Actualités économiques du Nigéria et du Ghana - semaine 2 du 10 novembre au 16 janvier 2022
Publication du Service économique régional d’Abuja, réalisée avec les contributions des SE de Lagos et d’Accra.
Faits saillants:
- Nigéria : Signature du premier prêt du Trésor au Nigeria depuis 1990 ; Le FMI et la Banque Mondiale anticipent des conséquences négatives au Nigeria d’une hausse du taux de la FED ; Le Nigéria lève la suspension de Twitter, après 7 mois d’interdiction ; Le canadien Thor Explorations prévoit la production de 100 000 onces d'or à Segilola en 2022 ; La startup SeamlessHR lève 10 M USD.
- Ghana : Le Cédi ghanéen pourrait dépasser les 7 GHc pour 1 USD fin 2022 ; L’augmentation de la dette publique ghanéenne se poursuit en 2022.
Le chiffre à retenir:
3,5 Md USD : C’est le montant des pertes causées par le vol et la contrebande de pétrole brut au Nigéria, en 2021. Ce montant représente près de 10% des réserves extérieures de change du pays.
Nigéria
Signature du premier prêt du Trésor au Nigeria depuis 1990
S.E. Mme Emmanuelle Blatmann, Ambassadrice de France au Nigeria et S.E. Mme Zainab Ahmed, Ministre fédérale des Finances, du Budget et de la Planification, ont signé le 13 janvier le premier prêt du Trésor au Nigeria depuis 1990. D’un montant de 55 MEUR, ce prêt concessionnel vise à rénover les infrastructures et équipements de santé dans l’Etat d’Oyo. Répondant à la volonté du Gouverneur de l’Etat, M. Seyi Makinde, une importance particulière a été accordée à la rénovation de l’ensemble des quelque 300 dispensaires de l’Etat. Plusieurs hôpitaux seront également dotés de nouvelles unités de soins spécialisés, y compris dans le domaine de la pédiatrie et de la chirurgie, ainsi que d’ambulances.
Le FMI et la Banque Mondiale anticipent des conséquences négatives au Nigeria d’une hausse du taux de la FED
Le FMI et la Banque Mondiale ont tous deux publiés des prévisions pour 2022 relativement pessimistes pour les pays en développement, dont le Nigéria. Ce pessimisme est dû au probable resserrement de la politique monétaire américaine, via une remontée du taux d’intérêt directeur de la FED.
L’augmentation de ce taux, fixé à 0,25% depuis mars 2020, devrait avoir pour effets d’une part de réduire la consommation américaine – et donc les échanges internationaux – et d’autre part d’augmenter les flux de capitaux vers les États-Unis. Le dollar devrait en conséquence s’apprécier sur le marché des changes. Cette politique devrait entrainer un recul de l’activité économique des économies émergentes, en raison de la baisse de la demande, ainsi qu’une accélération de l’inflation, via l’appréciation du dollar. Or l’économie nigériane fait déjà face à une inflation forte – environ 17% en 2021 – tout en ayant très peu de marge de manœuvre budgétaire en cas de réduction de l’activité économique. Le FMI recommande un resserrement de la politique monétaire nigériane par une augmentation du taux d’intérêt directeur, actuellement inférieur au taux d’inflation, afin de limiter la sortie des capitaux et de limiter l’augmentation des prix, tout en laissant la Naira se déprécier, afin notamment de relancer les exportations.
Le Nigéria lève la suspension de Twitter, après 7 mois d’interdiction
Après 222 jours de suspension, le gouvernement fédéral a levé, le 13 janvier à minuit, le blocage du réseau social Twitter en vigueur depuis le 4 juin dernier. En cause, la suppression d’un tweet du Président Buhari par le réseau social, mais aussi un différend entre l’entreprise américaine et le gouvernement nigérian. La décision de Twitter de créer une entité légale au Nigéria et de se soumettre aux règles fiscales ont permis la levée de l’interdiction. Cette annonce intervient quelques jours seulement après l’annonce par la Ministre des Finances de la création d’un nouvel impôt de 6% sur le chiffre d’affaires réalisé au Nigéria par des entreprises étrangères du digital.
D’après l’organisation de surveillance de l’utilisation d’internet Netblocks, cette suspension aura couté 546,5 Md NGN (1,33 Md USD) en seulement 7 mois, soit 2,5 Md NGN par jour, à l’économie nigériane.
