mds GHC en valeur. ; La livraison du premier cargo de gaz naturel liquéfié (GNL) encore retardée au terminal gazier de Tema.
Le chiffre à retenir:
9 millions : C’est le nombre d'emplois directs et indirects créés par la Bank of Industry (BoI) depuis 2015. Sur la période, la BoI a déboursé 1 240 Md NGN (2,7 Md EUR) et soutenus 4,2 millions d'entreprises.
Nigéria
L’Etat fédéral lance son programme de prêts à destination des PME et exploitations agricoles
La seconde mouture du programme gouvernemental « Enterprise and Empowerment » doit permettre à près de 100 000 agriculteurs et entrepreneurs de bénéficier de micro-prêts sans intérêt, allant de 50 000 à 300 000 NGN (soit de 110 à 660 EUR). La Ministre des Affaires humanitaires et Développement social Sadiya Farouq a d’ores-et-déjà annoncé que la première promotion de lauréats allait être révélée dans les prochains jours. Ces futurs bénéficiaires sont issus d’une phase de pré-qualification et de sélection, sur la base du projet présenté. Au total, 5 Md NGN (110 MEUR) vont être prêtés sous forme de crédits de faible montant, remboursables en neuf mois. Les groupes les plus vulnérables économiquement (populations rurales, femmes seules, jeunes sans éducation formelle) forment le cœur de cible de cette politique.
Le Nigéria importe chaque année pour près de 2 Md EUR de véhicules d’occasion
Alors que la production nationale – à peine 13 000 exemplaires – ne permet pas de répondre à la demande, le Nigéria importe chaque année plus d’un million de véhicules, dont l’essentiel d’occasion. La moitié d’entre-eux viennent des Etats-Unis. L’Union européenne (notamment l’Italie et l’Allemagne), le Brésil et le Canada comptent également parmi les principaux pourvoyeurs de véhicules d’occasion au Nigéria.
Il s’agit pour la plupart des véhicules présentant des défauts au regard des normes anti-pollution ou de sécurité, dont la réparation en Europe ou en Amérique du Nord est jugée non-rentable. Il n’est pas rare également que les compagnies d’assurance dans ces pays exportent les épaves des véhicules jugés « économiquement irréparables ». Cette activité s’est trouvée encouragée après que l’Etat fédéral nigérian a baissé drastiquement les droits de douanes sur les importations de véhicules en 2020, date à laquelle ils sont passés de 35 % à 5 % de la valeur du bien importé – au détriment sans doute du développement de l’industrie locale.
Avec 600 MUSD, le Nigéria totalise le tiers des levées de fonds de startups d’Afrique au premier trimestre 2022
Sur un total de 1,8 Md USD levés par les startups africaines au premier trimestre 2022, le Nigéria a représenté à lui seul 600 MUSD. Cela représente pour le pays une multiplication par 2,3 en valeur par rapport à la même période en 2021 – 2,5 fois pour la totalité du continent. A date, les plus importantes levées de fonds de l’année sont celles de Moove (65 MUSD le 14 mars), Thrive Agric (54 MUSD de dette le 22 mars), Reliance Health (40 MUSD le 7 février), et Bamboo (15 MUSD le 31 janvier). Au total, le Nigéria a déjà accueilli neuf levées de fonds supérieures ou égales à 10 MUSD. Le pays est suivi par le Kenya (482 MUSD) et l’Afrique du Sud (228 MUSD, mais en baisse de 16 %). Cette tendance contraste doublement avec celle du reste du monde. D’une part, entre le Q1 2021 et le Q1 2022, les levées de fonds ont globalement augmenté de 7 % en valeur, alors qu’elles ont augmenté de 130 % au Nigéria (et de 150 % à l’échelle du continent). D’autre part, entre le Q4 2021 et le Q1 2022, les levées de fonds ont baissé de 13 % globalement, alors qu’elles ont augmenté d’environ 6 % en Afrique. Pour rappel, il avait fallu 21 semaines en 2021 pour atteindre le premier milliard d’USD levé en Afrique. En 2022, il en a fallu… 7.
L’ONG Worldfish introduit des élevages de tilapia GIFT pour lutter contre la malnutrition et améliorer les conditions de vie des populations
Worldfish a signé un accord avec l’entreprise nigériane Premium Aquaculture Limited (PAL) pour lancer des élevages de tilapia génétiquement amélioré (Genetically Improved Farmed Tilapia, GIFT) au Nigéria. Introduit en Asie du Sud-Est dans les années 1980, le GITF a permis de lutter contre la malnutrition et d’améliorer les conditions de vie des producteurs, grâce à son haut niveau de rentabilité. Aujourd’hui, 75 % du tilapia consommé dans les pays en développement est du GIFT. Cette espèce est adaptée à toutes les tailles d’exploitations, même les plus petites. Worldfish et PAL, avec le soutien de la fondation Bill Gates et USAID, ont pour objectif de vendre du tilapia GIFT nigérian d’ici fin 2023.
