Focus : Paraquat - Une interdiction potentiellement lourde de conséquences

L’année 2020 a été marquée au Brésil par une intense agitation institutionnelle autour de la question de la possible interdiction d’un herbicide très utilisé au Brésil : le paraquat. Cet herbicide bon marché et efficace sur un vaste spectre de « mauvaises herbes » est aujourd’hui très utilisé dans les principales productions du pays (soja, canne à sucre, maïs, coton, riz,..). Le paraquat est généralement présenté par le monde agricole comme « un outil majeur de la compétitivité brésilienne sur le marché international des commodités ». En effet, cet herbicide garantirait la productivité d’une seconde récolte d’une autre culture sur une même surface (safrinha), paramètre majeur de la compétitivité brésilienne sur de nombreuses cultures de grains. Par ailleurs, cette molécule faciliterait le recours au système de semis direct ainsi que les opérations de récolte grâce à ses effets « desséchants » ultra-rapides.

Cet herbicide a été interdit dans l’UE en 2007 mais reste autorisé dans de nombreuses grandes puissances agricoles. En 2008, l’ANVISA, a entrepris de réévaluer cette molécule. Neuf ans plus tard, en 2017, au regard des études mettant en avant son potentiel mutagène et des liens épidémiologiques jugés sérieux avec la maladie de Parkinson chez les applicateurs, l’ANVISA a conclu son analyse en publiant la RDC nº 177, du 21 septembre 2017. Ce texte instituait une interdiction de la molécule mais différée en septembre 2020 et assortie d’une possibilité de réviser la décision au regard de potentielles nouvelles études scientifiques. Ce texte prévoyait également des mesures immédiates pour limiter les risques comme l’interdiction de l’usage de l’herbicide comme « desséchant », l’obligation de l’utiliser via des tracteurs à cabines fermées et de faire signer à l’utilisateur un « formulaire de responsabilité » informant sur les risques.

Ce texte a été l’objet de très nombreuses discussions entre l’ANVISA et l’industrie des produits phytosanitaires, les professionnels agricoles et leurs représentants au congrès au cours de ces trois ans. Suite à ces échanges, l’Anvisa a autorisé à nouveau l’usage comme « déssechant » pendant la période transitoire. Parallèlement les industriels se sont mobilisés pour mener les études scientifiques demandées via notamment la « task force paraquat » et une étude financée par la filière soja brésilienne (Aprosoja). Ces études ayant rencontré de nombreuses difficultés d’agenda, notamment d’approbation par les comités de déontologie et suite au COVID, les professionnels ont essayé tout au long de l’année 2020 d’obtenir en vain un report de la décision d’interdiction au 1er juillet 2021.

Plusieurs tentatives parlementaires visant à annuler purement et simplement l’interdiction ont été par la suite menées en arguant des conséquences économiques désastreuses pour le pays à un moment où son économie est durement frappée par la crise sanitaire. Pour autant, ces demandes n’ont pas abouti et l’ANVISA a finalement confirmé l’interdiction, tout en laissant des délais jusqu’en juillet 2021 pour écouler les stocks présents chez les agriculteurs. La question des conséquences de cette interdiction sur la compétitivité future des principales productions brésiliennes divise les professionnels. Toutefois, il semble faire consensus que des solutions de remplacement plus couteuses nécessitant l’emploi en mélange de plusieurs herbicides existent.

 

Productions et commerce

 

 

La transformation « numérique et biologique » du secteur agricole avance rapidement

Lors d’une réunion du Forum économique mondial, la ministre chargée de l’agriculture a indiqué que la transformation « numérique et biologique » de l’agriculture était en train d’avancer rapidement au Brésil et qu’elle était le seul moyen de concilier l’augmentation de la production agricole pour assurer la sécurité alimentaire et la préservation de l’environnement. Elle a précisé que les investissements publics et privés dans les entreprises technologiques axées sur l'agriculture sont passés de 4 M USD en 2013 à plus de 200 M USD en 2019. La ministre a également cité certains défis qui doivent encore être relevés au Brésil, comme la nécessité de développer la connectivité dans les zones rurales (lien).

L’agronégoce et la Chine permettent d’atténuer la contraction du commerce extérieur brésilien

Le repli de 6,9% du commerce extérieur brésilien en 2020 a été amorti par le dynamisme des ventes de produits agricoles à destination de l’Asie, en particulier de la Chine, premier client du Brésil qui établit un nouveau record à 68 Mds USD. Ce rebond de la demande chinoise a permis de contrebalancer les moindres performances enregistrées avec les autres partenaires commerciaux. L’ensemble des importations peinent pour leur part à se redresser et enregistrent une baisse marquée de 10,4% du fait d’une demande domestique atone.

