Tirée essentiellement par les recettes des exportations de produits hydrocarbures (environ 90% des recettes budgétaires annuelles), l’économie du Koweït reste absolument dépendante de ce secteur stratégique dont les coûts d’exploitation (8,5USD/b) et le prix d’équilibre budgétaire (71USD le baril de pétrole) demeurent parmi les plus faibles de la région.

1/ Le Koweït se présente comme le 9ème producteur mondial en 2016 avec de solides réserves pétrolières.

Avec 3,4 % de la production mondiale en 2016, le Koweït est le 9ème producteur mondial avec 3,15 mb/j en 2016 et le 4ème producteur de l’OPEP derrière l’Arabie saoudite (2ème rang mondial derrière les Etats-Unis, avec 13,4 % de la production mondiale), l’Iran (5%), l’Irak (4,8%) et les Emirats arabes unis avec 4,4%. Doté de réserves pétrolières considérables (101,5 milliards de barils en 2016 selon l’OPEP, soit 6,8% du total mondial, 7ème rang mondial), le Koweït paraît assuré d’une rente pérenne et d’une place de poids au sein de l’OPEP où il défend des positions modérées.

Le 30 novembre 2016, pour la première fois depuis 2008, l’OPEP a décidé de réduire sa production globale de pétrole, avec effet au 1er janvier 2017, initialement pour une durée de six mois. Le cartel s’est entendu sur une réduction mensuelle de 1,2 mb/j, ce qui représente une baisse de 4,5 % pour chaque pays membre (sauf la Libye, le Nigéria et l’Iran) par rapport à son niveau de production d’octobre 2016. Ainsi pour le Koweït, la production pétrolière mensuelle est passée de 2,9 mb/j en octobre à 2,77 mb/j, soit une baisse de 131 000 b/j par mois. Un comité chargé de contrôler le respect des quotas de chaque pays membre a été établi dans l’Emirat qui a jusqu’ici parfaitement honoré ses engagements. Le 25 mai 2017, les pays membres de l’OPEP et 10 pays producteurs non membres du cartel, comme la Russie, ont décidé de prolonger l’accord de réduction (respecté à hauteur de 118% en septembre 2017) de la production de pétrole de neuf mois jusqu’au 1er avril 2018. Le 30 novembre 2017, les pays ont prolongé cet accord de réduction de la production de neuf mois supplémentaires, jusqu’à la fin 2018.

Tout en respectant l’accord OPEP en cours, le Koweït maintiendrait son objectif à long terme de produire 4 mb/j à l’horizon 2030, en préparant l’accueil de sociétés privées dans des projets de récupération de dioxyde de carbone, d’extraction pétrolière et de construction de sites de production. Pour augmenter sensiblement sa production, le pays devrait relever certains défis majeurs dont les gouvernements successifs avaient tardé à prendre la mesure : vieillissement des infrastructures, main d’œuvre locale peu compétente, nécessité de diversification.

 

Quotas de réduction par pays

Au Koweït, le temps du « pétrole bon marché» touche cependant à sa fin, soutenu par le champ du « Grand Burgan » (1,7 mb/j, 2ème plus grand champ pétrolier du monde après celui de Ghawar en Arabie Saoudite), exploité depuis 1938 avec des coûts de production très bas (environ 2 USD/b). Ce champ géant est situé au sud-est du pays et comprend les champs de Burgan, de Magwa et d’Ahmadi, qui fournissent du pétrole léger et moyen, requérant peu de raffinage. Le pays doit désormais utiliser des techniques de récupération assistée sur ces champs matures (le pic de production ayant été atteint en 2005) et trouver de nouvelles capacités, en exploitant des réservoirs profonds de structure géologique complexe, en valorisant des huiles très lourdes ou en visant les ressources sous-marines.

Alors que la constitution koweïtienne interdit la concession des ressources minérales nationales aux compagnies étrangères, celles-ci sont limitées à un rôle de consultant via des contrats de service d’assistance technique (TSA) et des contrats de rachats incitatifs. Les grandes lignes de cette politique sont définies dans les cercles proches de l’Emir et dans le Supreme Petroleum Council qui réunit, sous la présidence du Premier ministre, six représentants ministériels (Affaires étrangères, Pétrole, Finances, Commerce, Travaux Publics, affaires du Cabinet). Pour l’heure, aucune modification de la Constitution nationale n’est évoquée.

 

Champs pétroliers et gaziers du Koweït

2/ La coopération avec l’Arabie saoudite dans la « zone neutre partagée » reste lettre morte en raison de contentieux irrésolus mais elle pourrait reprendre à moyen terme.

