L’Indonésie, 2e pollueur aux déchets plastiques des océans, pourrait devenir un importateur majeur de déchets plastiques suite aux restrictions d’importation émises par la Chine et plusieurs pays d'ASEAN. Le gouvernement indonésien réfléchit à renforcer sa réglementation pour encadrer ces importations.

1. Après les restrictions imposées en Chine et dans certains pays de l’ASEAN, une part croissante des exportations mondiales de déchets est réorientée vers l’Indonésie. Depuis les années 1990 jusqu’en 2016, le marché mondial des déchets plastiques était en progression continue. La Chine aurait reçu près de la moitié de ces exportations. Par exemple en 2016, la Chine a importé 7,35 M tonnes des 14,1 M tonnes exportées mondialement. La décision du géant asiatique prise au début 2018 d’interdire l’importation de la majorité des déchets plastiques a considérablement redessiné le marché mondial des déchets plastiques. Les exportations se sont depuis dirigées vers d’autres pays d’Asie comme la Malaisie, la Thaïlande et le Vietnam qui sont devenus les principaux pays importateurs de déchets plastiques de mi-2017 à mi-2018. Pour contrer cet afflux de déchets, ces pays ont à leur tour légiféré pour limiter ces importations. Pour sa part, l’Indonésie voit ses importations de déchets plastiques croître fortement, avec 283 000 tonnes en 2018 soit une augmentation de 141% par rapport à 2017. Ce volume de déchets est néanmoins faible face à celui des déchets produits localement (environ 9 M tonnes par an).

2. Bien que l’importation de déchets plastiques non recyclables soit interdite en Indonésie,  la réglementation n'empêche pas   totalement les importations illégales. En effet, alors que les importations de déchets papiers et métaux ne sont soumis qu’à un contrôle de documents, les déchets plastiques recyclables et textiles sont soumis à un contrôle visuel venant notamment confirmer leur caractère recyclable. Des pratiques frauduleuses consistent à contourner la réglementation, en faisant passer notamment des déchets non recyclables comme des déchets papiers ou métalliques, afin d’éviter un contrôle qui empêcherait leur importation. Ainsi les importations de papiers ont augmenté de 35% entre 2017 et 2018 alors que les revenus du secteur n’ont augmenté que de 6% en parallèle.

déchets plastiques

3. Le gouvernement indonésien réfléchit à l’adaptation de sa réglementation. Le ministère du commerce et le ministère de l’environnement, en charge de la gestion de ces importations, ont annoncé que les règles relatives à l’importation de papier et de métaux allaient être durcies pour permettre plus de contrôle et ainsi éviter les importations illégales de déchets plastiques. Néanmoins, le ministère de l’industrie rappelle que le pays a besoin d’importer des papiers, métaux et plastiques recyclables pour fournir l’industrie locale en matières premières.

Une nouvelle réglementation devrait également être promulguée pour durcir les poursuites envers les entreprises responsables d’importations illégales de déchets plastiques. Dans ce contexte, les autorités ont annoncé le 14 juin 2019 qu’elles renvoyaient aux Etats-Unis cinq conteneurs contenant des déchets illégaux, puis le 2 juillet 2019, 49 conteneurs vers l’Australie, les Etats-Unis, la France, l’Allemagne et Hong-Kong. Le 29 juillet, l'Indonésie a procédé au renvoi de 2 de ces conteneurs vers la France.

4. Les transferts transfrontaliers de déchets (TTD) sont encadrés par la Convention de Bâle au niveau international. Pour une exportation pour valorisation vers l’Indonésie, tous les déchets non dangereux (classés dans la liste verte de la convention de Bâle) sont soumis à un consentement préalable de l’Indonésie (procédure de notification) sauf les plastiques, les textiles, les revêtements de sols, les éthers polymères et le PVC pour lesquels l’exportateur doit simplement informer l’Indonésie (procédure d'information). Les déchets plastiques peuvent donc être envoyés en Indonésie sans autorisation préalable des autorités françaises ou indonésiennes, sous réserve qu’ils ne soient pas mélangés à d’autres déchets, par la procédure d’information et une procédure de contrôle selon le droit indonésien (détaillée au point 2).

En mai 2018, un amendement à la Convention de Bâle a été approuvé et entrera en vigueur le 1er janvier 2021. Celui-ci classifie maintenant la majorité des plastiques (sauf les plastiques destinés au recyclage et composés d’un seul type de polymère ou de résine) comme déchets devant faire l’objet d’un accord préalable du pays importateur. Les pays en développement qui ne sont pas en mesure de traiter ces déchets comme l’Indonésie pourront donc les refuser. La France a été un des acteurs qui a poussé cette démarche au sein de l’Union Européenne et des autres pays de l’OCDE pour s’assurer que les déchets des pays développés ne viennent pas accentuer les problèmes de pollution (notamment marine) dans les pays en développement.

5. Concernant le retour de containers de déchets illégaux vers la France par les autorités indonésiennes, la France entend respecter le droit indonésien et le droit international. Les autorités françaises sont en contact avec les autorités indonésiennes pour étudier tout cas d'exportation illicite de déchets depuis la France et prévenir ces exportations à l'avenir.