Prévision d’un troisième record consécutif pour la récolte des grains en 2021

L’institut de géographie et de statistiques prévoit une hausse de la récolte en soja (+6,8%) mais une baisse pour le maïs (- 1,5%). Ainsi environ 57% de la surface cultivée en grains serait occupée par du soja. Du côté du coton, la production devrait légèrement baisser de – 14 % en raison de la baisse de la demande causée par la pandémie. La production de riz, localisée à 70% dans le Rio Grande do Sul devrait diminuer de 0,8% (lien).

A partir du 11 février, les dispositions de l’IN 91 du 18 septembre 2020 sont pleinement applicables aux importations de vins et dérivés.

A la suite de plusieurs problèmes apparus dans la mise en place des modules de gestion des licences d’importation dans le système SIGVIG, des tolérances avaient été successivement accordées par le MAPA depuis la fin d’année dernière. Il ressort des derniers échanges avec le MAPA que le système est désormais entièrement opérationnel et que les exigences de l’IN 91/2020 seront pleinement exigées  à compter du 11 février 2020.

Publication d’une étude sur les caractéristiques des fromages artisanaux de la région du Serro

L’EMBRAPA a publié une étude scientifique sur les caractéristiques des fromages artisanaux produits dans la région de Serro, qui comprend 11 municipalités situées à environ 300 km au nord-est de Belo Horizonte. L'étude a évalué les aspects et qualités des fromages artisanaux de la région de Serro tout au long de leur processus de maturation. Les résultats jugés surprenants par les chercheurs semblent indiquer que chaque propriété rurale de la région possède un microclimat différent qui influence la maturation et la typicité du fromage.

La consommation de viande bovine en 2020 au Brésil au plus bas niveau depuis 1996.

Les experts considèrent que cette baisse s’explique avant tout par la hausse du prix de la viande (+18% en 2020) (lien). Parallèlement à cette baisse, le MAPA a annoncé le 18 janvier qu’il préparerait un plan national de protéines alternatives pour s’adresser au marché « plant-based » (substitution de protéines végétales aux protéines animales) qui a augmenté de 22% dans le pays au cours des trois dernières années (lien). Les lignes directrices de ce plan devraient être présentées lors de la Food Tech Expo, le 19 mars (événement en ligne).

 

Sécurité sanitaire

 

 

Un premier texte brésilien coercitif sur les conditions de protection animale en élevage  

Le MAPA a publié l’IN 113 du 16 décembre 2020 relative aux conditions de bien être des porcs. Ce texte détaillé, fruit d’un long travail collaboratif entre le MAPA, les scientifiques et les professionnels de la filière porcine est le premier texte brésilien définissant des conditions minimum de logement des animaux. Celles-ci, comme la plupart des conditions de bien-être animal étaient jusque-là, dans la plupart des filières, édictées sous la forme de guides de bonne pratique, d’usage volontaire. Ce nouveau texte fixe par exemple des surfaces minimum d’hébergement pour les porcs charcutiers de 0,9 m2 par animal (abattus en dessous de 110kg) contre 1m2 pour le droit européen. Le texte interdit la coupe des dents et limite, sans les interdire mais en en encadrant les conditions : les coupes de queue et la castration « chirurgicale ».

Procédures générales d’inspection par le MAPA des produits d’origine animale importés

Le MAPA a publié le 14 janvier, l’IN 118 du 11 janvier 2021 qui fixe les nouvelles procédures d’inspection des produits importés par le MAPA. La nouveauté est l’extension pour les produits animaux de la procédure d’ores et déjà mis en place pour certains codes douaniers végétaux qui prévoit plusieurs niveaux de contrôle : le canal vert, le canal orange, le canal rouge et le canal gris. La détermination initiale du canal correspondant à chaque couple produit/entreprise est réalisée lors de la demande de licence d’importation via le logiciel « LECOM ». Lorsqu’un couple produit/pays/entreprise est en canal vert, l’inspection documentaire est automatisée et il n’y a pas de réinspection physique. Le circuit est donc très accéléré. Pour le canal orange, l’inspection documentaire « manuelle » par le VIGIAGRO persiste mais il n’y a pas de réinspection. Le canal rouge correspond quant à lui aux couples produits/pays/entreprise pour lequel le système actuel du double contrôle reste de mise. Enfin le canal gris correspond aux importations nécessitant le prélèvement d’échantillons.

Bulletin sanitaire pour l’abattage des volailles

Le Brésil a mis en place via l’IN 100 du 02 octobre 2020, un document d’information dénommé « bulletin sanitaire » qui doit désormais à l’instar de la réglementation européenne accompagner chaque lot de volailles à l’abattoir. Celui-ci qui doit être signé par le vétérinaire sanitaire suivant l’élevage et comprend des informations sur la mortalité du lot et les traitements et vaccinations opérés sur les animaux.

