Amérique centrale – Note de conjoncture économique, Septembre 2019

L’Amérique centrale, qui représente une population d’environ 50 M d’habitants et un PIB de 279 Mds USD (2018), a connu un ralentissement de son économie en 2018, atteignant +2,7% (contre 3,8% en 2017). Si la croissance de la région reste cependant bien plus dynamique que celle d’Amérique latine en général (+1% en 2018), elle ne suffit pas à pallier les retards de développement et les faiblesses institutionnelles dont souffrent la plupart des pays de la région. Ce ralentissement s’est par ailleurs accompagné d’une légère détérioration des finances publiques et de la balance courante, même si les décisions politiques récentes laissent espérer une amélioration à moyen-terme.

1. La croissance de la région reste relativement dynamique malgré une légère décélération en 2018.

a) Une croissance en décélération en 2018

Le rythme de croissance des pays d’Amérique centrale est en décélération même s’il reste plus soutenu que la moyenne régionale pour la septième année consécutive. Il a atteint 2,7% en 2018, contre 1% pour la région Amérique latine-Caraïbes, en baisse par rapport au +3,9% enregistré en 2017 et 2016. Les pays de la région ont connu des croissances comprises entre 2,5% et 3,9%, - à l’exception du Nicaragua - et seuls le Guatemala et le Salvador ont connu une accélération de leur croissance par rapport à 2017. Le Panama continue d’être le pays le plus dynamique de la région, malgré un ralentissement assez marqué en 2018 (+3,9%, vs. 5,3% en 2017). Le Nicaragua se démarque à l’autre extrême par une entrée brutale en récession l’année dernière (-4,0% g.a.) suite à la crise sociopolitique qui secoue le pays depuis avril 2018.

La crise nicaraguayenne continue d’affecter la région entière, notamment via une baisse du commerce intrarégional et un renchérissement du coût du transport. Une étude de la fédération des chambres de commerce de l’isthme d’Amérique centrale (Feamco) estime que la crise a entraîné des pertes de ventes de 24% en moyenne au niveau régional. De nombreuses entreprises ont notamment dû élaborer des plans d'urgence afin d'éviter les blocages, en transférant par exemple les produits par voie maritime. A ce jour, le problème de vente de produits au Nicaragua ou inversement, des entreprises nicaraguayennes à d’autres pays persistent. A titre d’exemple, le FMI estime que la crise nicaraguayenne aurait amputé la croissance costaricienne de 0,2 point de pourcentage en 2018.

La décélération de 2018 peut également être partiellement expliquée par la baisse des exportations de la région, notamment dans un contexte d’incertitude mondiale, de tensions commerciales et de baisse des prix internationaux des produits agricoles (sucre et café, en particulier). Selon les estimations de la CEPAL, les exportations de biens et service n’ont crû que de 2,1% g.a., contre 3,6% en 2017. Par conséquent, les exportations n’ont participé que pour 0,9 point de pourcentage (pdp) à la croissance du PIB en 2019, vs. 1,9 pdp l’année précédente.

 Selon le FMI, la croissance de la région devrait s’accélérer de nouveau en 2019 pour atteindre 3,2% puis 3,5% en 2020. Pour 2019, le FMI prévoit +6% de croissance pour le Panama, devançant de loin le Guatemala, deuxième meilleure performance prévue pour la région (+3,5%).  Le Nicaragua devrait continuer de se trouver en récession pour les deux prochaines années à minima : -5,0% en 2019 et -0,2% en 2020. 

 b) Une croissance tirée par la consommation interne.

La croissance des pays d’Amérique centrale continue d’être tirée par la consommation interne. En 2018, l’apport de la consommation privée à l’expansion du PIB (de +2,7%) a été de 2,1 points de pourcentage[1].

