Focus : le Brésil se mobilise contre le système européen de LMR

Dans le contexte de la récente publication en mai de la stratégie « farm to fork » de la Commission européenne (incluant des objectifs « ambitieux » en termes de développement durable), la Confédération nationale agricole brésilienne (CNA) a organisé une série de conférences sur le thème des Limites maximales de résidus (LMR), dont une exclusivement dédiée à la question des LMR européennes. Pour un grand pays exportateur de produits végétaux, comme le Brésil, cette question est en effet centrale car les producteurs et exportateurs doivent jongler au moment de la production et de la vente avec les LMR des différents pays ou blocs acheteurs des produits.

Les autorités et professionnels brésiliens tiennent un discours en général particulièrement critique vis-à-vis du système de LMR européen. Le système européen de définition des LMR est pourtant un des plus développé dans le monde et il inclut : l’étude systématique des valeurs de LMR définies par le CODEX, la définition d’une LMR de base (0,01 ppm) pour des couples substances/production qui n’ont pas de LMR définies en Europe (produits tropicaux,..) et la possibilité de faire une demande de tolérance à l’importation (TI) pour définir des LMR spécifiques. Depuis 2009, l’Union européenne (UE) via ce canal a approuvé 83% des presque 500 demandes de tolérance à l’importation formulées en majorité par les Etats-Unis, le Canada et plus accessoirement le Brésil (top 3 des pays demandeurs). 

Le discours critique des brésiliens à l’égard des LMR européennes, comme indiqué lors de la conférence dédiée à ce thème, tient donc plus au système général d’approbation des produits phytosanitaires dans l’UE qu’au règlement spécifique sur les LMR. En effet, l’UE, évalue les risques des substances à visée phytosanitaires mais certaines substances jugées soit mutagènes (cat 1A et 1B), soit perturbatrices endocriniennes ou à caractère de polluant organique persistant sont exclues de l’analyse. En effet, l’UE juge que, face à ces dangers particuliers, il n’y a pas de mesures de réduction des risques véritablement satisfaisantes et qu’une évaluation de risques ne pourrait vraisemblablement pas conclure à la sécurité humaine ou environnementale de ces substances.

De fait, dans un discours particulièrement caricatural les opposants à cette vision, dont le Brésil, affirment que l’UE pratique une évaluation des dangers et pas des risques, comme s’il s’agissait d’un modèle archaïque, non scientifique et incohérent avec les directives internationales.  La crainte de ces pays est qu’au gré de la mise en place des textes d’application de la stratégie « farm to fork » la Commission revienne sur les tolérances à l’importation pour les substances interdites d’utilisation dans l’UE. Ces pays font donc front commun pour critiquer l’UE au sein des instances internationales sur ce sujet et exercer ainsi une pression maximum pour conserver cette possibilité.

 

Information COVID-19 :

La veille d’actualités COVID-19 sur la zone Brésil – Argentine - Chili, avec un focus sur les secteurs de l’agriculture, l’alimentation, la forêt et la pêche est désormais accessible via ce lien.

Agriculture et commerce

La ministre T. Cristina annonce la création d’une cellule d’action pour aider à la régulation foncière en Amazonie légale

 

L’objectif principal annoncé est de répondre à un besoin des petits producteurs ruraux qui exploitent une zone depuis au moins 2008. La cellule d’action pourra utiliser des images satellites pour faciliter le processus de régularisation des petites structures. Les propriétés situées en territoires indigènes, quilombolas ou unités de conservation ne pourront pas être régularisées. La ministre estime qu’en Amazonie légale, 166 900 parcelles sont susceptibles de régularisation, dont 88% pour des petits producteurs.

Des mesures complémentaires pour appuyer les agriculteurs familiaux face aux conséquences de la pandémie

Le conseil monétaire national a prorogé jusqu’au 15 août prochain les délais de paiement des échéances du crédit rural pour les agriculteurs familiaux, afin de prendre en compte les conséquences de la pandémie. Il a également relevé le plafond de crédit pour les investissements d’industrialisation réalisés dans le cadre du PRONAF.

