Actualités économiques du Nigéria et du Ghana - semaine 4 du 24 au 30 janvier 2022
Publication du Service économique régional d’Abuja, réalisée avec les contributions des SE de Lagos et d’Accra.
Faits saillants:
- Nigéria : L’abandon de la suppression de la subvention à l’essence coûtera au moins 3 000 Mds NGN au gouvernement fédéral en 2022 ; Malgré les recommandations du FMI et la hausse attendue des taux américains, la Banque Centrale maintient sa politique ; Le Président Buhari lance officiellement la politique nationale sur les réseaux de cinquième génération (5G) ; Les recettes du port de Tincan ont dépassé de 41 % l’objectif du gouvernement fédéral.
- Ghana : L’Union européenne retire le Ghana de sa liste des pays à risque en matière de blanchiment d’argent ; Le Ghana aurait perdu plus de 2 milliards de dollars de recettes fiscales en six ans à cause de la sous-évaluation des exportations d’or.
Le chiffre à retenir:
+2,7% : Le FMI a revu à la hausse ses prévisions de croissance du Nigéria pour 2022, avec une augmentation de 0,1 point de pourcentage. Ce taux de croissance devrait rester stable en 2023, toujours selon le FMI.
Nigéria
L’abandon de la suppression de la subvention à l’essence coûtera au moins 3 000 Mds NGN au gouvernement fédéral en 2022
Alors que le gouvernement fédéral prévoyait de lever la subvention à l’essence en juin 2022, la ministre des Finances, Mme Zeinab Ahmed, a finalement annoncé l’abandon de cette mesure. Celle-ci suscitait de vives critiques, et le Nigeria Labour Congress, qui regroupe les syndicats de travailleurs, prévoyait des manifestations de masse au mois de février 2022.
Selon le CEO de la Nigerian National Petroleum Company (NNPC), le retrait de la subvention aurait dû provoquer une augmentation du prix du litre d’essence à plus de 320 NGN, contre 162 NGN actuellement. En conséquence, la NNPC a demandé au gouvernement fédéral un total de 3 000 Mds NGN (env. 6,4 Mds EUR), soit un coût moyen de la subvention de 270 Mds NGN par mois (580 M EUR). Or, le budget 2022 ne prévoyait que 443 Mds NGN pour ces subventions, la ministre attribuant cette différence d’estimation à la variation des cours du pétrole et l’augmentation de la consommation de carburant. Ce total, que le gouvernement souhaite renégocier à la baisse avec la NNPC, devrait donc se répercuter sur la dette publique.
Pour rappel, selon le Plan quinquennal d’investissement 2021-2025, le stock de dette publique devrait atteindre 50 000 Mds NGN en 2023.
Malgré les recommandations du FMI et la hausse attendue des taux américains, la Banque Centrale maintient sa politique
La Banque Centrale du Nigéria a tenu cette semaine son premier comité de politique monétaire de l’année. Cette réunion n’a conduit à aucune modification de la politique monétaire actuelle du pays, le banquier central conservant un taux directeur à 11,5%, avec un corridor asymétrique de +100/-700 points de base.
Cette persévérance dans une politique relativement expansionniste, le taux réel étant négatif en raison du taux d’inflation, se fait malgré un certain nombre de signaux contraires. Le FMI a appelé la semaine dernière les économies émergentes à ne pas soutenir coûte-que-coûte leur monnaie et remonter progressivement les taux d’intérêt pour faire face à une hausse des taux directeurs américains. La FED devrait en effet annoncer prochainement un resserement de sa politique monétaire pour faire face à l’inflation aux Etats-Unis. De plus, après 8 mois de décélération, l’inflation est repartie à la hausse au Nigéria, avec +15,6% en décembre 2021, contre +15,4% en novembre.
La CBN pourrait être tentée de soutenir davantage encore la Naira face au Dollar qui devrait s’apprécier, en raison de la remontée des taux. Or les réserves de changes du Nigéria ont atteint, en janvier 2021, la barre symbolique de l’équivalent de 3 mois d’importations, ratio minimum préconisé par le FMI.
