Situation économique et financière du Nigéria
Le Président Bola Ahmed Tinubu a engagé, dès son arrivée au pouvoir en mai 2023, d’importantes réformes structurelles visant à rééquilibrer la situation économique du pays. Les principales mesures ont été la suppression de la subvention à l’essence, la libéralisation des marchés des changes et la réduction sensible du financement monétaire du déficit public.
Le Président Bola Ahmed Tinubu a engagé, dès son arrivée au pouvoir en mai 2023, d’importantes réformes structurelles visant à rééquilibrer la situation économique du pays. Les principales mesures ont été la suppression de la subvention à l’essence, la libéralisation des marchés des changes et la réduction sensible du financement monétaire du déficit public. Ces réformes ont eu un impact significatif sur l’économie, entraînant une forte dévaluation du naira (-73% entre mai 2023 et novembre 2024) et une inflation élevée (33% en 2024). En réponse, la Banque centrale a adopté une politique monétaire orthodoxe, resserrant ses taux directeurs de 1 100 points de base en deux ans. Le gouvernement poursuit son action de consolidation économique avec la recapitalisation du secteur bancaire annoncée fin 2024, la modernisation de la régulation du secteur des assurances en 2025 et l’entrée en vigueur de la réforme fiscale en 2026. Si les bénéfices du rééquilibrage tardent à être perçus par la population, ils se traduisent par l’amélioration progressive des équilibres externes et un redressement notable des finances publiques. Le climat des affaires s’améliore progressivement depuis l’arrivée du gouvernement Tinubu, porté par un programme économique destiné à renforcer l’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers et à stimuler durablement la croissance.
Le Nigeria est la quatrième puissance économique du continent : 250 Md USD de PIB en 2024, soit environ un douzième du PIB africain et 45% du PIB de la CEDEAO. La forte dépréciation du naira en 2023 et 2024 (-73%) a significativement réduit le poids du Nigeria, qui était la première économie africaine en 2022. Sa population, avec un marché de 230 millions de personnes, constitue un atout majeur pour le pays. Le Nigeria compte en outre parmi les « Next 11 » de Goldman Sachs. Cependant, des vulnérabilités structurelles telles que la dépendance aux hydrocarbures, le contexte d’insécurité et les carences des infrastructures de transports et d’énergie entravent la dynamique de croissance.
La croissance du Nigeria a atteint 3,4% en 2024, portée par les secteurs des services (notamment financiers et ICT), la reprise du secteur pétrolier et la stabilisation du naira. Elle devrait s’établir à 3,6% en 2025 selon les prévisions de la Banque mondiale (3,4% selon le FMI), soit légèrement plus rapide que la croissance démographique, estimée à 2,5% par an. Les perspectives de croissance à moyen terme oscillent entre 3% et 4%. La croissance économique repose principalement sur la dynamique du secteur tertiaire (4,4% en 2024, représentant 56% du PIB), tandis que la contribution du secteur pétrolier demeure limitée, malgré un rebond avec une expansion de 5,5% en 2024. Ne représentant que 3,4% du PIB, l’activité pétrolière est néanmoins structurante : il s’agit de la principale ressource fiscale (60%), source d’entrée de devises (85%) et d’exportations (88%). Le secteur agricole souffre d’une faible productivité et est exposé aux aléas climatiques (croissance de 1,7% en 2024 pour 28% du PIB). Le secteur industriel est en déclin relatif continu ces dernières années (17% du PIB en 2024, 26% en 2012).
L'économie nigériane souffre de problèmes structurels qui nécessitent des réformes profondes, devant être conduites sur le long terme pour permettre d'atteindre l’objectif de croissance annuelle de 7% fixé par l'administration Tinubu : investissements dans les infrastructures, réorientation des dépenses publiques vers des initiatives plus ciblées (capital humain), amélioration de la gouvernance, du contexte sécuritaire et du climat des affaires pour promouvoir le développement du secteur privé et la diversification économique.
