Le German Marshall Fund (GMF) et la Fondation Bertelsmann, ont publié les résultats d’une enquête d’opinions menée au printemps dans 11 pays d’Europe et d’Amérique du Nord portant sur la nature et les perspectives d’évolution des relations transatlantiques. Il ressort de cette enquête que le Canada est vu comme un « partenaire fiable », tandis que les interrogations menées auprès des Canadiens font émerger des similitudes mais également des divergences significatives avec le voisin américain.

1/ Le Canada, un "partenaire fiable"

Les résultats de l’enquête Transatlantic Trends 2021 font apparaître que 75% des personnes interrogées (hors Canada) voient le Canada comme un « partenaire fiable » dans le cadre des relations transatlantiques (cf. annexe 1). Il s’agit du total le plus élevé parmi tous les pays présents dans cette étude, à quasi-égalité avec l’Allemagne (73%) et la Suède (73%). La plupart des pays européens ainsi que les Etats-Unis semblent donc relativement confiants dans la capacité du Canada à être un acteur constructif des relations transatlantiques, même s’il convient de préciser que cette confiance semble légèrement inférieure en Allemagne et en Italie (71%, contre environ 80% pour le reste des pays européens). Enfin la population turque apparaît comme plus mitigée à l’endroit du Canada, avec seulement 52% des personnes interrogées qui voient le Canada comme un partenaire fiable – ce qui en fait tout de même l’un des pays ayant reçu le plus d’opinions favorables de la part des personnes interrogées en Turquie, avec la Suède et l’Allemagne, loin devant les Etats-Unis (23%) ou la France (26%).

Cette opinion relativement favorable du Canada aux yeux de ses partenaires transatlantiques peut être mise en perspective avec une défiance relativement plus importante à l’égard des Etats-Unis : en effet, seules 60% des personnes interrogées (hors Etats-Unis) considèrent les Etats-Unis comme un partenaire fiable. Cette défiance relative vis-à-vis des Etats-Unis s’illustre notamment en Allemagne, où près de la moitié de la population ne considère pas les Etats-Unis comme un partenaire fiable. À l’inverse, le Canada reste relativement confiant envers les Etats-Unis (69% d’opinions favorables), tout comme l’Italie (73%) et la Pologne (76%).

2/ La santé, le changement climatique et le commerce apparaissent comme les priorités de la population canadienne

Si l’année 2020 a fait émerger la santé comme l’une des priorités majeures de la relation transatlantique pour la totalité des pays[1], le Canada se démarque toutefois par un intérêt prononcé pour les questions relatives au changement climatique et au commerce (cf. annexe 2). En effet, 39% des Canadiens placent le changement climatique parmi les trois priorités qui devraient guider les relations transatlantiques (peu différent de la moyenne de 37% pour tous les pays), un chiffre significativement supérieur à celui observé aux Etats-Unis (29%) mais inférieur à celui de l’Allemagne (48%) ou de l’Italie (44%). La population canadienne accorde également une forte importance aux questions commerciales, avec 35% des personnes interrogées plaçant le commerce parmi les priorités des relations transatlantiques. Une tendance analogue peut notamment s’observer en Allemagne (37%) ou au Royaume-Uni (37%). À l’inverse, certains sujets tels que la lutte contre le terrorisme, particulièrement mentionnés en France ou en Suède, ne font pas partie des priorités identifiées par les Canadiens dans le cadre de la relation transatlantique. La population canadienne conserve par ailleurs une forte confiance dans le potentiel commercial et technologique du pays, puisque 73% des personnes interrogées estiment que le commerce international profite à l’économie du pays (cf. annexe 3), tandis que deux-tiers d’entre elles considèrent que le Canada se situe proche de la frontière en matière d’innovations technologiques.