Cet accord est particulièrement important dans un pays où le poisson est la principale denrée animale consommée. Il représente à lui seul 40 % de l’apport en protéine du régime alimentaire nigérian. La consommation annuelle de poisson est de 3,6 M de tonnes contre une production locale de 1,1 M de tonnes, l’aquaculture représentant 30 % de la production. Ainsi, entre 2019 et 2021, les importations de poisson surgelé ont atteint les 2,1 Md USD, principalement en provenance de Russie, des Pays-Bas et du Chili. A noter que les exportations russes vers le Nigéria ont été multipliées par 2 en 2021, atteignant 32 200 tonnes.
L’aquaculture, secteur agro-alimentaire qui croit que le plus rapidement dans le monde, représente un potentiel important pour le Nigéria. Deuxième producteur de poissons d’élevage du continent (313 000 tonnes), loin derrière l’Egypte (1,3 M de tonnes), le Nigéria n’exporte que 10 % de sa production. D’après la Banque Mondiale, l’aquaculture pourrait permettre au Nigéria de réduire de 1 Md USD le déficit de sa balance commerciale. Par ailleurs, la structuration des chaînes de valeurs pourrait permettre de mieux rentabiliser les activités de la pêche et de l’aquaculture et ainsi augmenter les revenus des 10 M de personnes qui travaillent dans le secteur.
Ghana
A l’approche de la mise en œuvre de la taxe E-Levy, la plateforme de mobile money perd 10 Md GHC en valeur
Avant même que la taxe sur les transactions électroniques (E-levy) n'entre en vigueur le mois prochain, les données disponibles montrent que la plateforme de téléphonie mobile a perdu environ 10 Md GHC en valeur entre novembre 2021 et janvier 2022 - un développement qui soulève des questionnements quant à la capacité de la nouvelle taxe à engranger les recettes escomptées. La taxe, qui couvrirait les paiements par téléphonie mobile (mobile money), les virements bancaires, les paiements des commerçants et les transferts de fonds entrants, doit rapporter jusqu'à 6,9 Md GHC (926 MUSD) en 2022, selon les estimations du gouvernement. La plateforme de paiement par téléphonie mobile est le plus grand réseau de systèmes de paiement du pays et est considéré comme le principal moteur de l’inclusion financière. Néanmoins, selon des données publiées par la Banque du Ghana, la plateforme a vu la valeur de ses transactions baisser à 76,2 Md GHC en janvier 2022, contre 86,1 Md GHC en novembre 2021 – lorsque la taxe sur les transactions électroniques a été annoncée – soit une baisse de 9,9 Md GHC. La plateforme n’a jamais connu une baisse de valeur aussi importante en l’espace de deux mois depuis son introduction en 2009. Alors que la taxe est censée représenter 6 % des recettes fiscales en 2022, la réticence des utilisateurs à utiliser le mobile money avant même la mise en œuvre de la taxe à partir du 1er mai 2022 est un signal négatif quant à l’atteinte des recettes attendues.
La livraison du premier cargo de gaz naturel liquéfié (GNL) encore retardée au terminal gazier de Tema
Dans le but de développer la production d'électricité au gaz, le Ghana ambitionne de devenir le premier importateur de gaz naturel liquéfié (GNL) d'Afrique subsaharienne. Or, la société propriétaire du terminal d’importation ghanéen Tema LNG, Tema LNG Terminal Co (TLTC) s’était montrée optimiste dans ses prévisions pour la livraison du premier cargo de GNL censé être effectué par Shell. Le terminal GNL de Tema devait être prêt à recevoir sa première cargaison d'ici la fin du premier trimestre 2021, puis a été repoussé d’un an. Le terminal, quant à lui, n’est toujours pas opérationnel et doit encore être approuvé par des opérations d’inspection. Il a la capacité d’importer 1,7 M de tonnes par an de GNL. La société TLTC est financée par le fonds d’investissement panafricain Helios Investment Partners et la firme Gasfin Development. Shell est censé être l’unique fournisseur de GNL à la société publique Ghana National Petroleum Corp (GNPC), qui le livrera ensuite le gaz aux centrales électriques du pays.