Lumière Turquoise numéro 82 / mai 2019

L’annulation des résultats de l’élection municipale d’Istanbul, qui avait donné la victoire à un candidat de l’opposition, a replongé le pays dans une période d’incertitude politique et économique, comme l’illustrent de nouvelles tensions sur le taux de change de la livre turque obligeant la Banque centrale à intervenir pour soutenir la devise locale. De nouvelles élections se tiendront le 23 juin prochain, repoussant encore la perspective d’une stabilisation de la situation politique indispensable à la mise en oeuvre de réformes structurelles nécessaires et longuement reportées. L’évolution de la situation économique en Turquie est aussi dépendante de ses relations avec ses partenaires. A cet égard, les relations turco-américaines sont de plus en plus tendues à l’approche de la date envisagée pour la livraison des missiles russes S-400, laissant craindre une vague de sanctions à l’égard de la Turquie.


L’amélioration du taux de croissance au premier trimestre 2019 (+1,3% par rapport au trimestre précédent, après -2,4% au T4 2018) ne doit pas pour autant laisser penser que la reprise économique est toute proche (le taux de croissance demeure de son côté en retrait de 2,6% par rapport au premier trimestre 2018). Ce rebond conjoncturel repose sur un effet de base favorable et est notamment attribuable à une politique budgétaire accommodante en période pré-électorale (croissance de la consommation publique de 7,2% en glissement annuel). La consommation privée se réduit de 4,7% et l’investissement se contracte pour le quatrième trimestre consécutif (-9,5%), tandis que la balance commerciale continue de s’améliorer (ralentissement des importations de l’ordre de -28,8 % et croissance des exportations de 9,5% en g.a.).


Des initiatives tous azimuts, dont le contenu et le calendrier restent souvent assez flous, sont régulièrement annoncées (à l’exemple du tout récent paquet économique de 4,4 Mds EUR visant à soutenir la croissance de la production nationale dans l’industrie turque, mesure qui pourrait amplifier le déficit budgétaire alors que les bénéfices attendus sont aléatoires, d’un nouveau plan d’actions pour lutter contre l’économie informelle ou d’une feuille de route qui détermine les grandes orientations en matière de réforme de la justice) et visent à marquer l’engagement des autorités à réformer et soutenir l’économie.


Le potentiel des autres marchés de la zone fait l’objet d’une mise en valeur logique comme en témoignent de nombreuses rencontres bilatérales, à l’instar de la commission économique franco-turkmène qui s’est tenue à Achgabat le 15 avril dernier permettant de mettre en lumière les projets des entreprises françaises dans ce pays, ou encore de l’importante délégation (plus d’une quarantaine d’entreprises) du Medef (associée à l’ADEPTA) conduite par M. Roux de Bézieux qui se rendra à Bakou la première quinzaine du mois de juillet.


Daniel GALLISSAIRES, Chef du Service économique régional d’Ankara