Composée d’une population aux origines ethniques variées, la société malaisienne fonde son « contrat social » sur la distinction ethnique. Cela s’est incarné dans le droit positif au début des années 1970, en particulier sur le terrain économique. En 1971, le gouvernement a adopté une nouvelle politique économique (« New Economic Policy ») visant à éliminer la pauvreté et assurer une meilleure participation des populations locales indigènes, dites « Bumiputera [1]», aux bénéfices de la croissance. Précisée ultérieurement par la National Development Policy (« NDP ») et la National Vision Policy (« NVP »), cette politique visait en particulier à atteindre d’ici 2010 une participation des Bumiputera (population malaise et assimilée) à 30% de l’économie (contre une estimation de moins de 5% au début des années 1970), en octroyant des avantages économiques et sociaux et en contraignant les entreprises étrangères (restrictions à l’investissement). Cela avait notamment pris la forme d’une obligation d’actionnariat à 30% « bumiputera ». Si la législation « bumiputera » a été allégée depuis 2009, plusieurs règles et pratiques demeurent, selon les secteurs.

      1. Plafonds de participation au capital social

Les obligations de participation « bumiputera » au capital social d’une entreprise sont mises en œuvre dans le cadre de procédures administratives dérivées de législations ou réglementations horizontales ou sectorielles. Les plafonds de participation au capital social sont contrôlés lors de la délivrance de licences ou permis de travail par les autorités administratives compétentes. D’une façon générale, ces restrictions à l'investissement étranger sont maintenues dans les secteurs de la pêche, de l'énergie, des télécommunications[2], de la finance et des services de transport, et la participation étrangère dans les projets de partenariat public-privé est limitée à un plafond de 25% du capital social.

 Généralités

  • Les entreprises étrangères dont les activités sont majoritairement basées en Malaisie qui souhaitent être cotées à la Bourse malaisienne doivent destiner au moins 12,5% du capital (élargi, émis et libéré) faisant l'objet de l'offre initiale à des investisseurs bumiputera au moment de leur cotation. 
  • S’agissant des entreprises publiques privatisées, le programme de privatisation prévoit que les Bumiputera doivent posséder au moins 30% du capital d'une entité privatisée. La participation étrangère est limitée à 25% du capital total, mais elle peut être autorisée jusqu'à 49% au cas par cas. 
  • L'achat, par des ressortissants étrangers, d'une propriété évaluée à 20 millions de ringgit ou plus à des membres de la communauté bumiputera ou à des organismes publics doit être approuvé par l'Unité de la planification économique (Economic Planning Unit).

Production industrielle

A l’exception des entreprises de moins de 75 salariés ou pour un investissement inférieur à 2,5 millions de ringgits, les investissements industriels doivent être autorisés par le Ministère du commerce international et de l’industrie (MITI). Il est recommandé d’établir une filiale. Une participation étrangère de 100% est possible pour les nouveaux investissements, ainsi que les investissements de diversification ou de développement des producteurs déjà autorisés.

Services

Le secteur des services a été pour parte libéralisé en 2009 et 2012 et le contrôle de 100% du capital est autorisé dans plusieurs domaines : architecture, audit, comptabilité, divertissement, éducation, informatique, professions juridiques, professions médicales, santé, services sociaux, services aux professionnels, services de télécommunications, sports, tourisme, transport. Des autorisations restent requises pour toutes les activités dans les secteurs suivants : télécommunications (70% de participation étrangère maximale pour les services de réseaux), les services pour le gaz et le pétrole (49%), et l’assurance (70%). S’il n'y a plus de restrictions à la participation étrangère sur le marché des capitaux, un plafond de 70% s’applique pour les banques d'investissement.

Il est également possible d’établir une filiale conforme à la réglementation « bumiputera » dans le cadre d’une autorisation particulière mais cela implique des obligations fortes notamment sur l’origine des administrateurs (majorité bumiputera), les cadres dirigeants (DAF bumiputera) et les employés (majorité bumiputra). En outre, l’autorité en charge d’octroyer les licences et de les contrôler peut varier dans le temps (association publique en charge du secteur de la construction, ministère des travaux publics, ministère des finances…).

Négoce et distribution

  • Une autorisation est nécessaire pour toutes les activités de négoce et de distribution, sous l’autorité du Ministry of Domestic Trade, Co-operatives and Consumerism (MDTCC). 
  • Les hypermarchés étrangers doivent réserver au moins 30% du capital à des intérêts bumiputera ainsi qu’assurer au moins 30% de leur approvisionnement auprès de fournisseurs locaux.

Secteur pétrolier (exploration-production)

Petronas, la compagnie pétrolière nationale détenue à 100% par l’Etat, est en charge de la délivrance et du contrôle des autorisations d’exploitation et de production de pétrole et gaz en Malaisie. Les licences incluent plusieurs obligations de contenu local au bénéfice des intérêts bumiputera.

      2. Les marchés publics

Traditionnellement, les marchés publics sont utilisés pour soutenir les objectifs socioéconomiques et les objectifs de développement de la Malaisie, y compris pour: favoriser et soutenir une plus grande participation des Bumiputera dans l'économie nationale.

Dans le cas des appels d'offres nationaux, la préférence est donnée aux fournisseurs bumiputera. La marge de préférence accordée aux fournisseurs bumiputera reste inchangée depuis 2014. Pour les marchés de biens et de services d'une valeur comprise entre 100 000 ringgit et 15 millions de ringgit, les fournisseurs bumiputera bénéficient d'une marge de préférence comprise entre 2,5% et 10% qui est inversement proportionnelle à la valeur du marché. Aucune préférence de prix n'est accordée pour les marchés dépassant 15 millions de ringgit.

En outre, les fabricants bumiputera bénéficient d'un traitement préférentiel pour les produits fabriqués dans le pays; cette marge va jusqu'à 10% pour les marchés de moins de 10 millions de ringgit, jusqu'à 5% pour les marchés d'une valeur comprise entre 10 et 100 millions de ringgit, et jusqu'à 3% pour les marchés d'une valeur supérieure à 100 millions de ringgit.


[1]  Littéralement « fils du sol », catégorie définie par la Constitution (Art.153) qui inclut les groupes suivants : Malais et populations indigènes des Etats du Sabah et du Sarawak (île de Bornéo). Se prononce phonétiquement « boumi-pou-trâ ».

[2]  En général, un titulaire de licence de fournisseur d'installations de réseaux ou de fournisseur de services de réseau est autorisé à détenir jusqu'à 49% en capitaux étrangers, une part de 30% au moins devant appartenir à des bumiputera. Toutefois, ces restrictions ne s'appliquent pas si le titulaire de la licence est une société cotée en bourse, mais elles s'appliquent si le titulaire de la licence est une société à responsabilité limitée (Sendirian Berhad) détenue par une société anonyme (Berhad).