SITUATION POLITIQUE ET SANITAIRE (COVID)

L’Espagne est passée en risque « modéré » de transmission du Covid. L’incidence est à la hausse, et atteint les 132 cas/100 000 hab. sur 14 jours (soit +50 par rapport au 11/11). Le variant delta est dominant dans toutes les régions et représenterait 98,9% des nouveaux cas pendant la semaine 44 (du 1 au 7 novembre). Les régions frontalières avec la France sont les plus touchées par cette reprise. L’Espagne peut se targuer d’une campagne de vaccination réussie : 80,5% de la population totale a reçu au moins une dose du vaccin (soit 90,7% de la population cible ; âgée de plus de 12 ans), 79% est vaccinée (soit 89 % de la population cible).

Le Portugal face une remontée des indicateurs sanitaires. Pour le pays, comme dans le reste de l’Europe, le mois de novembre est marqué par une remontée du taux d’incidence du Covid-19 (env. +200% en glissement mensuel), bien que moindre s’agissant des hospitalisations et des décès. Si le Portugal affiche l’un des meilleurs taux de vaccination au monde (87% de vaccination complète) grâce à une forte adhésion de la population, la mise en œuvre du renfort vaccinal est contrainte par la logistique. Le Conseil des ministres a annoncé le 25 novembre le retour de mesures sanitaires : masque obligatoire dans les espaces fermés ; pass sanitaire obligatoire pour les restaurants, établissements touristiques, évenements avec places assises et salles de sports ; test négatif obligatoire (même avec vaccination complète) pour les visites en maison de retraites et à l’hôpital et l’accès aux bars/discothèques et grands évènements ; test négatif obligatoire pour les arrivées en avion au Portugal ; semaine de « confinement des contacts » entre le 2 et le 9 janvier (fermeture des écoles, télétravail obligatoire, fermeture des bars et des discothèques).

ACTUALITÉS AGRICOLES

Future PAC

Plans stratégiques nationaux (PSN) : dernière ligne droite pour l’Espagne et le Portugal. Les 2 pays viennent de terminer leurs projets de PSN. Le Portugal a ainsi pu soumettre son plan à la consultation publique, tandis que l’Espagne le fera fin novembre. Ainsi, l’Espagne et le Portugal devraient pouvoir transmettre leurs projets à la Commission européenne fin décembre comme prévu.

 

Plan de relance et de résilience, fonds européens

Lancement par le gouvernement portugais de 17 appels à projets, pour un total de 300 M€, afin de soutenir le secteur agricole. Les appels à projets, lancés jusqu’à fin mars 2022, seront issus du programme de développement rural (PDR2020), financé par le FEADER dans le cadre du second pilier de la PAC. Le premier soutiendra les investissements dans la transformation et la commercialisation des produits agricoles, à hauteur de 40 M€. Des avis seront également émis pour les investissements dans les exploitations agricoles (65 M€), pour l'amélioration de l'efficacité des parcelles d'irrigation existantes (70 M€). La reprogrammation du PDR2020 pour la période 2021-2022 assurera la continuité du soutien aux bénéficiaires, accompagnée de ressources additionnelles, pour un montant total de 1,4 Md€ sur les deux ans.

Un consortium candidate au PRR portugais dans la production d'insectes. Intitulé « Agenda InsectERA », il réunit 38 entreprises et centres de recherche. Le projet vise la création de 140 nouveaux emplois et un chiffre d'affaires de 23 M€ à horizon 2025. L'investissement de 57 M€ sur une durée de quatre ans, dont 25 M€ pour la R&D, serait financé à hauteur de 38 M€ par le PRR. Avec la création de trois usines de production d'insectes, d'une usine de production de chitosan et d'un centre logistique, l'objectif est produire près de 43 nouveaux produits et services.

 

Coûts de production, engrais

Les agriculteurs espagnols alertent sur une possible baisse de la production. Selon eux, la flambée généralisée des prix des moyens de production au cours du dernier trimestre (engrais +100%, gasoil +40 à 60%, énergie +300%, plastiques + 50%, eau +30%, aliments du bétail +25%) pourrait entrainer dans les mois qui viennent une baisse de l’activité productive du pays. Les agriculteurs sont dans l’incapacité de répercuter la hausse des coûts de production sur le prix de leurs produits, qui, dans de nombreuses filières, n’a pas augmenté depuis 20 ans. Dans les filières porcines et avicoles, les éleveurs auraient d’ores-et-déjà réduit les entrées d’animaux de 10%. En fruits, légumes et grandes cultures, de nombreux producteurs renonceraient à certains engrais et seraient tentés d’utiliser des semences non certifiées. La profession appelle la grande distribution à réduire ses marges afin de mieux rémunérer les agriculteurs, et exhorte le ministère à renforcer les contrôles pour garantir la bonne application de la « Loi Egalim ». Certaines organisations ont demandé des aides directes et fiscales pour accompagner les agriculteurs.

