Le secteur agricole de la plus grande économique d’Afrique est sinistré depuis le boom pétrolier des années 1970, ce qui réduit le pays à une dépendance croissante vis-à-vis des denrées alimentaires importées. Malgré les assurances répétées des gouvernements successifs, le pays a constamment sous-financé son secteur agricole, entrainant pauvreté, insuffisance alimentaire et ralentissement de la croissance économique. Le manque d'infrastructure, l'insécurité, ainsi que les impacts négatifs du changement climatique entravent la croissance du secteur, tout en offrant d’innombrables opportunités pour la France dans un domaine qui reste une priorité du Gouvernement Fédéral.

Contribution essentielle à l’économie, l’agriculture est au cœur de multiples cadres stratégiques, mais l’aval des chaines de valeurs est négligé.

En 1960, les exportations alimentaires contribuaient à plus de 70% du PIB et le Nigeria était premier producteur mondial de caoutchouc, d’arachide et d’huile de palme, ainsi que second pour le cacao. En 2020, le secteur agricole contribue à 22% du PIB alors que secteur emploie de manière formelle ou informelle plus de 70% de la population.

Le gouvernement fédéral appuyé par la Banque Centrale accorde une place ambitieuse au secteur agricole dans ses cadres d’orientations stratégiques successifs qui cependant sont tous consacrés au soutien à l’amont des chaines de valeur et souffrent d’un manque de continuité et de coordination avec les autres secteurs (infrastructures, énergie, appui aux petites et moyennes entreprises), ainsi que d’une absence de retour sur les acquis, succès et échecs. Les secteurs de la transformation, de la conservation, de l’emballage et du transport des marchandises peinent à se moderniser.

Une politique protectionniste qui entraine une hausse du prix des denrées alimentaires.

Dès son premier mandat en 2015, le président Buhari s’est engagé à promouvoir l’agriculture et l’autosuffisance alimentaire. En août 2019, il décrète la fermeture des frontières terrestres du pays pour encourager la production locale. En conséquence, le prix des denrées alimentaires de base (riz, viande, poisson), y compris de ceux produits localement, ne cesse d’augmenter. L’indice de prix des denrées alimentaires atteint 18,3 % en novembre 2020, soit le taux le plus élevé depuis janvier 2018, malgré la réouverture des postes-frontières avec le Bénin, le Niger et le Cameroun en décembre 2020.

Le Gouvernement Fédéral interdit à la Banque Centrale de fournir des devises pour les importations de denrées alimentaires de base (riz, volaille surgelée, huiles végétales raffinées, sucre de canne), ce qui oblige la plupart des importateurs à se fournir sur le marché parallèle, beaucoup plus cher.

Les investissements privés dynamisent le secteur de l’agribusiness

Face au sous-financement gouvernemental du secteur agroalimentaire, le secteur privé s’organise et investit de manière dynamique l’ensemble de la chaîne de valeur, y compris la transformation, la mécanisation et la logistique, négligées par les politiques publiques. Les groupes Dangote et BUA sont très actifs dans les filières riz, sucre, huiles, fertilisants. Les banques (Access Bank, First Bank of Nigeria) privilégient l’économie verte et le soutient aux coopératives et PME. Des groupes régionaux comme SAHEL ou internationaux comme OLAM investissent dans le développement à la fois technique et financier des filières en amont (produits laitiers, manioc, riz, beures végétaux, huiles végétales, élevage) et en aval (transformation, emballage, logistique, marketing).

L’expertise française est présente sur le secteur des marchés agroalimentaires dans le cadre d’un partenariat entre le Ministère Fédéral de l’Agriculture et du Développement Rural, l’AFD et la SEMMARIS. D’autres domaines transversaux sont en cours d’exploration à la demande des gouvernements des Etats fédérés, tels que l’irrigation ou la chaine du froid.

Difficiles réformes agricoles alors que le déficit commercial agricole se creuse

Les politiques agricoles successives peinent à fournir les denrées de base à la population (200 millions d’habitants en 2020, 400 millions en 2050) et à proposer à la classe moyenne urbaine, en pleine croissance, des denrées transformées de qualité.

La part de l’agriculture dans les recettes d’exportation du Nigéria reste marginale (577 MEUR), tandis que le déficit commercial agricole augmente. En 2019, les importations agricoles atteignent plus de 2 Mds EUR, la valeur la plus élevée jamais enregistrée dans le pays.

Le commerce bilatéral avec la France est encore trop faible, à l’exception notable des vins et spiritueux qui représentent 15% en valeur de nos exportations vers le Nigéria.