Financement des entreprises, crise et productivité - séminaire Fourgeaud du 11 octobre 2017

Les intervenants au séminaire du 11 octobre 2017

Sur la photo : Romain Duval, Anne Duquerroy et Guy Lalanne. 

Le séminaire Fourgeaud du 11 octobre 2017, septième séminaire de l’année 2017, a porté sur le thème "Financement des entreprises, crise et productivité". Tout d’abord, Anne Duquerroy (Banque de France) a exposé les principaux résultats d’un article co-écrit Christophe Cahn (Banque de France) et William Mullins (Université du Maryland) intitulé "Politique monétaire non conventionnelle et financement relationnel bancaire". Ensuite, Romain Duval (Fonds Monétaire International - FMI) a présenté une étude réalisée avec Gee Hee Hong (FMI) et Yannick Timmer (Trinity Collège de Dublin) intitulée "Frictions financières et ralentissement de la productivité". La discussion a été introduite par Guy Lalanne (direction générale du Trésor) 

Voici un bref résumé des études présentées :


« Politique monétaire non conventionnelle et financement relationnel bancaire », par Christophe Cahn, Anne Duquerroy et William Mullins


Soutenir l’octroi de crédit aux entreprises en période de récession constitue un enjeu politique majeur. Ce papier examine la dynamique d’ajustement des portefeuilles de prêts bancaires octroyés aux Petites et Moyennes Entreprises, en France, en période de crise. Il exploite pour cela un choc, non anticipé, ayant conduit à une diminution du coût de refinancement bancaire d’une catégorie spécifique de prêts aux entreprises. Cette baisse des coûts de refinancement, induite par une mesure de politique monétaire non-conventionnelle introduite fin 2011, a conduit à une augmentation relative de l’octroi de crédit aux entreprises ciblées par la politique de 9% sur un an, par rapport aux entreprises non éligibles. La mesure a également contribué à une diminution significative des incidents de paiement envers les fournisseurs et à une réduction de la probabilité de dégradation de la notation de crédit. Ces résultats montrent, de manière causale, que des mesures de politique monétaire non conventionnelles, ciblant une classe d’actif en particulier, peuvent être un levier efficace pour accroître l’offre de financement privé et réduire les effets de contagion.

L’effet du choc d’offre positif que nous étudions est entièrement tiré par les entreprises monobancaires, un groupe nombreux et sous-étudié, et sa transmission varie en fonction de la qualité de la relation bancaire. Nous trouvons que, pour les emprunteurs les moins risqués, le financement dit relationnel permet de maintenir un accès au crédit en période de crise. Nos résultats suggèrent également que les entreprises monobancaires étaient plus contraintes financièrement que les entreprises multibancaires.


« Frictions financières et ralentissement de la productivité », par Romain Duval, Gee Hee Hong, et Yannick Timmer

Exploitant la variation quasi expérimentale de l'exposition des firmes à l'effondrement de Lehman Brothers, cet article met en évidence un impact majeur du resserrement des conditions de crédit et des vulnérabilités financières des firmes au ralentissement de la productivité dans les pays avancés depuis la crise financière de 2008-2009.  Plus précisément : (i) les entreprises ayant abordé la crise avec des bilans plus fragiles ont connu une baisse de croissance de la productivité totale des facteurs plus marquée que celle des autres firmes après la crise ; (ii) cette baisse a été plus large pour les firmes confrontées à un resserrement plus sévère des conditions de crédit — telles celles dont les principales banques créancières ont été les plus touchées par le choc Lehman ; (iii) les entreprises aux bilans les plus fragiles ont réduit leurs investissements en actifs intangibles, ce qui est l’une des raisons pour lesquelles les frictions financières ont affaibli la productivité. Ces différents effets sont très persistants et quantitativement importants ; les frictions financières ont pu contribuer pour environ un tiers au ralentissement de productivité au sein des firmes au cours de la période après-crise.  Nos résultats ont des implications significatives pour la conduite des politiques monétaires et macro-prudentielles.

Ce séminaire généraliste de la direction générale du Trésor est un lieu d'échanges de tous ceux qui participent au progrès de l'économie quantitative : membres de l'administration économique, universitaires, économistes de banques ou d'entreprises, représentants d’institutions économiques et financières internationales, etc. À tonalité scientifique, ce séminaire cherche à favoriser la réflexion sur les grandes questions économiques, notamment de politique économique, ainsi qu'à faire progresser les méthodes permettant d’analyser ces questions. Les thèmes abordés couvrent l'ensemble des domaines d'intervention de la direction générale du Trésor et font l'objet d'exposés présentés tant par ses membres que par des spécialistes extérieurs.

 

Crédit photo : © Patrick Bagein, Secrétariat général des ministères économiques et financiers, droits réservés.