Le Canada se démarque également par une vision relativement positive de l’immigration. En effet, près de 59% des Canadiens interrogés déclarent avoir une opinion positive de l’immigration, soit le 2ème total le plus élevé après la Suède (65%). Le Canada se situe ici en rupture avec les pays européens, qui ont pour la plupart une vision assez négative de l’immigration : seulement 28% d’opinions positives en Italie et en France ou encore 31% aux Pays-Bas. Les Etats-Unis se situent quant à eux entre ces deux grandes tendances, restant ainsi plus mitigés que le Canada (47% d’opinions positives).

3/ Malgré des similitudes dans l'approche des relations internationales, le Canada se démarque de son voisin américain sur des questions stratégiques et institutionnelles

La proximité culturelle (et géographique) entre le Canada et les Etats-Unis entraîne naturellement une convergence des deux pays dans l’approche globale des relations internationales. Le Canada est ainsi le pays (hors Etats-Unis) où l’on trouve la fraction la plus importante de personnes considérant que les Etats-Unis sont l’acteur le plus influent sur la scène internationale (69%). À l’inverse, seuls 10% des Canadiens estiment que l’Union européenne est l’acteur le plus influent, un chiffre inférieur à celui observé dans la totalité des pays européens. Cette proximité dans l’approche des grands équilibres internationaux est d’autant plus éloquente que le Canada et les Etats-Unis sont les seuls pays parmi les 11 présents dans l’enquête à considérer que le Royaume-Uni est le pays le plus influent en Europe, tandis que le reste des pays interrogés placent l’Allemagne largement en tête. Enfin la majorité des Canadiens (58%) estiment que la Chine doit être vue comme un rival plutôt que comme un partenaire, une opinion largement partagée aux Etats-Unis (70%) mais plus mitigée en Europe, notamment en Europe du Sud (Espagne, Italie, Turquie).

Toutefois, l’enquête Transatlantic Trends 2021 fait apparaître des divergences entre le Canada et les Etats-Unis, tant sur des questions stratégiques que sur la perception des institutions. En effet, seuls 5% des Canadiens interrogés déclarent souhaiter que leur pays renforce son implication militaire au Moyen-Orient, un chiffre comparable à celui observé dans les pays d’Europe de l’Ouest (6% en France et en Suède, 7% en Allemagne), tandis que cette proportion est significativement supérieure aux Etats-Unis (14%), illustrant une divergence des visions géostratégiques canadienne et américaine. Par ailleurs, l’enquête réalisée par le GMF et la Fondation Bertelsmann fait apparaître une forte confiance des Canadiens dans leur démocratie, puisque 76% des personnes interrogées jugent favorablement l’état de leur démocratie, soit le total le plus élevé parmi les 11 pays présents dans l’enquête – à égalité avec la Suède (cf. annexe 4). La population américaine, à l’inverse et malgré l’élection récente du président Biden[2], semble plus inquiète au sujet de ses institutions, puisqu’une faible majorité des personnes interrogées juge l’état de la démocratie satisfaisant aux Etats-Unis, tandis que 20% d’entre elles considèrent que celle-ci est « en danger », une proportion significativement supérieure à celle observée au Canada (8%), au Royaume-Uni (8%) ou en Allemagne (14%).


[1] Les enquêtes dans les différents pays ont en effet été menées au printemps 2021, c’est-à-dire après la prise de fonction de Joe Biden comme président des Etats-Unis. La question n’était pas abordée dans l’édition 2020 de cette enquête, il est difficile de quantifier l’effet exact du remplacement du président Trump par le président Biden

[2] La santé n’était pas mentionnée dans la version de janvier 2020 de l’enquête Transatlantic Trends 2020 (Transatlantic Trends 2020 | The German Marshall Fund of the United States (gmfus.org)), avant de faire son apparition comme principale priorité dans la mise à jour réalisée en mai 2020 en raison de la pandémie de Covid-19. À noter que le rapport publié en 2020 par le GMF peut difficilement servir de référence pour cet exercice, puisque les enquêtes n’avaient été menées que dans 3 pays : France, Allemagne et Etats-Unis.