Le secteur du tourisme a été l’un des plus touchés par la pandémie, en raison des mesures restrictives liées aux déplacements et aux activités de restauration. Les revenus de l’industrie du tourisme canadien ont été réduits de moitié en 2020, tandis que l’emploi dans le secteur a connu une baisse estimée à 25%. Toutefois le secteur entrevoit des perspectives de reprise du tourisme domestique grâce à l’avancée de la campagne de vaccination et à un allègement des restrictions avant l’été 2021.

1/ Un secteur en croissance avant la pandémie

Avant l’éclosion de la pandémie de Covid-19, au printemps 2020, le secteur du tourisme canadien connaissait une croissance régulière. En 2019, sa contribution au PIB canadien était estimée à environ 40 Md CAD (27 Md€), soit près de 2 % du PIB, pour un revenu global du secteur de 105 Md CAD (71,2 Md€). Le secteur soutenait par ailleurs 1,9 M d’emplois dans le pays, dont 750 000 emplois directs. Le Canada s’appuie principalement sur l’attractivité touristique de l’Ontario, de la Colombie-Britannique et du Québec (et dans une moindre mesure de l’Alberta), qui abritent à la fois des centres urbains et culturels prisés des voyageurs internationaux et des parcs naturels, moteurs du tourisme domestique (25 M de visiteurs en 2019).

Le secteur touristique canadien repose d’abord sur le tourisme domestique. Au 4ème trimestre 2019, les revenus générés par les Canadiens représentaient 79% du revenu total du secteur, tandis que les non-résidents ne représentaient que 21% du revenu total. Cependant, il convient de remarquer que l’accueil de touristes internationaux connaissait un développement rapide avant la pandémie. En 2019, le Canada a accueilli 22,1 M de visiteurs étrangers (en hausse pour la 6ème année consécutive), le plus haut total jamais enregistré dans le pays. Parmi ces visiteurs internationaux, les Etats-Unis représentent le contingent le plus important avec 15 M de visiteurs en 2019 (soit près de 68 % des visiteurs internationaux). Toutefois, la diversification géographique des touristes au Canada se poursuit, puisque les Etats-Unis représentaient 77 % des entrants en 2000. Après les Etats-Unis, les pays les plus représentés en 2019 étaient le Royaume-Uni (680 000 visiteurs) et la France (590 000). L’Asie connaît également une forte progression au cours des dernières années : les pays asiatiques représentaient 34 % des entrants non-américains en 2019, contre seulement 26% en 2009.

2/ Un impact significatif de la pandémie sur les revenus et l’emploi du secteur du tourisme

Les restrictions mises en place à compter de mars 2020, notamment les restrictions de déplacement, ont fortement affecté le secteur touristique au cours de l’année 2020. Les revenus du secteur touristique canadien ont ainsi été réduits de moitié entre 2019 et 2020. Les différents segments du tourisme canadien n’ont toutefois pas été affectés de la même manière. En effet, si le tourisme domestique a pu rapidement repartir à la hausse dès le 2ème trimestre 2020 (saison estivale, allègement des restrictions sanitaires au Canada), les voyages internationaux sont restés très limités, principalement en raison des fortes restrictions mises en place pour les entrants sur le territoire canadien : fermeture des frontières pour les voyages non-essentiels, quatorzaine, isolement durant trois jours à l’arrivée (en cas d’entrée par voie aérienne). Ainsi, les dépenses effectuées par des non-résidents sont restées quasi-nulles depuis plus d’un an.

L’emploi dans le secteur touristique a également été particulièrement touché par la diminution des flux touristiques. Statistiques Canada estime que l’emploi a été réduit de moitié entre la fin de l’année 2019 et le 2ème trimestre 2020, avant de progressivement remonter. Toutefois, à la fin de l’année 2020, l’emploi dans le secteur était toujours inférieur de près de 25% à son niveau pré-pandémie, faisant du secteur du tourisme l’un des secteurs dans lesquels l’emploi a été le plus durement affecté. En septembre 2020, l’Association de l’Industrie du Tourisme Canadien (AITC/TIAC) soulignait que l’impact de la crise sur l’emploi était d’autant plus important que les travailleurs de ce secteur sont relativement plus jeunes (30% de la main-d’œuvre, contre 12% en moyenne dans l’économie canadienne), mais comptent également plus de femmes ou de personnes issues des minorités ou des communautés autochtones. Par ailleurs, les acteurs de l’industrie du tourisme témoignent de leurs difficultés à réembaucher en préparation de la réouverture pour la saison estivale 2021, anticipant ainsi un taux d’emploi durablement inférieur aux autres secteurs de l’économie.