Le canadien Thor Explorations prévoit la production de 100 000 onces d'or à Segilola en 2022
Dans ses prévisions pour 2022, la compagnie canadienne Thor Explorations a évoqué une production de 20 000 à 22 000 onces d'or au premier trimestre sur son exploitation de Segilola, et 100 000 onces (2 835 kgs) sur l'année, pour une valeur estimée à plus de 180 M USD. Le projet de Segilola, détenu à 100 % par Thor Explorations, est le plus avancé du groupe en Afrique de l'Ouest, également présent au Sénégal (Douta) et au Burkina Faso (Houndé). Situé dans l'État d'Osun (Sud-Ouest), il est entré en phase de production commerciale en octobre 2021 et contiendrait au total plus de 500 000 onces d'or (14 175 kgs). Il représente ainsi la première mine d'or à vocation commerciale du pays.
Après des études de faisabilité en 2017 et 2018, le projet de Segilola a nécessité des levées de fonds importantes. Dès 2019, Thor Explorations avait levé 78 M USD auprès de l'Africa Finance Corporation, suivis de 10 M USD en 2020. Au total, Thor Explorations, valorisée à plus de 128 M USD, estime que le projet devrait créer plus de 400 emplois directs et 1 000 emplois indirects. Pour rappel, si le secteur minier ne représente pas plus de 1 % du PIB du Nigéria (contre 5 % en 1970), son potentiel demeure bridé par des exploitations principalement artisanales et des pratiques illégales.
La startup SeamlessHR lève 10 M USD
Co-fondée en 2018 à Lagos par Emmanuel Okeleji et Deji Lana après un premier projet lancé en 2013 sous le nom de Insidify, la startup Seamless HR vient d'annoncer une levée de fonds de 10 M USD. Ce nouveau financement servira l'expansion de l'entreprise sur le reste du continent.
SeamlessHR propose une plateforme unique fonctionnant sur le cloud (Software-as-a-Service, SaaS), permettant aux entreprises d'automatiser leur gestion des ressources humaines et de la paie. Cette nouvelle levée de fonds porte le financement total de la startup à plus de 12 M USD, après une levée initiale en octobre 2020 qui lui a permis de perfectionner ses solutions et de recruter à ce jour 130 personnes. Elle a été menée par le fonds TL Com Capital, un fonds britannique spécialisé sur le continent africain et qui a notamment financé la licorne nigériane Andela. Ces nouveaux fonds permettront à l'entreprise, déjà présente au Nigéria et au Kenya, de s'étendre en Afrique du Sud, et de développer de nouveaux services fondés sur une plus grande exploitation des données.
SeamlessHR est déjà utilisée au Nigéria, au Ghana et en Tunisie par de grands groupes, dont Axa et PwC. Elle entre en concurrence avec d'autres startups du secteur de la gestion administrative des entreprises telles que Bento et Workpay.
Ghana
Le Cédi ghanéen pourrait dépasser les 7 GHc pour 1 USD fin 2022
Cette baisse de la monnaie nationale pourrait résulter d'une hausse continue de l'inflation en 2022, selon le Ghana Statistical Service, ainsi que de celle des importations du fait de la reprise de l'activité économique. Le CEFIS ne prévoit pas non plus d'amélioration des réserves de change, ce qui sera de nature à renforcer la pression exercée sur le Cédi, a fortiori si la disponibilité des liquidités au niveau global venait à se réduire.
Si la Banque centrale du Ghana a souligné l'amélioration des réserves de change (10 Mds USD en octobre 2021, soit cinq mois d'importations), elle a également indiqué qu'elle injecterait 450 M USD sur le marché des changes durant le premier trimestre 2022.
L’augmentation de la dette publique ghanéenne se poursuit en 2022
Le Ghana enregistre un des taux d’endettement public les plus importants d’Afrique. En 2021, la dette publique devrait représenter 83,5% du PIB, classant le Ghana parmi les pays à fort risque de surendettement, selon le FMI.
Cette tendance à la hausse devrait se poursuivre en 2022. Le gouvernement a annoncé l’émission de 24,5 Md GHS (4 Md USD) de dettes lors des trois premiers mois, soit une augmentation de 7,2% par rapport au stock total de septembre 2021. Cette émission de bons du Trésor, pour des maturités allant de 91 jours à 6 ans, sera d’un montant de 9,3 Md GHS (1,5 Md USD) au mois de janvier. 41% de ce montant sera par ailleurs émis sur les marchés domestiques. Or cette dette intérieure, qui représentait 52,1% du stock total en septembre 2021, est extrêmement coûteuse pour les finances publiques. En effet, les intérêts qui représentent 7,5% du PIB ghanéen, sont absorbés à hauteur 77,3% par ceux de la dette intérieure. Le gouvernement en a donc profité pour rappeler sa volonté, d’une part de dégager un excédent budgétaire afin de stabiliser son stock de dette, mais également de réduire le coût de sa dette intérieur grâce à un rééchelonnement de cette dernière en 2022.