Modification du texte sur l’étiquetage des produits animaux emballés pour la vente aux consommateurs

Cette modification via l’IN 67 du 14 décembre 2020, ne fait a priori que des ajustements mineurs par rapport à la réglementation existante. Les dispositions à même d’entrainer un changement d’étiquette concerneraient en première analyse essentiellement les produits non destinés à la consommation humaine. Les importateurs et entreprises exportateurs sont donc invités à vérifier les conséquences pour les produits les concernant. Le délai fixé pour réaliser les éventuels changements d’étiquettes et les enregistrer auprès du DIPOA est le 4 juin 2021. Le SER publiera une analyse plus détaillée de ce texte et de ses conséquences.

Modifications de l’étiquetage des viandes fraîches de porcs et de volailles

La RDC 459, du 21 décembre 2020 définit les instructions de préparation, d’utilisation et de conservation qui doivent obligatoirement être mentionnées sur l’étiquetage pour les viandes crues de porcs et de volailles. Elle s’applique, pour ces deux espèces à toutes les viandes, les abats, les viandes hachées ou émincées, les saucisses, le bacon et les peaux, qu’ils soient conservés réfrigérés, congelés ou assaisonnés, dès lors qu’ils sont prêts à la vente aux consommateurs. L’étiquette des produits de ce type fabriqués après le 4 janvier 2023 devront porter en gras la mention : « Ces aliments, s'ils sont mal manipulés et/ou consommés crus, peuvent nuire à la santé. Pour votre sécurité, suivez les instructions ci-dessous : », suivi d’indication en fonction du type de produits pour éviter les contaminations croisées par des bactéries pathogènes lors de la préparation par le consommateur. Ce texte durcit également les paramètres en matière de salmonelles pour les viandes fraîches de porc en modifiant le texte sur les critères microbiologiques des aliments (IN 60/2019).

Environnement

 

 

Promulgation de la loi 14.119/21 relative aux paiements pour services environnementaux

Les paiements pour services environnementaux pourront prendre différentes formes allant du paiement direct à la mise en place d’appuis sociaux aux communautés rurales et urbaines. Les recettes issues de la redevance pour l’utilisation des ressources hydriques pourront être utilisées pour le financement du dispositif sous réserve de l’avis du comité de bassin (lien).

Trois entreprises brésiliennes d’achat et de vente de soja se sont engagées à ne plus vendre de soja issu de parcelles déboisées après août 2020.

Il s’agit de CJ Selecta, Caramuru et Imcopa qui approvisionnent essentiellement la filière de production du saumon en Norvège. Pour respecter cet engagement les entreprises indiquent qu’elles utiliseront des données issues d’observations satellitaires et de données officielles gouvernementales (lien).

Entreprises et Club Agro

 

 

La coopérative de production porcine Cooperalfa développe sa production de porcs et de fabrique d’aliments

L’investissement s’élève à 269 M de Réaux et sera localisé dans le Mato Grosso do Sul (lien).

L’entreprise de produits laitiers Tangara Foods investit 145 M de Réaux.

Cet investissement vise à mettre en place deux unités de production dont la première sera mise ne service en févier 2021 (lien).

Le producteur d’œufs Mantiqueira investit 100 M de Réaux pour développer la production d’œufs alternatifs

Les investissements localisés dans les Etats de Sao Paulo et du Minas Gerais consistent en la construction de bâtiments de poules pondeuses libres. L’entreprise souhaite porter sa production à 1 million de poules libres en 2021 et 2,5 en 2025 (lien).

Emission de 750 M USD de titres verts par AMMAGI dans le secteur des grains et fibres agricoles

Ces titres lancés le 21 janvier ont pour objectif de financer des projets répondant aux enjeux du développement durables fixés par l’ONU, notamment ceux liés à l’énergie renouvelable, la gestion durable de l’utilisation de la terre et des ressources naturelles, la préservation des ressources naturelles et la biodiversité, l’adaptation au changement climatique et la sécurité alimentaire (lien).

Bayer lance au Brésil un programme d’achat de carbone capté par les exploitations agricoles

Le projet lancé en collaboration avec l’EMBRAPA auprès de 450 agriculteurs a pour objectif de donner des résultats dans un horizon de trois ans. La première étape qui vient d’être lancée consiste à mesurer les émissions de carbone émises par ha pour trois cultures prioritaires, les plus émettrices : le riz, le maïs et le soja. Des pratiques agronomiques seront mises en place pour stocker du carbone et in fine permettre aux producteurs de vendre ces crédits à des acquéreurs (lien).

 

Auteur : Service Économique de Brasília

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