Focus : l’inflation des prix des aliments – Une question de souveraineté alimentaire ?

 

Selon les données de l’institut brésilien de géographie et de statistiques (IBGE), l’inflation brésilienne sur douze mois arrêtée à la fin août 2020 s’établit à +2,44%. Toutefois, le secteur des aliments et boissons s’est retrouvé pointé du doigt ces derniers mois en raison des hausses sensibles de prix de plusieurs aliments phares tels que la viande bovine, le riz, ou certains fruits et légumes. L’indice d’inflation cumulée des prix des aliments et boissons sur les douze derniers mois s’établit à +8,55%. Cette inflation est toutefois à mettre en relation avec le versement de l’aide d’urgence aux personnes dans le besoin qui se sont parfois retrouvées avec une hausse de leur pouvoir d’achat. L’inflation n’en est pas moins restée réelle et largement relayée par la presse pointant les effets de la pandémie, favorisant les exportations agricoles brésiliennes poussées par une parité Réal/USD favorable conduisant à un relatif assèchement du marché intérieur pour certains produits, faisant ainsi craindre de possibles pénuries.

L’inflation du riz – près de 20% depuis janvier 2020 selon l’IBGE - est devenue un symbole de ce phénomène d’autant plus que les exportations brésiliennes ont bondi de 73% cette année malgré une baisse des récoltes de 13%. Elles ont notamment été tirées par la hausse des cours mondiaux (cf. graphique). De plus, le riz est un aliment important qui fait partie du régime alimentaire traditionnel. Il est très consommé par les classes populaires. La consommation moyenne par habitant s’élève à environ 45 kg (environ 7kg en France à titre de comparaison).

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Evolution du cours mondial du riz sur le marché spot au cours des 5 dernières années.

Le gouvernement qui s’est prononcé dès le début de la pandémie comme garant de la sécurité alimentaire du pays a anticipé le risque politique d’une poursuite de l’inflation ou de ruptures d’approvisionnement en adoptant des mesures. L’absence d’intervention pour un produit dont le programme de stockage public a été sensiblement réduit représentait un risque politique certain. Ainsi, une résolution a été adoptée afin d’autoriser à compter du 10 septembre l’importation de 400 000t de riz à droit nul. Il s’agit du riz non étuvé (qui était jusqu’alors taxé à 10%), poli ou bruni (qui était taxé à 12%). Les pays du Mercosur, principaux exportateurs, bénéficiaient déjà de droits nuls. Le MAPA vient d’annoncer avoir négocié 225 000 t en provenance des Etats-Unis, d'Inde et de Guyana. Ils devraient être importés durant la seconde quinzaine du mois d'octobre.

Selon le président de la CONAB (équivalent de FranceAgriMer), la mesure devrait produire ses effets avec une baisse des prix sur le marché brésilien. Il rappelle toutefois que traditionnellement les cours du riz sont plus élevés durant le second semestre. La baisse est donc plutôt à attendre pour l’année prochaine où la production nationale est estimée en hausse de 7,1%. En tout état de cause, pour que la mesure produise l’effet escompté, il serait nécessaire que les cours mondiaux diminuent et surtout que la parité monétaire devienne plus favorable aux importations brésiliennes. Ce n’est pas le cas actuellement et cela d’autant plus que la menace d’une deuxième vague de Covid-19 augmente.

Agriculture et commerce

Le réseau des attachés agricoles du MAPA s’élargit de 3 agents dont un en France

 

La ministre chargé de l’agriculture a annoncé que trois agents supplémentaires renforceront dès cette année le réseau des attachés agricoles brésiliens dans le monde qui s’élèvera donc à 28 agents. Les trois nouveaux seront basés en Allemagne, en France et en Australie. L’objectif annoncé pour les agents basés dans l’Union européenne est de se focaliser sur la promotion de l’image de l’agronégoce brésilien et la ratification de l’accord UE-Mercosur. Plus spécifiquement pour la France l’objectif sera de travailler sur le volet de la durabilité de l’agriculture brésilienne et la lutte contre la déforestation, ainsi que participer aux travaux de l’OIE et de l’OCDE dont les sièges sont basés à Pairs. En Australie, il s’agira d’un poste à profil défensif pour analyser la concurrence australienne sur les marchés internationaux.

Une première récolte expérimentale de blé surprenante dans le Nord-Est

Une première expérimentation de culture de blé issue d’un partenariat entre l’EMBRAPA et une entreprise privée dans l’Etat du Céara a donné des résultats surprenants selon les porteurs du projet. Un rendement de 16 qtx par hectare a été obtenu pour un cycle de production de seulement 75 jours. Les cultivars ayant donné les meilleurs résultats sont le BRS264 et BRS404. Cela ouvre des perspectives sur la diminution de la dépendance (actuellement quasiment totale) de cette zone du brésil à l’approvisionnement en blé extérieur. Pour mémoire, le blé actuellement cultivé au Brésil dans les autres régions traditionnellement plus adaptées à cette culture oscille entre 140 et 180 jours.

La croissance de la consommation de vin se fait aussi sur le nouveau segment des vins en cubitainers

Dans un marché où la consommation per capita de vin au Brésil a cru de 11% entre janvier et juillet 2020, la startup de commercialisation en ligne de vins en « cubi » dénommée Fabenne, a connu une hausse de ses ventes de près de 400% aux mois de juillet et août. La prévision de chiffres d’affaires s’établit à environ 620 000€ cette année.

