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Le tourisme en Azerbaïdjan : un potentiel longtemps sous-exploité

Pays du Sud-Caucase situé à la croisée de l’Europe et de l’Asie, l’Azerbaïdjan dispose d’atouts indéniables dans la compétition mondiale pour l’attraction des flux touristiques. La diversité de ses paysages tout d’abord : le pays abrite 9 des 13 zones climatiques de la typologie de Köppen, réparties sur un territoire de 86 600 km², soit l’équivalent du Portugal. On y trouve ainsi les massifs montagneux du Grand Caucase propices aux sports d’hiver, une façade maritime dotée d’un climat méditerranéen, des plaines fertiles et une tradition viticole ancienne, des déserts arides et des zones subtropicales à proximité de la frontière avec l’Iran. Le pays peut également compter sur un patrimoine historique et culturel conséquent, avec deux sites d’exception classés au patrimoine mondial de l’Unesco : la vieille ville de Bakou et la réserve naturelle du Gobustan, ainsi que plusieurs destinations à fort potentiel en région, dont la ville de Sheki. Enfin, le pays s’est doté au cours de la dernière décennie d’infrastructures de transport modernes, dont un aéroport international bénéficiant de la notation maximale du classement Skytrax (cinq étoiles) mais également d’un réseau routier étendu et moderne sur les principaux axes de circulation.

Malgré cet environnement propice, l’Azerbaïdjan a longtemps négligé le développement du secteur touristique, axant la totalité de sa stratégie économique sur l’exploitation de la rente énergétique. En raison du sous-investissement chronique dans l’offre hôtelière, la formation du personnel et la promotion de la destination à l’international, l’Azerbaïdjan a ainsi accumulé au fil des ans un retard conséquent vis-vis de ses principaux concurrents régionaux : la Géorgie et la Turquie.

Un axe prioritaire de la stratégie de diversification économique

La chute brutale des cours des hydrocarbures survenue en 2014 a poussé les autorités à réagir en réorientant les politiques publiques vers le développement des secteurs non-pétroliers. La stratégie de diversification économique mise en œuvre à partir de 2016 a fait du développement du secteur touristique un axe prioritaire, en fixant notamment un objectif de 4 millions de visiteurs d’ici à 2023. En 2018, le pays a enregistré 2,8 M d’arrivées, dont 1,5 M peuvent être considérées comme des touristes (au moins une nuitée payante dans le pays). Les flux les plus importants proviennent de Russie (0,8 M, mais incluent de nombreux azerbaïdjanais établis en Russie et détenant un passeport russe), de Géorgie (0,51 M), d’Iran (0,36 M, en forte baisse du fait de la dégradation de la situation économique dans le pays) et de Turquie (0,31 M). A noter la très forte progression des arrivées en provenance des Emirats arabes unis, quasiment nuls en 2014 (812 arrivées) mais dépassant les 100 000 visiteurs en 2017.  

Plusieurs réformes significatives ont été lancées dans ce cadre. Parmi les initiatives emblématiques figure l’instauration d’une procédure de visas électronique dont la gestion est assurée depuis janvier 2017 par l’agence des services publics numériques ASAN. Disponible à ce jour pour 94 pays, cette initiative permettant d’obtenir en moins de 3 heures un visa touristique a indéniablement contribuée à doper les arrivées de touristes hors CEI. A noter que de nombreux pays du Golfe, ainsi que les ressortissants de Chine, de Malaisie et du Japon peuvent également obtenir un visa touristique directement à l’arrivée à Bakou sans demande préalable.

Des investissements conséquents ont également été consentis afin d’améliorer l’offre et la qualité des infrastructures hôtelières. Le secteur a connu un développement accéléré, toutefois surtout concentré dans la capitale. Ainsi, alors que le pays ne comptait que 285 établissements hôteliers en 2006, leur nombre a atteint 563 en 2017, pour une capacité totale en lits de 41 611. Les revenus de l’industrie hôtelière ont logiquement connu une forte hausse durant la même période, passant de 74,3 M AZN en 2006 à 284,5 AZN en 2017.

