L’Indonésie est le deuxième pollueur aux déchets plastiques des océans mais a conscience de l’urgence de la situation à remédier aux conséquences désastreuses sur l’environnement et à ses impacts sur les activités et la santé humaine. Elle a publié ainsi en 2017 son plan national de lutte contre la pollution marine pour atteindre son objectif de réduction de 75% de la pollution marine d’ici 2025, avec un budget d’1 Md USD par an. Des initiatives complémentaires de collectivités locales et d’entreprises accompagneront ces mesures nationales.

                              lutte contre la pollution marine

1. L’Indonésie, plus grand archipel au monde au croisement de deux océans, a un important rôle à jouer dans la lutte contre la pollution marine aux déchets plastiques. Les observateurs estiment qu’environ 8 millions de tonnes de déchets plastiques par an se retrouve en mer dans le monde, l’Indonésie en étant le 2e pollueur au monde, avec de nombreuses conséquences néfastes : étouffement des animaux marins, dégradation des coraux, perturbation de la croissance du zooplancton affectant l’ensemble de la chaîne alimentaire, possible contamination des humains ingérant du poisson ou des fruits de mer, dégradation de l’image touristique. La croissance démographique, notamment dans les villes, accompagnée des changements rapides des modes de consommation (remplacement des emballages traditionnels par le plastique) ont conduit à une explosion des déchets plastiques posant problème en l’absence de filière de gestion des déchets efficace et de sensibilisation de la population.

2. De récents évènements en Indonésie résultant de cette pollution marine ont ainsi été largement médiatisés, dans le pays et à l’international, pointant l’urgence de la situation : envoi de troupes de l’armée pour nettoyer une rivière recouverte de déchets plastiques à Bandung (5e ville d’Indonésie) début 2018, images d’un plongeur anglais nageant dans un océan de déchets plastiques en mars 2018 près de Bali, mort d’un grand cachalot ayant ingéré 6 kg de plastique retrouvé le 19 novembre 2018 dans le parc national marin de Wakatobi, mort de trois tortues de mer étouffées par des déchets plastiques retrouvées le 27 novembre 2018 dans les Mille Îles au nord de Jakarta.

3. De nombreuses voix politiques s’élèvent pour dénoncer l’augmentation inquiétante des déchets plastiques en mer. Les plastiques à usage unique sont particulièrement sous le feu des critiques de la Ministre de l’Environnement qui estime que 9,8 milliards de sacs plastique sont utilisés en Indonésie chaque année (95% finissant en déchet) et que 93 millions de pailles sont utilisées chaque jour par les Indonésiens. La Ministre de la Pêche et des Affaires maritimes a appelé la population à arrêter d’utiliser des produits plastiques à usage unique. Le Président Jokowi a enfin appelé à des efforts conjoints pour lutter contre la pollution plastique dans les océans lors du 33e Sommet de l’Asie orientale le 15 novembre 2018 à Singapour, car les solutions durables sont à trouver aux niveaux régional et mondial.

4. Le gouvernement indonésien a ainsi pris conscience de la nécessité de réduire la pollution plastique dans les océans afin de protéger l’environnement et la biodiversité, ainsi que les futures générations. L’Indonésie a publié en 2017 son plan national de lutte contre la pollution plastique marine 2017-2025, reposant sur 5 piliers : changement des comportements, lutte contre la pollution d’origine terrestre, lutte contre la pollution d’origine marine, forte réduction de production et d’usage de plastique et amélioration des mécanismes de financements et de la mise en œuvre des dispositions réglementaires. Grâce à ce plan, l’Indonésie porte l’ambition de réduire sa production de déchets de 30% et sa pollution plastique marine de 70% d’ici 2025 (décret présidentiel 97/2017). Un budget de 1 Md USD par an est dédié au financement de ce plan d’action.