Augmentation temporaire du quota d’importation de blé à droit nul

Le gouvernement brésilien a augmenté temporairement de 450 000 t, jusqu’en novembre 2020, la quantité de blé pouvant être importé à droit nul en provenance de pays extérieurs au Mercosur. Cette mesure a été critiquée par les opérateurs argentins, principaux fournisseurs de cette céréale. Ce quota additionnel temporaire ne sera activé qu’après l’utilisation à 85% des 750 000 t du quota actuel. Outre une mesure de prévention dans le cas où la commercialisation des graines provenant d’argentine ne serait pas au rendez-vous, il faut probablement également voir dans cette mesure une volonté brésilienne de se prémunir d’une éventuelle hausse du prix du blé argentin.

Le président de l’EMBRAPA évoque l’autosuffisance en blé du Brésil

Dans une interview donnée à la presse brésilienne, Celso Moretti, président de l’EMBRAPA, indique que l’institution de recherche a développé des variétés de blé adaptées à la sécheresse et pouvant se développer dans le Cerrado. Le taux de protéine serait près de deux fois supérieur à la moyenne brésilienne. Il estime que le développement de la production de blé dans le Cerrado pourrait conduire à doubler la production de blé au Brésil et rendre le pays autosuffisant.

L’EMBRAPA et l’APEX finalisent un accord général de coopération

Mis en place le 21 juillet, cet accord entre l’institution de recherche et l’agence de promotion des exportations et investissements vise à développer des initiatives conjointes pour attirer des investissements étrangers au Brésil dans le domaine de la recherche et du développement en agriculture.

Ouverture du marché égyptien aux produits à base de viande de volaille

L’annonce a été faite le 23 juillet par le MAPA qui célébrait son 82ème marché ouvert depuis le 1er janvier 2019.

Un record d’exportations au premier semestre et de belles perspectives

Selon les données diffusées par le centre de recherches avancées en économie appliquée, la croissance des exportations brésiliennes de l’agronégoce s’établit à +16,5% par rapport à la même période de l’année précédente. Elles ont été portées par le coton, les viandes, le complexe soja, le sucre, l’éthanol et la cellulose. La part de la Chine a encore augmenté pour s’établir à 40%, loin devant l’UE, second partenaire à 14,5%. Les perspectives pour le second semestre sont positives, dans un contexte de poursuite d’une parité Réal/USD faible et de guerre commerciale sino-américaine.

Croissance des importations de vins en volume au Brésil au premier semestre 2020, mais baisse en valeur

La croissance s’établit à 7,2% en volume par rapport à la même période de 2019. La baisse de 3% en valeur illustre une recherche de vins moins chers et une forte baisse des importations de champagne et plus généralement de vins pétillants. Le prix moyen de la caisse de 9 litres de vins importés s’établit à US$ 25,7 (FOB), contre US$ 28,4 au S1 2019 selon les données d’Ideal Consulting. Le Chili reste de loin le premier pays fournisseur (42,4% des importations) et connait une forte croissance en volume (10,1%) mais une baisse en valeur (5,2%). Le Portugal se consolide comme second fournisseur avec une croissance en volume de 17,2% et de 18,6% en valeur, devant l’Argentine.

 

Alimentation et sécurité sanitaire

Alimentation animale : centralisation des enregistrements d’établissements et de produits

 

Un nouveau texte concernant les conditions d’enregistrement des établissements et des produits du secteur de l’alimentation animale est paru le 22 avril 2020 (IN 17 du 15 avril 2020). Celui-ci sans changer les textes fondateurs du secteur réorganise les modalités d’organisation des enregistrements. Désormais les demandes que cela soit d’enregistrement des établissements ou des produits ainsi que les notifications (cadastro pour les produits exemptés d’enregistrement) ne seront plus faites au niveau des superintendances fédérales mais seront centralisées au niveau du MAPA via un dépôt complètement informatisé dans le logiciel SIPEAGRO. Les établissements d’ores et déjà enregistrés ont un délai de 6 mois pour faire une nouvelle demande via ce nouveau canal.