La demande interne est tirée par l’arrivée massive de remesas, qui résulte notamment de la bonne performance de l’économie étatsunienne. Les remesas constituent désormais le flux de capitaux étrangers le plus important de la région, dépassant très largement l’investissement direct étranger (11 Mds USD) et l’aide publique. En 2018, les pays d’Amérique centrale ont reçu près de 22 Mds USD de remesas, en augmentation de 10,3% par rapport à 2017. Ces flux de capitaux sont un apport économique très conséquent : en moyenne, ils représentent 8,2% du PIB en 2018. Deux pays sont particulièrement dépendants des remesas : le Salvador (20,7% du PIB – soit l’équivalent de 114% des exportations du pays) et le Honduras (20,0%) ; dans une moindre mesure, le Guatemala (11,8% du PIB, soit l’équivalent de 84% de ses exportations) et le Nicaragua (11,4% du PIB). A l’inverse, le rôle des remesas est beaucoup moins important au Costa Rica et au Panama, à la fois en termes de volume et de ratio au PIB (0,8% et 0,7% du PIB respectivement).

 c) Une inflation et des taux de change globalement maîtrisés

 L'inflation a ralenti en 2018 dans la plupart des pays et s'est établie en moyenne à 1,9%, soit 1,5 point de moins que la moyenne enregistrée en 2017. Ce ralentissement s’est produit en dépit de la hausse des prix de carburant sur le marché international, grâce à un ralentissement de la demande. Pour 2019, les prévisions d’inflation se situent dans les fourchettes cibles des différentes autorités monétaires.

 Compte tenu des régimes de change présents dans la région (dollarisation, régime de change intermédiaire…), les taux de change ont été maîtrisés. Le Salvador et le Panama ont des régimes dollarisés, tandis que le Guatemala maintient un taux de change flottant dans le cadre d’un régime de politique monétaire ayant des objectifs explicites en matière d’inflation. Le Costa Rica, le Honduras et le Nicaragua jouissent de régimes de change intermédiaires[2]. Dans la plupart des cas, la stabilité du régime de change repose sur une politique de gestion des réserves internationales ainsi que sur des mécanismes d’intervention sur le marché des changes.

2. La croissance ne suffit pas à pallier les retards de développement de la région, provoquant des migrations massives et des protestations sociales.

a) Des retards de développement, couplés à une violence endémique

La relative bonne performance économique de la région n’a pas généré les avancées espérées en matière de réduction de la pauvreté et des inégalités ; dans certains pays, une stagnation voire un recul a été observé. A l’exception du Costa Rica et du Panama, dont le classement mondial pour l’indice de développement humain a stagné entre 2016 et 2017 (respectivement à la 63ème et 66ème place sur 189 pays, soient les meilleurs classements de la région), tous les pays de la région ont reculé dans ce classement. Les niveaux de développement du Guatemala, du Salvador, du Honduras et du Nicaragua sont similaires, tous classés entre la 121ème et la 133ème place – soient les pires classements de toute l’Amérique latine.

 Les disparités socio-économiques restent très élevées. L’Amérique centrale reste caractérisée par des taux de pauvreté parmi les plus élevés d’Amérique latine (hors Caraïbes). A cet égard, deux pays se distinguent particulièrement : le Honduras, dont le pourcentage de la population vivant avec moins de 3,2 USD PPP par jour atteint 32% et le Guatemala (23%)[3]. A l’inverse, le Panama et le Costa Rica connaissent les meilleures performances avec des taux respectifs de 6,7% et 4,0%. Malgré ces meilleures performances relatives, les inégalités restent très marquées : le Panama et le Costa Rica se placent en queue de classement des pays de la région pour le coefficient de Gini avec respectivement des scores de 50,4 et 48,7.  Plus globalement, tous les pays d’Amérique centrale[4] sont au-dessus de la moyenne mondiale pour le « coefficient d’inégalité humaine », mis en place par le Programme des Nations-Unies pour le Développement[5].

Ces inégalités reflètent la faiblesse institutionnelle des pays. D’après le Global Competitiveness Index 2018, réalisé par le World Economic Forum, le Honduras, le Nicaragua, le Guatemala et le Salvador sont classés respectivement 117ème, 122ème, 123ème et 131ème sur 140 en termes d’institutions. Ces mêmes pays sont classés 135ème, 151ème, 143ème et 112ème sur 180 pays selon l’indice de perception de la corruption de Transparency International.