L'inflation demeure l’un des principaux défis macroéconomiques du Nigeria. L’inflation, qui s’élevait en moyenne à 13% sur les dix années précédentes, a atteint 25% en 2023 et 33% en 2024. Le retrait des subventions au carburant et la flexibilisation du change ont provoqué une hausse des prix significative. La trajectoire descendante de l’inflation en 2025 est encourageante, avec 21,9% enregistré en juillet 2025, recul partiellement imputable à une mise à jour méthodologique opérée début 2025. La stabilité du naira sera clef dans la trajectoire de l’inflation : la Banque mondiale comme le FMI s’attendent à continuer de constater une inflation élevée en 2025 (22% et 24% respectivement) et les prochaines années, principalement par effet d’inflation importée. La Banque centrale du Nigeria (CBN) a fortement relevé son taux directeur (+875 pdb en 2024 après +225 pdb en 2023) pour le maintenir à 27,5% depuis novembre 2024. Elle agit parallèlement sur le taux de réserves obligatoires des banques qui atteint 50% (+1750 pdb en 2024). La transmission de la politique monétaire à l’économie réelle demeure faible, le resserrement des taux ne permettant pas de résoudre les défis structurels (faible productivité et vulnérabilité climatique agricoles, goulets d’étranglement de transports, forte croissance démographique).
Les réformes de l’administration Tinubu, la politique orthodoxe de la CBN et le règlement de ses arriérés de change ont permis l’amélioration notable des équilibres extérieurs du Nigeria. Suite à la flexibilisation du régime de change initiée en 2023, la monnaie nigériane s'est dépréciée jusqu'à atteindre 1690 NGN pour 1 USD (-73%) en novembre 2024, permettant la convergence des taux de change. Le cours officiel est actuellement stabilisé autour de 1 530 NGN pour 1 USD, grâce aux interventions de la CBN et de l'élimination progressive des arriérés de change. Le pays a dégagé en 2024 un excédent commercial en biens de 13 Md USD (6% PIB), un excédent de compte courant de 17 Md USD (9% PIB), les réserves en devises ont augmenté de 16% entre juin 2024 et mai 2025 pour atteindre 40,9 Md USD et les réserves nettes sont passées de 4 Md USD fin 2023 à 23 Md USD fin 2024. La mise en service de la raffinerie Dangote en septembre 2024 a participé à réduire la demande en carburant. La dépréciation du naira et l’inflation ont contribué à réduire la consommation et les importations.
Les exportations nigérianes (53 Md USD en 2024) se sont relativement diversifiées : si la part des exportations d’hydrocarbures est restée relativement stable (88% en 2024 après 92% en 2023), la part des exportations de pétrole brut s’est contractée pour représenter 71% après 81%. Les autres postes d’exportation sont les produits pétroliers dérivés (17% après 11% en 2023, grâce à la croissance des exportations gazières) et les denrées agricoles (6%). En 2024, sur 40 Md USD d’importations, le premier poste correspond aux produits pétroliers raffinés (37%), devançant les matériels industriels (22%), les biens d’équipement et pièces détachées (15%) et les produits alimentaires et boissons (11%), une répartition similaire à 2023. La balance commerciale (biens et services) du pays reste négative, en raison du déficit structurel du pays en matière d’échanges de services. Le pays enregistre une balance des services déficitaire, représentant 13 Md USD en 2024, comme en 2023. Les services de transports, de voyage, de télécommunications correspondent aux principaux postes d’importations de services.
Les finances publiques du Nigeria se sont consolidées en 2024. Le déficit budgétaire s’est établi à 2,6% du PIB après 4,2% du PIB en 2023. Dans le même temps, les recettes fiscales brutes du pays ont augmenté de 8,8% du PIB à 13,3% du PIB, imputable notamment au retrait des subventions au change. Les subventions pétrolières et de change, qui ont été supprimées, représentaient un coût cumulé de 5,2% du PIB en 2022, soit les ¾ des recettes annuelles. La réforme fiscale de 2025 devrait consolider les recettes, améliorer le climat des affaires tout en introduisant une certaine progressivité de l’imposition.
La dette publique devrait se stabiliser autour de 46% du PIB à l’horizon 2030 (FMI). Celle-ci est passée de 40% en 2022 à 53% en 2024, essentiellement sous l’effet comptable de la dépréciation du naira, 27% étant libellé en devises en 2022 (49% en 2024). Le FMI considère le risque de surendettement « modéré », notamment en raison de la maturité longue et du niveau contenu de la dette. La charge d’intérêt représente aujourd’hui 40% des recettes fédérales, et ce ratio devrait se maintenir à moyen terme. Signe de l’atténuation des risques pesant sur le Nigeria, Fitch Ratings et Moody’s ont successivement amélioré la note souveraine du Nigeria en avril et mai 2025, à B (Fitch Ratings) et B3 (Moody’s) avec perspectives stables. S&P a confirmé sa note à B-/Stable, inchangée depuis août 2023. Le Nigeria a confirmé son accès aux marchés internationaux avec une émission de 2,5 Md USD d’eurobonds en décembre 2024, après trois ans sans y avoir recours.