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Macroéconomie

Activité économique – Le PMI manufacturier était en hausse en juin, s’établissant à 56,6 (contre 55,4 le mois précédent). Les nouvelles commandes ont enregistré leur croissance la plus soutenue depuis le début de l’année et les producteurs irlandais se montrent confiants dans la demande future. Cette hausse contraste avec la baisse du PMI manufacturier de la zone euro, qui passe de 55,5 à 55,0 sur le mois – son niveau le plus bas depuis le quatrième trimestre 2016 mais toujours en territoire positif. Le PMI des services continue quant à lui sa progression, s’établissant à 59,5 en juin contre 59,3 le mois précédent.

PMI

Chômage – Le taux de chômage continue de diminuer en Irlande, s’établissant à 5,1% en juin (-0,1pp par rapport à mai et -1,7pp en g.a), soit le taux le plus faible depuis près de 11 ans. Les premières estimations concernant les taux de ces derniers mois ont été fortement revues à la baisse (passant d’une estimation initiale de 5,8% à 5,2% en mai). L’économie irlandaise semble approcher du plein emploi plus rapidement que prévu, ce qui justifie les appels à la prudence budgétaire afin d’éviter une potentielle surchauffe de l’économie. Le nombre de chômeurs s’établit maintenant à 120 000, en baisse de -2,4% sur le mois et de -22,0% en g.a. Pour la première fois depuis la récession, le taux de chômage des hommes est plus faible que celui des femmes, respectivement à 5,1% et 5,2%. Selon Davy Research, ces chiffres reflètent la solide reprise économique dans les secteurs où l’emploi masculin prédomine (tels que la construction) mais également une diminution structurelle du taux de participation des hommes.

chomage

Ventes au détail – Les ventes au détail (en volume) hors automobiles  continuent leur progression au mois de mai, en hausse de +1,5% sur le mois et de +4,7% en g.a. cvs. Les ventes sont notamment stimulées par la croissance du revenu des ménages et le dynamisme du marché du travail. L’indice des dépenses de consommation Visa (enregistrant l’évolution transactions par carte bancaire Visa) du mois de mai a ainsi enregistré une hausse de la valeur des transactions de +3,7% en g.a. Ventes automobiles inclues, les ventes au détail n’ont cependant augmenté que de +0,1% sur le mois et de +4,3% en g.a. Les ventes de voitures neuves ont en effet baissé de 2,3% en mai et de 5,3% sur les 5 premiers mois 2018 en g.a. Parallèlement, le nombre de voitures importées a augmenté de 14,0% en mai et de 11,5% sur les 5 premiers mois 2018 en g.a : les consommateurs irlandais profitent de la faiblesse de la livre sterling par rapport à l’euro pour acheter leur voitures en Irlande du Nord.

retail

Construction – La production du secteur de la construction a connu une forte croissance au premier trimestre 2018 à +7,4% en g.t. et +21,0% en g.a. – principalement stimulée par la production résidentielle (+5,6% en g.t. et +30,0% en g.a). Le PMI de la construction s’est ainsi établi à 61,8 en mai (contre 60,7 le mois précédent), son plus haut niveau en 12 mois. Ces chiffres de croissance élevés ne doivent pas masquer un niveau d’activité encore faible (55% inférieur à celui du T4 2006 et 28% inférieur à celui de la période 2000-2001). La construction résidentielle demeure quant à elle 76% plus faible que lors du pic de 2006 et 58% plus faible que la période précédant la bulle immobilière. Les permis de construire ont également enregistré une forte progression au T1 2018, en hausse de +81% en g.a. Les permis de construire pour les appartements ont connu la croissance la plus rapide, en hausse de +178% en g.a. – 75% des demandes de permis ayant été accordées à Dublin.

construction

Immobilier – L’écart entre offre et demande de logements est plus large qu’attendu et continue de se creuser en Irlande. D’après les nouvelles données publiées par le Bureau national de la Statistique irlandais (CSO), l’offre de logement est beaucoup plus faible que ne le laissaient entendre les estimations précédentes (fondées sur le nombre de nouvelles connections au réseau électrique) : le nombre d’unités résidentielles achevées entre 2011 et 2017 serait de 53 600, soit 40% de moins que la précédente estimation. Parallèlement, la population a augmentée de +1,1% en 2017, soit 53 000 individus – l’immigration ayant été plus forte qu’attendue (+20 000 individus sur l’année). Sur l’année 2017, 14 446 unités ont été mises sur le marché, pour une demande estimée à 40 000. Ce déséquilibre continue d’alimenter la hausse des prix (+13% en mai 2018 en g.a.)