    Afin d’accompagner cette dynamique, les autorités ont aussi mis en place en 2018 une nouvelle agence d’Etat pour le tourisme, reprenant des compétences auparavant dévolues au ministère de la culture. Une seconde structure placée dans l’orbite de cette agence d’Etat, l’Azerbaijan Tourism board (ATB), a également été créée pour promouvoir la destination Azerbaïdjan. Dirigée par un professionnel du tourisme de nationalité autrichienne, l’ATB a notamment piloté la nouvelle campagne mondiale de promotion de l’Azerbaïdjan basée sur le slogan « Take another look ». Parmi ses faits d’armes récents, figure la signature en mars 2019 d’un accord ADS (approved destination status) avec la République populaire de Chine, ouvrant la voie à l’arrivée de touristes chinois en voyage organisé. L’ATB a également coordonnée en partenariat avec des acteurs privés locaux la rénovation et mise en valeur de plusieurs sites touristiques, dont Yanar dag (la montagne brûlante) et prévoit l’ouverture de centres d’accueil des visiteurs sur plusieurs autres sites, dont les fameux volcans de boue du parc du Gobustan. Un travail sur la signalétique à destination des touristes est également en cours.

Un fort besoin de professionnalisation et de structuration de la filière, dans un contexte de forte concurrence internationale

Malgré ces efforts récents et une dynamique encourageante, la part du tourisme dans le PIB total de l’Azerbaïdjan demeure modeste, atteignant 4,5% du PIB en 2017 (3,6% en 2013), selon les données du comité d’Etat des statistiques. La filière génère par ailleurs 46 800 emplois directs.   

Outre le caractère récent des initiatives prises pour soutenir le tourisme, plusieurs éléments contribuent à en freiner l’expansion. Ainsi, les experts du secteur soulignent les efforts encore insuffisants pour professionnaliser la filière. La formation du personnel reste un point noir en Azerbaïdjan, où les sections spécialisées sont encore peu nombreuses et considérées comme peu attractives. La création en 2014 d’une université de gestion du tourisme (ATM) vise en particulier à répondre à cet enjeu, mais ne suffira vraisemblablement pas à satisfaire l’ensemble des besoins. Plusieurs opérateurs privés dont le groupe français Vatel s’intéressent à ce marché (projet d’école hôtelière) mais rencontrent des obstacles administratifs.

L’absence de régulation de l’activité de guide touristique est également déplorée par de nombreux professionnels. De fait, il n’existe pas de label officiel  ou de certification permettant de distinguer les guides amateurs ou volontaires des professionnels, et pas non plus de grilles tarifaires harmonisées.   

Par ailleurs, l’offre hôtelière est à ce jour majoritairement concentrée sur le segment du luxe, avec de nombreux palaces, en particulier à Bakou, mais il existe un déficit persistant d’hôtels et résidences de moyenne gamme offrant des prestations comparables aux établissements des pays voisins, en particulier la Géorgie. L’absence d’un système unifié et transparent de classement des hôtels (système des étoiles) rend l’offre difficilement lisible pour les clients potentiels. Enfin, le secteur reste majoritairement contrôlé par une poignée de grands groupes proches du pouvoir politique, ce qui limite la concurrence et maintient les tarifs à un niveau élevé.

Enfin, malgré les investissements très conséquents consentis au cours de la dernière décennie, L’Azerbaïdjan reste loin derrière la Turquie mais également la Géorgie en termes de connectivité aérienne. La compagnie aérienne nationale AZAL et sa filiale low cost Buta Airways dispose de fait d’une position hégémonique sur le marché, limitant la concurrence. La signature d’un accord portant création d’un espace aérien commun avec l’Union européenne (Open sky agreement) fait partie des priorités de la Délégation de l’UE en Azerbaïdjan, mais se heurte aux réticences d’AZAL, soucieuse de préserver son monopole sur les destinations les plus rentables.

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