La gestion du champ pétrolier offshore Al Khafji et du champ on-shore Wafra pose problème. Ces champs sont exploités conjointement depuis 1960 par le Koweït et l’Arabie saoudite qui se partagent la production à part égale. Les deux pays doivent coopérer techniquement pour extraire, raffiner et commercialiser le pétrole de ces deux champs.

Depuis octobre 2014, la production est suspendue sur le site d’Al Khafji à la demande de la partie saoudienne, alors qu’elle atteignait 300 000 b/j. Le Koweït a indiqué que l'Arabie saoudite avait interrompu unilatéralement l'exploitation du site, alors qu’un préavis de cinq ans était imposé, selon l’accord bilatéral. Les Saoudiens ont prétendu avoir cédé à la pression koweïtienne et aux tracasseries administratives pour cesser leurs activités.

La production irait en augmentant progressivement à mesure que les questions relatives à la protection de l’environnement, qui ont justifié l’arrêt de la production du côté saoudien, seraient réglées. Un certain nombre de contrats de maintenance auraient été conclus dans la perspective de la reprise de la production, selon les medias locaux. Au total, ce serait 700 000 barils que les deux pays se partageraient. Al Khafji est le champ le plus important de la zone neutre avec 300 000 b/j, devant celui de Wafra (on-shore) dont la production (220 000 b/j via Chevron USA) a été suspendue en mai 2015. En off-shore, les champs pétroliers de Lulu et Hout restent à développer.

3/ Affichant de fortes ambitions nationales, le pays poursuit le développement de l’amont du secteur des hydrocarbures à horizon 2030 malgré les récents accords de réduction de l’OPEP.

Soucieux de maintenir ses parts de marché à l’international, le Koweït souhaite porter, d’ici 2030, sa capacité de production à 4 mb/j. Les autorités ont annoncé un vaste plan d’investissement de 100 MdUSD d’ici 2020-2022 et la Kuwait Oil Company prévoit d’augmenter le nombre d’appareils de forage de 130, actuellement, à 180 d’ici 2019/2020. Ces objectifs apparaissent toutefois difficiles à atteindre car les compagnies pétrolières internationales ne peuvent pas assumer de responsabilités étendues dans l’amont du secteur. Par ailleurs, ces objectifs s’opposent désormais aux accords de réduction conclus au sein de l’OPEP.

4/ Doté de modestes réserves de gaz, le Koweït cherche à accroître ses capacités de production pour faire face à sa consommation interne.

Les besoins domestiques (génération d’électricité, pétrochimie) croissent rapidement ; les ressources existent mais la production reste très inférieure aux prévisions. Depuis 2009, le Koweït consomme plus de gaz naturel qu’il n’en produit. Ainsi, en 2016, le pays a consommé 21,9 milliards de mètres cubes de gaz naturel et produit 17,1 Md de m3, soit 0,5 % seulement de la production mondiale[1]. Le pays poursuit donc l’importation de gaz naturel pour combler ce manque. Les cargaisons de GNL arrivent au Koweït via GasPort, une installation flottante située au port d’Ahmadi.

Au total, le pays dispose de réserves relativement modestes : 1 800 milliards de m3 de réserves de gaz prouvées, soit 0,9 % des réserves mondiales. Les espoirs en gaz naturel portent désormais sur le champ offshore de Dorra (également nommé Arash côté iranien). Ce champ offshore qui se situe à cheval sur les frontières maritimes du Koweït, de l’Arabie saoudite et de l’Iran contient des réserves estimées à 5,6 trillions de pieds cubes. Son exploitation ne pourrait débuter qu’après délimitation territoriale et accord de partage avec l’Iran et l’Arabie saoudite. Depuis quasiment quinze ans, aucun accord n’a été conclu entre les parties qui annoncent pourtant régulièrement leur souhait de renouer le dialogue pour finaliser l’accord tripartite nécessaire à l’exploitation des ressources sous-marines prometteuses de Dorra.

L’effort déployé par les autorités koweïtiennes pour valoriser leurs réserves de gaz naturel est perceptible. Ainsi, en octobre 2017, la KPC souhaitait augmenter sa production de gaz naturel à 1 milliard de pieds cubes par jour en 2023. Pour ce faire, la holding devrait lancer trois projets majeurs en début 2018 qui permettront à eux seuls de produire 500 millions de pieds cubes par jour (Mpc/j). Certains champs dits « jurassiques », situés dans le nord du pays, ont fait l’objet d’un appel d’offres international dans le cadre du projet Jurassic Non-Associated Gas Reserves.



[1] BP Statistical Review of World Energy June 2017