Publication du Service économique régional d’Abuja, réalisée avec les contributions des SE de Lagos et d’Accra.

Faits saillants:

- Nigéria : La Fintech nigériane Moove Africa lève 105 M USD ; Le Nigéria fait face à une accélération de l’inflation dès le mois de février ; Le gouvernement met fin à la subvention de l’électricité ; Les importations de produits agricoles atteignent le niveau record de 4,3 Md EUR en 2021.

 

- Ghana : La valeur du ghana cedi s’était érodée de 17% à la mi-mars, par rapport à fin 2021 ; L’inflation menace particulièrement les boulangeries ghanéennes, qui risquent de fermer.

 

 

Le chiffre à retenir:

107 MillionsC’est le nombre de barils de pétrole que la NNPC aurait « égarés » en 2019, soit environ 19,5% de la production annuelle (sous l’hypothèse d’une production quotidienne de 1,5 millions de barils).

 

Nigéria

La Fintech nigériane Moove Africa lève 105 M USD

Basée à Lagos, la Fintech Moove Africa donne accès à des financements pour l’acquisition de véhicules neufs dans les marchés émergents. Elle a annoncé ce lundi 14 mars une levée de capital et de dette à hauteur de 105 M USD. Ce nouveau financement intervient peu après sa première levée de fonds de 23 M USD en août 2021 et un financement de 10 M USD obtenu auprès de NBK Capital (National Bank of Kuwait) en février 2022.

Fondée en 2020 par Ladi Delano et Jide Odunsi, deux Britanniques d’origine nigériane, l’entreprise est le partenaire exclusif d’Uber en Afrique subsaharienne. Moove propose des formules tout-compris (véhicule, téléphone, abonnement, caméra de sécurité, etc.) permettant aux personnes exclues des circuits de financement traditionnels de devenir à terme (en 12 à 48 mois) propriétaires d’un véhicule. Les véhicules qu’elle met à disposition des conducteurs, notamment via un partenariat avec CFAO Motors, ont depuis la création de l’entreprise parcouru plus de 25 millions de kilomètres, et permis d’effectuer plus de trois millions de courses. Déjà présente à Lagos, Accra, Le Cap et Johannesburg, elle a pour ambition de diffuser son modèle dans d’autres pays en développement en Asie et au Moyen-Orient.

Pour rappel, moins de 5 % des véhicules en Afrique sont achetés grâce à une solution de financement, contre 92 % en Europe, continent qui compte près de 640 véhicules pour 1 000 habitants (44 en Afrique).

Le Nigéria fait face à une accélération de l’inflation dès le mois de février

Après un léger ralentissement en janvier 2022, l’inflation est repartie à la hausse au Nigéria. Le taux d’inflation sur un an est ainsi passé de 15,6% en janvier à 15,7% en février. En seulement un mois, les prix ont augmenté de 1,63%, soit 0,16 point de pourcentage de plus qu’entre décembre et janvier. Cette inflation a été particulièrement forte pour les produits alimentaires dont les prix ont augmenté de 1,87% en seulement un mois, soit une hausse de 17,1% sur un an, la plus importante parmi les différents postes de dépenses.

Selon le Bureau national des statiques, cette hausse est principalement due à une augmentation des prix de l’énergie. Le Nigéria connaît en effet une pénurie d’essence depuis le mois de janvier, provoquant une explosion des prix de l’essence au marché parallèle. Le litre s’y échange désormais à 450 NGN (1,08 EUR), soit plus du double du prix réglementé de 165 NGN dans les stations-service. Le prix du diesel a également été multiplié par deux, passant de 300 NGN le litre à environ 700 NGN. Enfin, la crise ukrainienne a eu un impact sur les prix au Nigéria dès le mois de février selon les pouvoirs publics. Cependant, les prix de l’eau, de l’électricité, du gaz et autres carburants ont également augmenté entre janvier et février.

Cette annonce d’une accélération de l’inflation, dans un contexte de hausse généralisée de prix – la FED a déjà annoncé une remontée de son taux directeur à 0,5% – intervient  à seulement quelques jours du prochain comité de politique monétaire, qui se tiendra les 21 et 22 mars.

Le gouvernement met fin à la subvention de l’électricité

La Commission nigériane de régulation de l’électricité (Nigerian Electricity Regularoty Commission, NERC) a confirmé la suppression d’une subvention aux prix de l’électricité. Celle-ci, introduite après la privatisation du secteur, avait pour but de combler l’écart entre le coût de production de l’électricité et le prix de vente. Entre 2019 et 2021, cette aide aura couté au gouvernement environ 1 000 Md NGN  (2,41 Md USD). En raison de cette suppression, les prix de l’électricité ont légèrement augmenté en février 2022, de plus ils seront revus tous les 6 mois afin de les ajuster au taux de change de la Naira et à l’inflation. 