Délai d’approbation tacite des produits phytosanitaires

Dans le cadre de la déclinaison pour le ministère de l’agriculture de la loi brésilienne de « libération économique » un arrêté ministériel a été adopté (Portaria 43/2020) fixant des délais très courts d’approbation tacite pour les produits phytosanitaires. Un projet de décret-loi (65/20) est en cours d’étude par le parlement pour revenir sur ces dispositions. En effet, certains parlementaires sont très critiques vis-à-vis de l’application de cette loi dans des secteurs pouvant impliquer la santé humaine. Pour autant, les juristes considèrent que le texte adopté par le MAPA est sans conséquence car celui-ci ne se prononce que sur l’efficacité agronomique et ne peut enregistrer un produit sans les avis de l’IBAMA et l’ANVISA. Or l’IBAMA a refusé d’appliquer un tel délai aux produits phytosanitaires.

Nouvelles dispositions facilitant l’enregistrement des produits biofertilisants

Le MAPA a publié le 15 juillet 2020, l’IN 61 du 8 juillet 2020 fixant les critères auxquels doivent répondre les produits biofertilisants pour faire l’objet d’un enregistrement au Brésil. Ce texte ne concerne pas les « inoculants » (produits fertilisants à base de bactéries) qui feront l’objet d’une instruction spécifique. Ce texte en clarifiant les conditions d’enregistrement de ces produits s’inscrit dans les objectifs du plan « bioinsumos » qui vise à favoriser le développement des intrants biologiques au Brésil.

Environnement

Ratification du protocole de Nagoya

 

Le Brésil est entré dans le groupe des pays ayant ratifié le protocole de Nagoya. Ce texte prévoit de gérer les règles d’utilisation des ressources génétiques et les bénéfices qui découlent de leur utilisation. La ratification de ce protocole est l’une des conditions pour la participation à la COP15 sur la biodiversité prévue en 2021 en Chine.

Moratoire sur les feux

Dans un contexte de croissance des feux de forêt en Amazonie durant le premier semestre 2020, un décret a mis en place un moratoire sur les feux réalisés dans le cadre de pratiques agricoles ou forestières dans les régions de l’Amazonie légale et du Pantanal, jusqu’à la mi-novembre 2020. Les feux restent permis dans les autres biomes sous réserve d’autorisation préalable, ainsi que dans certains cas particuliers (populations traditionnelles et autochtones, recherche…)

Un manque de politiques de soutien à la régénération des forêts

Dans un contexte de croissance de la déforestation dans le pays qui se poursuit, des chercheurs de l'Initiative pour la politique climatique (CPI) ont mis en évidence un manque de surveillance et de politiques publiques dédiées aux terres déboisées au Brésil. Or ces terres, dont la surface est estimée à 17 millions d’hectares, représentent un enjeu pour le stockage du carbone, la régulation du climat et la biodiversité qui devrait être accompagné par des politiques environnementales spécifiques selon ces chercheurs.

Entreprises

Club Agro

Le groupe Carrefour Brésil enregistre un résultat historique au second trimestre

 

Les informations publiées par le groupe Carrefour Brésil pour le second trimestre 2020 font état d’une croissance du résultat net de 74,6% avec un développement exceptionnel du e-commerce dans un contexte de pandémie.

JBS développe un service de fret dématérialisé pour les éleveurs

L’entreprise JBS Transportadora, filiale du géant JBS a annoncé le lancement de l’application Uboi à la suite d’un investissement de 170 000€. Son objectif est de contractualiser en ligne le transport des animaux destinés aux phases d’élevage et d’engraissement. L’application est présentée comme offrant une traçabilité en temps réel du fret et utilisant des chauffeurs certifiés en matière de protection animale.

Piracanjuba investit près de 14 M€ dans une unité de production de fromage

L’objectif annoncé est de construire la plus grande unité de production de fromage du Brésil. Elle sera située dans le Sud du pays, à São Jorge D'Oeste dans l’Etat du Paraná.

Investissements dans la filière du poulet dans le Tocantins

L’entreprise Frango Americano, appartenant au groupe Santa Izabel Alimentos a annoncé investir plus de 19 M€ pour développer sa production de poulet ainsi que d’aliments pour poulets au sein de son unité basée à Paraíso do Tocantins, dans l’Etat du Tocantins.