Le groupe AFD aux côtés du Maroc face à la crise du COVID-19

Mot de la Chef du Service économique

La crise sanitaire et économique que vient de connaitre la planète pourrait rebattre les cartes et permettre au Maroc de profiter du resserrement géographique des chaînes de valeur mondiales. 

En effet, le pays a su adapter très rapidement son outil industriel dans le cadre de cette crise en développant, parallèlement aux mesures prises pour limiter la diffusion du Covid-19, une production en urgence de matériel et de produits nécessaires à la lutte contre l’épidémie. Cette production, qui a bien entendu avant tout pour objet de couvrir les besoins du pays, pourrait permettre à terme de dégager une capacité pérenne d’exportation de certains de ces équipements, notamment de masques, compte tenu des volumes importants dégagés. C’est d’ailleurs à la constitution d’une telle filière d’exportation vers la France que nous sommes en train de travailler avec le Ministère marocain de l’industrie et du commerce et l’Association Marocaine des Industries du Textile et de l’Habillement. Au-delà des équipements sanitaires, cette capacité d’adaptation de l’industrie marocaine pourrait être amplifiée par la généralisation de l’industrie 4.0 qui est déjà une réalité au Maroc, notamment à travers l’IoT et le Big Data.

Le Maroc possède à cet égard de nombreux atouts pour renforcer encore davantage son insertion dans ces chaînes de valeur mondiales : proximité géographique avec l’UE qui implique des risques plus faibles de ruptures d’approvisionnement ainsi qu’une empreinte carbone moindre, infrastructures adaptées qui permettent de valoriser ce potentiel en termes logistiques... Le nouveau partenariat économique franco-marocain que les Ministres ont appelé de leurs vœux le 31 janvier dernier lors de la visite de Bruno le Maire au Maroc pourrait se bâtir sur ces bases nouvelles.

Cécile HUMBERT-BOUVIER

 

1. Un chiffre mis en perspective : 3 Mds USD

Le Maroc tire l’intégralité de la Ligne de Précaution et de Liquidité (LPL) octroyée par le FMI

Pour la première fois, le Maroc a procédé le 7 avril 2020 à un tirage sur la Ligne de Précaution et de Liquidité (LPL) qui lui est octroyée et renouvelée tous les deux ans par le FMI depuis 2012. D’un montant équivalent à près de 3 Mds USD, il sera remboursé sur 5 ans avec une période de grâce de 3 ans.

Ce tirage intervient comme assurance contre le choc sur la balance courante marocaine induit par la pandémie. En effet, la crise du Covid-19 arase les réserves de change du Maroc : les secteurs pourvoyeurs de devise, à savoir notamment le tourisme (8 % du PIB) et l’industrie exportatrice (automobile, aéronautique, textile, etc…), sont pratiquement à l’arrêt et les transferts financiers des Marocains résidant à l’étranger ainsi que les investissements directs entrants au Maroc sont en diminution.

Dans ces conditions, le FMI évalue l’hypothèse d’un doublement du déficit du compte courant en 2020, à 7,8 % du PIB. Selon la Directrice du Trésor marocain, le risque d’une crise de liquidité externe est cependant maîtrisé, dès lors que le tirage de la LPL permettra de couvrir le besoin de financement du Maroc, ce même si la crise affecte toute l’année 2020. En outre, fort de cet appui du FMI, il est probable que le Trésor marocain s’apprête à se refinancer sur les marchés financiers internationaux, la dette souveraine marocaine étant toujours jugée soutenable par les agences de notation (la note Investment Grade BBB- ayant été récemment confirmée par Fitch Ratings et S&P).

