Le Koweït a dévoilé, le 30 janvier 2017, sa stratégie de long terme « Vision du Koweït en 2035 », destinée à planifier son développement socio-économique et à diversifier ses secteurs d’activité pour transformer le pays en un centre économique et financier régional. 100 MdUSD devraient être alloués à ce plan jusqu’en 2021 dont 15 MdUSD pour l’année fiscale 2017/2018.

1/ Dans la « Vision du Koweït en 2035 », le secteur privé serait le principal moteur de l’économie.

Cet objectif constitue un défi majeur dans un Etat où le secteur des hydrocarbures, entièrement nationalisé, représente environ 88 % des recettes budgétaires et où près de 90 % de la population autochtone travaillent dans la fonction publique. Selon le ministre koweïtien des Finances, 100 MdUSD devraient être alloués à ce plan jusqu’en 2021, dont 15 MdUSD pour l’année fiscale 2017/2018.

Cette stratégie repose sur 164 programmes de développement et sur sept piliers : la bonne gouvernance, la diversification des sources de recettes budgétaires, la formation du capital humain, l’amélioration du système de santé, la réalisation d’infrastructures solides et efficaces, la protection d’un environnement durable et l’accès à un positionnement international intéressant. A court/moyen terme, le Koweït souhaite augmenter de 300 % les investissements directs étrangers et attirer plus de 1,2 MdEUR d’investissements dans le secteur des technologies de l’information et des énergies renouvelables ; 20 indicateurs de performance seront mis en place pour mesurer l’état d’avancement des projets.

2/ Le plan stratégique porte l’effort sur les grands travaux d’infrastructures.

L’un des objectifs majeurs vise à transformer cinq îles (Boubiyan, Faïlaka, Warbah, Miskan, Awhah) en zones franches et en destinations touristiques attractives avec de nouveaux musées, des centres culturels et sportifs. Les normes appliquées par Singapour, Luxembourg et Venise serviraient de guide. Les études de faisabilité pour ce projet de 120 MdEUR devraient s’achever en 2017 car la transformation de ces cinq îles devrait être terminée en 2030. La Kuwait Authority for Partnership Projects (autorité en charge des partenariats publics-privés) a ainsi annoncé début mars le lancement à venir de la transformation de l’île de Faïlaka (située à 20 km au nord-est de Koweït City) dans le cadre du projet « Faïlaka Island Development ». Ce projet d’environ 3 MdEUR sera piloté par plusieurs institutions publiques qui joueront sur leur complémentarité.

« Koweït 2035 » a également pour ambition de créer la ville nouvelle de « Silk City » dont le plan directeur final a été approuvé en juin 2014, pour un coût estimé à au moins 80 MdEUR. Une entité ad hoc devrait voir le jour afin d’accélérer la mise en place du projet qui, pour l’instant, n’en est qu’au stade des études préliminaires. D’une superficie de 250 km², la ville doit devenir à terme le deuxième centre urbain du pays, accueillant 700 000 habitants (450 000 emplois à créer).

En outre, la construction de deux nouveaux terminaux d’aéroport et du pont autoroutier Cheikh Jaber Al Ahmad, pour relier Koweït City (Shuwaikh) à Subiya « Silk City » en novembre 2018, doivent permettre d’améliorer les liaisons nationales et internationales. La création d’une zone franche, de nombreux hôtels, de centres de conférences, de complexes touristiques et médicaux ainsi qu’une tour de 1 km de haut sont prévus. Enfin, en 2035, la composition de la population devrait être restructurée, avec 40 % de Koweïtiens contre 32 % actuellement. Cette variation (réduction planifiée des quotas d’expatriés) peut sembler paradoxale car l’exécution des projets nécessitera encore davantage de main d’œuvre expatriée qu’actuellement.

3/ La mise en œuvre concrète de « Koweït 2035 » reste à démontrer.

Une stratégie similaire avait été initiée en 2010, avec peu de résultats tangibles et plusieurs experts koweïtiens et européens ont critiqué la définition trop généraliste de cette stratégie, l’absence d’une feuille de route claire et d’une structure de pilotage ad hoc. Ils redoutent que le Koweït ne se serve de ce plan comme effet d’annonce en suivant la « vision de l’Arabie Saoudite en 2030 » qui semble à un stade de développement plus avancé. Selon ces experts, le gouvernement devrait, en priorité, lancer la diversification de l’économie nationale, trouver des sources de recettes budgétaires alternatives aux hydrocarbures (objectif de 150 MdEUR de recettes en 2035 contre 40 MdEUR actuellement) et faire en sorte que chaque citoyen koweïtien s’approprie et partage cette vision de long terme.