Hébergeant près de 9 % des forêts mondiales, le Canada est l’un des acteurs principaux du marché mondial du bois. Cependant, sous l’effet de plusieurs événements naturels (invasion d’insectes, incendies), la production de bois au Canada est en baisse depuis plusieurs années. La forte hausse de la demande de bois observée en 2020 a entraîné une aggravation des tensions sur l’ensemble de la filière, matérialisée notamment par de fortes hausses de prix depuis le début de l’année 2021.

1/ Une filière du bois fortement touchée par le ralentissement du commerce mondial

Structurellement, le bois brut ne représente qu’une part marginale des exportations de produits issus de l’exploitation forestière au Canada (810 M CAD/545 M€ en 2019, contre 33,2 Md CAD/22,3 Md€ pour l’intégralité de la filière forestière, soit 2,4 %). La majorité des produits d’exportation (et de la production) issus de l’exploitation forestière est constituée de papier, de pâte de bois ou encore de bois d’œuvre. Plus conjoncturellement, les exportations de bois brut[1] ont connu une baisse significative (-42 %) au cours de l’année 2020 dans le contexte de la pandémie (Annexe 1). Le ralentissement des exportations a aussi été observé en aval de la filière, avec notamment une baisse de 16,7 % des exportations de pâte de bois et de 11,6 % des exportations de papier, même si les proportions restent moins importantes que pour le bois brut.

En 2020, la Chine représentait près de la moitié (45,5 %) des exportations de bois brut canadien (Annexe 2), une part relativement stable par rapport aux années précédentes. Les Etats-Unis sont devenus le deuxième débouché du bois brut canadien, voyant leur part progresser de 19,3% en 2019 à 32,6% en 2020. Le Japon, à l’inverse, a rétrogradé au 3ème rang (13,4% des exportations canadiennes en 2020 contre 23,5% l’année précédente). Ces trois pays constituent ainsi la grande majorité des débouchés pour le bois brut canadien, tandis que les exportations vers les autres pays asiatiques et les pays européens restent très marginales.

Principal acteur de l’écosystème forestier canadien, la Colombie-Britannique représente plus de 85 % des exportations canadiennes de bois brut en 2020 (Annexe 3), une part en légère baisse par rapport à l’année précédente (90,1%). Le rôle des autres provinces dans les exportations de bois brut au Canada semble donc négligeable, même s’il convient de noter la progression de l’Ontario entre 2019 et 2020 (de 5,9% à 8,7%). L’Alberta et le Québec, qui sont par ailleurs des acteurs importants de la filière forestière canadienne, exportent peu de bois brut.
 
2/ L'essence de chêne très minoritaire au Canada
 

Les forêts canadiennes sont principalement composées de conifères (pins, sapins, épicéas, pruches, etc.) ; par conséquent, l’essence de chêne représente seulement 1 % des exportations de bois brut canadien en 2020 (4,7 M CAD/3,2 M€), contre près de 90 % pour l’ensemble des conifères (418 M CAD/281 M€). Les chênes canadiens, principalement des chênes blancs et des chênes rouges, se trouvent dans le sud de l’Ontario et du Québec. Les exportations de chêne ont par ailleurs connu une baisse de 17,3 % au cours de l’année 2020 (Annexe 4).

La Chine représente, comme pour l’ensemble des bois bruts, le principal débouché pour les exportations canadiennes de chêne (3,72 M CAD/2,5 M€ en 2020, soit près de 80 % du total des exportations de chêne brut, voir Annexe 5). Les deux autres pays clients pour le chêne brut canadien sont les Etats-Unis (412 000 CAD/277 000€ en 2020, soit 8,8%) et le Vietnam (410 000 CAD/275 000€ en 2020, soit 8,7%). Le commerce de bois entre le Canada et le Vietnam, important acteur régional du marché du bois en Asie, a notamment été renforcé au cours des dernières années par la signature de l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste, entré en vigueur en 2018. Enfin, à la différence des autres essences, les exportations de chêne brut en 2020 proviennent davantage de l’Ontario (51,6%) et du Québec (35,9%) que de Colombie-Britannique (12,5%) – cf. Annexe 6.
 
3/ Une secteur fortement régulé mais dont les réglementations n'ont pas été affectées par les tensions récentes
 

Le secteur du bois canadien est très régulé au Canada (Annexe 10  pour des précisions sur les réglementations existantes en Colombie-Britannique et au Québec). La superficie de forêt exploitée chaque année représente moins de 1 % de la superficie forestière du Canada et la majorité des forêts canadiennes sont publiques : plus de 90% des forêts canadiennes se trouvent sur les terres de la Couronne[2] et comptent pour 84% de l’approvisionnement en bois du Canada[3]. Les forêts et leur exploitation sont principalement administrées à l’échelle provinciale et territoriale ; dans ce cadre, chaque province met en place un plan d’aménagement forestier décrivant la planification des activités forestières pour des périodes et des unités territoriales données. La superficie exploitable ainsi que la quantité de bois récolté sont donc précisément définies et font l’objet d’un contrôle strict. Chaque province établit ainsi, à l’échelle de son territoire, un plan opérationnel prévoyant les zones de récolte et les quantités annuelles de bois autorisées (Annexe 11 et 12).

Dès les premiers mois de la pandémie, de fortes tensions sont apparues sur le marché du bois en raison de la demande croissante, notamment dans le secteur de la construction, et de contraintes importantes sur l’offre (manque de main-d’œuvre, restrictions à la production dans les principales provinces fournisseuses de bois). Cette tension a entraîné une forte augmentation de l’indice des prix du bois, qui a été multiplié par plus de 2 entre janvier 2020 et juin 2021 (Annexe 9). Ces hausses de prix ont eu de fortes répercussions sur l’ensemble de la filière jusqu’aux consommateurs finaux, en fonction de la capacité des entreprises à répercuter la hausse du prix du bois brut dans leurs prix. Certaines provinces (Alberta, Ontario, Colombie-Britannique) ont par ailleurs augmenté les redevances payées par les entreprises qui coupent et transforment le bois, générant ainsi des recettes publiques supplémentaires.

Les tensions observées ces derniers mois sur le marché du bois n’ont pas, à ce jour, entraîné la mise en place de nouvelles restrictions sur la production ou l’exportation de bois. Ces questions ont cependant émergé dans le débat public récemment, notamment au Québec[4], certains acteurs politiques (Bloc Québécois, Québec Solidaire) se positionnant en faveur d’un protectionnisme à l’export, tandis que d’autres acteurs à l’image du Conseil de l’industrie forestière du Québec  (CIFQ) demandaient plutôt l’autorisation au gouvernement de couper plus de bois afin de ne pas tourner le dos aux Etats-Unis, qui restent le principal débouché du bois canadien. Face aux grands pays producteurs de bois qui bénéficient de coûts de production bien inférieurs à ceux observés au Canada (notamment la Russie), l’industrie appelle davantage à une progression des standards environnementaux globaux plutôt qu’à la mise en place de mesures de sauvegarde au Canada. Il convient de préciser que le Canada a perdu des parts de marché sur le marché mondial du bois au cours des dernières années, notamment en Chine où la concurrence du bois russe freine les exportations de l’industrie du bois canadien.


[1] SH 4403 selon la classification établie par l’Organisation mondiale des Douanes

[2] 77% terres publiques provinciales, 13% terres publiques territoriales, 2% terres publiques fédérales