 

arthur.francois@dgtresor.gouv.fr

2. La Chronique économique

Commerce extérieur : repli de 7,8 % au terme du premier trimestre

Sous l’effet de la crise du Covid-19, le volume des biens échangés entre le Maroc et le reste du monde s’est replié de 7,8 % au terme du premier trimestre en glissement annuel.
Conséquence d’une diminution plus importante des exportations (-8,1 Mds MAD) que des importations (-6,3 Mds MAD), le déficit commercial marocain s’est creusé de 3,8 % à 49,1 Mds MAD et le taux de couverture a enregistré une perte de 3,6 points à 58,1 %.
 
Sur le plan des exportations, l’ensemble des secteurs de l’économie marocaine a été négativement impacté. Les plus touchés sont l’automobile et l’aéronautique, dont les ventes à l’étranger ont reculé de 25,3 % et 19,2 %. Dans une moindre mesure, les secteurs du textile et du cuir, des phosphates et dérivés et de l’agriculture et agroalimentaire pâtissent également de la récession globale, leurs exportations ayant diminué respectivement de 7,0 %, 4,9 % et 2,5 %.
 
Au niveau des importations, la crise actuelle a davantage pesé sur les importations de biens d’équipement (-12,0 %) que sur les produits finis de consommation (-3,2 %). La facture énergétique, pour sa part, a diminué de 4,8 % en raison de la baisse du cours du pétrole.
 
La situation du commerce extérieur en 2020 dépendra certes de facteurs domestiques, comme la reprise de la consommation interne, mais aussi de contraintes externes, en premier lieu, du rebond des économies européennes, principaux débouchés des exportations marocaines.
 
arthur.francois@dgtresor.gouv.fr

3. Secteur à l’affiche

Conséquences de la sécheresse sur la production céréalière

La production de la campagne agricole 2019-2020 des trois céréales principales (blé tendre, blé dur et orge) est estimée à seulement 30 millions de quintaux (MQx) selon le ministère de l’agriculture marocain, contre une moyenne de 78 M depuis 10 ans.
 
La production est issue d’une superficie semée de 4,3 M ha dont 2 M ha complètement perdus en termes de production céréalière du fait de la sécheresse hivernale. Cette partie perdue a toutefois été reconvertie en fourrage pour les animaux dans certaines zones.
 
La production prévue (16,5 MQx de blé tendre, 7,5 MQx de blé dur, et 5,8 MQx d’orge) devrait permettre d’assurer l’approvisionnement du pays pour plus de 4,5 mois, selon le ministère. Aussi, le gouvernement va mettre en place un régime de commercialisation incitatif afin de favoriser la collecte de la production nationale à des prix rémunérateurs au profit des producteurs de blé tendre.
 
Les conséquences de la sécheresse sont doubles. D’une part, le ministère de l’agriculture a annoncé un plan d’aide d’urgence. Ce plan prévoit de distribuer 2,5 MQx d’orge subventionné au profit des éleveurs des zones affectées mais également le déblocage d’un financement additionnel de 1,5 Md MAD permettant des mesures de retraitement de l’endettement des agriculteurs pour leurs échéances à venir. D’autre part, le Maroc a prolongé la suspension des droits de douanes (à 0 %) sur les céréales et légumineuses jusqu’au 31 décembre afin de poursuivre les importations de céréales sur le marché international.
 
xavier.vant@dgtresor.gouv.fr
 
4. Relations France-Maroc
 
AFD ONEE
 
Crédit Photo : AFD
Légende : Au 1er plan : M. Abderrahim EL HAFIDI, Directeur général de l’ONEE, et M. Mihoub MEZOUAGHI, Directeur de l’AFD au Maroc
 
Le groupe AFD aux côtés du Maroc face à la crise du COVID-19

L’Agence française de développement (AFD) se mobilise pour répondre à l’urgence sanitaire mondiale. Au Maroc, son soutien s’articule autour de trois actions principales :

1. Apporter une réponse immédiate au besoin de financement de l’Etat et des Etablissements Publics
L’AFD a anticipé la mise à disposition à court terme des fonds d’opérations en cours conformément à  leurs objectifs. Ainsi, au cours des trois prochains mois, près de 100 M EUR seront versés au budget de l’Etat afin de contribuer au financement du programme de stabilisation économique et sociale et près de 50 M EUR aux Entreprises Publiques marocaines. Un nouvel accord de prêt de 100 M EUR a été signé le 1er avril dernier en appui à l’amélioration de la performance des communes. Il vise à renforcer les capacités humaines et financières des collectivités locales qui sont également amenées à porter une partie des réponses de soutien face à la crise.