ImmoImmobilier locatif – La croissance des prix des loyers – déjà très élevée – accélère en Irlande. Au premier trimestre 2018, les loyers ont crû de +7,1% en g.a, contre +6,4% au trimestre précédent. L’instauration, il y a un an, d’un plafonnement des hausses de loyers à 4% par an dans les zones dites « en tension » n’a eu que peu d’effet sur le marché locatif : à Dublin, les loyers ont progressé de +1,0% sur le trimestre et de +7,8% au T1 2018 sur un an. Si le plafonnement a pu bénéficier aux locataires existants, les nouveaux locataires semblent avoir été négativement impactés : l’asymétrie d’information entre les nouveaux locataires et les propriétaires permet à ces derniers d’augmenter le loyer bien au-delà de la limite légale car il est difficile pour un nouveau locataire de connaitre le loyer appliqué précédemment. L’absence de recours possibles pour les locataires ainsi que la forte demande relativement à l’offre limitée entretiennent la crise du logement.

Loyers

Fiscalité

Evitement fiscal des multinationales – Le National Bureau of Economic Research, le principal think-tank indépendant américain, a publié une étude intitulée The Missing Profits of Nations visant à mesurer l’échelle des « transferts de bénéfices » des multinationales (montages fiscaux permettant aux entreprises multinationales de transférer leurs profits d’un Etat à un autre afin de les déclarer dans les juridictions qui appliquent des taux d’impôts très faibles, voire nuls). Selon cette étude, 90 Mds € (106 Mds $) de profits auraient relocalisés en Irlande pour des raisons fiscales en 2015, soit plus que dans l’ensemble des Caraïbes (incluant les Bermudes, les îles Caïmans et les îles Vierges britanniques). Ce constat amène les auteurs de l’étude à qualifier l’Irlande de « plus gros paradis fiscal au monde ». L’étude indique également que le ratio de bénéfices imposables rapportés à la masse salariale des multinationales en Irlande est d’environ 800%, soit 16 fois plus que le ratio moyen des pays considérés comme n’étant pas des paradis fiscaux (environ 50%) – ce qui alimente, pour les auteurs, de fortes présomptions quant au rôle central joué par l’Irlande dans les montages d’évitement fiscal. Le ministère des Finances irlandais a rapidement réagi, jugeant les conclusions de l’étude « simplistes » et rejetant le qualificatif de « paradis fiscal » au motif que l’Irlande respecte les normes établies par l’OCDE.

Finances publiques

Summer Economic Statement 2018 - Le ministre des Finances et de la Dépense publique, Paschal Donohoe, a présenté mi-juin le traditionnel Summer Economic Statement (SES) qui donne les premières orientations du Budget 2019. Le cadrage macroéconomique est inchangé par rapport au Programme de stabilité (croissance de +5,6% en 2018 et +4,0% en 2019) et fait l’hypothèse d’un « Brexit doux ». La stratégie budgétaire du gouvernement confirme un ralentissement de l’effort de consolidation, les dépenses publiques augmentant légèrement. Elle demeure cependant prudente, se conformant aux règles budgétaires européennes, cherchant à éviter les mesures pro-cycliques et à consolider la position budgétaire de l’Irlande face aux risques extérieurs. Ainsi, le gouvernement n’entend pas utiliser la marge de manœuvre budgétaire (« fiscal space ») disponible de 900 M€, bien que les règles budgétaires européennes l’y autorisent. Le ministre Donohoe a justifié cette décision par le souci de ne pas conduire de politique pro-cyclique dans un contexte où l’activité demeure robuste. L’une des principales craintes du gouvernement est de réitérer les cycles de « boom and bust » des années 2000 qui sont en partie à l’origine de la récession de 2008. Le gouvernement s’est attiré un certain nombre de critiques, principalement du Sinn Féin et des travaillistes, alors que le pays connait un important déficit d’infrastructures et de logements. Le Fianna Fáil, principal parti d’opposition dont l’approbation est requise pour que le budget soit voté, a en revanche « globalement » accepté l’approche du gouvernement. De même, le National Economic Dialogue (27-28 juin) n’a pas fait ressortir de dissension majeure au sein de la société civile. L’Ibec et l’Irish Tax Institute ont toutefois souligné l’importance de renforcer l’investissement dans les entreprises irlandaises (notamment à travers une réduction de l’impôt sur les plus-values), et en particulier dans les PME, pour leur permettre d’accroître leur compétitivité. Le think-tank public ESRI a par ailleurs recommandé d’aider ces entreprises à attirer et à conserver une main d’œuvre qualifiée, actuellement trop concentrée dans les multinationales.