Le Président Buhari lance officiellement la politique nationale sur les réseaux de cinquième génération (5G)
Le Nigéria est l’un des premiers pays d’Afrique à adopter la technologie 5G. Après une série d’études sanitaires, l’approbation par le Conseil exécutif fédéral a permis la mise en place d’une politique au niveau national et, en septembre 2021, les licences 5G ont été mises aux enchères. Ce sont les opérateurs MTN Nigéria et Mafab Communications qui ont remporté le spectre de 3,5 GHz en décembre 2021.
Cette technologie 5G devrait notamment permettre de lutter contre l’insécurité au Nigéria, grâce notamment au développement de l’intelligence artificielle. Le Président Buhari a également souligné les effets bénéfiques de cette technologie sur l’économie du pays et le bien-être de la population. D’après Qualcomm, entreprise américaine spécialisée dans le domaine des technologies mobiles, la mise en place de la 5G devrait permettre des retombées économiques de l’ordre 12 300 Mds de dollars d’ici 2035 et environ 22 millions d’emplois, au niveau mondial.
Les recettes du port de Tincan ont dépassé de 41 % l’objectif du gouvernement fédéral
Selon un communiqué du contrôleur financier des douanes du Terminal de Tincan, M. Abdullahi Musa, les recettes collectées pour l’année 2021 se sont élevées à 493 Mds NGN, soit plus d’un milliard d’euros (1,06 Mds EUR). L’objectif initial du gouvernement fédéral était de 350 Mds NGN, ce qui signifie une surperformance de plus de 143 Mds NGN, soit 41 %. Ce chiffre traduit également une croissance considérable par rapport à 2020 (+28%).
Au total, selon le même communiqué, plus de 58 000 conteneurs et véhicules ont été transférés du terminal de Tincan vers les entrepôts temporaires avant dédouanement. Par ailleurs, plus de 1,72 MT de marchandises ont été exportées via le terminal de Tincan vers le reste du monde en 2021, pour une valeur d’environ 141 Mds NGN (300 M EUR).
Pour rappel, selon le Nigerian Economic Summit Group (NESG), le secteur maritime nigérian, mieux exploité, pourrait générer 7 000 Mds NGN par an (15 Mds EUR) et créer quatre millions d’emplois sur les cinq prochaines années.
Ghana
L’Union européenne retire le Ghana de sa liste des pays à risque en matière de blanchiment d’argent
Dans une lettre du 7 janvier 2022, la Commission européenne a annoncé avoir retiré le Ghana de la liste des pays à risque en matière de blanchiment d’argent, sur laquelle il figurait depuis octobre 2020. Ce retrait est notamment dû à la mise en place d’un certain nombre de règles et de cadres légaux répondant aux exigences du groupe d’action financière (GAFI). Pour rappel, en juin 2021, le GAFI avait retiré le Ghana de la liste des pays présentant des carences en matière de lutte contre le blanchiment d’argent, où il était inscrit depuis mai 2020.
Le Ghana a également légèrement progressé dans le classement de Transparency International relatif à la perception de la corruption : 75ème sur 180 pays en 2020, il est passé à la 73ème place en 2021.
Néanmoins, le Ghana conserve le faible score de 43/100 dans la lutte contre la corruption entre 2020 et 2021. De plus, la performance actuelle du pays est toujours inférieure à la moyenne attendue de 50. Le rapport formule des recommandations qui permettraient d'améliorer ce score, notamment par le renforcement des contrôles institutionnels du pouvoir.
Le Ghana aurait perdu plus de 2 milliards de dollars de recettes fiscales en six ans à cause de la sous-évaluation des exportations d’or.
En ce qui concerne l’or, cette sous-évaluation équivaut à environ 11 % du total des exportations du métal entre 2011 et 2017. Le grand producteur d’or du continent a donc son vu son assiette fiscale érodée de 2 Mds USD à prix constants, en 2011 et 2017.
Pour rappel, la mauvaise évaluation commerciale se produit lorsqu’un ou les deux partenaires commerciaux font délibérément une fausse déclaration sur la valeur, la quantité ou la nature des biens et services dans une transaction commerciale. Ce phénomène a tendance à toucher particulièrement les pays en développement riches en ressources comme le Ghana, en raison notamment d’une réglementation de l’évaluation des exportations limitée et de risques de prix de transfert découlant d’opérations internationales d’entreprises multinationales.