Quelques mesures de gestion des déchets plastiques sont détaillées ci-dessous :

  • Le recours à des taxes pour financer la gestion des déchets. Ainsi par exemple, dans les zones touristiques (liste restant à définir mais qui comprendra Bali et Labuan Bajo), qui sont par définition soumises à une forte affluence pouvant dégrader leur environnement, il est envisagé de recourir à une « taxe de nettoyage » qui pourrait se monter à 1 USD pour les touristes locaux et 10 USD pour les touristes étrangers.
  • La sensibilisation de la population aux dangers des déchets plastiques et au recyclage, notamment vis-à-vis des plus jeunes. Ainsi, des modules sont en cours d’introduction dans les cursus scolaires depuis la maternelle jusqu’au lycée dans l’ensemble du pays.
  • La valorisation de la démarche 3R (Réduire, Réutiliser, Recycler), la promotion de l’innovation et l’implication des communautés locales.
  • La limitation de la distribution de produits en plastique à usage unique, notamment l’appui aux collectivités locales.
  • La promotion du waste-to-energy, répondant aux enjeux de gestion des déchets et de production d’énergie alternative aux énergies fossiles. 12 villes prioritaires ont ainsi été désignées par décret présidentiel n°35/2018 pour la mise en place d’infrastructures d’incinération et de production électrique associée, sur un modèle de Partenariat Public-Privé (PPP).

5. Les villes et provinces indonésiennes s’engagent également dans cette lutte, avec des initiatives à souligner. Ainsi, 8 villes ont pour l’instant interdit l’usage de sacs plastique à usage unique. Le gouverneur de Bali a interdit l’utilisation des sacs plastiques, des pailles et du polystyrène expansé (Styrofoam, servant notamment aux repas à emporter) depuis le 24 décembre 2018 sur l’île. Enfin, le gouvernement de Jakarta a interdit la distribution des sacs plastique à usage unique dans les supermarchés, supérettes et marchés depuis le 1er janvier 2019 (avec une amende pouvant atteindre 25 millions IDR, soit 1500 EUR, en cas d’infraction, une période de transition de quelques mois ayant néanmoins été décidée pour sensibiliser les commerçants), tandis que la réglementation sera ensuite élargie aux secteurs de la restauration, de l’hôtellerie et du e-commerce.

6. L’accomplissement de l’objectif de réduction des déchets ne pourra se faire qu’avec l’implication de la société civile. Ainsi, plus de 150 entreprises ont annoncé des engagements pour réduire leur déchets plastiques tandis que près de 450 entreprises ont enregistré 8500 activités visant à l’atteinte de l’Objectif de Développement Durable 14 « Conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable ». Danone Aqua, leader de l’eau en bouteille, est ainsi très impliquée dans le recyclage des déchets plastiques, avec l’objectif d’ici 2025 de renforcer la collecte des déchets et d’utiliser 50% de plastique recyclé dans ses bouteilles. Veolia Indonesia, acteur reconnu dans la gestion des déchets, est actuellement en phase de construction d’une usine de recyclage qui pourra traiter jusqu’à 25 000 tonnes de bouteilles PET par an près de Surabaya (mise en service prévue début 2020).

7. Preuve du renforcement de la place de l’Indonésie sur la scène internationale pour la lutte contre les déchets plastiques, elle a accueilli deux évènements majeurs en octobre-novembre 2018 qui lui ont permis de montrer toute son implication : la 5e Conférence Our Ocean (29-30 octobre, qui se tient tous les ans) et la 4e réunion intergouvernementale (IGR-4) sur la mise en œuvre du Programme d’action mondial pour la protection du milieu marin contre la pollution due aux activités terrestres (31 octobre-1er novembre, qui se tient tous les 5 ans, dans le cadre du Programme des Nations Unies pour l’Environnement-UNEP). L’IGR-4, sur le thème de la pollution des océans, a vu l’adoption de la Déclaration de Bali sur la protection de l’environnement marin des activités terrestres, en particulier la protection des écosystèmes marins et côtiers des déchets marins, des micro-plastiques et des eaux usées. Lors de la Conférence Our Ocean, l’Indonésie a confirmé ses engagements contre la pollution marine.