Une hausse des prix inévitable au Portugal face à l'augmentation des coûts de production. Selon la Confédération des agriculteurs, l'augmentation du coût des facteurs de production (carburant, énergie, engrais et transport) rend inévitable une hausse des prix des produits tout au long de la chaîne de valeur agroalimentaire, reflétée dans les prix au consommateur final. Sont notamment en jeu des produits tels que les engrais (+50%), mais aussi les tracteurs, dont la disponibilité est de plus en plus compromise. Même constat de la Fédération nationale des coopératives de producteurs de bétail qui estime que les prix du lait et de la viande devront nécessairement augmenter. Face à la hausse continue des prix des matières premières et des denrées alimentaires, l’Association portugaise des fabricants d'aliments composés pour animaux alerte quant à elle sur les risques de faillite, de réduction du cheptel, de désertification du territoire et in fine d’une plus grande dépendance alimentaire. Le ministre de l’Economie portugais a toutefois assuré fin novembre qu’il n’existait pas, à ce stade, de pénurie d'approvisionnement ni de rupture de stock dans la chaîne alimentaire.

 

Fruits et légumes

Début de campagne sous tension pour l’orange espagnole, le ministre appelle à la réciprocité des normes sanitaires. Selon les organisations professionnelles de la communauté de Valence, principale région de production d’agrumes du pays, les prix aux producteurs de Naveline (principale variété d’orange produite en Espagne) ont chuté jusqu’à 0,15 € le kilo, bien en deçà des coûts de production (estimés à 0,23 €/kg selon l’INRA de Valence), alors que la perspective d’une campagne courte en volume (-9,1%) incitait à l’optimisme. Les syndicats agricoles attribuent cette situation à la substitution par la grande distribution de la production espagnole par celle provenant d’Afrique du Sud, d’Egypte et du Maroc. Lors d’un récent déplacement à Valence, le ministre Planas a déclaré qu’il fallait que les produits phytosanitaires non autorisés par l'UE ne soient pas utilisés sur les agrumes en provenance de pays tiers.

La production d'oranges augmente de 15 à 20 % en Algarve, craintes sur les effets des parasites. La campagne 2021 connait une production d’orange en hausse de 15 à 20%, mais également une baisse des prix d’au moins 15% par rapport à l’année dernière. Cependant, l'Association AlgarOrange craint que les parasites (mouche des fruits, trioza) ne provoquent des pertes de production de 70% dans un avenir proche.

De bonnes perspectives pour la campagne fruitière portugaise. Selon le dernier rapport de l’Institut national de la statistique (INE), une augmentation significative de la production de la plupart des cultures fruitières est attendue.  En ce qui concerne les fruits à pépins, le cycle de production s'est déroulé favorablement, avec une production de 341 000 t en pommes (la deuxième plus importante depuis 1986), de 183 000 t en poires (+40% par rapport à la dernière campagne) et 50 000 t en kiwi.

Dans le secteur des amandes, la production atteindra 38 000 t (niveau le plus élevé depuis 25 ans). Enfin, dans le secteur viticole, malgré une certaine hétérogénéité régionale, une augmentation de 5% est prévue par rapport à la récolte 2020. Quant aux tomates destinées à la transformation, elles dépasseront à nouveau 1,5 Mt, avec un rendement unitaire historiquement élevé.

 

Porc blanc

La baisse des cours ralentit en Espagne. Le marché espagnol du porc blanc reste sous pression, avec des prix bas mais stables, et des abattages dynamiques, malgré une demande intérieure peu soutenue et des exportations toujours difficiles vers la Chine. Contrairement aux autres marchés de l’UE, les prix de la viande ne remontent pas, ce qui permet aux exportateurs espagnols de retrouver quelques marges à l’export. Ces derniers ne s’attendent pas à une reprise des achats chinois avant février-mars 2022.