Sur le premier semestre 2020 le Brésil reste le troisième pays au monde en nombre d’acheteurs en ligne de vins

Le pourcentage de consommateurs réguliers de vins en ligne a cru de 2 points au premier semestre 2020 en comparaison avec celui de 2017 pour s’établir à 28% (cf. carte ci-dessous).

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Alimentation et sécurité sanitaire

Blocages de produits laitiers au port de Santos

 

Suite à de nombreux blocages de produits laitiers européens au port de Santos, dont une partie de produits français, pour des motifs de forme des certificats sanitaires (numéros manuscrits, champs incomplets ou imprécis, pagination des annexes,…) le ministère de l’agriculture français a envoyé une note aux certificateurs pour demander la plus grande attention en matière de signature à l’export sur ce couple pays-produit.

Projet de nouvelles dispositions d’étiquetage pour les produits à base de viande porc et de volailles

L’Anvisa a publié une consultation publique N° 898 sur l’étiquetage des produits à base de viandes crues de porc et de volailles proposant de nouveaux critères microbiologiques et de nouvelles modalités d’indication des modalités de conservation.

Nouvelles dispositions d’étiquetage des aliments et boissons en cas de changement de composition

L’ANVISA a publié le 1er septembre 2020 l’IN 67 qui oblige à apposer pour une meilleure information des consommateurs l’information de tout changement de formule, composition ou recette sur les produits alimentaires fabriqués durant les 90 premiers jours qui font suite à ce changement.

Nouvelles dispositions d’étiquetage des pesticides en cas de changement de composition

L’ANVISA a publié le 1er septembre 2020 l’IN 73 qui oblige à apposer pour une meilleure information des utilisateurs l’information de tout changement de formule, composition ou recette sur les produits phytopharmaceutiques fabriqués durant 3 premières années qui font suite à ce changement.

Affichage du service de renseignement au consommateur et des logos liés au recyclage

Suite à une question d’une entreprise, le MAPA a confirmé que l’apposition des informations sur le SAC (Serviço de atendimento ao consumidor) est de nature volontaire. En effet, le décret n° 6523 du 31 juillet 2008 qui régit la loi n° 8078 du 11 septembre 1990, établit des règles générales sur le service à la clientèle - SAC. Actuellement, la plupart des industries proposent à leurs clients le SAC en fournissant, sur l'étiquette, le téléphone et le courrier électronique pour faciliter le contact en cas de questions, critiques ou suggestions. Cependant, il n'existe pas de réglementation spécifique pour les fabricants de produits alimentaires et de boissons. Il n'y a donc pas de support juridique rendant le SAC obligatoire sur les étiquettes des produits alimentaires.

Environnement

Le plan d’agriculture bas carbone peine à donner des résultats à la hauteur

 

Les autorités brésiliennes sont actuellement en train d’évaluer leur stratégie décennale d’agriculture à faible intensité de carbone lancée il y a 10 ans pour adapter sa nouvelle stratégie. Le programme d’ABC, d’agriculture bas carbone intégré dans le Plano safra y a toute sa place (cf. B de BRICS n°148). Toutefois, le budget associé reste faible au regard des enjeux et le développement d’itinéraires de production durables se heurte bien souvent à une faille dans le déploiement de l’assistance technique au plus près des producteurs. Ainsi, les premiers résultats du programme ABC sont en deçà des objectifs avec un peu plus de 4 millions d’hectares de prairies restaurées au lieu des 15 prévus. La mise en place de forêts aurait également pris du retard avec moins de 1 M ha alors que la cible était à 3M ha.

 

Mise en place d’un fonds pour l’appui dans le développement de productions durables

Sélectionné par le « Global Innovation Lab for Climate Finance », ce fonds mobilisera un peu plus de 60 M€ jusqu’à juillet 2021 pour appuyer des projets de producteurs adoptant le système ILPF (agroforesterie et élevage) dans le cadre du réseau mixte public-privé « réseau ILPF ». 54 M€ serviront à octroyer des prêts aux producteurs et 4M€ aux opérations de recherche, certification et appui technique.

Entreprises

Club Agro

Cargill met en place une certification de soja RTRS au port d’Itaqui dans le Nord-Est

 

 

Le projet qui s’insère au sein du port d’Itaqui où Cargill exporte actuellement 900 000 t de soja chaque année vise à développer une part de flux certifiés selon le standard RTRS, de 8 à 12% selon les informations données par l’entreprise. Cette dernière, qui possède un objectif de supprimer la déforestation de ses chaînes d’approvisionnement d’ici 2030 indique avoir finalisé la cartographie des points de collecte de 100% de ses fournisseurs de soja au Brésil. Elle estime que 95,86% de son soja originaire du Brésil est cultivé sur des surfaces non déforestées ou converties. Le reste concerne des conversions légales au regard de la réglementation brésilienne. Pour mémoire, le standard RTRS concerne des normes environnementales comme l’absence de déforestation ainsi que des normes sociales et de conditions de travail. Il n’intègre toutefois pas l’absence d’OGM dans son niveau de certification de base.

Le groupe São Luiz prévoit d’investir environ 30 M€ dans l’éthanol

Il s’agit de développer les capacités de production d’éthanol dans ses sites de Santa Cruz et de Santa Maria dans l’Etat de Bahia.

AgroSul Food prévoit d’agrandir un site d’abattage et de découpe de poulet

Il s’agit de l’unité de São Sebastião do Cai dans l’Etat du Rio Grande do Sul. L’investissement s’élève à 9 M€.

Nestlé développe sa présence dans le segment des laits concentrés

Un plan d’investissement d’environ 9 M€ a été annoncé pour appuyer l’augmentation de la production et la communication.