La pauvreté et les faiblesses institutionnelles participent à la violence endémique qui touche certains pays d’Amérique centrale. Les problèmes de violence pourraient coûter à la région 4,2% de son PIB[6], les pays les plus touchés étant le Salvador, le Honduras et le Guatemala (respectivement 140e, 136 et 138e en ce qui concerne le crime organisé selon l’indice de compétitivité 2018 du Forum économique mondial). La région se caractérise également par une importante vulnérabilité aux désastres naturels qui affectent négativement les performances économiques régionales (ouragans, tremblements de terre, inondations…).

 b) Crise migratoire et tensions sociales

 Ces éléments favorisent la crise migratoire que traverse actuellement la région. Selon les migrants eux-mêmes, les trois principales raisons de leur émigration sont : le manque d’emploi ou la crise économique dans leur pays d’origine (plus de 600 000 jeunes entrent sur le marché du travail par an en Amérique centrale et seuls 250 000 emplois formels sont créés)[7] ; des salaires très bas et/ou des mauvaises conditions de travail et la violence ou insécurité[8]. 40,6% de la population hondurienne exprime la volonté d’émigrer, contre 36,3% au Salvador et 30,6% au Nicaragua. Même dans les pays considérés comme plus développés économiquement, cette volonté concerne 19,3% de la population au Panama et 16,8% au Costa Rica.

 Dans ce contexte, des tensions sociales ont éclaté au Nicaragua mais également au Honduras plus récemment. Tandis que la situation reste tendue au Nicaragua depuis avril 2018 et que le pays s’enfonce dans la récession, le Honduras fait face depuis le mois de mai à des vagues de manifestations et de pillage, initialement amorcée par des réformes dans le secteur de la santé et de l’éducation. Selon certains analystes, les protestations dans le pays freinent l’activité économique et empêcheront d’atteindre l’objectif de taux de croissance fixé entre 3,5% et 3,6%.

 3. Des finances publiques en légère détérioration mais les volontés politiques laissent espérer une amélioration à moyen terme.

a) Légère dégradation des finances publiques en 2018, suivant une tendance de long-terme

 La dette publique totale des pays de la région a augmenté en valeur absolue (+6,7% entre décembre 2017 et décembre 2018 pour atteindre 113 Mds USD) ainsi qu’en proportion du PIB (41,2% en 2018 contre 39,5% en 2017). L’évolution a cependant été hétérogène selon les pays : le Costa Rica a  enregistré la plus forte augmentation de son ratio d'endettement public en pourcentage du PIB, passant de 48,5% à 53,5% entre 2017 et 2018. Le Nicaragua a également connu une augmentation conséquente de son ratio/dette PIB (de 34% à 37,2%). Si cette évolution est pour l’instant temporaire compte tenu des perspectives de croissance négative du pays, une prolongation de la situation actuelle pourrait affecter l’économie du pays à plus long terme. Le Salvador et le Guatemala ont quant à eux réduit leur ratio sur l’année.

Cette augmentation de la dette publique est d’autant plus flagrante à plus long terme : au cours de la dernière décennie, le ratio dette sur PIB des pays de la région a augmenté de près de 10 points de pourcentage. Le Costa Rica et le Salvador se distinguent des autres pays : ils ont enregistré une augmentation significative de leur dette au cours de la période 2008-2018 (respectivement +29,4 et +20,3 points de pourcentage du PIB), pour atteindre près de 60 % d’endettement sur PIB au Costa Rica et 67,1% au Salvador, bien au-dessus de la moyenne régionale.

 Les déficits budgétaires des gouvernements centroaméricains ont quant à eux atteint 2,7% du PIB en moyenne, contre 2,3% enregistrés en 2017. Cette légère augmentation du déficit résulte d'un ralentissement de l'ensemble des revenus et d'une légère augmentation des charges totales par rapport à l'année précédente. Les recettes moyennes sont passées de 16,2% du PIB en 2017 à 16,0% du PIB en 2018. De plus, les dépenses courantes ont augmenté dans tous les pays de la région – de 18,5% à 18,6% du PIB en moyenne-, principalement en raison du paiement d'intérêts sur la dette (2,2% du PIB en 2017 à 2,4% du PIB en 2018). L'augmentation des dépenses courantes a entravé les efforts visant à contenir les dépenses publiques par le biais de réformes fiscales et de changements administratifs.