Nouvelle alerte de la Fédération portugaise des associations d'éleveurs de porcs. La FPAS estime que les éleveurs de porcs sont "au bord de l'effondrement" (sic) et que sans mesures d’urgence, environ 20 000 petites entreprises familiales d'élevage de porcs seraient menacées de faillite en raison d'un manque de capacité financière. Contrairement à d'autres filières, les cours du porc ont connu 21 semaines de baisse constante (-53,3 c€ depuis juin) ne permettant pas aux éleveurs une répercussion des coûts de production dans le prix du produit fini. Si les cours de la bourse de Lleida se maintiennent ces deux dernières semaines, avec une très légère hausse pour le Portugal (+0,7 c€), la situation reste particulièrement difficile.

 

Lait

Les éleveurs laitiers espagnols en colère contre Lactalis. Les producteurs laitiers ont manifesté devant les usines Lactalis de Galice et Castille-et-León pour protester contre les prix du lait. Le prix producteur en Espagne se situe parmi les plus bas de l’UE, et la légère hausse consentie aux producteurs ces derniers mois n’est pas à la hauteur de la flambée des coûts de production (notamment de l’alimentation animale qui représente 50 à 60% des coûts totaux). Selon les organisations syndicales, les éleveurs percevraient jusqu'à 34 centimes d'euro par litre de lait, alors que le coût de production serait de 40 centimes. Dans ces conditions, les pertes annuelles d’une exploitation moyenne (sur la base d’une production de un million de litres par an) seraient de 60 000 €. Alors que l’Espagne est structurellement déficitaire en lait (le pays consomme 9 Mt de lait mais n’en produit que 7,5 Mt), les professionnels réclament des prix justes, dans le respect de la Loi Egalim.

Les producteurs de lait portugais exigent des prix alignés sur la moyenne de l'UE. Le prix du litre de lait payé au producteur en octobre au Portugal était de 30 c€, alors que la moyenne dans l'Union européenne était de 38 c€. Les producteurs portugais exigent de manière urgente une rémunération au juste prix, au risque sinon de devoir fermer des dizaines de fermes laitières dans le pays d’ici la fin d’année 2021. L'Association des producteurs de lait du Portugal (Aprolep) estime le  soutien à l’investissement de 300 M€ annoncé par le gouvernement, dont seulement 5 M€ (1,7%) spécifiquement destinés au secteur laitier, très insuffisant.

 

Céréales

Hausses des cours record, notamment sur l’orge. En Espagne aussi les cours des céréales sont au plus haut. Au cours des deux dernières semaines, la plupart des marchés du pays ont enregistré des hausses spectaculaires, de plus de 10 € la tonne. A Barcelone et Binéfar (Huesca), l’orge a passé la barre symbolique des 300 € la tonne, soit une hausse de 60% par rapport à la cotation de 2020 à la même époque. Sur le maïs, la hausse est plus modérée.

De bonnes prévisions pour la production portugaise de maïs et de riz. Selon l’INE, la production globale (irriguée et non irriguée) de maïs atteindra 716 000 t, soit +5% par rapport à la dernière campagne et proche de la moyenne des 5 dernières années. La production de riz devrait s’elever à 173 000 t, soit +7% que la moyenne des 5 dernières années, grâce à la hausse à la fois de la superficie ensemencée et des rendements unitaires.

 

Filière oléicole

De bonnes perspectives pour la campagne espagnole 2021-22. Après une campagne 2020-21 marquée par des volumes commercialisés record (plus de 1,63 Mt), la campagne huile d’olive 2021-22 a démarré le 1er octobre sous de bons auspices, selon l’interprofession espagnole. Sous l’effet des températures élevées et des faibles précipitations, l’offre devrait se situer autour de 1,3 Mt, un volume en légère diminution mais suffisant pour couvrir la demande intérieure et les exportations (notamment vers les États-Unis et l’Italie, ses 2 premiers clients) qui, pour la 4ème année consécutive, pourraient dépasser le million de tonnes. Toutes les régions espagnoles prévoient une production en baisse, sauf l’Estrémadure qui devrait atteindre des volumes élevés. L’Espagne devrait conserver son rang de leader de la production mondiale d’huile d’olive. Le marché de l’olive de table devrait également retrouver l’équilibre, avec une production qui devrait frôler les 600 000 t, en hausse de 8% par rapport à la campagne antérieure, grâce à la relance de variétés plus productives.