3/ Des perspectives de reprise du tourisme domestique à compter du 2nd semestre 2021

Face aux difficultés apparues dès le printemps 2020 dans le secteur du tourisme, les gouvernements fédéral et provinciaux ont mis en place une série de mesures destinées à soutenir le secteur. Les acteurs de l’industrie du tourisme ont ainsi eu accès à la plupart des programmes transversaux de soutien fédéral (Subvention salariale d’urgence, Subvention pour le loyer, Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes), mais aussi à des programmes plus spécifiques tels que le Programme de crédit pour les secteurs très touchés (PCSTT). La plupart des acteurs soulignent que l’arrêt prévu de ces mesures de soutien (diminution dès juillet 2021, puis arrêt total prévu au 25 septembre) risque d’entraîner de fortes difficultés financières pour l’industrie du tourisme, et plaident ainsi pour une extension au minimum jusqu’en 2022. Par ailleurs, les acteurs de l’industrie du tourisme ont également bénéficié du soutien des agences de développement régionales, par l’intermédiaire du Fonds d’aide et de relance régionale (FARR, 2 Md CAD/1,4 Md€ en tout dont environ 200 M CAD/135 M€ à destination du secteur du tourisme). Enfin, le gouvernement fédéral a annoncé, à l’occasion de la publication du budget 2021/2022, un soutien supplémentaire de 1 Md CAD (670 M €) sur les trois prochaines années, notamment par l’intermédiaire du FARR (500 M CAD/340 M€ supplémentaires) ou d’une enveloppe de 82 M CAD (55,6 M €) pour 2021/2022 à destination de Transport Canada, afin de financer les infrastructures de test dans les aéroports. Partenaire essentiel du tourisme international, le secteur aérien a également été fortement touché par la crise, avec des pertes nettes estimées à plus de 100 Md CAD (67 Md €) pour le secteur aérien canadien en 2020 selon l’AITA[1]. Le gouvernement canadien a annoncé en avril 2021 un plan d’aide à destination d’Air Canada (5,9 Md CAD/3,9 Md €) et Air Transat (700 M CAD/470 M€).

Par ailleurs, les acteurs de l’industrie du tourisme canadien espèrent que l’été 2021 coïncidera avec une reprise d’activité relativement forte. Si les perspectives concernant les voyages internationaux restent pour le moment relativement incertaines, le secteur du tourisme compte sur une reprise du tourisme domestique dès les prochains mois. Selon Destination Canada[2], 80% des Canadiens envisageraient de voyager à court-terme une fois les restrictions levées[3]. Par ailleurs, plusieurs facteurs d’optimisme sont apparus au début de l’année 2021. Tout d’abord l’avancée de la campagne de vaccination[4] laisse entrevoir une levée des restrictions de déplacement interprovincial avant l’été 2021 au Canada. En outre, les acteurs du secteur soulignent une reprise dynamique aux Etats-Unis depuis la mi-février, à la suite de l’allègement des restrictions. Destination Canada prévoit ainsi des revenus d’environ 70 Md CAD (47,6 Md €) pour l’année 2021, soit une hausse de 28% par rapport à 2020. Ces perspectives sont confirmées par les acteurs de l’industrie touristique et du secteur aérien, qui soulignent l’accumulation d’épargne des ménages canadiens durant la pandémie qui pourrait alimenter un effet rebond dès l’été 2021. Toutefois plusieurs incertitudes demeurent ; à court-terme, le tourisme canadien pourrait souffrir de la concurrence de son voisin américain, dont la campagne de vaccination très avancée a permis une levée plus précoce des restrictions sanitaires. Par ailleurs, certains aspects du tourisme pourraient connaître des difficultés à moyen-terme, en raison du changement de comportement induit par la pandémie. C’est notamment le cas du tourisme d’affaires, dont la pandémie pourrait avoir accéléré le remplacement partiel par des missions et événements virtuels. Enfin, les acteurs de l’industrie relèvent le manque de visibilité du calendrier et de clarté des consignes fédérales et provinciales, entraînant des difficultés d’anticipation pour la saison estivale mais également, à plus long-terme, l’impossibilité de s’adapter aux évolutions du marché liées aux consignes sanitaires (notamment concernant les voyages internationaux).



[1] Association Internationale du Transport Aérien

[2] Agence fédérale responsable du secteur du tourisme

[4] 53,4 % de la population canadienne a reçu au moins une injection (27 mai 2021)