La transition d'un système parlementaire vers un système présidentiel a entraîné des changements importants dans l'administration économique, non seulement par la réduction du nombre de ministères (de 6 à 3 : Ministère des finances et du Trésor, Ministère du Commerce et Ministère de l'Industrie et de la Technologie), mais aussi par la création de 4 nouveaux « bureaux » (finances, transformation digitale, RH et investissements) et « conseils » traitant des questions économiques et financières (dont le conseil des politiques économiques responsable du suivi et de l’évaluation de la politique économique ainsi que de la définition de recommandations visant à orienter l’investissement public et à assurer le développement du marché financier).

Le président Erdoğan a annoncé le nouveau gouvernement et a nommé l'ancien ministre de l'énergie, qui est également son gendre, ministre des Finances et du Trésor. Des modifications ont été introduites dans le cadre législatif de la Banque centrale, au risque de compromettre davantage son indépendance (le décret a supprimé la clause stipulant que le gouverneur de la Banque centrale devait être nommé pour un mandat de cinq ans par un décret du Conseil des ministres et a également apporté des changements concernant la qualification et la nomination des vice-gouverneurs). De nombreuses institutions impliquées dans la gouvernance économique, telles que le Conseil des marchés de capitaux (SPK), l'Agence de régulation et de supervision bancaire (BDDK) et le Fonds d'assurance des dépôts d'épargne (TMSF), ont été directement rattachés au Président.

L'annonce du nouveau cabinet et la publication de données sur la balance des paiements (la Turquie a enregistré un déficit du compte courant de 5,9 milliards USD en mai 2018, le portant sur 12 mois à 57,6 milliards USD) ont accéléré la chute de la livre turque qui a atteint un nouveau plus bas historique (4,97 USD et 5,82 EUR le 12 juillet).

Les déclarations du nouveau Ministre des finances qui affiche comme priorités une politique monétaire et fiscale permettant de lutter contre l’inflation (15,4 en juin en g.a), le retour à la discipline budgétaire (que le contexte pré-électoral avait malmené) et la mise en place de réformes structurelles (sans préciser lesquelles), n’ont pas été suffisantes pour apaiser les marchés, ni les craintes de Fitch, l’agence abaissant la note souveraine turque à « BB » le 13 juillet dernier.

La stabilisation de la situation économique ne pourra venir que de mesures rapides et concrètes pour réduire l’inflation, lutter contre les vulnérabilités externes et améliorer l’environnement des affaires (la levée de l’état d’urgence le 18 juillet prochain constitue à ce titre un signal positif).