La productivité moyenne des oliveraies portugaises à un niveau historique. L’INE prévoit  une productivité moyenne supérieure à 3 t/ha pour l'huile d'olive (la plus élevée depuis 1986), favorisée par le poids croissant des oliveraies irriguées de manière intensive. En olives de table, la productivité devrait dépasser 2 t/ha pour la deuxième fois depuis 1986, suscitant même de l’inquiétude chez les producteurs concernant la disponibilité de main-d’œuvre pour la récolte, avec une période d'opportunité de récolte très limitée.

 

Alimentation

Retour progressif de la consommation hors domicile en Espagne. Selon le baromètre de l’AECOC (Association espagnole des fabricants et distributeurs), 29% des consommateurs espagnols reprennent progressivement leurs habitudes et déjeunent au restaurant au moins une fois par semaine, ce qui représente une augmentation de 6 points par rapport au chiffre de mars, mais reste toutefois inférieur au taux pré-Covid de 35%. 77% des personnes interrogées déclarent cuisiner à la maison presque tous les jours afin de manger sainement, passer du temps avec leur famille et leurs amis ou limiter leurs dépenses. La majorité des consommateurs sont retournés dans les bars et les restaurants, mais moins fréquemment qu'avant la crise sanitaire.

Promotion du plan national portugais pour une alimentation équilibrée et durable. Le ministère de l'Agriculture allouera environ 5 M€ au financement d'initiatives régionales visant à promouvoir le plan national pour une alimentation équilibrée et durable. L’appel à projet, qui sera lancé le 15 décembre, permettra notamment de recruter jusqu'à quatre techniciens par Communauté intercommunale pour deux ans. Il sera accompagné par des actions de sensibilisation des consommateurs et de la population des territoires ruraux pour adopter un régime nutritionnellement équilibré et consommer des produits de saison.

COMMERCE EXTÉRIEUR

Reprise spectaculaire des exportations de vins AOC espagnols en 2021. En interannuel au 1er août dernier, elles ont dépassé 1,3 Md€, chiffre le plus haut de la série historique (+10%), selon l’Observatoire espagnol du marché du vin (OeMv). Elles ont également augmenté en volume (+3,5%), avec un prix moyen au litre en croissance de 6%, à 3,94 €.

Hausse des exportations portugaises de produits agricoles entre janvier et septembre 2021, mais aggravation du déficit commercial. Les exportations de produits agricoles entre janvier et septembre 2021 ont atteint 3,2 Md€ (+10% en glissement annuel). Cependant sur la même période, les importations de produits agricoles s’élèvent à 6 Md€ (+8%), se traduisant par une détérioration de la balance commerciale de -167 M€. Les principaux produits agricoles exportés sont les graisses et huiles, les poissons et les fruits (55,6%  des exportations en cumulé). Le poisson et les graisses et huiles ont connu les plus fortes augmentations, atteignant respectivement 104 M€ (+23%)  et 74 M€ (+12,9%).

PÊCHE MARITIME ET AQUACULTURE

XXXIIème Sommet hispano-portugais / volet pêche. Les gouvernements des 2 pays se sont retrouvés le 28 octobre dans la ville de Trujillo (Estrémadure). S’agissant de la  pêche, l’Espagne et le Portugal ont défendu une réforme de la PCP privilégiant les enjeux économiques et sociaux dans la transition vers une pêche durable. Ils se sont félicités de leur étroite collaboration dans la gestion des quotas de la sardine ibérique. L’Espagne a salué le leadership portugais en matière de gouvernance internationale des océans, et confirmé sa participation à la prochaine conférence qui se tiendra à Lisbonne en juin 2022, et qui abordera l’ODD 14 des Nations Unies : « conservation et exploitation durable des océans, des mers et des ressources marines aux fins du développement durable ».

Aides à la digitalisation de la filière pêche espagnole. Le ministère a annoncé une enveloppe d’un montant de 3,8 Md€ (dont 1,45 Md€ pour l’année 2022) visant à financer la digitalisation des filières pêche et aquacole. L’objectif est notamment d’équiper les bateaux de plus de 12 mètres avec des systèmes de surveillance électronique à distance (REM).

Lancement du « Hub Azul » pour le développement de l'économie de la mer au Portugal. Le gouvernement portugais prévoit d’investir 87 M€ dans six centres de recherche et de développement des produits de l'économie de la mer en Algarve, à Lisbonne, Oeiras, Peniche, Aveiro et Porto. Le Hub Azul, financé par le PRR, vise à développer des technologies et promouvoir les liens entre monde universitaire et industrie dans les secteurs de la biotechnologie marine, des énergies océaniques, de la robotique sous-marine, de l'ingénierie et de la construction navale.