Secteur financier

Crédits hypothécaires – D’après les données publiées par la Fédération irlandaise des banques et des paiements (BPFI), plus d’1 Md€ de prêts hypothécaires ont été accordés en mai, soit une augmentation de +14,4% en g.a. Le nombre de prêts accordés a augmenté de +9,8%. Le montant moyen des crédits hypothécaires accordés en mai s’élève à 237 000 € (+4,4% en g.a), soit la croissance la plus faible de ces deux dernières années. Le nombre de crédits hypothécaires en arriérés demeure élevé mais continue de diminuer : au premier trimestre 2018, les prêts en arriérés de 90 jours sont passés de 6,8% des encours de prêts à 6,7% pour les propriétaires-occupants et de 15,4% à 15,2% pour les propriétaires de biens locatifs. Les arriérés de long terme (720 jours) – qui représentent 61% des arriérés totaux et dont la valeur moyenne est passé de 78 000€ à 89 000€ entre mars 2017 et mars 2018 – constituent le principal problème. Malgré un nombre élevé de prêts en arriérés, le nombre de saisies demeure très faible : 14 300 propriétés (1,7% du stock total de collatéraux) ont été saisies depuis 2010. La saisie des biens immobiliers demeure difficile en Irlande, en raison de la lenteur des procédures judiciaires (7 ans en moyenne), des jugements généralement favorables aux emprunteurs et des risques de réputation élevés pour les banques.

Banque centrale irlandaise – Le 5 juillet dernier, la Banque centrale irlandaise (CBI) a annoncé qu’elle fixera la marge de capital contra-cyclique (CCyB – exigence de fonds propres supplémentaires déterminée discrétionnairement par les banques centrales nationales) à 1% à partir de juillet 2019 (elle est actuellement à 0%) pour les banques irlandaises. La CBI a indiqué que ce taux était cohérent avec son objectif de rendre le secteur bancaire irlandais plus résilient : la CBI vise un taux moyen de 1% à terme, la banque pouvant l’augmenter lorsque les risques persistent et le diminuer durant les phases de ralentissement économique. La CBI a justifié sa décision par la forte croissance du PIB irlandais, la rapide hausse des prix de l’immobilier commercial et résidentiel, le niveau toujours élevé de la dette des ménages et du ratio de prêts non-performants dans le bilan des banques – qui constituent, selon elle, autant de risques alors que le système financier irlandais demeure vulnérable.

Affaires européennes

Brexit – Le gouvernement britannique a dévoilé sa proposition de relation future avec l’UE à travers un « livre blanc » (white paper), qui confirme la direction prise par Westminster vers un « Brexit doux ». Le Royaume-Uni propose ainsi un « accord d’association » avec l’UE – similaire à celui récemment signé entre Bruxelles et Kiev – garantissant un alignement réglementaire du Royaume-Uni avec l’UE pour le commerce des biens mais ouvre la possibilité à une divergence sur les services. Ce livre blanc a été accueilli favorablement côté irlandais, qui y voit la clarification tant attendue de la position britannique ; mais surtout, il propose une « zone de libre échange » pour les biens et un projet (complexe) qui maintiendrait le Royaume-Uni dans une forme d’union douanière avec l’UE, permettant ainsi d’éviter le retour d’une frontière physique sur l’île d’Irlande. Le Vice-Premier ministre irlandais (Tanáiste), Simon Coveney, a ainsi indiqué que ce livre blanc « était un pas dans la bonne direction, vers un Brexit pragmatique et raisonnable ». La veille de sa publication, le Premier Ministre (Taoiseach), Leo Varadkar, avait déclaré que « si le Royaume-Uni assouplissait ses lignes rouges, l’UE devrait également se montrer plus flexible ».

Contribution au budget de l’UE – Un rapport publié par la Commission des Comptes publics du Dáil (chambre basse du parlement irlandais) estime que la contribution de l’Irlande au budget européen est surévaluée. Selon le rapport, la méthodologie utilisée pour calculer la contribution des Etats membres (EM) au budget de l’UE – basée sur le revenu national brut (RNB) de chaque EM – ne convient pas à l’Irlande : le RNB irlandais est – comme le PIB – artificiellement gonflé par la relocalisation d’actifs incorporels (brevets de propriété intellectuelle notamment) en Irlande par les entreprises multinationales ces dernières années. La contribution du pays est ainsi passée de 1,3 Md€ en 2010 à plus de 2 Mds€ en 2017 et pourrait atteindre 2,7 Mds€ cette année, selon les prévisions de la Commission. Parallèlement, la sortie du Royaume-Uni de l’UE – qui pourrait engendrer un manque à gagner de 94 Mds € sur 7 ans (période du cadre financier pluriannuel) pour le budget de l’UE – et les ressources supplémentaires nécessaires au financement des nouvelles politiques que souhaite mettre en place l’Union (migrations, défense, économie du numérique) pourraient augmenter la contribution de l’Irlande de 250 à 400 M€ supplémentaires selon les estimations du ministère des Finance, portant sa contribution totale à plus de 3 Mds€. La Commission parlementaire recommande ainsi au ministre des Finances, Paschal Donohoe, de chercher une base légale permettant le recours à des indicateurs économiques alternatifs pour calculer la contribution de la République au budget de l’UE.

Evolution des indicateurs macroéconomiques

Tableau mensuel

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Tableau annuel

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