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Zoom de la semaine : Situation économique et financière de l’Ouzbékistan

Pays le plus peuplé d’Asie centrale, avec une population de 34,2 millions d’habitants, l’Ouzbékistan est la deuxième économie de la zone avec un PIB nominal qui s’élevait à environ 58 Md USD en 2020, soit un PIB par habitant de près de 1 700 USD. L’Ouzbékistan a été touché par la crise de la COVID-19 alors qu’il traverse une période transformation économique. Malgré un ralentissement important de l’activité, l’Ouzbékistan est l’un des rares pays à ne pas entrer en récession en 2020. Le PIB a ainsi progressé de 1,6% en 2020.

 1/Une économie en cours de transformation.

L’économie de l’Ouzbékistan repose assez largement sur l’exploitation des matières premières : les produits énergétiques (principalement le gaz), le coton, les métaux (or, cuivre) et les engrais représentent près des 3/4 des exportations. L’Ouzbékistan dispose néanmoins d’une économie relativement plus diversifiée que ces voisins. Les produits agricoles et agroalimentaires y occupent une place également non négligeable avec plus de 10% des exportations. Le pays a en outre conservé un tissu industriel hérité de l’URSS et de la politique dirigiste de substitution aux importations mise en œuvre après l’indépendance (automobile, agroalimentaire, construction, métallurgie, chimie). Le secteur des services n’est par ailleurs pas en reste avec notamment un fort développement du tourisme au cours des dernières années. L’Ouzbékistan a ainsi enregistré 6,7 millions d’entrées d’étrangers en 2019, soit 4,5% de plus qu’en 2018 (6,4 millions), et 2,4 fois plus qu’en 2017 (2,8 millions).

Depuis 2017, d’importantes réformes   ont été engagées, notamment : la libéralisation du change, la libéralisation des prix, la réforme fiscale, l’amélioration de la statistique et la réorganisation des ministères.

2/ Crise de la COVID-19 et réponse des autorités.

L’Ouzbékistan a été touché par la crise alors que la dynamique de croissance se renforçait.  Après avoir atteint +4,5% en 2017, la croissance du PIB avait accéléré à 5,4% en 2018, puis 5,8% en 2019. L’économie Ouzbèke a été touchée par la crise COVID-19 via plusieurs canaux, notamment : la chute des échanges commerciaux, la baisse des cours des hydrocarbures, la diminution des flux touristiques (le nombre d’entrées d’étrangers a été divisé par plus de quatre en 2020 à 1,5 million) et les conséquences des restrictions locales.

En réponse à la crise, dès le 19 mars 2020, un décret présidentiel a élargi de 10% le cercle des familles éligibles aux prestations sociales et réduit les cotisations sociales du 1er avril au 1er octobre 2020. Par ailleurs, un fonds anti-crise abondé par le budget et les Institutions financières internationales de 1,05 Md USD (environ 1,8 % du PIB) a été créé avec notamment pour objectif d’attribuer des prêts à taux zéro aux entreprises d’intérêt stratégique et de financer des d’infrastructures sociales ou d’intérêt général. En juin 2020, ces mesures étaient complétées par des baisses d’impôts et subventions s’adressant aux secteurs les plus touchés, notamment le tourisme. Au total, les mesures budgétaires anti crise représenteraient environ 4% du PIB selon le FMI.

Pour soutenir l’activité, la Banque centrale a abaissé son taux directeur à deux reprises de 100 points de base en avril et septembre 2020, le fixant à 14%. Ses marges de manœuvre restent cependant limitées par une inflation forte qui a atteint 11,1% en décembre 2020 en g.a. et se maintenait à 10,9% en mars 2021 en g.a.

En 2020, le PIB n’a ainsi crû que de 1,6% en g.a. alors que le FMI prévoyait une croissance de 6% avant la crise. La consommation a ralenti mais est restée en territoire positif avec des ventes de détail en hausse de 3,2% en 2020. La production industrielle a pour sa part progressé très faiblement, de 0,7% en 2020, probablement en raison de la baisse de l’investissement en capital fixe, de 8,2% en 2020. Principal moteur de la croissance ouzbèke au cours des dernières années, l’investissement représentait malgré tout 37% du PIB en 2020.

La croissance devrait retrouver son niveau d’avant crise dès 2021 selon le FMI qui prévoit +5%, puis +5,3% en 2022. La reprise de l’activité en 2021 semble pour le moment se confirmer avec une croissance de 3% au 1er trimestre en g.a.

Point d’attention, le poids des crédits bancaires a fortement augmenté passant de 13,5 Md USD en janvier 2018 – 27% du PIB – à environ 22,2 Md USD en janvier 2020 – 38% du PIB –, puis 26,5 Md en mars 2021 – 42% du PIB prévisionnel. Cette croissance rapide comporte un risque d’emballement : le ratio crédits sur dépôts est passé de 191% au 1er janvier 2019 à 232% le 1er janvier 2020, puis à 248% au 1er mars 2021.

3/ Les comptes publics et les comptes externes se dégradent.

Après un déficit budgétaire estimé à 0,3% du PIB en 2019 (3,9% consolidé), le déficit a atteint 3,3% en 2020 (4,4% consolidé). Le gouvernement a pour objectif de ramener ce déficit à 2% du PIB à moyen terme. Malgré une forte augmentation, de 20,4% du PIB en 2018 à 37,8% en 2020, la dette publique reste sous contrôle et devrait se stabiliser à un niveau légèrement supérieur à 40% à partir de 2021. L’Ouzbékistan bénéficie toutefois d’un fort soutien international avec en 2020 1,7 Md USD de financements multilatéraux et bilatéraux.

En période d’ouverture et de forts besoins en investissement, les résultats du commerce extérieur se sont nettement détériorés. Après un excédent d’environ 1 Md USD en 2017, le solde de la balance commerciale est devenu déficitaire à hauteur de 5,3 Md USD en 2018, puis 6,4 Md en 2019. Le déficit s’est stabilisé à 6 Md USD en 2020 avec des exportations en baisse de 13,4% en g.a. à 15,1 Md USD et des importations en repli de 12,8% en g.a. à 21,1 Md USD.

L’Ouzbékistan reçoit d’importants transferts d’environ 2,5 millions travailleurs vivant à l’étranger, notamment depuis la Russie ce qui permet de compenser partiellement le déficit du commerce extérieur. En 2020, les transferts entrants de travailleurs ouzbèks atteindraient 7,3 Md USD selon les estimations du FMI (près de 13% du PIB), en baisse de 16% en g.a.

En raison notamment de la dégradation de la balance commerciale, le compte courant est devenu déficitaire à partir de 2018 (3,6 Md USD soit 7% du PIB). Il s’est néanmoins légèrement réduit en 2019 pour s’établir à environ 3,4 Md USD (5,6% du PIB), puis en 2020 à environ 3,1 Md USD (5,4% du PIB). Avec la reprise économique, le déficit courant devrait se creuser à pour atteindre 6,4% du PIB en 2021 selon le FMI. Pour leur part, les flux nets d’IDE entrants se sont établis à 1,4 Md USD en 2020, soit une baisse de 39% par rapport à 2019.

L’endettement externe du pays progresse très rapidement. La dette extérieure totale atteignait environ 24 Md USD à fin 2019 soit près de 44% du PIB contre 34,3% en 2018. En décembre 2020, la dette externe atteignait déjà 33,8 Md USD, soit 58,4% du PIB. En avril 2021, le FMI estimait comme faible le risque de non-soutenabilité associé à la dette extérieure ouzbèke.