Le projet propose des objectifs en matière de transition énergétique et de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 légèrement plus ambitieux que ceux fixés en 2017 par la stratégie énergétique publiée par le gouvernement précédent, qui en représente le point de départ. L’Italie semble en bonne voie pour atteindre son objectif climatique à cet horizon, tandis que l’atteinte des objectifs énergétiques semble demander des mesures nouvelles.

 

Le 31 décembre dernier, le gouvernement Conte a transmis à la Commission européenne le projet de plan national énergie-climat (PNEC) à l’horizon 2030. Ce plan, élaboré par les ministères du développement économique (chef de file), des transports et de l’environnement, reprend les principaux axes de la stratégie énergétique nationale publiée en 2017 par le gouvernement Gentiloni et les adapte aux nouveaux objectifs européens, notamment en termes d’énergies renouvelables et d’émissions de CO2. Il fera l’objet d’une consultation publique avant son approbation prévue en 2019.

1. Le plan augmente modérément les objectifs définis par le gouvernement précédent.

La stratégie énergétique nationale (SEN), conçue comme point de départ des politiques énergétiques à l’horizon 2030, repose notamment sur une transition vers une économie bas carbone qui s’appuie sur l’abandon du charbon à l’horizon 2025, la forte réduction de la consommation de pétrole et le développement des renouvelables, le gaz devant jouer un rôle de stabilisation du système électrique à moyen terme. Le PNEC fixe, par rapport à la SEN, des objectifs à l’horizon 2030 légèrement plus ambitieux en matière de renouvelables (30% de la consommation finale brute contre 28%) et de réduction des émissions dans les secteurs non couverts par le mécanisme ETS (-34,6% par rapport à 2005, contre -33%).

L’objectif est inchangé du point de vue des émissions de gaz à effets de serre, le PNEC prévoyant d’ici 2030 une réduction de 33% par rapport à 2005, un objectif supérieur à celui fixé par les accords communautaires (30%). En particulier, s’agissant des industries sous le régime de « permis d’émissions » (ETS), le gouvernement actuel s’est fixé un objectif de réduction de 55,9%, contre 43% prévu par l’UE pour l’Italie et 57% prévu par la SEN.

2. Les efforts les plus importants portent sur la génération d’électricité, les transports et les bâtiments.

Selon le PNEC, en 2030, la consommation finale brute d’énergie devrait s’élever à 103,8 Mtep, en baisse de 7,5% par rapport à 2017. S’agissant du secteur électrique, le PNEC prévoit une consommation finale de 29 Mtep (+1,7% par rapport à 2017), dont 55,4% de sources renouvelables, alors que l’objectif SEN avait été fixé à 55%. La croissance des renouvelables repose essentiellement sur le solaire et sur l’éolien qui tripleront et doubleront, respectivement, leur production actuelle (74,5 GWh et 40,1 GWh en 2030). L’électrification de la consommation d’énergie, un des facteurs qui, avec le développement des renouvelables, devrait contribuer à réduire la dépendance aux ressources fossiles, passera de 23,6% de la consommation finale en 2017 à 26% en 2030.

Dans le secteur thermique, grâce notamment aux investissements dans l’efficacité énergétique des immeubles, la consommation finale devrait s’élever en 2030 à 44,4 Mtep (-20,3% par rapport à 2017), dont 33,1% issus d’énergies renouvelables (contre 20,1% en 2017), tandis que la SEN fixait un objectif de 30% d’EnR. Une contribution très significative sera apportée par les pompes à chaleur sur air, dont la production devrait doubler (5,6 Mtep, contre 2,6 Mtep actuellement). La production de chaleur par les biocombustibles (biogaz, biofuel et biomasse) s’élève actuellement à 6,7 Mtep et augmentera à 7,2 Mtep d’ici 2030.

Dans le secteur des transports, le plan prévoit une consommation finale de 27,6 Mtep, soit -9% par rapport à 2017, avec une part d’énergies renouvelables de 21,6% (5,5% en 2017), un objectif légèrement plus ambitieux que celui fixé par la SEN (20%). Sur ces 21,6%, les biocarburants pour les automobiles joueront le rôle le plus important, avec une part de 14,4 p.p, dont environ la moitié représentée par le biométhane (de 0 à env. 800 ktep en 2030), suivis par les renouvelables électriques dans le transport routier (5,5 p.p, de 2 à 380 ktep) et ferroviaire (1,7 p.p). À l’horizon 2030, 1,6 millions de véhicules 100% électriques (EV) et 4,4 millions de véhicules hybrides (PHEV) seraient en circulation. Le PNEC reprend en outre les objectifs de la SEN en matière de développement du gaz pour le transport routier : premier pays en Europe en termes de voitures à gaz (naturel et GPL), l’Italie vise à doubler le nombre actuel de stations-services pour les véhicules à méthane (2400 en 2030) et à développer fortement le réseau pour les véhicules à gaz naturel liquéfié, destiné surtout aux poids-lourds (800 stations-services en 2030).

Le PNEC réaffirme la centralité du rôle du gaz naturel dans la stabilité du système électrique et dans le chauffage et l’importance de diversifier ses sources d’approvisionnement, via tanker (GNL d’Amérique du Nord et Moyen-Orient), mais également par gazoduc. Ainsi, malgré les protestations d’une partie de l’électorat M5S, le gouvernement a confirmé l’autorisation du gazoduc transadriatique (TAP), pour l’acheminement du gaz azerbaïdjanais en Italie.

3. L’Italie semble en bonne voie pour atteindre ses objectifs climatiques pour 2030, tandis que l’atteinte des objectifs énergétiques demanderait des mesures nouvelles.

L’Italie semble bien placée pour atteindre son objectif de réduction de 33% des émissions de GES en 2030, grâce aux efforts déjà réalisés depuis 2005, et malgré la hausse des émissions constatée entre 2016 et 2018. Entre 2005 et 2015, les émissions ont en effet été réduites de 25%, principalement grâce à l’essor des renouvelables et la diminution de l’utilisation du charbon, si bien que l’effort à réaliser d’ici 2030 est moindre que celui constaté entre 2005 et 2015. En revanche, le scénario du PNEC s’écarte du scénario tendanciel s’agissant de la réduction de la consommation d’énergie finale (103,8 Mtep contre 113,2 Mtep) et de la part renouvelable du besoin primaire d’énergie (28% contre 21%), ce qui illustre le besoin de mesures nouvelles.

Des études montrent un écart entre le scénario tendanciel et les objectifs du PNEC. Selon la principale association patronale italienne, Confindustria, les investissements prévus par ses adhérents dans les infrastructures énergétiques permettront une baisse des émissions de CO2 de 72 Mt/an en 2030 par rapport à 2016, inférieure aux objectifs du PNEC. Du point de vue des transports et notamment de la mobilité électrique, le PNEC fixe des objectifs supérieurs à ceux du scénario tendanciel d’une étude du Politecnico de Milan, qui prévoit environ 1,1 M de véhicules EV et 700 000 PHEV en circulation à l’horizon 2030.

Elettricità Futura, l’association qui réunit les producteurs italiens d’électricité (dont les opérateurs EnR), a qualifié le PNEC de « raisonnablement ambitieux », tandis que les organisations de protection de l’environnement, et notamment Legambiente, ont critiqué le projet du gouvernement, notamment du point de vue des renouvelables, en soulignant que l’objectif italien de 30% est inférieur à l’objectif moyen européen (32%).