2. Maintenir l’accès des TPME au financement et soutenir le secteur privé
L’AFD a mobilisé deux lignes de crédit en faveur de FINEA (CDG) et du Groupe Crédit Agricole du Maroc, permettant l’accès des TPME à des financements adaptés. 130 M EUR ont été versés dans les semaines suivant la déclaration de l’état d’urgence sanitaire. Proparco, filiale du groupe AFD dédiée au secteur privé, a récemment procédé à une augmentation de capital pour le groupe Oncologie et Diagnostic du Maroc. Elle a également acquis en avril, aux côtés du fonds SPE AIF I, Saham Pharma, premier fabricant d’antibiotiques et l’un des principaux fournisseurs d’hôpitaux au Maroc.

3. Préparer l’après-crise en soutenant de nouvelles politiques publiques de long terme
Le groupe AFD devrait mobiliser au cours du second semestre 2020 entre 400 et 550 M EUR pour soutenir les nouvelles politiques structurelles et les réformes institutionnelles qui constitueront les leviers d’une sortie de crise. Un programme de soutien des réformes du secteur de la santé et du système de protection sociale est en préparation avec le ministère de la Santé. Il contribuera à renforcer la performance du système de santé et sa capacité à mieux résister et répondre aux menaces posées par l’épidémie. Des discussions sont engagées avec le ministère de l’Agriculture pour un programme de soutien à la stratégie Generation Green. Il visera notamment à accélérer la mise aux normes sanitaires des circuits de transformation et de commercialisation alimentaire. L’Agence poursuivra, par ailleurs, son appui financier à la réforme de la régionalisation avancée et aux programmes de villes durables qui contribueront à la relance économique des territoires, ainsi qu’à leur résilience sociale et écologique.

laurence.jacquot@dgtresor.gouv.fr
 
5. Affaires à suivre

• Dans le cadre de l’appel à projets « Imtiaz-Technologies Covid-19 », lancé par l’Agence Maroc PME, 34 projets d’investissement portés par des TPME ont été approuvés pour la fabrication de produits et d’équipements utilisés dans la lutte contre cette pandémie. D’un montant  total de 25 MEUR, ces investissements devraient permettre la création de 487 emplois.

• En réponse aux impacts de la pandémie au Maroc, la BERD a mis en place une facilité de financement de 145 M EUR auprès de Bank of Africa – BMCE Group, comprenant une ligne de prêt dédiée aux PME et une ligne de financement du commerce extérieur.

• Un accord de don de l’UE de 1,5 Mds MAD a été signé en appui aux efforts du Maroc dans la gestion de la crise sanitaire, notamment en termes d’accès à l’enseignement à distance pour les populations en âge scolaire.

• L’AFD et le Crédit Agricole du Maroc ont conclu une convention de subvention de 16,8 M MAD, pour l’appui technique à la transformation des pratiques vers une agriculture durable

• Casa Transports vient de relancer deux appels d’offres relatifs aux nouvelles lignes de tramway T3 et T4 de la ville de Casablanca. Le premier concerne la fourniture du matériel roulant (date de remise des offres : 30 juin 2020) et les travaux d’infrastructures (date d’ouverture des plis : 7 juillet 2020).

• Un Arrêté conjoint n°927-20 du ministre de l’énergie, des mines et de l’environnement et du ministre de l’industrie, du commerce et de l’économie verte et numérique a été publié au BO du 2 avril 2020 rendant d’application obligatoire de normes marocaines relatives aux produits photovoltaïques et installations solaires thermiques.