Cette annonce a lieu alors que le Nigéria a connu plusieurs coupures de courant au début du mois de mars, en raison d’actes de vandalisme et d’une pénurie de gaz dans les centrales électriques. La faiblesse du réseau électrique et l’insuffisance des infrastructures aurait engendré, selon la Banque mondiale, une perte d’environ 96 400 Md NGN (232 Md USD) de revenus lors des huit dernières années pour les entreprises nigérianes, soit 29 Md NGN par an.   

Les importations de produits agricoles atteignent le niveau record de 4,3 Md EUR en 2021.

Les importations de produits agricoles ont augmenté de 42% en 2021, atteignant le niveau record de 1 970 Md NGN (soit 4,3 Md EUR) malgré les mesures prises par la Banque centrale (Central Bank of Nigeria, CBN) pour stimuler le développement du secteur agricole. En effet, la CBN a interdit l’octroi de devises pour l’importation de certains produits agricoles (riz, légumes, maïs…) ou l’a conditionné à des investissements d’intégration industrielle (lait, sucre) pour favoriser la production locale. En outre, la CBN a mis en place plusieurs programmes de financement pour soutenir le secteur. Ainsi, 928 Md NGN (soit 2 Md EUR) ont été déboursés pour développer la culture de produits de base (manioc, huile de palme, tomate, etc.) Depuis 2015, 4,5 millions de petits exploitants ont bénéficié de ce programme de prêts agricoles. Malgré ces mesures, la production intérieure ne permet toujours pas de répondre à la demande locale et la croissance du secteur stagne (2,1% en 2021 et 2020).

Pour rappel, le secteur agricole est le plus important de l’économie : il représente 26% du PIB et emploie 70% de la population de manière formelle et informelle.

Ghana

La valeur du ghana cedi s’était érodée de 17% à la mi-mars, par rapport à fin 2021

Selon les taux de change interbancaires quotidiens (moyenne pondérée du jour) publiés par la Bank of Ghana, au 15 mars 2022, le cedi a plongé de 17,1 % par rapport au dollar américain en moins de trois mois, se vendant à 7,03 GHC/ 1 USD. C’est la pire performance de la monnaie depuis août 2015, lorsqu'elle s'était dépréciée de 18,4% par rapport au dollar américain. La situation est encore plus alarmante lorsqu'elle est calculée avec les données des banques commerciales sur le montant de la vente du dollar sur le marché : les données recueillies sur le marché mi-mars montrent que les banques ont vendu le dollar en moyenne à 7,3 GHC, ce qui indique une dépréciation de 21,5%.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette chute du cedi, dont une forte demande de devises de la part des importateurs, l’augmentation mondiale des prix du pétrole et des aliments de base, la hausse de l’inflation (15,7% en février 2022), les incertitudes sur la dette ghanéenne et la guerre russo-ukrainienne. Le Ghana ne peut stabiliser le cours de sa monnaie en lançant des émissions d’euro-obligations du fait des récentes dégradations de sa note souveraine. Une certaine stabilisation est néanmoins attendue pour le deuxième trimestre, lorsque le gouvernement sera en mesure de collecter davantage de recettes et aura reçu des fonds de bailleurs, comme les prêts syndiqués pour le cacao.

L’inflation menace particulièrement les boulangeries ghanéennes, qui risquent de fermer

Les problèmes des chaînes de valeurs causées par la pandémie, la dépréciation de la monnaie nationale et la hausse des prix alimentaires de base ont fait grimper l’inflation, qui atteint 15,7%.

Les céréales ont connu certaines des plus fortes hausses de prix – et c’était avant que l’invasion russe de l’Ukraine ne tende davantage les marchés mondiaux des matières premières, en particulier le blé. Les prix mondiaux du blé et de l’orge avaient déjà augmenté de 31% en 2021 et le blé a vu son prix augmenter de 70% depuis le début de l’année. Entre cette augmentation des prix mondiaux et l’inflation nationale, les boulangeries ghanéennes peinent à survivre, alors que les prix de vente sont normalisés par l’association nationale des boulangers et n’ont pas augmenté depuis août.

Par ailleurs, le Ghana importe près d’un quart de son blé de Russie, ce qui risque de tendre encore plus les prix de la céréale au Ghana. Si le blé est loin d’être la céréale la plus consommée au Ghana, le pain reste un aliment de base, bien que dans une moindre mesure par rapport à ses voisins francophones. Par ailleurs, la hausse des cours du blé pourrait avoir des répercussions sur le prix des substituts, comme sur le riz, le maïs ou la farine de manioc.