Les pays de la région se démarquent par ailleurs par la faiblesse de leur pression fiscale. Alors que les recettes fiscales atteignent en moyenne 34,3% du PIB dans les pays de l’OCDE, aucun des pays de la région ne dépassent 18%. Les charges fiscales du Panama (9,6% du PIB) et du Guatemala (10%) sont parmi les plus faibles du monde ; tandis que celles du Honduras et du Salvador, qui possèdent pourtant les meilleures performances de la région (18%), atteignent à peine la moitié de la moyenne de l’OCDE en termes de proportion du PIB.

 b) Une volonté d’assainissement des finances publiques

On observe néanmoins une volonté politique à l’assainissement des finances publiques, notamment au Costa Rica et au Salvador, les deux situations les plus préoccupantes de la région.

Au Costa Rica, face à l’urgence de la situation (augmentation de +12,2 points de la dette publique/PIB entre 2013 et 2018), le Gouvernement a fait passer une réforme fiscale en décembre 2018, dont les gains sont estimés par le FMI à 4 points du PIB. Le Gouvernement prévoit également de procéder une émission d’obligations souveraines sur les marchés internationaux pour 1,5 Mds USD, projet approuvé par l’Assemblée nationale en juillet dernier, pour répondre à ses besoins de financements à court terme. Ainsi, si le ratio dette publique/PIB devrait continuer d’augmenter dans les prochaines années, le Ministère des finances ainsi que la Banque Centrale estiment que l’endettement public du Costa Rica devrait se stabiliser autour de 58% du PIB en 2024. L’objectif affiché est d’atteindre un ratio d’endettement de 50% du PIB en 2028. Le FMI, quant à lui, anticipe une augmentation de l’endettement public consolidé jusqu’en 2022 (63,4% du PIB) avant une réduction progressive. Cependant, face au risque de détérioration à court-terme, Moody’s et Fitch ont toutes deux baissé la note souveraine du Costa Rica, en décembre 2018 et janvier 2019 respectivement. De plus, la poursuite de cette trajectoire favorable suppose la mise en place de plusieurs textes de loi complémentaires en 2019.

Au Salvador, qui connaît le niveau de dette le plus important de la région (67,1%), le Gouvernement a entamé un projet d’assainissement de ses finances publiques, notamment via des efforts de meilleur recouvrement de l’impôt. Comme évoqué, le Salvador a le taux de recouvrement le plus élevé de la région (18%), notamment après une progression de +1,3 point de pourcentage en trois ans. Grâce à ces efforts budgétaires, le Salvador est l’un des rares pays dont le ratio dette publique/PIB a diminué cette année, passant de 67,3% du PIB à 67,1%. Dans ce contexte, Moody’s a amélioré la note souveraine du pays en février 2018 et Standard & Poor’s en janvier 2019.

 

 4. La dépendance à la conjoncture américaine est l’une des plus grandes vulnérabilités des économies centraméricaines.

a) Des économies ouvertes…

Les économies centroaméricaines sont des économies ouvertes. Il convient cependant de distinguer deux-sous groupes : le Nicaragua et le Honduras dont le taux d’ouverture[9] approche les 100% (respectivement 97% et 102% du PIB en 2017) et le reste des pays dont le taux d’ouverture, bien qu’important, est moindre.[10]

Le déficit de la balance courante des pays centraméricains s’est légèrement détérioré en 2018 : il est passé de 2,7% du PIB en 2017 à 3,2% du PIB en 2018, notamment à cause du moindre dynamisme des exportations. Comme évoqué précédent, tous les pays de la région, à l’exception du Panama, ont connu un ralentissement du rythme de croissance de leurs exportations. On notera le cas du Guatemala qui est le seul pays de la région à avoir connu une contraction de la valeur de ses exportations (-0,2%), due à la suspension de certaines activités minières et à la réduction des prix moyens des produits agricoles clés pour l’exportation du pays, comme le café et le sucre. Il est cependant le seul pays, avec le Nicaragua[11], à avoir eu un solde courant positif en 2018, à 0,8% du PIB (1,6% en 2017).  

