La Banque centrale indienne (RBI) baisse une nouvelle fois ses taux directeurs, pour la quatrième fois consécutive, dans un contexte de ralentissement économique.

Quatrième baisse des taux directeurs et poursuite d’une politique monétaire accommodante

La Banque centrale (RBI) a abaissé son principal taux directeur de 35 pdb, à 5,4 %. Le comité de politique monétaire (CPM) de la RBI a pris une décision dans un sens identique pour la quatrième fois consécutive, avec pour conséquence de porter les taux de prise en pension (reverse repo), de mise en pension (repo) et le taux au jour le jour (marginal standing facility) à 5,15 %, 5,40 % et 5,65 % respectivement.

La décision a été votée à l’unanimité par les six membres du CPM, mais la discussion a surtout porté sur le niveau souhaité de l’ajustement à la baisse. Deux membres ont en effet voté pour une réduction de 25 pdb (à l’image des trois dernières) contre quatre en faveur d’une baisse de 35 pdb. Cette décision a été couplée au maintien de l’orientation expansionniste de la politique monétaire décidée lors du précédent CPM de juin.

Cette baisse de 35 points de base rompt avec la tradition d’ajuster les taux par 25 pdb ou un multiple. Le Gouverneur DAS avait laissé poindre cette possibilité lors d’une intervention plus tôt dans l’année. Il avait notamment déclaré : « dans une situation où la Banque centrale préférerait être accommodante mais pas trop, elle pourrait annoncer une réduction du taux directeur de 35 points de base si elle estimait que la valeur standard de 25 points de base est trop faible, mais son multiple, à savoir 50 points de base est trop élevé ».

C’est la première fois depuis plus de cinq ans – et, partant, depuis l’arrivée au pouvoir de Narendra Modi – que l’Institut d’émission décide d’abaisser pour la quatrième fois consécutive ses principaux taux.

Depuis le début de ce cycle baissier en février dernier, le CPM a diminué ses taux de référence de 1,10%. Ce mouvement devrait sans doute se poursuivre puisque les analystes de marché tablent désormais sur une baisse des taux d'au moins 40 points de base dans les prochains mois.

Une décision justifiée par un contexte de ralentissement économique…

L’Institut d’émission a mis en avant le net ralentissement de l’économie sur ces derniers mois pour expliquer sa dernière décision. L’activité économique a en effet enregistré une croissance de seulement 5,8 % sur le premier trimestre 2019. Cet essoufflement de l’expansion économique indienne inquiète la RBI, qui craint de surcroît que le ralentissement de la demande extérieure, dans le sillage de celui de la croissance mondiale, ne pèse également sur un pays affecté aussi par une diminution marquée du rythme de l’investissement.

Au-delà de ce constat, la RBI prend également en compte un environnement international de plus en plus instable, source potentiel de risques géopolitiques croissants. Elle met ainsi en exergue le ralentissement de la croissance à la fois au sein des économies avancées mais également émergentes alors que les menaces liées aux tensions protectionnistes persistent.

La RBI a, dans ces conditions, de nouveau abaissé sa prévision de croissance du PIB à 6,9% pour l’exercice actuel (avril 2019-mars 2020), contre une estimation 7% en juin et 7,2% en février derniers. La RBI souligne notamment l’atonie de la consommation privée (matérialisée par la poursuite de la contraction des ventes de voitures pour le huitième mois consécutif), surtout en milieu rural, qui devrait peser sur l’activité économique au cours des prochains mois.

On relèvera enfin que la Banque centrale a aussi modifié sa trajectoire d’inflation pour l’exercice budgétaire 2019-20. Elle estime dorénavant que les prix à la consommation progresseront à environ 3,1% à l’issue du second trimestre de l’exercice actuel (contre une estimation à 3% en juin 2019) et s’établiront entre 3,5 et 3,7 % sur la seconde moitié (contre une estimation entre 3,4 et 3,7% en juin 2019). Elle a annoncé par ailleurs une prévision de 3,6% à l’issue du premier trimestre de l’exercice suivant.

…dans un contexte de timide reprise du cycle de crédit depuis 2018

Le secteur bancaire a connu une reprise du cycle de crédit en 2018, avec une hausse des encours de 13,8% en glissement annuel. Ils s’élèveraient à 93 384 Mds INR (1 151 Mds €) selon la RBI, soit une nette accélération de la dynamique du crédit sur la période. Cette progression des encours de crédit s’explique surtout par la dynamique des prêts au secteur tertiaire et par les prêts de détail. L’amélioration de la situation financière des banques publiques devrait par ailleurs alimenter ce mouvement, la croissance du crédit étant estimée entre 11 et 13% pour l’exercice en cours.

Le Gouverneur de la Banque centrale espère que ce mouvement de baisse des taux d’intérêt permettra de stimuler la consommation et de rendre les banques moins averses au risque. Il a rappelé à cet égard que les trois précédentes réductions, pour un total de 75 points de base, avaient permis aux banques commerciales d’abaisser leur taux d’intérêts de près de 29 pdb. Conséquence directe, la State Bank of India (SBI), principale banque du pays en termes d'actifs, a abaissé cette semaine de 15 points de base ses taux de prêt de référence, toutes positions confondues. La HDFC, deuxième banque du pays en avait déjà fait de même la semaine antérieure à la décision de la RBI.

La Bourse de Bombay a plutôt bien réagi à ses annonces pour clôturer à 36 690 points en baisse de seulement 0,8% par rapport à la veille. Le rendement des obligations souveraines à 10 ans n’a évolué de son côté que de manière marginale, - 3 pdb.

Evolution des taux directeurs de la RBI (%)

Source : RBI