Les critiques adressées à la Belgique par la Commission européenne à la suite de la transmission du projet de plan budgétaire pour 2020 ont été largement relayées par la presse, et donnent une nouvelle impulsion au débat public portant sur l’endettement belge.

Commission européenne
La presse belge reconnaît en grande partie le fondement des critiques adressées par la Commission à la Belgique

La Commission européenne estime que la trajectoire budgétaire belge présente un risque d’écart significatif.

L’avertissement adressé à la Belgique le 22 novembre souligne d’une part, qu’en dépit de l’engagement belge de réduire le déficit structurel de 0,6% du PIB, celui-ci devrait plutôt augmenter de 0,3% et que, d’autre part, la Belgique fait face à une hausse des dépenses publiques de 4,3%, au lieu du 1,6% recommandé. La Commission en déduit que la trajectoire budgétaire du royaume présente un risque d’écart significatif.

Ces critiques trouvent un large écho dans la presse belge. Celle-ci rappelle abondamment (i) que le tax shift (glissement de la fiscalité pesant sur le travail vers d’autres sources de recettes) n’est pas neutre financièrement, (ii) qu’il s’agit du 4e avertissement consécutif adressé à la Belgique concernant sa situation budgétaire, (iii) que le pays a cessé d’entreprendre depuis 2017 les réformes structurelles nécessaires permettant notamment de répondre à la problématique du vieillissement, qui pèse lourdement sur les dépenses sociales, et (iv) que l’absence d’un exécutif fédéral de plein exercice depuis près d’un an empêche la mise en place d’importantes mesures correctrices.

Plus globalement, l’avertissement de la CE semble susciter une relance du débat public sur la rigueur et les règles budgétaires en vigueur

Parmi l’attention médiatique accordée au sujet, les quotidiens Le Soir et De Standaard (deux quotidiens généralistes populaires dans les deux communautés linguistiques) interrogent tous deux un panel d’économistes sur la situation budgétaire du pays, tandis que La Libre (d’obédience plus libérale), à travers un dossier spécial (« 20 questions pour y voir plus clair sur la dette belge »), essaie d’associer au débat les citoyens en fournissant les clés pour comprendre les enjeux de la question budgétaire. Les points les plus fréquemment soulevés sont :

  • La contradiction entre la « règle d’or » comptable et la « comptabilité d’exercice européenne », cette dernière empêchant l’amortissement dans le temps d’investissements qui produiront des richesses au-delà de l’année où la dépense est enregistrée
  • Le caractère inadapté des règles budgétaires européennes, surtout dans le contexte des taux négatifs, qui rend les politiques d’investissement particulièrement intéressantes. Il est toutefois reconnu qu’il conviendrait de se prémunir contre des politiques budgétaires trop laxistes. Pour cela, Giuseppe Pagano et David de la Croix, respectivement professeur de finances publiques à l’UMons et d’économie à l’UCLouvain, tous deux favorables à plus d’investissements publics, suggèrent de veiller à ce que le taux d’intérêt effectif payé sur la dette publique reste inférieur au taux de croissance de l’économie. A cet indicateur prudentiel pourraient également s’ajouter un critère d’emploi, de manière à financer les pensions, ainsi que plusieurs critères environnementaux
  • Il existe un consensus sur le fait que le recours éventuel à l’endettement doit servir à financer les investissements, et non pas des dépenses courantes et autres transferts sociaux. Les économistes reconnaissent néanmoins la difficulté à définir la notion « d’investissement », celle-ci pouvant couvrir des projets infrastructures tout comme le salaire du personnel enseignant