Les IDE dans la région ont quant à eux augmenté (+2,7%) entre 2017 et 2018, atteignant 11,4 Mds USD. Cependant, la situation des différents pays de la région est très hétérogène : le Costa Rica, le Salvador, le Guatemala et le Nicaragua ont tous connu une contraction des arrivées d’IDE, avec une chute particulièrement importante au Nicaragua (-53,5% g.a.)[12]. Les IDE du Panama ont ainsi tiré les IDE régionaux, le Panama captant à lui seul près de la moitié des IDE de la région (48,5%), avec un rythme de croissance de 21,4%.

 b) …qui cherchent à diversifier leurs partenaires commerciaux…

La région est de plus en plus intégrée au commerce international, grâce à un nombre croissant de traités de libre-échange signés ces dernières années et de négociations en cours pour de nouveaux traités. En août 2019, la Corée du Sud a notamment signé un traité de libre-échange avec cinq pays centroaméricains (Costa Rica, Salvador, Honduras, Nicaragua et Panama) pour baisser ou éliminer les taxes d’importations sur 95% des produits. Des négociations de TLC et accords de coopération avec Israël sont en cours (Guatemala, Honduras).

La Chine a une présence de plus en plus importante dans la région, et est devenue le deuxième ou troisième partenaire commercial des pays de la région. Jusqu’en 2018, le Costa Rica était le seul pays centraméricain à avoir des relations diplomatiques avec la Chine. Depuis, le Panama et le Salvador ont choisi de se séparer de Taiwan au profit du géant asiatique et de fait, la Chine devrait être en 2019-2020, le premier pays de destination des exportations panaméennes. La situation géographique de l’Amérique centrale, véritable plateforme entre l’Amérique du sud et les États-Unis, intéresse particulièrement la Chine, qui souhaite intégrer cette région dans la section latino-américaine de sa nouvelle « Route de la soie ». Les entreprises chinoises s’intéressent particulièrement aux projets d’infrastructures dans la région et participent à des projets d’investissement pour un montant total de 2 Mds USD.

Les pays d’Amérique centrale cherchent également à approfondir leur intégration régionale : en 2017, l’union douanière entre le Guatemala et le Honduras est entrée en vigueur ; le Salvador vient d’y adhérer de manière officielle. En termes de facilitation des échanges, les pays de la région ont mis en place une Déclaration Unique Centroaméricaine (DUCA) (mise en place d’un seul formulaire pour toutes les procédures douanières) en mai dernier, dont l’entrée en vigueur a cependant généré des problèmes de douanes, ralentissant le commerce dans la région pendant plus d’un mois.

Enfin, le Mexique cherche également à se rapprocher du Triangle Nord notamment via le Plan de Développement Intégral du Sud du Mexique, du Guatemala, du Honduras et du Salvador (PDI), coordonné par la CEPAL. Ce plan, pour lequel le Mexique a d’ores et déjà promis 30 M USD au Salvador et 30 M USD au Honduras, a pour but de traiter les causes structurelles des migrations dans la région Sud du Mexique/Triangle Nord : amélioration des flux migratoires, développement du bien-être social, développement économique, développement durable et adaptation au changement climatique.

c) …mais qui restent dépendantes de la conjoncture américaine…

Les pays centroaméricains sont majoritairement tournés vers l’économie américaine, créant une vulnérabilité à la conjoncture étatsunienne. En 2018, 42% des exportations de la région[13] ont été à destination des Etats-Unis, avec en tête le Nicaragua (51,9%) et le Salvador (50,9%) ; et 37% des importations[14] provenaient du voisin américain. La majorité des IDE de la zone proviennent des Etats-Unis : en 2018, ils représentaient 47% des IDE reçus pour la région, suivis des pays centroaméricains eux-mêmes (37%) et de l’Europe (13%). La diversification des partenaires commerciaux reste donc un véritable défi pour la région afin de réduire son exposition à une détérioration éventuelle de la conjoncture des Etats-Unis.

La dépendance aux Etats-Unis se traduit également par la part importante que prend le pays dans les transferts de migrants. Près de 1,5 million de Guatémaltèques sont installés aux Etats-Unis, et 2,5 millions de Salvadoriens soit l’équivalent de 40% de la population du pays, et contribuent ainsi à l’envoi de remesas. Dans le cas des trois pays du triangle du Nord (Salvador, Honduras et Guatemala), les transferts provenant des Etats-Unis représentent plus de 80% du total des remesas reçues.

Cet afflux massif de remesas pourrait cependant être menacé : le Gouvernement américain a annoncé la fin du programme de Statut de protection temporaire précédemment accordé au Honduras, au Salvador et au Nicaragua, qui devrait prendre fin entre fin 2019 et début 2020. Selon des chiffres rapportés par de récentes enquêtes, la réduction des remesas pourrait représenter entre 4% et 12% du total des envois, dans le cas du Honduras et du Salvador, respectivement. Les Etats-Unis ont par ailleurs annoncé l’annulation des budgets de coopération de l’USAID pour 2018-2019 et menacent régulièrement de supprimer l’ensemble des aides destinées au Triangle Nord.  

Malgré le ralentissement récent, les pays d’Amérique centrale connaissent une croissance relativement soutenue en comparaison avec le reste de la région Amérique latine. Néanmoins la situation macroéconomique et les perspectives économiques des différents pays sont hétérogènes et les faiblesses structurelles continuent de grever le développement économique, social et humain des pays de la zone. Les défis demeurent nombreux : renforcement de la compétitivité, investissement dans les infrastructures, amélioration de la gouvernance et de l’efficacité de la dépense publique, mise en place des réformes fiscales, lutte contre la criminalité et contre la corruption endémique… La diversification des partenaires commerciaux est également fondamentale pour des pays dépendant étroitement des Etats-Unis sur le plan commercial et des flux de capitaux (IDE et transferts de migrants), en particulier dans le contexte d’un possible retournement de la conjoncture américaine. Dans ce contexte global, le processus d’intégration économique centraméricain, engagé il y a 60 ans mais aux faibles avancées (car souvent laissé au second plan), gagnerait à être renforcé.  



[1] Selon les estimations de la CEPAL

[2] Administrés respectivement avec des objectifs d'inflation explicites, des fourchettes de crédit et des mini-dévaluations quotidiennes annoncées à l'avance

[3] Les dernières données disponibles datent de 2015.

[4] à l’exception du Costa Rica

[5] Ce coefficient se calcule grâce aux inégalités observées dans les trois dimensions clés du développement humain (espérance de vie, éducation et conditions économiques). La moyenne mondiale en 2017 a été de 20,0. Les résultats des pays de la région sont les suivants : Costa Rica - 17,3 ; Panama – 21,1 ; Belize – 21,3 ; El Salvador – 21,9 ; Nicaragua – 22,6 ; Honduras – 25,2 ; Guatemala – 27,7.

[6] Selon une étude de la Banque interaméricaine de Développement (BID), publiée en 2017.

[7] Selon les estimations de la CEPAL, qui incluent la République Dominicaine.

[8] Selon une enquête réalisée par le Collège de la Frontière Nord (COLEF)

[9] Calcul de la Banque Mondiale: Exportations + Importations de biens et services en pourcentage du PIB.

[10] Costa Rica: 68%; El Salvador: 73%; Guatemala: 46%; Panama: 87%; chiffres Banque Mondiale 2017.

[11] 0,6% du PIB en 2018 vs -4,9%  en 2017.

[12] -3,2% au Costa, -15,3% au Salvador et -11,8% au Nicaragua

[13] Hors Panama

[14] Hors Panama